Intervention de Annick Jacquemet

Réunion du 21 octobre 2020 à 15h00
Déshérence des contrats de retraite supplémentaire — Adoption d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Photo de Annick JacquemetAnnick Jacquemet :

Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, le texte que nous examinons aujourd’hui porte sur la lutte contre la déshérence des contrats de retraite supplémentaire. En préambule, je tiens à saluer la qualité du travail effectué par notre collègue rapporteur Catherine Procaccia.

Les auteurs de cette proposition de loi constatent que certains épargnants sont insuffisamment informés sur l’épargne qu’ils ont constituée ou que les entreprises dans lesquelles ils ont travaillé ont constituée pour eux sans toujours les en aviser. Ainsi, un nombre important d’assurés ont délaissé leurs capitaux, qui figurent donc en déshérence au bilan des compagnies d’assurances.

Alors que la loi Eckert de 2014 visait à résorber les comptes bancaires inactifs et les contrats d’assurance-vie en déshérence, les contrats de retraite supplémentaire, dont l’échéance n’est pas déterminée à l’avance, se trouvaient hors de son champ. En dépit d’importantes avancées permises par la loi Pacte, qui étend ces dispositions aux contrats sans terme, et par la loi Sapin II, visant à renforcer l’information des salariés sur les contrats de retraite supplémentaire, le phénomène de la déshérence persiste.

Ces nouvelles dispositions sont insuffisantes aux yeux de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution. Dans son dernier rapport, elle démontre que, à la fin de 2016, « les contrats de retraite supplémentaire à adhésion obligatoire ou facultative non liquidés passé l’âge de 62 ans représentent environ 10, 6 milliards d’euros […] et s’élèvent encore à 1, 8 milliard d’euros pour les assurés âgés de plus de 70 ans ».

Comme la Cour des comptes, qui a proposé différentes pistes de travail, le Comité consultatif du secteur financier s’est saisi de la question et a rendu un rapport en janvier dernier. L’objet du présent texte était de traduire ses recommandations afin d’apporter une solution à un double problème : l’incapacité des épargnants à faire valoir leurs droits et l’immobilisation des fonds en déshérence, d’autant plus regrettable dans le contexte de crise économique que nous connaissons.

À cet égard, la finalité du texte doit être avant tout de rationaliser les dispositions visant à lutter contre le phénomène de déshérence des produits d’épargne retraite. En effet, l’essentiel du dispositif repose sur la création d’une nouvelle fonctionnalité renforçant l’information de l’assuré : ce dernier pourra désormais consulter un nouveau relevé de situation récapitulant ses droits constitués au titre des contrats de retraite supplémentaire sur le service en ligne géré et financé par le groupement d’intérêt public Union Retraite.

Il nous semble que ce dispositif répondra aux attentes des gestionnaires qu’aux recommandations de l’ACPR et de la Cour des comptes. Cependant, la formulation retenue à l’Assemblée nationale nécessitant d’être nuancée, la commission y a apporté les rectifications nécessaires. En effet, il ne s’agit pas tant de consacrer un droit nouveau à l’information que de tenter de renforcer l’accès à l’information pour les épargnants.

Sur l’ensemble des points du texte, la commission des affaires sociales a apporté plusieurs correctifs bienvenus. Elle proposera d’ajuster encore le dispositif concernant la transmission au groupement par les gestionnaires de données financières sur les contrats de retraite supplémentaire.

Toutefois, nous regrettons que ces dispositions ne concernent que le flux. On peut douter de l’efficacité du dispositif d’information pour un épargnant déjà à la retraite qui ignore l’existence d’un contrat d’assurance souscrit à son nom et n’en sera informé que s’il accède au service en ligne du GIP Union Retraite. Notre rapporteur partage d’ailleurs ce point de vue.

Dans la version du texte adoptée en première lecture à l’Assemblée nationale, un article 4 nouveau tendait à résoudre le problème du stock. Cependant, la rédaction proposée soulevant de réelles questions de conformité constitutionnelle, notre commission l’a supprimé. Dès lors, nous formulons le vœu qu’une solution à ce problème puisse être trouvée dans le cadre de la navette parlementaire, avec le soutien des services du Gouvernement.

Alors que l’on s’apprête à créer une cinquième branche de la sécurité sociale et à examiner un projet de loi sur le grand âge et l’autonomie, nous ne pouvons faire l’économie d’une réflexion sur les moyens de permettre à nos aînés ayant capitalisé pour leur retraite de percevoir le fruit de leur épargne. Celle-ci pourrait être mise à contribution pour améliorer la prise en charge de leur éventuelle dépendance.

Même si certaines données tendent à démontrer que les montants en déshérence par bénéficiaire sont relativement faibles, il n’en demeure pas moins que les intéressés doivent pouvoir être retrouvés. J’ajoute que ces près de 2 milliards d’euros seraient les bienvenus pour alimenter la relance de l’économie.

En conclusion, le groupe Union Centriste votera cette proposition de loi.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion