Je ne sais pas ; c’est vous qui le dites.
Je crois pouvoir dire, en tout cas, que nous avons toujours cherché non pas nécessairement un consensus – nous ne serions pas là pour débattre et, in fine, pour procéder à des votes s’il fallait chercher chaque fois le consensus –, mais, à tout le moins, à éclairer l’ensemble de nos collègues présents dans cet hémicycle. Vous avez profondément raison : les textes ultramarins doivent nous concerner collectivement. Il est important que, le moment venu, l’ensemble de la représentation nationale, Sénat et Assemblée nationale, puisse se prononcer de façon éclairée.
Les travaux que nous avons menés, selon une orientation qui a été rappelée lors de la discussion générale, nous ont conduits à présenter cette disposition visant à « rapprocher » – j’entends le reproche d’imperfection dans la bouche de notre collègue Patient – les articles 73 et 74. Et si, alors même que je suis coauteur du texte – j’en ai parlé avec Philippe Bas –, je suis prêt à supprimer cet article, c’est justement en vertu du raisonnement suivant : puisque nous travaillons sur un texte constitutionnel, invitons donc pleinement les territoires ultramarins dans ce débat, tout en essayant d’éclairer la représentation nationale et, en l’espèce, le Sénat, qui représente les territoires.
Je le dis avec un peu de gravité et de solennité : dès lors que vous nous avez indiqué, lors de la réunion de commission, alors qu’il s’agissait de l’une des dispositions importantes de ce texte, qu’elle n’était pas aboutie, qu’elle était imparfaitement rédigée, nous nous sommes promis d’être vraiment à l’écoute. Comme l’a rappelé notre collègue Micheline Jacques, voici ce que nous nous sommes dit : peut-être vaut-il mieux présenter, à défaut d’un texte totalement consensuel, un texte, du moins, justement expertisé. Or, vu les conditions de ce début de session, une telle expertise n’a pu décemment être menée, le texte ayant été déposé préalablement à la remise du rapport d’information de notre ancien collègue Michel Magras, dont je veux souligner le sérieux des propositions. J’ai eu l’occasion de beaucoup travailler aux côtés de Michel Magras ; j’ai toujours tenu à souligner l’excellence du travail qu’il a conduit en tant que président de la délégation sénatoriale aux outre-mer.
L’idée, donc, était de proposer la suppression de cette disposition tout en prenant un engagement : qu’elle fasse l’objet d’une expertise globale. Cela ne signifie évidemment pas – j’ai entendu cette petite musique – renvoyer son examen sine die. Personne ici ne peut dire que nous n’avons pas le souci permanent de faire en sorte que les évolutions souhaitées, unanimement ou pas, d’ailleurs, par nos collègues ultramarins, soient entendues et traitées avec justesse ; je pense par exemple – il vient d’en être question – à la façon dont nous avons travaillé sur la modification du statut de la Polynésie française.
Pour en venir au présent amendement, et pour dire les choses très clairement, nous n’avons même pas eu l’occasion d’évoquer ces dispositions de l’article 6, encore moins de les expertiser, en commission des lois, alors même que, au-delà de la dénomination, sur laquelle chacun peut avoir un avis, la modification visée apporte des éléments essentiels, notamment pour donner des compétences en matière pénale aux pays d’outre-mer, parmi bien d’autres évolutions qui, selon nous, peuvent être parfaitement fondées, mais qui nécessitent que nous puissions vraiment en débattre.
En proposant le retrait de cette disposition que nous avions initialement souhaité inclure dans le texte, qui est issue de travaux importants, l’engagement que nous avons pris était de créer le groupe de travail dont j’ai parlé, dans la perspective du dépôt prochain d’une autre proposition de loi constitutionnelle.
Notre collègue Guy Benarroche l’a dit : en définitive, les 50 propositions ne se retrouvent pas toutes dans ce texte ; c’est donc bien qu’il y aura lieu, à l’avenir, de discuter plus avant. Mme la ministre pourra peut-être nous éclairer : le Gouvernement, j’imagine, n’a pas totalement enterré l’idée d’une réforme constitutionnelle, qui emporte avec elle beaucoup d’autres décisions. En l’espèce, si j’ai bien compris, la finalité de nos travaux ne doit pas être de présenter un amendement d’appel ou simplement de « cranter » quoi que ce soit ; l’idée est bien d’avancer sur un sujet constitutionnel.
Et puisque Montesquieu s’est invité aujourd’hui tout au long de nos débats, lui qui disait qu’il ne fallait toucher à la Constitution que d’une main tremblante, je vous invite à suivre son conseil – c’est en toute sincérité que je le dis. Le corapporteur qui est devant vous n’a jamais failli lorsqu’il a fallu témoigner de l’ardente volonté de servir tous nos territoires, et particulièrement ceux que vous représentez, mes chers collègues d’outre-mer. Je souhaite simplement faire œuvre utile et contribuer à la fois à faire converger les avis et à formuler une disposition plus expertisée…