Séance en hémicycle du 21 octobre 2020 à 15h00

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

  • bénéficiaire
  • déshérence
  • d’épargne
  • professeur
  • retraité

Sommaire

La séance

Source

La séance est ouverte à quinze heures.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Mes chers collègues, afin de respecter les règles sanitaires, je vous rappelle que le port du masque est obligatoire dans notre hémicycle, y compris pour les orateurs, et qu’il vous est demandé de laisser un siège vide entre deux sièges occupés.

Les sorties de la salle des séances devront exclusivement s’effectuer par les portes situées au pourtour de l’hémicycle, à l’exception de celles des membres du Gouvernement, lesquels sortiront par le devant.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

L’ordre du jour appelle les réponses à des questions d’actualité au Gouvernement.

La séance est retransmise en direct sur Public Sénat et sur notre site internet.

Chacun observera le respect tant des uns et des autres que du temps de parole.

Un certain nombre de nos collègues sont présents dans les tribunes du public ; ils sont donc pleinement dans l’hémicycle pour ces questions d’actualité au Gouvernement.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à Mme Éliane Assassi, pour le groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

L’assassinat de Samuel Paty a sidéré la Nation tout entière.

Oui, en France, si souvent qualifiée de « pays des Lumières », un homme, un enseignant, a été tué sauvagement, parce qu’il transmettait le savoir et la réflexion, parce qu’il transmettait l’humanité pour que ses élèves deviennent demain des femmes et des hommes libres ! Cette humanité si profonde, qui est au cœur de la laïcité, c’est ce qu’a voulu tuer ce terroriste au nom d’un islam radical.

Oui, l’islam doit sortir de l’emprise intégriste encouragée par des pays qu’il faudra dénoncer ! Il faudra aussi permettre, comme ils le souhaitent, à l’immense majorité des musulmans de pratiquer leur religion dans la sérénité.

Ce combat devra rejeter les amalgames et les tentatives de récupération et de division qui se multiplient.

Samuel Paty est mort en héros. Il a porté au plus haut niveau les valeurs de la laïcité et de la liberté d’expression, jusqu’à en perdre la vie. Son petit garçon pourra être fier de la gloire de son père, en écho à ces hussards de la République, qui, au début du siècle dernier, ont diffusé par l’école publique, partout en France, la nécessité de l’émancipation humaine par le savoir et la culture.

Monsieur le Premier ministre, avec la Nation tout entière, nous devons nous lever pour saluer la mémoire de Samuel Paty et entourer ses proches de notre profonde affection, mais nous devons aussi nous lever pour donner enfin aux enseignants les moyens de leur action essentielle pour l’avenir de notre pays. Ces hussards de la République, qu’ils soient à l’école, à l’hôpital, dans les mairies ou les commissariats, sont trop souvent abandonnés. Ils crient ou taisent leur impuissance à remplir leur mission.

Il n’y aura pas de réponse à long terme au défi sanglant du terrorisme islamiste sans une véritable reconquête républicaine, qui pose la question clé d’un choix de société plaçant l’humain au cœur des décisions. C’est la voie pour préserver l’unité de la Nation.

Avec Gambetta, j’affirme : « Ce qui constitue la vraie démocratie, ce n’est pas de reconnaître des égaux, mais d’en faire. »

En ce jour de deuil national, nous nous inclinons devant la dépouille de Samuel Paty, mais nous portons l’espoir que sa mort remettra en mouvement la République laïque, démocratique et sociale, pour que liberté et progrès règnent sur notre territoire. C’est là notre devoir.

Applaudissements.

Debut de section - Permalien
Jean Castex

Madame la présidente Assassi, c’est en effet dans un moment extrêmement grave et solennel que je prends la parole cet après-midi devant la Haute Assemblée. M. le Président de la République présidera tout à l’heure une cérémonie d’hommage national à ce professeur lâchement assassiné dans des conditions particulièrement odieuses et inacceptables, de surcroît – vous l’avez rappelé, et ce point est très important – dans l’exercice de ses fonctions.

Ainsi que vous l’avez souligné, à travers lui, c’est bien la République qui est visée. Au cœur de la République et de ses valeurs figurent évidemment l’éducation nationale, la liberté d’enseigner, la liberté de penser, la liberté de s’exprimer. Telles sont bien, au-delà de la personne de Samuel Paty, les cibles de cet ennemi que nous connaissons et que nous devons nommer : l’islamisme politique, l’islamisme radical, qui est l’un des terreaux du terrorisme. Les combattants, nous les connaissons.

Debut de section - Permalien
Jean Castex

La première chose à faire est de rester unis dans de tels moments – toujours ! –, car leur objectif, n’en doutez pas, est aussi de nous diviser, de nous monter les uns contre les autres, d’affaiblir la République, de nous pousser à faire ou à dire des choses qui ramèneraient dans leurs filets encore davantage d’adversaires de la République.

Nous agissons de manière ferme et déterminée. Je pourrais évidemment détailler devant la Haute Assemblée les dispositions qui ont été prises pour donner toutes les suites à cet acte horrible, mais je souhaite surtout rappeler que le Gouvernement et l’administration de la République travaillent depuis plusieurs années, notamment depuis 2017, à la prévention de ce type d’actes ignobles. Les services ont été réorganisés. Les moyens ont été renforcés comme jamais, quand, jadis, les Renseignements généraux avaient été supprimés. Les lois ont été renforcées. De très nombreux attentats ont été déjoués grâce à ces dispositifs.

L’attentat contre Samuel Paty doit conduire, dans le cadre de l’unité et dans le respect de nos propres valeurs, à intensifier encore davantage, de façon résolue – n’en doutez pas, madame la présidente Assassi –, notre action.

Voyez comme va arriver à point nommé le projet de loi annoncé aux Mureaux voilà quelques jours par le Président de la République pour lutter contre toute forme de séparatisme !

Voyez combien, sous l’autorité du ministre de l’intérieur, nous allons dès à présent augmenter encore, non pas seulement dans les textes, mais dans les faits, les moyens pour lutter contre la haine sur internet !

Voyez que, dès aujourd’hui, un groupement de fait répandant la haine a été dissous par le conseil des ministres ! Sachez que d’autres suivront.

L’éducation nationale, la République et, finalement, la France ont été attaquées. Mais nous vaincrons. Nous vaincrons dans l’unité et dans la détermination, parce que ces valeurs de la République, nous les partageons. Nous agirons, nous continuerons à agir sans relâche pour que force reste à la loi républicaine.

Applaudissements sur les travées des groupes RDPI, INDEP et RDSE, ainsi que sur des travées des groupes SER, UC et Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

M. le président. La parole est à Mme Nadège Havet, pour le groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.

Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.

Debut de section - PermalienPhoto de Nadège Havet

Ma question s’adresse à M. le ministre de l’éducation nationale.

Toutes nos pensées vont à Samuel Paty, assassiné parce qu’il faisait son métier. Toutes nos pensées vont à sa famille, à ses élèves et à ses collègues, à tous les professeurs qui sont retournés dans leur classe pour accomplir la plus belle des missions qui soit : enseigner, transmettre. Nous le savons, ils y retournent choqués. Ils se sentent parfois trop seuls.

Cet attentat terroriste islamiste caractérisé fait suite à d’autres actes barbares animés par la même idéologie. Il y a eu près de 300 morts depuis 2011. Des enfants ont aussi perdu la vie. Face à ce constat tragique, il ne faut pas trembler ; il ne faut pas de compromission. C’est une chose de le dire, mais la question de l’accompagnement au quotidien se pose.

En ce moment même, des propagateurs de haine officient encore sur les réseaux.

En ce moment même, une lycéenne ne peut toujours pas retourner dans son lycée pour avoir critiqué une religion. C’est inimaginable et inacceptable !

Face à cela, le risque serait de s’autocensurer, de reculer collectivement. Nous parlons là de l’essentiel, des fondements mêmes de notre Nation : la liberté de conscience, le libre examen, la libre expression, l’esprit critique, l’égalité entre les femmes et les hommes. Nous parlons là de ce que nous sommes : une République laïque, une et indivisible.

Nous savons la détermination du Gouvernement et du Président de la République à terrasser cette idéologie mortifère. Le texte sur les séparatismes arrive bientôt au Parlement. Il fera partie de la réponse globale.

Monsieur le ministre, comment l’éducation nationale doit-elle accompagner les professeurs dans l’enseignement de la laïcité face à des contestations d’élèves ou de parents violentes jusqu’à l’extrême ? Comment mieux les protéger dans tous leurs enseignements ? Quid de leur formation et de leur encadrement ?

Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – M. Philippe Bas applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. le ministre de l’éducation nationale.

Debut de section - Permalien
Jean-Michel Blanquer

Madame la sénatrice, je souhaite d’abord vous saluer avec respect, puisque vous venez d’être élue au sein de la Haute Assemblée.

Je partage tout ce que vous avez dit. Dans la lignée de ce que M. le Premier ministre vient de rappeler, j’ajoute que nous nous rejoignons évidemment tous ici, je le crois, sur ce socle de la République. La liberté d’expression est un pilier fondamental pour notre République, pour notre démocratie et, plus généralement, pour la démocratie dans le monde. Je profite de l’occasion pour saluer l’immense élan international de solidarité à l’œuvre ; en ce qui me concerne, je le constate de la part des ministres de l’éducation du monde entier.

Avec M. le Premier ministre, nous avons reçu les organisations syndicales samedi dernier. J’ai ensuite reçu les organisations représentant les parents d’élèves. J’ai été très heureux de constater, même si je m’y attendais, que nous avions cette unité si indispensable et cette convergence de vues sur les valeurs de la République. Les organisations syndicales ont demandé que nous ayons des consignes claires, nettes, précises et fortes pour le 2 novembre, jour de la rentrée, et pour les jours suivants. C’est pourquoi j’ai demandé au Conseil des sages de la laïcité, que j’ai créé voilà trois ans précisément pour définir le système de référence dont nous avons besoin – il existe désormais –, de siéger en permanence, afin de recevoir l’ensemble des organisations et les élus, qui souhaitent être écoutés en ce moment, mais également de formuler des propositions, tant pour cette rentrée que pour la suite, y compris en matière de protection des professeurs.

Je donnerai donc ces consignes claires, nettes et précises sur le déroulé du 2 novembre. Je vous en livre d’ores et déjà une, qui vous concerne directement : je demande à tous les élus de la République, conseillers municipaux, maires et, bien entendu, vous-mêmes, membres du Parlement, d’être présents auprès des professeurs le jour de la rentrée. Cela me paraît très important.

D’autres mesures seront prises ; j’aurai peut-être l’occasion d’en reparler aujourd’hui.

Applaudissements sur les travées du groupe RDPI, ainsi que sur des travées du groupe UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

M. le président. La parole est à M. David Assouline, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Applaudissements sur les travées du groupe SER.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Monsieur le Premier ministre, au nom de mon groupe, je tiens à exprimer notre immense peine et notre solidarité à la famille et aux proches de Samuel Paty, odieusement assassiné par un terroriste islamiste.

Un professeur a été assassiné. Ce n’est pas par hasard. L’islamisme politique, cet extrémisme qui ne peut ni ne doit être confondu avec la religion musulmane, celle de bon nombre de nos concitoyens, doublement meurtris aujourd’hui, développe une offensive idéologique obscurantiste contre tout ce qu’incarne la République indivisible, sociale, démocratique et laïque. C’est sur la base de ce qu’il a semé dans les esprits par de multiples réseaux, bénéficiant de nombreuses complaisances ou aveuglements, qu’un terroriste s’est senti encore « autorisé » à tuer.

Un professeur a été assassiné. Il était de celles et de ceux qui, au quotidien, avaient pour mission de permettre à nos jeunes de devenir des citoyennes et des citoyens émancipés, capables d’exercer leur liberté individuelle de jugement et d’expression, c’est-à-dire de leur permettre d’échapper à des assignations à résidence communautaire, familiale, culturelle, religieuse, sociale ou territoriale.

Un professeur a été assassiné. Il était de celles et de ceux qui, dans des conditions souvent difficiles, à contre-courant des haines qui se déversent impunément, devaient expliquer que les femmes et les hommes sont égaux, que personne ne peut être discriminé en raison de son origine, de sa religion, de sa couleur de peau ou de son orientation sexuelle et qu’aucune loi religieuse ne peut s’imposer à la loi de la République.

Un professeur a été assassiné. Alors, je vous demande d’affirmer avec force que personne n’est supérieur au professeur de l’école de la République laïque pour la transmission de nos valeurs fondamentales ! Je vous demande aussi d’honorer les 900 000 enseignants, ces piliers de la République, en les protégeant mieux, en renforçant leurs moyens et en les valorisant aux yeux de toute la société ! Ce serait le meilleur hommage à M. le professeur Samuel Paty.

Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST, ainsi que sur des travées du groupe RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. le ministre de l’éducation nationale.

Debut de section - Permalien
Jean-Michel Blanquer

Monsieur le sénateur, je vous remercie de votre question. Nous sommes au cœur du sujet, qui repose sur le socle républicain. Nous en étions témoins vous et moi, puisque nous étions côte à côte place de la République dimanche dernier ; je veux vous saluer pour cela également.

Nous sommes effectivement confrontés à une problématique, certes, de protection – j’aurai l’occasion d’y revenir –, mais également de reconnaissance des professeurs par notre société. Cette question se pose avec acuité quelques jours à peine après cet assassinat, mais elle existait déjà auparavant. Nous devons y apporter une réponse. C’est pourquoi nous travaillons depuis plusieurs mois avec les organisations syndicales sur ce que nous appelons l’agenda social. Cela débouche aujourd’hui sur ce que j’avais annoncé : le Grenelle de l’éducation. Celui-ci commencera demain ; c’était le calendrier prévu, et nous ne le modifierons pas. Il repose sur des mots clés : « reconnaissance », notamment financière, mais aussi « coopération », avec le travail en équipe, « modernisation » et « protection ».

Nous devons développer un ensemble de mesures au cours des trois prochains mois. Elles feront l’objet d’une loi de programmation. Leur effet le plus visible sera l’augmentation de la rémunération des professeurs, mais il y en aura d’autres. Vous constaterez la première augmentation dès l’examen du projet de loi de finances pour 2021, dont vous serez bientôt saisis, avec une enveloppe de 400 millions d’euros. Au-delà de cette augmentation, qui s’adressera notamment aux plus jeunes, mais qui pourrait concerner aussi l’ensemble des professeurs, nous transformons notre système, notamment avec des ressources humaines de proximité. Ce système sera beaucoup moins anonyme et beaucoup plus personnalisé, avec un suivi de chaque professeur tout au long de sa carrière. Cela manifestera la reconnaissance du pays à tous les professeurs.

Au-delà de ces mesures, le sursaut national actuel doit nous conduire à considérer que le professeur est central. Nous devons tous, comme citoyens, comme parents d’élèves, respecter les professeurs et tenir des discours qui les placent au centre de notre société.

Applaudissements sur des travées des groupes RDPI et RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Jean-Claude Requier, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Requier

Je tiens à exprimer à mon tour, au nom de mon groupe, notre grande émotion après cet attentat inqualifiable. Nos pensées vont bien sûr vers Samuel Paty, à sa famille et à ses proches, à qui nous adressons notre compassion. Elles vont aussi aux forces de l’ordre, qui sont intervenues dans le plus grand professionnalisme.

Mais je veux également exprimer notre colère face à notre incapacité collective à mettre un terme aux défis devenus quotidiens d’une idéologie totalitaire et mortifère. Assez de minutes de silence, de marches hommages et de reculs ! Notre pays a besoin d’actes forts pour préserver notre démocratie. Car tel est bien l’enjeu du combat culturel qui se nourrit de la misère sociale et dans lequel nous sommes entrés pour au moins une génération.

Aujourd’hui, l’école, le creuset de l’avenir de notre Nation, a été attaquée. Un enseignant a été décapité pour avoir enseigné la liberté d’expression. Rendons-nous compte du sens terrible de cette phrase !

J’ai été professeur d’histoire-géographie. J’ai enseigné l’histoire de France à des élèves de toutes origines et de toutes croyances. J’ai tâché de leur transmettre ce qu’a été l’édification de la République par les grands principes émancipateurs des Lumières. J’ai voulu qu’ils apprennent le doute raisonnable, le libre arbitre, le débat contradictoire, afin qu’ils deviennent des citoyens éclairés et d’égale dignité, quel que soit leur milieu d’origine.

Mon groupe a toujours été, depuis 1892, un défenseur acharné de la laïcité : une laïcité qui ne peut se concevoir que sans adjectif, pour garantir dans la concorde civile l’unité nationale au-delà des opinions et croyances ; une laïcité qui assure le droit de croire ou de ne pas croire, qui permet l’égalité des chances, qui ne réduit pas les individus à une vision essentialiste ; une laïcité à rebours du projet obscurantiste que des fanatiques ne concevant la vie que par le dogme religieux veulent nous imposer.

Monsieur le Premier ministre, l’autorité de l’État n’a cessé de reculer depuis trente ans sur la laïcité. Allez-vous enfin mettre un terme à cette situation ?

Applaudissements sur les travées des groupes RDSE, UC et Les Républicains, ainsi que sur des travées des groupes RDPI, INDEP et SER.

Debut de section - Permalien
Jean Castex

Monsieur le président Requier, je vous salue d’autant plus volontiers que je sais la profession que vous avez exercée, laquelle profession revêt une symbolique particulière en ces moments difficiles pour notre pays.

Vous avez raison, l’une des forces de la République est d’être laïque ; elle le demeurera, plus que jamais. C’est un pilier de notre socle social, aujourd’hui combattu, mais que nos prédécesseurs républicains ont construit avec ténacité.

Nous allons conforter la laïcité. Nous le ferons d’abord – je l’ai indiqué précédemment – en ne laissant pas cet acte odieux impuni. Je voudrais rendre hommage à nos forces de sécurité intérieure. Dois-je rappeler à la Haute Assemblée que l’auteur de l’attentat, lui aussi barbare, perpétré devant les anciens locaux de Charlie Hebdo voilà quelques semaines à peine a été arrêté par les forces de police une heure et dix minutes après la commission des faits et que l’auteur de l’assassinat sauvage de Samuel Paty a été neutralisé par les forces de sécurité quelques minutes seulement après la commission des faits ?

Sous le contrôle de l’autorité judiciaire, nous avons engagé tous les moyens nécessaires pour que les complices présumés de cet acte ignoble soient poursuivis. Nous avons d’ores et déjà pris un certain nombre de mesures. J’ai évoqué précédemment la dissolution d’une association. Je pourrais également mentionner la fermeture d’une mosquée en Seine-Saint-Denis, à Pantin.

Au-delà, dans la lutte contre le séparatisme, nous comptons bien renforcer les valeurs de la laïcité. C’est tout l’objet du texte dont vous aurez à débattre en début d’année prochaine. Il prolongera et approfondira des dispositions que vous avez déjà votées. Je salue d’ailleurs Mme Gatel, ici présente.

Nous voulons renforcer la laïcité. Cet événement tragique doit nous donner plus fortement encore l’occasion de nous rassembler autour de cette belle valeur : la République. Monsieur le président Requier, nous ne renonçons à rien ; notre détermination et notre action se trouvent au contraire énergiquement renforcées par les événements qui viennent de se produire.

Applaudissements sur les travées du groupe RDPI, ainsi que sur des travées du groupe UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à Mme Monique de Marco, pour le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires.

Debut de section - PermalienPhoto de Monique de Marco

Ma question s’adresse à M. le ministre de l’éducation nationale.

Ma première pensée va à la famille de Samuel Paty, à sa femme et à son fils. La violence de cet assassinat montre l’immense difficulté et la mission essentielle du métier de professeur aujourd’hui.

Immense difficulté, car les enseignants sont depuis plusieurs années en première ligne face aux événements tragiques auxquels nos enfants sont confrontés.

Mission essentielle, car il s’agit d’accompagner tous les enfants de la République sur le chemin de la connaissance et de la réflexion, gage et moyen d’une vraie liberté de pensée. L’éducation et la construction de l’esprit critique sont les conditions de la démocratie et de la lutte contre le terrorisme.

À côté de cette tragédie, combien d’enseignants sont confrontés à d’énormes difficultés dans leur pratique quotidienne ? Les relations se tendent, et l’accompagnement, le soutien et la formation manquent trop souvent cruellement.

Nous assistons à une paupérisation du service public de l’enseignement. Cela laisse aujourd’hui les professeurs seuls garants des principes de la République. Il n’y a plus de formation continue digne de ce nom, en particulier s’agissant de la citoyenneté et du vivre ensemble. Pourtant, le besoin est réel. Il faut des dispositions effectives pendant le temps scolaire, avec des moyens de remplacement appropriés.

Monsieur le ministre, pour avoir été enseignante en collège pendant trente ans, c’est avec beaucoup d’émotion et d’inquiétude pour l’avenir que je vous demande quel plan de formation ambitieux vous allez mettre en œuvre dès la rentrée de novembre. Allez-vous proposer un énième numéro vert ou prendre de véritables mesures pour accompagner comme il se doit les professeurs face aux enjeux actuels ?

Il est important d’honorer la mémoire de Samuel Paty en poursuivant son travail.

Applaudissements sur les travées du groupe GEST, ainsi que sur des travées des groupes SER et CRCE. – M. André Gattolin applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. le ministre de l’éducation nationale.

Debut de section - Permalien
Jean-Michel Blanquer

Madame la sénatrice, je vous salue également avec respect, puisque vous venez d’être élue.

La question que vous posez, sur la formation des professeurs, est évidemment de la plus haute importance. Sur ce sujet, nous avons avancé à plus d’un titre.

Je faisais mes calculs hier. Ainsi que nous aurons l’occasion de l’évoquer lors de l’examen du projet de loi de finances, c’est sous ce quinquennat que les budgets de l’éducation nationale ont le plus augmenté, en particulier par rapport aux deux, voire aux trois quinquennats précédents. Vous le verrez, tout cela est chiffré.

La Haute Assemblée a eu à travailler sur au moins deux textes législatifs ayant une importance s’agissant du sujet que vous avez abordé. Je pense d’abord à la proposition de loi présentée par Mme Gatel, que j’ai très fortement soutenue. Ce texte nous a permis d’avancer sur la laïcité, notamment via le combat contre les écoles hors contrat adossées à des projets extrémistes ou radicaux. Je pense ensuite à la loi pour une école de la confiance. Il y a eu ici des débats très approfondis sur la formation initiale et la formation continue.

Je vous donne en partie raison. La formation n’est pas suffisante aujourd’hui. Nous avons commencé à apporter des réponses. La formation aux enjeux de l’éducation morale et civique est désormais systématique dans la formation initiale ; elle doit être beaucoup plus abondante dans la formation continue.

Je centrerai mon propos sur l’éducation morale et civique, mais je pourrais évoquer beaucoup d’autres sujets, comme les mesures que nous prenons pour développer les savoirs fondamentaux, notamment en français et en mathématiques.

Sachez que nous avons déjà renforcé l’éducation morale et civique et que nous allons continuer de le faire, notamment pour lui donner un caractère plus vivant, plus tonique, afin que les élèves se sentent engagés sur ces sujets. Je prendrai aussi d’autres initiatives en tant que ministre chargé de la jeunesse pour favoriser l’engagement civique des élèves.

L’amélioration de la formation continue passe également par le développement d’outils pédagogiques et de formations à distance. Le réseau Canopé a déjà mis en place un programme à distance sur la laïcité, et il va continuer de l’enrichir.

En tout cas, l’ensemble du corps professoral doit s’approprier les enjeux de l’éducation morale et civique, même si celle-ci est portée en premier lieu par les professeurs d’histoire-géographie.

Applaudissements sur des travées du groupe RDPI. – Mme Françoise Gatel applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à Mme Monique de Marco, pour la réplique.

Debut de section - PermalienPhoto de Monique de Marco

Mme Monique de Marco . Monsieur le ministre, je crois qu’il est nécessaire d’élargir cette formation à l’ensemble des enseignants – elle ne doit pas être dispensée qu’aux professeurs d’histoire-géographie. En outre, il est préférable que ce type de formation se déroule en présentiel plutôt qu’à distance. Je le redis, tous les enseignants ont besoin de formation sur ces sujets.

Applaudissements sur les travées du groupe GEST.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

M. le président. La parole est à M. Claude Malhuret, pour le groupe Les Indépendants – République et Territoires.

Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Malhuret

Ce n’est plus seulement dans les mosquées salafistes que se recrutent les djihadistes ; c’est aussi sur internet, devenu l’écosystème du complotisme, de la haine et, désormais, des influenceurs islamistes.

L’assassinat de Samuel Paty a été préparé par les torrents d’injures des fanatiques sur les réseaux antisociaux. Il y a aussi sur ces réseaux ceux qui fracturent méthodiquement notre pays : les identitaires, les racialistes, les indigénistes, les décoloniaux. Il y a enfin les idiots utiles qui crient à l’islamophobie ou au racisme dès qu’on annonce des mesures pour combattre l’islamisme.

L’Assemblée nationale a voté la loi qui imposait le retrait des contenus haineux dans les vingt-quatre heures. Cette loi a été censurée par le Conseil constitutionnel au nom de la liberté d’expression, ce qui laisse le problème entier.

La liberté d’expression ne consiste pas à mettre en ligne la haine, le harcèlement, les appels au meurtre ou le djihadisme. La loi interdit à la presse de publier de tels contenus, et la presse s’y conforme, sans que personne y voie une atteinte à la liberté d’expression. Les plateformes, quant à elles, s’en exonèrent sans aucune sanction. Les résultats sont sous nos yeux !

Monsieur le Premier ministre, vous avez annoncé hier la création d’un délit de mise en danger de la vie d’autrui par internet. Pourquoi pas ! Mais il faut aller plus loin. La seule façon de nettoyer le dépotoir des réseaux antisociaux, le « torrent de boue », disait le président Larcher, est l’obligation de retirer les contenus haineux. Il faut absolument y revenir sous une forme acceptable par le Conseil constitutionnel. Nous le devons à Sonia Mabrouk, à Mila, à Zineb El Rhazoui et à tant d’autres obligés de vivre chaque jour sous protection policière à cause de fatwas sur internet.

Au-delà des commémorations, le meilleur hommage à Samuel Paty est de continuer avec des lois enfin efficaces le cours qu’il donnait à ses élèves, ce cours par lequel il luttait contre la haine et pour l’unité de la République.

Applaudissements sur les travées des groupes INDEP, RDSE, UC et Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe RDPI.

Debut de section - Permalien
Jean Castex

Monsieur le président Malhuret, je partage l’intégralité des propos que vous venez de tenir.

Nous voyons apparaître et se consolider un profil de criminels qui passent à l’acte sous l’effet de deux effecteurs : une manipulation – elle passe souvent par des associations qui, sous prétexte d’un objet sportif, éducatif ou cultuel, sont en réalité des instruments de l’islam politique – ; les réseaux sociaux au sens large.

Je vous rejoins tout à fait : il faut impérativement nous attaquer plus fortement encore à ceux qui manipulent et à ceux qui transmettent la haine. Nous allons donc procéder dans le cadre actuel à un certain nombre de dissolutions d’associations ou de groupements de fait – le conseil des ministres a pris dès aujourd’hui des décisions en ce sens – et proposer à la représentation nationale d’élargir les cas dans lesquels de telles dissolutions peuvent intervenir.

Mais, vous l’avez dit, il y a aussi la question de la haine en ligne et de l’utilisation des réseaux sociaux – vous avez emprunté à M. le président du Sénat une appréciation, dans laquelle je me retrouve d’ailleurs volontiers. Comme vous le savez, nous avons en réalité deux sujets : la nécessaire évolution des directives communautaires pour mieux responsabiliser les hébergeurs et la jurisprudence du Conseil constitutionnel, que vous avez rappelée et que chacun connaît.

Je serai dès vendredi à Bruxelles pour rencontrer la présidente de la Commission européenne et plusieurs commissaires européens ; la responsabilité des hébergeurs est l’un des premiers sujets que j’aborderai lors de ce déplacement. Cette question constituait l’une de nos priorités, avant même les terribles faits dont nous parlons cet après-midi, et nous avions déjà pris des initiatives au niveau européen.

Conformément à l’intervention que j’ai faite hier à l’Assemblée nationale et à laquelle vous avez bien voulu faire référence, il nous faudra trouver dans le texte dont je parlais précédemment une voie juridique qui devra tenir compte de la jurisprudence du Conseil constitutionnel, qu’il n’appartient pas au Premier ministre de commenter, pour rendre beaucoup plus efficace notre action déterminée contre la haine sur les réseaux sociaux. Je suis certain que le Sénat concourra à nos travaux pour aller dans ce sens.

Applaudissements sur des travées des groupes RDPI, RDSE et UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

M. le président. La parole est à M. Bruno Retailleau, pour le groupe Les Républicains.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

En France, aujourd’hui, on peut être décapité seulement pour avoir donné un cours d’instruction civique sur la liberté d’expression. En France, aujourd’hui, des fatwas sont lancées et la charia immédiatement exécutée. Mais, cette fois, quelque chose a changé. Les Français sont passés presque instantanément d’un état de sidération à un état de colère ; ils demandent des comptes, ils exigent des résultats, tout simplement parce qu’ils sentent confusément, mais indéniablement, que nous sommes en train de perdre le combat contre le totalitarisme islamiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

Faute de courage souvent ! Faute aussi de mener un combat global contre l’islamisme sous toutes ses formes, violentes ou rampantes ! Faute enfin de mener un combat global contre le désordre migratoire – l’un des terreaux de l’islamisme –, qui est un défi et un obstacle à l’assimilation de nos valeurs républicaines !

Monsieur le Premier ministre, êtes-vous prêt à mener ce combat, qui doit être global ? Vous nous parlez d’un texte qui nous arrivera dans cinq mois, en février. Ce texte comportera-t-il, oui ou non, des mesures pour remédier à ce désordre migratoire ?

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe INDEP.

Debut de section - Permalien
Jean Castex

Monsieur le président Retailleau, vous avez dit, à juste titre, que les Français ont été sidérés, qu’ils sont en colère. Je crois que nous le sommes toutes et tous, il n’y a pas de doute là-dessus, mais le Gouvernement de la République que j’ai l’honneur de diriger n’est pas simplement sidéré ou en colère, il est déterminé et à la manœuvre – je le répète, le Gouvernement est déterminé et à la manœuvre !

Debut de section - Permalien
Jean Castex

Certains semblent s’interroger sur notre prétendue inefficacité. C’est sans doute dans la nature du débat démocratique et, bien entendu, je l’accepte, mais je le regrette aussi, car vous mesurez bien que les choses sont difficiles et que ceux qui combattent la République ont justement comme objectif, je le redis, de faire éclater la communauté nationale – n’en doutez pas un seul instant ! Or nous agissons, notamment en matière de renseignement, et le ministre de l’intérieur pourra y revenir.

Vous avez parlé d’immigration, mais je veux rappeler à chacune et à chacun d’entre vous que de tels actes peuvent être commis par des personnes étrangères comme, malheureusement, par des citoyens de la République – c’est un fait, les chiffres le montrent.

Debut de section - Permalien
Jean Castex

M. Jean Castex, Premier ministre. C’est pourquoi notre action est tous azimuts, notamment pour identifier ces personnes et les empêcher de passer à l’acte. Nous avons considérablement renforcé nos capacités de renseignement, nous allons nous attaquer encore plus fort aux effecteurs, comme je l’ai dit précédemment, et nous prendrons toutes les mesures nécessaires. Nous n’avons aucune hésitation, sachez-le, et notre main, la mienne en particulier, n’a jamais tremblé et ne tremblera pas !

Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Bruno Retailleau, pour la réplique.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

M. Bruno Retailleau . Monsieur le Premier ministre, c’est votre gouvernement qui fait le lien entre l’islamisme, le terrorisme et l’immigration

Exclamations ironiques sur les travées du groupe SER.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

, puisque les premières annonces du ministre de l’intérieur concernaient des expulsions d’étrangers en situation irrégulière.

Eh oui ! sur des travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

Ce que nous vous demandons, c’est d’avoir le courage de réarmer la République. Nous vous demandons aussi de faire aimer la France. Ne cédez pas à la tentation, si française, de la pénitence perpétuelle ! §Ne faites pas comme le Président de la République, qui a déclaré que la France était coupable de crimes contre l’humanité, le pire des crimes !

Monsieur le Premier ministre, il faut réarmer la République et faire aimer la France. Relevons ensemble l’étendard de nos couleurs et de nos valeurs ! Relevons ensemble l’étendard de la fierté française !

Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

M. le président. La parole est à M. Loïc Hervé, pour le groupe Union Centriste.

Applaudissements sur les travées du groupe UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Loïc Hervé

Monsieur le ministre de l’intérieur, la France est un État de droit et entend le rester. Alors, notre pays ne doit pas être faible et nous devons être capables de faire appliquer les décisions judiciaires et administratives.

Des milliers d’étrangers qui sont des prêcheurs de haine et veulent abattre les principes de notre République continuent de vivre sur notre sol. Des décisions les ont pourtant condamnés à quitter notre territoire national ; ils sont nombreux, trop nombreux, à être toujours là. Une immense majorité de nos concitoyens, pris d’une colère froide, se pose cette question : pourquoi sont-ils encore là ? À cette question mille fois posée, on nous a mille fois répondu : « Ah oui, mais, vous comprenez, c’est compliqué… »

Debut de section - PermalienPhoto de Loïc Hervé

Après ce nouvel attentat atroce contre Samuel Paty qui nous a tous touchés très profondément, vous allez être tenté de proposer de nouveau au Parlement de durcir notre arsenal juridique et d’aggraver les peines. En réalité, l’affaiblissement de l’État n’en serait que renforcé, car, le premier problème, c’est l’application ferme et systématique du droit. Or nous savons tous que tel n’est pas le cas.

Plus qu’un constat d’impuissance, c’est un terrible aveu. Le Président de la République a annoncé vouloir prendre des mesures concrètes et rapides. Monsieur le ministre de l’intérieur, vous avez indiqué dimanche que 231 étrangers dangereux allaient être expulsés. Pouvez-vous prendre l’engagement de revenir dans un mois nous dire combien d’entre eux sont effectivement partis ? Et pouvez-vous nous donner de la visibilité pour les mois qui viennent ?

Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains.

Debut de section - Permalien
Gérald Darmanin

Monsieur le sénateur, je suis tout à fait prêt à venir devant toutes les commissions parlementaires que vous désignerez pour répondre à cette importante et difficile question. Ma motivation est complète.

Avant de vous répondre sur le fond, permettez-moi d’avoir une pensée pour les policiers, qui sont en première ligne en cas d’attentat. Ce fut le cas devant les anciens locaux de Charlie Hebdo comme lors de l’attentat ignoble qui s’est déroulé près de ce collège. Chaque fois, leur intervention a été très rapide et a permis d’interpeller le terroriste ou d’arrêter sa cavale mortelle. Ils risquent leur vie, et je sais, monsieur le sénateur, que vous les saluez pour cela.

Je suis malheureusement contraint de faire un lien entre votre question et celle du président Retailleau. Vous me demandez des comptes, et je vais vous répondre, mais je note que ces questions nous sont posées alors que Samuel Paty n’est pas encore enterré.

C’est depuis 2018, sous la présidence Macron, que le FSPRT permet d’identifier les étrangers en situation irrégulière qui y sont inscrits.

Depuis trois ans, 436 étrangers radicalisés et en situation irrégulière ont été expulsés, alors qu’entre 2007 et 2012 – la période était très différente, et je ne fais pas de procès d’intention – 24 expulsions ont eu lieu et qu’entre 2007 et 2010, soit trois années, 106 personnes ont été expulsées pour trouble à l’ordre public. Les circonstances sont sans doute différentes, mais les expulsions ont été cinq fois plus nombreuses sous la présidence Macron.

J’ai aussi entendu beaucoup de choses sur les interpellations d’étrangers en situation illégale : elles ont été au nombre de 74 000 sous le gouvernement de François Fillon, contre 125 000 sous celui d’Édouard Philippe.

Vous le voyez, nous pouvons effectivement comparer les chiffres.

Applaudissements sur des travées du groupe RDPI.

Debut de section - PermalienPhoto de Loïc Hervé

Monsieur le ministre, aucun humanisme ne tiendra le choc si la République ne fait pas appliquer le droit et ne met pas en œuvre les mesures adoptées par le Parlement ; en somme, si l’État ne fait pas appliquer les peines décidées par les juges.

Alors, si certaines personnes étrangères condamnées sont toujours sur notre sol dans un mois, il faudra nous expliquer pourquoi. Si ce sont des raisons juridiques, il faudra nous dire précisément lesquelles et modifier la loi. Si ce sont des raisons diplomatiques, il faudra l’expliquer aux Français et prendre toute mesure pour que les obstacles soient levés.

J’ai conscience qu’en répondant à ces questions on ne traite qu’une partie du problème. Beaucoup de ces prêcheurs de haine sont Français, comme vous et moi, mais renvoyons déjà en dehors de nos frontières ceux qui méritent de l’être !

Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

M. le président. La parole est à M. Olivier Paccaud, pour le groupe Les Républicains.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Olivier Paccaud

Ma question s’adresse à M. le ministre de l’éducation nationale, ainsi qu’au garde des sceaux.

Si je suis sénateur, je reste le professeur d’histoire-géographie que j’ai été, comme d’autres ici. Vendredi, un enseignant d’histoire-géographie, Samuel Paty, a été sacrifié sur l’autel du fanatisme islamiste, ce fascisme d’aujourd’hui, condamné à devenir martyr pour avoir accompli son devoir – enseigner la tolérance, tenter d’éveiller les consciences –, décapité pour avoir simplement fait son métier, transmis un savoir.

L’histoire et sa fille naturelle, l’éducation civique, sont des matières plus que précieuses, parce qu’elles révèlent nos racines, donnent un sens au long fil d’Ariane qui nous relie à nos aïeux, nous permettent de mieux comprendre comment vivre ensemble. Mieux vaut savoir d’où l’on vient pour ne pas se perdre et s’égarer sur les sentiers du malheur, telle est la leçon de vie, le talisman prudent, qu’offrent l’histoire et ses professeurs.

Or, depuis des années, ceux qui enseignent l’histoire et l’éducation civique sont parfois menacés. On veut les faire taire ! La Shoah, les croisades, les valeurs républicaines, la laïcité, les droits de l’homme, la femme égale de l’homme, les islamistes veulent en effacer les traces, ils veulent aveugler les esprits. Et certaines autorités ne veulent surtout pas de vagues – pensez que Samuel Paty avait été convoqué au commissariat pour se justifier !

Aussi est-il temps de réellement protéger les professeurs et de sanctuariser les cours d’histoire et d’instruction civique, mais aussi ceux de sciences, de lettres ou de sport.

Monsieur le ministre, ne doit-on pas désormais instaurer un délit d’entrave à la liberté d’enseigner dans le cadre, bien évidemment, des programmes définis par l’éducation nationale ? C’est l’un des moyens de faire cesser la guérilla permanente des ennemis de l’école émancipatrice.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. le ministre de l’éducation nationale.

Debut de section - Permalien
Jean-Michel Blanquer

Monsieur le sénateur Olivier Paccaud, je vous remercie d’avoir fait référence aux professeurs d’histoire-géographie. En effet, au-delà de l’hommage que nous rendons aux professeurs, regardons les enjeux de cette discipline. C’est un sujet dont je parlais ce matin même avec les représentants de l’association des professeurs d’histoire-géographie venus m’apporter leur soutien et leurs propositions dans les circonstances actuelles d’unité nationale.

Vous avez raison, les professeurs d’histoire-géographie sont souvent ceux qui sont en première ligne. Cela ne devrait pas nécessairement être le cas, parce que tous les enseignements, y compris dans le domaine scientifique, peuvent être confrontés aux mêmes difficultés. De fait, tous les enseignants sont en première ligne pour défendre la République et transmettre ses valeurs.

Monsieur le sénateur, je ne peux pas vous laisser dire que l’institution n’a pas apporté son soutien à Samuel Paty.

Tout d’abord, depuis mon arrivée à ce ministère, j’ai créé le Conseil des sages de la laïcité. Il existe désormais pour l’éducation nationale un ensemble de normes et de références extrêmement exigeantes en la matière.

Ensuite, nous avons mis en place des équipes « Valeurs de la République », qui sont intervenues dans cette affaire en soutien de Samuel Paty.

Je vous en supplie, ne relayez pas les mensonges, les fake news, des réseaux sociaux – nous venons justement de dire il y a quelques instants que ce problème était l’un des pires de notre époque. Il n’est pas vrai de dire que l’institution n’a pas apporté son soutien à Samuel Paty. C’est un fait, et l’inspection générale comme les autorités judiciaires le démontreront. Je vous en supplie, ne faites pas ce que nous reprochons justement aux ennemis de la République.

Il est extrêmement important de dire que le fameux « pas de vagues ! » n’est pas ou n’est plus, si vous préférez, la logique de l’éducation nationale. Je l’ai dit dès les premiers jours de mon arrivée au ministère il y a trois ans et demi, et je l’ai démontré ensuite. Dans cette affaire, ce n’est pas le « pas de vagues ! » qui est en question.

Bien sûr, il existe des problèmes, je suis le premier à les reconnaître et les nommer. Nous n’avons pas tout résolu, il y a encore beaucoup à faire, notamment pour encore mieux signaler et réagir. Nous avons commencé à avancer, nous allons continuer de le faire, et je suis ouvert à toute proposition pour aller encore plus loin. Je le répète, notre logique est celle du signalement et de la défense sans faille des principes de la République.

Applaudissements sur des travées du groupe RDPI.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Olivier Paccaud, pour la réplique.

Debut de section - PermalienPhoto de Olivier Paccaud

Monsieur le ministre, vous ne m’avez pas répondu sur le délit d’entrave.

Oui, nous sommes en guerre ! Oui, la peur doit changer de camp ! Oui, la foi ne saurait être au-dessus de la loi ! Mais si la parole a des vertus, elle a des faiblesses. La République doit éclairer, mais aussi protéger. Alors, commençons par modifier l’article 431-1 du code pénal. Je tiens une proposition de loi à votre disposition pour aller dans ce sens. Charles Pasqua disait jadis : « Il faut terroriser les terroristes. » On pourrait dire qu’il faut se séparer des séparatistes. En tout cas, aujourd’hui, il faut paralyser les islamistes !

Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

M. le président. La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Applaudissements sur les travées du groupe SER.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Pierre de La Gontrie

Mme Marie-Pierre de La Gontrie . Chacun ici a soutenu des gouvernements qui ont dû faire face au terrorisme. Cela doit tous – je m’adresse également au président Retailleau à cet instant – nous engager à l’humilité et à la responsabilité.

Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Pierre de La Gontrie

Dans une période troublée et violente, il est d’autant plus nécessaire d’être clair sur les principes. Le premier principe est que la France est un État de droit, c’est-à-dire un pays où la norme s’applique et où l’arbitraire n’a pas sa place. Or, depuis vendredi, monsieur le Premier ministre, votre ministre de l’intérieur dit vouloir intimider et passer des messages, usant pour ce faire de pouvoirs qui trouveront rapidement leurs limites, et assume une forme d’arbitraire. Le garde des sceaux, tout d’abord discret – il est d’ailleurs absent aujourd’hui –, semble prêt à modifier la loi fondatrice de la liberté de la presse et de la liberté d’expression du 29 juillet 1881.

Permettez-moi de vous rappeler les propos tenus par Robert Badinter, au lendemain de l’attentat contre Charlie : « Ce n’est pas par des lois et des juridictions d’exception qu’on défend la liberté contre ses ennemis. Ce serait là un piège que l’histoire a déjà tendu aux démocraties ; celles qui ont cédé n’y ont rien gagné en efficacité répressive, mais beaucoup ont perdu en termes de liberté et parfois d’honneur. »

Monsieur le Premier ministre, dans cette période où le « en même temps » ne peut vous guider davantage, ma question est simple : entendez-vous écorner notre État de droit ou, au contraire, vous y référer toujours dans un face-à-face courageux avec les Français ?

Applaudissements sur les travées du groupe SER.

Debut de section - Permalien
Gérald Darmanin

M. Gérald Darmanin, ministre de l ’ intérieur. Madame la sénatrice, j’applique les lois votées par le Parlement, singulièrement les excellentes lois que jadis vous souteniez, celles de MM. Cazeneuve et Valls. En préparant cette séance de questions d’actualité, j’ai vu qu’à l’époque vous n’y étiez pas très opposée. Le changement de ministre vous encourage sans doute à faire part de votre opposition…

Rires sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - Permalien
Gérald Darmanin

La semaine dernière, quelques jours avant que cet attentat odieux n’ait été perpétré, le Sénat débattait d’un projet de loi visant à proroger certaines dispositions de la loi SILT – le président de la commission des lois François-Noël Buffet et le rapporteur du texte Marc-Philippe Daubresse s’en souviennent. Or votre groupe n’a pas voté les dispositions de ce texte, qui aident les services de renseignement et de police à lutter contre le terrorisme.

Marques d ’ approbation et applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains. – Protestations sur les travées du groupe SER.

Debut de section - Permalien
Gérald Darmanin

J’ai effectivement commandé quatre-vingts opérations de police – figurez-vous qu’un ministre de l’intérieur commande la police et la gendarmerie ! Pour répondre à ma requête, les services compétents, que ce soit la DGSI, la DGPN ou la DGGN, ont évidemment demandé à des juges des libertés et de la détention d’autoriser ces opérations, ce qu’ils ont fait. Toutes ces opérations ont donc été autorisées par un juge.

Madame la sénatrice, je suis à la disposition du Parlement pour rendre compte de toutes ces opérations devant n’importe laquelle de ses commissions. J’applique la loi de la République, c’est-à-dire la loi de l’État qui ne vise qu’à protéger les petites gens !

Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et RDSE, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie, pour la réplique.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Pierre de La Gontrie

Mme Marie-Pierre de La Gontrie . Je regrette, monsieur le ministre, que vous n’ayez pas affirmé votre attachement à l’État de droit.

Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Pierre de La Gontrie

Vous étiez enfant et n’aviez donc pas encore entamé votre vie de jeune homme lorsque l’un de vos illustres prédécesseurs, qui a également été membre du Sénat, avait annoncé qu’il allait terroriser les terroristes et que l’insécurité changerait de camp. Quatre mois plus tard, un attentat, rue de Rennes, faisait sept morts et cinquante et un blessés.

Aujourd’hui, vous devriez être conscient de la gravité du sujet. Or, quand vous envisagez de réglementer la disposition des étals de supermarché, vous n’êtes pas exactement dans votre rôle, et je ne suis pas sûre que vous respectiez l’État de droit !

Applaudissements sur les travées du groupe SER.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

M. le président. La parole est à M. Philippe Pemezec, pour le groupe Les Républicains.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Pemezec

Charles Pasqua avait donc raison…

Ma question s’adresse à M. le Premier ministre, au nom des Français qui ont appris avec effroi la décapitation de Samuel Paty, un cran de plus dans l’abomination, dans la volonté des ayatollahs de l’islam d’imposer leur loi chez nous.

Élu local, en trente ans, j’en ai vu et entendu des renoncements. J’ai aussi vu cette idéologie totalitaire gagner nos quartiers, encouragée par la lâcheté coupable de politiques et aussi de technocrates.

On a fermé les yeux sur l’immigration massive liée au regroupement familial, sur la création de ghettos urbains, sur la dérive de ces quartiers gangrenés par la drogue, le communautarisme et l’islamisme.

On a fermé les yeux sur les motivations réelles de certains migrants qui viennent pour porter la haine et le sang.

On a fermé les yeux sur les coups de canif à la laïcité, les repas de substitution, les prières de rue, les couloirs dans les piscines, le port du voile dans l’espace public. Autant de coups de boutoir portés contre les fondements de notre République !

Mais, aujourd’hui, monsieur le Premier ministre, vous ne pouvez pas fermer les yeux, parce que l’horreur vous a sauté au visage, comme à nous tous d’ailleurs, parce qu’il s’est passé à Conflans la même chose qu’à Raqqa ou à Mossoul.

Alors, que doit-on faire aujourd’hui ? Les Français ont compris qu’allumer des bougies et défiler dans la rue n’étaient pas un rempart contre cet ennemi qui veut imposer la charia au ventre mou de l’Occident. Les Français attendent de vous des actes forts : la mise en place d’une immigration choisie, et non pas imposée par des juges irresponsables ; l’expulsion des clandestins et des délinquants étrangers ; une application sans faille des règles de la laïcité ; la déchéance de nationalité contre tous ceux qui prennent les armes contre la mère patrie ; la reconquête, rue par rue, de toutes les zones de non-droit ; un soutien total à la police et, si nécessaire, le renfort de l’armée.

Pour cela, il faut un exécutif déterminé et un Parlement respecté, car représentant légitime du peuple. « Ils ne passeront pas », a déclaré le Président de la République. Le combat a donc enfin commencé chez nous – espérons-le !

Monsieur le Premier ministre, dites-nous avec quelles armes nous allons combattre et comment nous pouvons gagner cette guerre. Plus de renoncements, s’il vous plaît, des actes !

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - Permalien
Gérald Darmanin

Monsieur le sénateur Pemezec, si le constat peut nous rapprocher, nous avons des différences sur quelques-unes de vos solutions…

D’abord, vous faites un lien, que j’ai déjà entendu plusieurs fois, pas de la part de tous les représentants du groupe Les Républicains, mais de la part de quelques-uns, qui revient à dire : étranger égale islam, islam égale problème, problème égale terrorisme.

Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - Permalien
Gérald Darmanin

Quand on dit qu’on arrête totalement l’immigration, c’est qu’on pense que, par principe, tout étranger qui vient sur le territoire national pourrait être un problème.

Debut de section - Permalien
Gérald Darmanin

Or beaucoup de gens qui demandent le droit d’asile en France fuient des dictatures islamistes ; ce sont par exemple des femmes qui veulent avoir le droit de laisser leurs cheveux flotter au vent dans la rue.

Cette caricature n’honore ni la laïcité ni la vocation universelle de la France, y compris lorsque nous parlons d’immigration en provenance de pays arabes.

Ensuite, je ne pense pas qu’il y ait un procès à faire sur le thème des naturalisations ou alors il s’agit du procès de la majorité que nous soutenions, moi jeune militant, vous parlementaire… En effet, il y a eu 84 000 naturalisations par an entre 2007 et 2012 et 54 000 sous la présidence Macron. Vous faisiez donc peut-être votre propre procès…

Debut de section - Permalien
Gérald Darmanin

Si l’on regarde bien les choses, la famille du terroriste de Conflans-Sainte-Honorine est arrivée en France sous le Président Chirac, a eu ses papiers sous le Président Sarkozy, n’a pas été expulsée sous le Président Hollande et un attentat est commis sous le Président Macron !

Monsieur le sénateur, il est facile de poser des questions, plus difficile d’y apporter des réponses, et il faut beaucoup de courage pour réparer les erreurs du passé. C’est pour cette raison qu’être ministre de l’intérieur est un grand honneur.

Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

M. le président. La parole est à M. Olivier Cigolotti, pour le groupe Union Centriste.

Applaudissements sur les travées du groupe UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Olivier Cigolotti

Ma question s’adresse à Mme Jacqueline Gourault, ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.

Madame la ministre, le groupe Union Centriste ne remet pas en cause la baisse des impôts de production, qui est l’une des mesures phares du projet de budget pour 2021. Nous ne contestons pas la pertinence de ce choix, qui relève presque du bon sens. Pour relocaliser, réindustrialiser et relancer, il faut effectivement alléger la fiscalité des entreprises.

Le problème, c’est que le Gouvernement a choisi, encore une fois, de réduire la fiscalité locale : la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), la contribution économique territoriale (CET), la cotisation foncière des entreprises (CFE), la taxe foncière sur le bâti, le tout à hauteur de 10 milliards d’euros. On ne touche donc pas aux impôts de l’État, tels que la taxe sur les salaires, la C3S ou le forfait social. C’est toujours la même logique qui est à l’œuvre, celle ayant déjà présidé à la suppression de la taxe d’habitation. La fiscalité locale est mise en coupe réglée.

Le ministre des comptes publics nous a bien assuré que la baisse des impôts de production serait « compensée intégralement et de manière dynamique pour les collectivités ». Dont acte, mais cette politique sape encore une fois en profondeur le principe d’autonomie fiscale des communautés de communes ou d’agglomération. Lorsque l’on perçoit des dotations, aussi dynamiques soient-elles, on devient dépendant d’un État centralisateur. Supprimer les impôts locaux, c’est transformer les collectivités en simples guichets, car, sans fiscalité propre, on ne perçoit plus de retour sur investissement, et on n’a donc plus beaucoup de moyens ni de raisons de faire des efforts.

Madame la ministre, on ne peut pas à la fois prétendre faire confiance aux territoires et aux élus locaux et poursuivre ainsi. Ma question est la suivante : comment entendez-vous restaurer une fois pour toutes l’autonomie fiscale des collectivités territoriales ?

Applaudissements sur les travées du groupe UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Monsieur le sénateur Olivier Cigolotti, la suppression de la taxe d’habitation était un engagement du Président de la République, l’objectif étant d’alléger les impôts pesant sur les Français.

Vous aurez pu constater, je pense, pendant les récentes campagnes, que personne n’a contesté le principe de la suppression de la taxe d’habitation.

Protestations sur des travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Personne dans la population !

Comme vous le savez, les impôts de production baisseront de 10 milliards d’euros en 2021, grâce à la suppression de la part régionale de la CVAE et à la réduction de moitié des impôts fonciers sur les locaux industriels. Bien sûr, le Gouvernement s’est engagé à assurer une compensation intégrale, de façon pérenne et dynamique, pour les collectivités locales. Les régions recevront dès 2021 une fraction de TVA égale à la CVAE perçue auparavant.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

C’est un accord passé avec l’Association des régions de France.

Par ailleurs, pour les communes et les intercommunalités, nous inscrivons dans la loi un prélèvement sur les recettes de l’État, dont le montant sera strictement égal à celui des impôts que les collectivités territoriales auraient dû toucher.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Mme Jacqueline Gourault, ministre. Il s’agit non pas d’une dotation budgétaire, mais d’un prélèvement sur recettes. C’est un gage, bien sûr, pour les élus locaux.

Mme Cécile Cukierman le conteste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Hier, dans cette assemblée, nous avons eu un très intéressant débat de fond, qu’il faudra poursuivre, sur l’autonomie fiscale et l’autonomie financière des collectivités territoriales. Les régions, par exemple, ont accepté de percevoir des fractions de TVA, c’est-à-dire des parts d’impôt national.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Mme Jacqueline Gourault, ministre. Je le reconnais, pour les communes, le fait de lever l’impôt est quelque chose de très important. C’est un débat que nous devrons avoir ensemble.

M. François Patriat applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

M. le président. La parole est à M. Bruno Belin, pour le groupe Les Républicains.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Belin

Ma question s’adressait à M. le ministre des solidarités et de la santé.

Je parlerai non pas d’un virus venu du bout du monde, encore inconnu de tous voilà quelques mois, mais d’un virus dont la puissance contagieuse est connue mondialement depuis 1918 et pour lequel un vaccin existe depuis 1944. Chacun sait la virulence contagieuse du virus saisonnier de la grippe. Or nous ne sommes pas prêts : 7 millions de Français, inquiets de la situation sanitaire, ont d’ores et déjà retiré en pharmacie une dose de vaccin ; 15 millions de personnes bénéficieront d’une prise en charge du fait d’une situation à risque ; mais 13 millions de doses de vaccin seulement ont été préparées…

Que compte faire le Gouvernement pour protéger les habitants de ce pays, pour éviter la rupture de stock en officines dès cette semaine, alors que nous entrons dans la période optimale pour se faire vacciner ?

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. le secrétaire d’État chargé de l’enfance et des familles.

Debut de section - Permalien
Adrien Taquet

M. Adrien Taquet, secrétaire d ’ État auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargé de l ’ enfance et des familles. Monsieur le sénateur Belin, permettez-moi tout d’abord de vous féliciter de votre élection récente. Je suis ravi d’avoir l’honneur de répondre à votre première question en tant que sénateur, car j’ai apprécié le travail que nous avons pu mener ensemble l’année dernière, alors que vous étiez président du conseil départemental de la Vienne, sur la protection de l’enfance.

Exclamations ironiques sur des travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - Permalien
Adrien Taquet

La campagne de vaccination a débuté le 13 octobre dernier et se poursuivra jusqu’au 31 janvier prochain. La presse s’est fait l’écho d’un certain nombre de questions légitimes : tout le monde doit-il se faire vacciner ? Aurons-nous suffisamment de doses de vaccin ?

Concernant la première de ces interrogations, je rappellerai que la Haute Autorité de santé a rendu, dès le 20 mai dernier, un avis confirmant que la vaccination contre la grippe devait s’adresser en priorité aux professionnels de santé et aux personnes les plus fragiles, notamment les personnes âgées et celles qui présentent un risque d’infection grave par la covid-19.

La vaccination des professionnels de santé répond à un double objectif : non seulement les protéger et leur permettre de continuer à assurer leur activité, et ainsi soulager l’ensemble du système de soins, mais également protéger les patients avec lesquels ils sont en contact, notamment dans les hôpitaux, les établissements médico-sociaux et les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad).

Concernant le nombre de doses de vaccin disponibles, je me permets de rappeler que l’objectif de cette campagne vaccinale est non pas que 100 % des Français soient vaccinés, mais 75 %, conformément aux recommandations de l’Organisation mondiale de la santé. Compte tenu de l’anticipation d’une demande accrue cette année, nous avons fait le nécessaire pour mettre à disposition 30 % de doses supplémentaires par rapport aux 12 millions consommées lors de la précédente campagne. Cela se traduira par un approvisionnement continu. Nous avons bien conscience des tensions qui peuvent exister dans certaines zones, mais toutes seront servies grâce aux doses de vaccin commandées par les officines, les laboratoires pharmaceutiques ou encore les établissements de santé, ainsi que, pour la première fois, grâce à la constitution d’un stock d’État. Je peux donc vous assurer, monsieur le sénateur, que l’État fait tout pour protéger nos concitoyens de l’épidémie de grippe.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Belin

M. Bruno Belin. Je crains que nous ne devenions le pays de la pénurie : pénurie de médecins, pénurie de moyens dans les hôpitaux, pénurie de masques, pénurie de gel, pénurie de surblouses, pénurie de tests, pénurie de lits de réanimation, pénurie de doses de vaccin, pénurie d’anticipation, ce qui est encore plus grave… L’impréparation est une faute, monsieur le secrétaire d’État. J’espère que nous allons nous mobiliser, les uns et les autres, pour qu’il y ait moins de pénuries et d’incurie dans ce pays.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Leconte, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Applaudissements sur les travées du groupe SER.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Leconte

Ma question s’adresse à M. le ministre de l’intérieur.

Vendredi dernier, Samuel Paty, enseignant dans un collège public, fut victime d’un attentat terroriste islamique. Lâchement assassiné avec la plus grande barbarie, il a payé de sa vie la défense et l’enseignement de la liberté d’expression, de la laïcité, des valeurs de notre République. Il a payé de sa vie l’exercice d’un métier qui le passionnait, celui d’instruire et d’éduquer nos enfants. Avec le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, je m’associe évidemment à l’hommage qui lui est dû.

Une de ses anciennes élèves indiquait hier : « Quand il entendait une remarque agressive contre moi en cours, il intervenait immédiatement pour me protéger. Je n’arrive pas à croire que personne n’ait réussi à le protéger, lui. »

Nous partageons tous cette interrogation, monsieur le ministre. En effet, nous disposons d’un arsenal juridique complet et de dispositions législatives et réglementaires spécifiques permettant, en théorie, aux pouvoirs administratif et judiciaire de prévenir la menace terroriste. Or, en l’espèce, à la suite des appels à la haine, de la campagne mensongère et diffamatoire et du cyberharcèlement dont ce professeur a été victime, et bien que des protagonistes soient fichés « S », nos services auraient conclu qu’il n’y avait pas de risque. Et pourtant, Samuel Paty n’est plus !

En 2014, le Parlement a introduit dans le code pénal les délits de provocation à la commission d’actes terroristes et d’apologie du terrorisme, et créé l’infraction d’entreprise individuelle de terrorisme. Dès lors, ces infractions peuvent donner lieu à l’emploi de techniques spéciales d’enquête prévues par le code de procédure pénale. En 2015, nous avons élargi et encadré les moyens d’action de nos services de renseignement. Malheureusement, nous savons, depuis les attentats survenus la même année, que cela ne garantit en rien le risque zéro. Toutefois, l’enchaînement des actes conduisant à l’assassinat de Samuel Paty illustre dramatiquement le manque de moyens consacrés à la mise en œuvre des dispositions légales, moyens pourtant nécessaires pour réagir de manière adéquate aux signaux qui auraient dû alerter.

Aussi, monsieur le ministre, au-delà des effets d’annonce d’hier du Président de la République et du Gouvernement, de quels moyens concrets, humains et financiers, les pouvoirs publics seront-ils dotés afin de prévenir plus efficacement la commission de tels actes terroristes ?

Applaudissements sur les travées du groupe SER.

Debut de section - Permalien
Gérald Darmanin

Monsieur le sénateur, permettez-moi de ne pas être d’accord avec votre constat.

Vous évoquez la nécessité de moyens supplémentaires. Depuis qu’Emmanuel Macron est devenu Président de la République, les moyens financiers et humains des services de la direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) et du renseignement territorial ont été multipliés par deux. Le projet de budget proposé par M. le Premier ministre cette année prévoit encore d’affecter 330 personnes de plus aux seuls services de renseignement. Vous le savez bien, vous qui suivez ces questions, mais votre groupe, s’exprimant par votre voix et celle de Mme Conway-Mouret notamment, n’a pas souhaité voter les mesures permettant de renforcer les moyens.

Debut de section - Permalien
Gérald Darmanin

M. Gérald Darmanin, ministre. Monsieur le sénateur, ne vous énervez pas, j’explique !

Sourires sur quelques travées.

Debut de section - Permalien
Gérald Darmanin

Nous manquons de moyens légaux. La vidéo mise en ligne par ce père de famille dont le procureur a dit aujourd’hui qu’il était un complice de la commission de l’attentat n’aurait pu être retirée avec les lois de la République actuelles, car elle est insidieuse : elle n’appelle pas directement à l’assassinat. Il faut donc renforcer la loi sur ce point.

De même, monsieur le sénateur, je ne peux proposer au conseil des ministres la dissolution de certaines associations, à la demande du Président de la République, que parce qu’elles ont un lien direct avec le terrorisme. Il faut modifier notre droit afin que nous puissions aussi dissoudre des associations liées à l’islamisme politique. Tel est l’objet du projet de loi sur les séparatismes ; j’espère que vous le voterez.

Enfin, monsieur le sénateur, les échanges qui ont lieu via les réseaux sociaux seront toujours possibles si nous ne nous dotons pas, comme l’a très bien dit M. Malhuret, de moyens supplémentaires pour lutter contre la haine en ligne.

Oui, il faut plus de moyens, mais nous vous attendons pour changer la loi !

Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

M. le président. La parole est à M. Rémy Pointereau, pour le groupe Les Républicains.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Rémy Pointereau

Ma question s’adresse à Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales. Elle porte sur les zones de revitalisation rurale (ZRR).

Madame la ministre, le 26 novembre 2019, avec mes collègues corapporteurs Frédérique Espagnac et Bernard Delcros, nous vous avons remis notre rapport portant sur l’avenir des ZRR. L’une de nos principales recommandations était de proroger d’un an et demi, soit jusqu’au 31 décembre 2021, le dispositif actuel, afin de pouvoir réfléchir à la réforme des critères et aux mesures financières associées.

En réponse, vous nous avez opposé un refus, et proposé une prorogation de seulement six mois, jugeant que vous auriez, en si peu de temps, la possibilité de réformer l’ensemble des critères de classement. Vous deviez également vous inspirer du travail sénatorial.

Malheureusement, cette réforme n’a pas encore vu le jour, au point qu’aujourd’hui vous seriez prête, selon certaines informations, à proroger le système actuel jusqu’en 2022. Si cela est vrai, je m’en réjouis, mais je constate que le Sénat a de nouveau eu tort d’avoir raison trop tôt…

Madame la ministre, durant la campagne pour les élections sénatoriales, tous les élus concernés par les ZRR que j’ai rencontrés ont manifesté leur inquiétude quant à l’échéance du dispositif, prévue à la fin de l’année : comment peut-on parler d’un plan de relance, lequel contiendrait des mesures de relocalisation, alors que l’on s’apprête à réduire encore les ZRR, qui, comme on le sait, favorisent l’installation des entreprises dans les territoires les plus isolés ?

Confirmez-vous la prorogation du dispositif des ZRR jusqu’en 2022 ? Si oui, avez-vous élaboré un calendrier pour l’étude des critères ?

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Monsieur le sénateur Rémy Pointereau, je vous le confirme, le Premier ministre a décidé de prolonger les ZRR jusqu’en 2022.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Je l’ai dit la semaine dernière à l’Assemblée nationale, en réponse à une question d’actualité.

Je me souviens très bien du travail excellent que vous avez accompli avec Frédérique Espagnac et Bernard Delcros. Je vous rappelle que nous avions déjà maintenu dans le dispositif jusqu’à la fin de l’année les quelque 4 400 communes qui devaient en sortir au mois de juillet. Nous voulions en outre, comme vous le recommandiez dans votre rapport, qui soulignait le caractère complexe et insuffisamment ciblé des ZRR, et comme le demandaient les maires ruraux et le secrétaire d’État Joël Giraud, établir une géographie prioritaire de la ruralité plus ciblée. Cependant, le Premier ministre a jugé que nous n’aurions pas le temps de mettre en place un nouveau système, du fait notamment des conséquences très importantes de la crise de la covid. Je suppose que cette décision prise par le Premier ministre vous convient. Cela ne nous empêchera pas de continuer à travailler, comme nous avons commencé à le faire, notamment avec l’Insee, pour définir une nouvelle géographie de la ruralité dans les années qui viennent.

Applaudissements sur des travées du groupe UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Rémy Pointereau, pour la réplique.

Debut de section - PermalienPhoto de Rémy Pointereau

M. Rémy Pointereau. Madame la ministre, je me réjouis de la confirmation de cette annonce faite à l’Assemblée nationale. Je me félicite de ce que vous remettiez en route les travaux sur les ZRR, mais il faut absolument que le Sénat y soit associé, notre assemblée étant la maison des territoires.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

M. le président. La parole est à M. Olivier Cadic, pour le groupe Union Centriste.

Applaudissements sur les travées du groupe UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Olivier Cadic

Ma question à M. le ministre de l’Europe et des affaires étrangères porte sur les relations entre la Chine et l’Agence française de développement (AFD).

On connaît les réticences du Parlement, qui se demande si l’AFD n’a pas d’autres priorités que de prêter 250 millions d’euros à la Chine pour financer sa transition écologique. La semaine dernière, avec le concours du président Cambon, j’ai demandé au directeur général de l’AFD s’il n’était pas possible de redéployer ces prêts à la Chine vers le monde Indo-Pacifique, où la France a besoin d’accroître son influence. Je me faisais ainsi le relais des demandes des élus du Pacifique et de nos diplomates.

Le directeur de l’AFD s’est justifié par cette formule renversante : « Je gagne de l’argent en Chine ; mon salaire est payé par les Chinois. » Et de nous expliquer, geste circulaire à l’appui, que les Chinois achètent des obligations émises par l’AFD sur les marchés financiers, que cet argent retourne ensuite en Chine sous forme de prêts de l’AFD, celle-ci prenant une commission au passage… au risque de servir la stratégie d’influence du régime communiste chinois à l’international.

Cette situation de conflit d’intérêts est consternante. J’observe au quotidien les difficultés de nos entrepreneurs, qui se battent à l’international, et particulièrement en Afrique. Ils sont confrontés à des concurrents chinois utilisant des techniques commerciales interdites par notre droit.

Ce conflit d’intérêts a fait réagir, en particulier, nos collègues d’outre-mer Nassimah Dindar, de La Réunion, ou Gérard Poadja, de Nouvelle-Calédonie. Celui-ci m’a alerté sur le prêt controversé de l’AFD à la Nouvelle-Calédonie, la lourdeur des réformes fiscales qu’il impose et les conditions opaques de sa conclusion. Selon lui, si l’influence de la Chine dans cet organisme prêteur était avérée, cela ne serait pas neutre pour l’avenir d’une partie du territoire français stratégique pour la France comme pour la Chine.

Monsieur le ministre, la politique française d’aide au développement passe par l’AFD ; comment pouvez-vous garantir que cet organisme ne serve pas, malgré lui, d’autres intérêts que ceux de la France ? Quand le Parlement pourra-t-il disposer d’un rapport d’évaluation de la relation de l’AFD avec la Chine ?

Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur des travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. le ministre de l’Europe et des affaires étrangères.

Debut de section - Permalien
Jean-Yves Le Drian

Monsieur le sénateur Olivier Cadic, le directeur général de l’AFD pense avoir le sens de l’humour… De mon point de vue, sur un tel sujet et devant la commission des affaires étrangères et des forces armées du Sénat, la boutade n’était ni pertinente ni opportune. Je tenais à vous le dire.

Debut de section - Permalien
Jean-Yves Le Drian

Oui, l’AFD est présente en Chine, parce que c’est notre intérêt. Pour ne prendre que l’exemple de la lutte contre le changement climatique, il est dans notre intérêt stratégique et politique de bâtir des partenariats permettant d’orienter le premier émetteur de CO2 dans le monde vers la mise en place d’une économie bas carbone. Ne pas le faire affaiblirait notre posture. Nous agissons avec la Chine, sur ce point, pour lutter contre le dérèglement climatique. De surcroît, j’observe que cela présente des avantages pour les entreprises françaises, car l’intervention de l’AFD et de ses outils bancaires dans ce pays, sur ces sujets-là, permet de faire valoir leur expertise.

Je le répète, cette présence en Chine est dans notre intérêt. J’ajoute qu’il n’y a en aucun cas de subventions, la Chine ne recevant de la France que des prêts aux conditions du marché.

Cela étant, je suis tout à fait favorable à une présentation globale de notre présence en Chine sous différentes formes. La Chine est à la fois notre partenaire, notre concurrent et notre rival. Il nous faut décliner ces trois aspects avec beaucoup de vigilance, en faisant valoir en permanence nos intérêts et notre souveraineté. C’est ainsi que je conçois la relation avec la Chine, qui exige de la fermeté, de la transparence de la détermination.

M. François Patriat applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Stéphane Ravier, pour la réunion administrative des sénateurs ne figurant sur la liste d’aucun groupe.

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Ravier

Ma question s’adresse à M. le ministre de l’intérieur.

Monsieur le ministre, « la barbarie est à nos portes », a dit le ministre de la justice. Quelle inquiétante affirmation ! Pour vous, la barbarie ne serait qu’à nos portes, quand des gamins se font tirer dessus au Bataclan, quand des familles se font écraser à Nice, quand des passants se font poignarder, quand des profs sont décapités.

La réalité, c’est que les barbares sont là, parmi nous, et qu’en plus nous n’avons plus de porte à fermer. Mes chers collègues, de droite comme de gauche, vous avez supprimé toutes les barrières, toutes les frontières. Ce que vous appelez timidement le « désordre migratoire », qui est, en réalité, une anarchie, une déferlante migratoire, vous en êtes tous responsables, à droite peut-être davantage, car c’est Nicolas Sarkozy qui a aboli la double peine ; c’est lui qui entretenait les meilleurs rapports avec le Qatar ; c’est sous sa présidence que l’immigration a battu des records. Mes chers collègues de droite, vos coups de menton d’aujourd’hui sont aussi indécents qu’inaudibles.

Les terroristes profitent de notre générosité pour commettre leurs abominations. Le Bataclan : des migrants §à Marseille : un clandestin tunisien ; l’attaque de Romans-sur-Isère, en avril : un réfugié soudanais ; l’attaque de Charlie Hebdo, le mois dernier : un faux mineur isolé pakistanais ; l’assassinat d’un enseignant, la semaine dernière : un réfugié tchétchène. Chaque fois, c’est la même chose : la politique d’immigration anarchique tue des Français, des terroristes d’importation tuent des innocents, mais, dans la classe politique, c’est le grand silence. Impossible pour vous d’avouer que la politique d’immigration, loin d’être une chance, est un véritable fléau. Il faut pourtant la stopper, car elle coûte trop de vies à la France !

Vous avez épuisé votre crédit communication, monsieur le ministre : il s’agit désormais d’agir pour sauver des vies. Malgré les insultes et les violences, le mouvement national auquel j’appartiens vous alerte inlassablement depuis des décennies. Aujourd’hui, qu’il est douloureux d’avoir raison dans ces conditions ! Vous nous avez diffamés, diabolisés, haïs, pour, aujourd’hui, nous donner raison en tout.

Monsieur le ministre, allez-vous, oui ou non, stopper l’immigration et renvoyer dans leur pays ces centaines de milliers d’étrangers qui n’ont rien à faire chez nous ?

Debut de section - PermalienPhoto de Cécile Cukierman

Il y avait des Français parmi les assaillants du Bataclan !

Debut de section - Permalien
Gérald Darmanin

Monsieur le sénateur Ravier, le moment est trop grave pour polémiquer. Je ne vous répondrai pas sur le ton que vous avez employé : n’y voyez pas de la condescendance.

Vous évoquez des attentats, tous horribles, tous ignobles, tous commis au nom d’une idéologie : l’islamisme radical. Cependant, il est faux, monsieur le sénateur – je le dis devant une chambre qui représente la Nation française –, d’affirmer que seuls des étrangers ont commis ces actes. Parmi les auteurs des dix-neuf derniers attentats, soit tous ceux qui ont eu lieu depuis 2017, on comptait neuf étrangers et vingt-deux Français.

Debut de section - Permalien
Gérald Darmanin

Monsieur le sénateur, il faut bien sûr poser la question des étrangers en situation de radicalisation. Je partage l’opinion qu’il faut expulser du territoire national toute personne radicalisée qui trouble gravement l’ordre public et n’appartient pas à la Nation française. C’est évident ! Cependant, il n’en va pas toujours ainsi, pour diverses raisons : ce peut être manque de volonté, manque de moyens, ou parce qu’il est difficile, vous en conviendrez avec moi, d’expulser des personnes venues de pays en guerre, comme la Libye ou la Syrie.

Mais il y a aussi des Français nés en France, parfois issus d’une famille française ou devenue française depuis plus longtemps que la mienne, qui se sont convertis, sont allés en Syrie et en sont revenus pour commettre des attentats ignobles. Oui, il y a des étrangers radicalisés, mais éliminer les étrangers n’éliminera pas la radicalisation, monsieur le sénateur.

Applaudissements sur des travées des groupes RDPI, RDSE et UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Nous en avons terminé avec les questions d’actualité au Gouvernement.

Les prochaines questions d’actualité au Gouvernement auront lieu mercredi 28 octobre, à quinze heures.

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux quelques instants.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à seize heures trente, est reprise à seize heures quarante, sous la présidence de Mme Laurence Rossignol.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Rossignol

L’ordre du jour appelle le scrutin pour l’élection de six juges titulaires et de six juges suppléants à la Cour de justice de la République.

Il va être procédé, dans les conditions prévues par l’article 86 bis du règlement, au scrutin secret pour l’élection de six juges titulaires et de six juges suppléants à la Cour de justice de la République. Ce scrutin se déroulera dans la salle des Conférences ; la séance ne sera pas suspendue durant les opérations de vote.

J’invite chacune et chacun à veiller au respect des distances de sécurité en se rendant aux deux bureaux de vote, destinés l’un aux sénateurs dont les noms commencent par les lettres A à I, l’autre à ceux dont les noms commencent par les lettres J à Z.

Je rappelle que la majorité absolue des suffrages exprimés est requise pour être élu. Pour être valables, les bulletins ne peuvent comporter plus de six noms pour les juges titulaires et plus de six noms pour les suppléants.

Le nom de chaque titulaire doit être obligatoirement assorti du nom de son suppléant. En conséquence, la radiation de l’un des deux noms, soit celui du titulaire, soit celui du suppléant, entraîne la nullité du vote pour l’autre.

Une seule délégation de vote est admise par sénateur.

Je remercie nos collègues Victoire Jasmin et Jacques Grosperrin, secrétaires du Sénat, qui vont superviser ce scrutin.

Les juges titulaires et les juges suppléants à la Cour de justice de la République nouvellement élus seront immédiatement appelés à prêter serment devant le Sénat.

Je déclare ouvert le scrutin pour l’élection de six juges titulaires et de six juges suppléants à la Cour de justice de la République.

Il sera clos dans une demi-heure.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Rossignol

En application du cinquième alinéa de l’article 13 de la Constitution, ainsi que de la loi organique et de la loi du 23 juillet 2010 relatives à son application, la commission de la culture, de l’éducation et de la communication a émis, lors de sa réunion de ce jour, un avis défavorable – 3 voix pour, 25 voix contre – à la nomination de M. Thierry Coulhon à la présidence du Haut Conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Rossignol

J’informe le Sénat qu’ont été publiées des candidatures pour siéger au sein des commissions mixtes paritaires chargées d’élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne en matière économique et financière, du projet de loi organique relatif au Conseil économique, social et environnemental et de la proposition de loi relative au renforcement de l’inclusion dans l’emploi par l’activité économique et à l’expérimentation « territoires zéro chômeur de longue durée ».

Ces candidatures seront ratifiées si la présidence n’a pas reçu d’opposition dans le délai d’une heure prévu par notre règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Rossignol

L’ordre du jour appelle, à la demande du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants, la discussion de la proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale, relative à la déshérence des contrats de retraite supplémentaire (proposition n° 543 [2019-2020], texte de la commission n° 43, rapport n° 42).

Dans la discussion générale, la parole est à Mme la secrétaire d’État.

Debut de section - Permalien
Olivia Grégoire

Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, les Françaises et les Français qui ont atteint l’âge de la retraite s’endorment chaque soir sur une épargne de 5, 4 milliards d’euros. Ce serait une excellente nouvelle pour leur pouvoir d’achat s’il ne s’avérait que, pour la plupart d’entre eux, cette épargne demeure invisible, ignorée, inconnue. Même pour les bénéficiaires ayant atteint 70 ans, le problème demeure : l’encours des contrats d’épargne retraite non liquidés s’élève à pas moins de 1, 8 milliard d’euros.

Je n’ignore pas que notre littérature est friande de ces héritages miraculeux, qui attisent toutes les convoitises : c’est bien ce qui pousse le Tartuffe de Molière à conspirer dans la maison d’Orgon ; ce qui, à en croire Balzac, attire la bourgeoisie de Saumur auprès d’Eugénie Grandet ; ce qui explique enfin, chez Flaubert, la réussite sociale de Frédéric Moreau. Mais les fortunes dont nous parlons ici auraient profondément découragé nos plus grands écrivains, car il s’agit précisément de sommes qui ne trouvent en fin de compte ni propriétaire ni héritier.

Les milliards d’euros que représentent les encours des contrats d’épargne retraite supplémentaire non liquidés ne sont pas un pécule que des intrigants veulent s’arracher, mais bien au contraire une épargne que des hommes et des femmes ont construite par le travail, une épargne de sécurité dont le temps et la complexité des dispositifs ont toutefois effacé le souvenir.

Le cynisme pourrait laisser penser que c’est une bonne affaire pour l’État, qui se retrouve à terme le propriétaire de tous ces contrats en déshérence. Tel n’est évidemment pas mon point de vue, ni celui du Gouvernement, ni celui des assemblées : cette épargne constituée par le travail doit revenir aux travailleurs ; cette épargne constituée en vue de la retraite doit être utilisée au moment de la retraite. L’État n’est ni Tartuffe, ni Félix Grandet, ni Frédéric Moreau : il est au contraire un garant, un régulateur, un facilitateur.

Tous les assurés bénéficiaires d’une retraite supplémentaire doivent être clairement informés de ce que les assurances leur doivent. Cette démarche avait été amorcée dès 2014 pour les contrats d’assurance-vie et les comptes bancaires ; la proposition de loi que nous examinons aujourd’hui permettra de lever les derniers obstacles en matière de contrats d’épargne retraite supplémentaire, pour lesquels l’information a toujours été difficile à obtenir, de la part tant des gestionnaires que des bénéficiaires.

Les obstacles sont importants : non seulement ces contrats n’ont pas de terme, ce qui rend délicate la caractérisation de la déshérence, mais surtout le lien entre les gestionnaires et les bénéficiaires est souvent « distendu », pour reprendre l’expression du Comité consultatif du secteur financier (CCSF). En effet, les changements d’adresse, d’emploi ou de vie, ainsi que les contrats dénommés « article 39 » ou « article 83 », conclus à titre obligatoire par les entreprises, parfois sans que les bénéficiaires en aient conscience, sont autant de facteurs qui concourent à cette déshérence.

L’enjeu, pour nos concitoyens, est de rendre lisibles leurs encours de retraite supplémentaire, afin que cette épargne soit visible et surtout qu’ils puissent – espérons-le – en bénéficier en temps voulu.

Je salue très sincèrement le travail accompli par la représentation nationale sur ce texte, à commencer par celui du député Daniel Labaronne, qui a saisi le Comité consultatif du secteur financier, puis a été l’auteur et le rapporteur de cette proposition de loi à l’Assemblée nationale. Je veux remercier tout aussi sincèrement Mme Catherine Procaccia, rapporteur du texte au Sénat, ainsi que votre commission des affaires sociales, grâce à qui cette proposition de loi a gagné en efficacité et en rigueur. Nous sommes aujourd’hui en mesure d’aboutir à des dispositions non seulement utiles, mais également consensuelles.

Le Gouvernement ne présentera aucun amendement, car il approuve sans réserve l’équilibre trouvé au travers du texte. Un point seulement fait encore débat, mais je sais que M. Labaronne et Mme Procaccia ont eu, en responsabilité, des échanges constructifs visant à conserver le consensus qui entoure ce texte.

Les autres modifications apportées à la présente proposition de loi par la commission des affaires sociales sont pertinentes. Je le dis très clairement : le Gouvernement y souscrit totalement.

À l’article 1er, qui constitue le cœur du dispositif, la commission a renforcé le dispositif d’information sur les contrats d’épargne retraite supplémentaire ; il transitera par le site internet Info Retraite.

La mesure consiste à s’appuyer sur ce site, qui centralise et consolide déjà les informations sur les droits à la retraite de chaque personne pour les régimes obligatoires, de base et complémentaires. Il s’agit d’y ajouter l’information relative aux droits acquis aux termes de contrats d’épargne supplémentaire. Ainsi, chaque personne qui se connectera à ce site aura une vision consolidée de l’ensemble de ses droits à la retraite, qu’ils soient acquis dans les régimes obligatoires, de base ou complémentaires, ou par des versements sur les contrats d’épargne retraite supplémentaire. C’est un dispositif particulièrement efficace de lutte contre la déshérence des contrats.

Les échanges d’informations entre les gestionnaires des contrats de retraite et le groupement d’intérêt public (GIP) Union Retraite, qui gère le site Info Retraite, ont été précisés par la commission. En aval de la promulgation de la loi, une convention permettra de définir plus précisément les modalités d’échanges de données dans le cadre prévu, qui assure la protection des données personnelles.

L’article 2 prévoyait que le nouveau service d’information qui est au cœur de cette proposition de loi fasse l’objet d’une campagne de communication. Autant l’obligation de transfert des données et la prise en charge financière des entreprises gestionnaires relèvent strictement de la loi, autant les dispositions prévoyant une campagne de communication peuvent être envisagées, me semble-t-il, à un niveau infralégislatif. La position de la commission nous convient donc totalement. En outre, la publicité du service est déjà prévue à l’article 1er et il est plus que probable que la mise en œuvre de ce service bénéficie d’importantes retombées médiatiques qui contribueront également à son succès.

Nous sommes encore d’accord avec la suppression par votre commission de l’expérimentation de délégation de la recherche de bénéficiaires par la Caisse des dépôts et consignations à des cabinets de généalogie, expérimentation qui était initialement prévue à l’article 4. Le Gouvernement partage le constat des difficultés majeures posées par cette expérimentation.

Dans ces conditions, le Gouvernement apporte tout son soutien à cette proposition de loi et souhaite qu’elle puisse être promulguée dans les meilleurs délais pour permettre une mise en œuvre effective et rapide de son dispositif.

Lutter contre la déshérence des produits financiers, c’est renforcer le pouvoir d’achat en apportant aux retraités un complément auquel ils ont droit ; c’est renforcer la qualité du contrat en défendant l’idée qu’il doit être honoré ; c’est enfin, tout simplement, renforcer la protection des citoyens en les aidant à se repérer dans des dispositifs qui peuvent souvent s’avérer complexes. Qu’il soit régulateur, garant et facilitateur : voilà ce que les Françaises et les Français sont en droit d’attendre de l’État.

M. Alain Richard applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Rossignol

La parole est à Mme la présidente de la commission des affaires sociales, en remplacement de Mme Catherine Procaccia, rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Deroche

Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, je tiens tout d’abord à excuser Catherine Procaccia, rapporteur de la commission des affaires sociales, qui se trouve temporairement éloignée de nos travaux.

La proposition de loi que nous examinons vise à lutter contre la déshérence des contrats d’épargne retraite supplémentaire.

Ces produits de capitalisation sont souscrits par des entreprises au profit de leurs salariés, ou volontairement par des individus, comme c’est souvent le cas pour les professions libérales. Ils sont destinés à compléter les pensions des régimes de retraite obligatoires à la cessation de l’activité professionnelle. Les prestations sont versées sous forme de rente viagère, même si une sortie en capital est possible dans certains cas. Le souscripteur peut liquider son contrat à l’âge où il le souhaite, et non pas nécessairement au moment de son départ à la retraite.

Le risque de déshérence des contrats de retraite supplémentaire est bien identifié, notamment par l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR), qui a consacré un rapport à ce sujet en 2018. Elle estime à 10, 6 milliards d’euros le total des encours des contrats non liquidés passé l’âge de 62 ans ; ce montant s’élève encore à 5, 4 milliards d’euros passé 65 ans, mais à seulement 1, 8 milliard d’euros passé 70 ans.

Ces montants confirment que ni l’âge légal de la retraite ni l’âge effectif de départ ne sont celui de la liquidation du contrat de retraite supplémentaire, qui demeure un choix du souscripteur.

Aussi les contrats non liquidés ne doivent-ils pas nécessairement être regardés comme en situation de déshérence. Celle-ci devient plus probable si aucune liquidation n’a été sollicitée à un âge avancé ; elle n’est cependant pas certaine.

Il n’est donc pas possible d’identifier réellement le nombre de contrats en déshérence ni les montants en jeu. Selon la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees) du ministère des solidarités et de la santé, la retraite supplémentaire représentait, en 2018, 4, 5 % des cotisations, tous régimes confondus, obligatoires ou non, pour 2, 4 % des prestations. Ce sont donc des produits encore marginaux dans la construction de la retraite.

Les contrats à adhésion obligatoire, c’est-à-dire ceux qui sont souscrits par les entreprises pour le compte de leurs salariés, sont identifiés comme davantage susceptibles de tomber en déshérence. Les informations sur les salariés bénéficiaires sont parfois incomplètes ou dépassées ; il arrive même que le titulaire ignore qu’il détient un contrat.

La lutte contre la déshérence des contrats d’épargne retraite supplémentaire a déjà fait l’objet d’évolutions législatives récentes. La loi Pacte a fait entrer dans le champ de la loi du 13 juin 2014 relative aux comptes bancaires inactifs et aux contrats d’assurance-vie en déshérence, dite « loi Eckert », les contrats sans terme que sont souvent les contrats d’épargne retraite supplémentaire. En outre, la loi Sapin II a renforcé l’information des salariés sur les contrats d’épargne retraite supplémentaire au moment de leur départ à la retraite. Par ailleurs, les nombreux produits d’épargne retraite – plan d’épargne retraite populaire (PERP), plan d’épargne pour la retraite collectif (Perco), contrats dits « Madelin » et « article 39 » – doivent à terme s’éteindre au profit des nouveaux plans d’épargne retraite prévus par la loi Pacte.

L’initiative du présent texte revient à notre collègue député Daniel Labaronne, qui a cherché à traduire la recommandation émise par le Comité consultatif du secteur financier en réponse aux constats faits par l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution. Daniel Labaronne est lui-même membre du CCSF ; je sais son engagement sur ces sujets et sa volonté d’apporter des solutions rapides, concrètes et opérationnelles au problème de la déshérence des contrats d’épargne retraite supplémentaire. Je salue son travail en tant qu’auteur et que rapporteur de cette proposition de loi à l’Assemblée nationale.

La commission des affaires sociales du Sénat a souhaité préserver l’intention de l’auteur du texte et le cœur du dispositif proposé.

De nouvelles fonctionnalités seront donc bien mises en œuvre par le GIP Union Retraite en vue de renforcer l’information des bénéficiaires de contrats d’épargne retraite supplémentaire. Grâce à ces nouvelles dispositions, l’assuré qui consultera le site Info Retraite au titre de ses droits à la retraite obligatoire verra désormais s’afficher également les éventuels contrats d’épargne retraite supplémentaire dont il est bénéficiaire.

Le mécanisme proposé repose sur un répertoire créé à cet effet, dans lequel les gestionnaires de ces produits d’épargne retraite verseront des informations relatives aux contrats et à leurs souscripteurs. Le GIP Union Retraite sera chargé d’identifier les souscripteurs et de mettre à leur disposition, au moyen de son service en ligne, des informations sur les contrats détenus.

La démarche constructive que nous avons retenue s’est notamment concrétisée dans le travail réalisé par la commission sur l’article 1er de la proposition de loi.

Au nom de la clarté du dispositif, la commission a procédé au transfert au sein du code monétaire et financier des nouvelles dispositions proposées. Il nous semblait cohérent d’inscrire ces dispositions aux côtés des nouveaux plans d’épargne retraite et non au sein du code de la sécurité sociale, la retraite supplémentaire n’y ayant pas sa place.

Nous avons également souhaité renforcer les distinctions entre retraites obligatoires et supplémentaires sur le site Info Retraite, en dissociant le relevé de situation sur les droits à la retraite obligatoire et en prévoyant des mentions informatives renforcées.

Nous avons surtout voulu garantir l’efficacité de ce dispositif sans pour autant remettre en cause la protection des données personnelles ni le droit au respect de la vie privée.

La commission s’est ainsi attachée à encadrer les informations transmises par les gestionnaires au groupement : en seront exclues les données financières liées au contrat, dont il ne nous a semblé ni pertinent ni opportun de permettre la communication.

Elle a aussi estimé que le silence du texte sur un éventuel « sens retour » ne garantissait pas sa sécurité juridique ; nous avons donc prévu que les transmissions d’informations du groupement vers les gestionnaires seraient possibles, mais de manière proportionnée et limitative.

Il conviendra d’évaluer l’efficacité du schéma retenu dans ce texte et de déterminer si des données complémentaires seraient de nature à renforcer de manière substantielle ce dispositif.

Notre commission a supprimé l’article 4, qui prévoyait une expérimentation visant à confier à des généalogistes la recherche des bénéficiaires de contrats placés à la Caisse des dépôts et consignations.

Ce dispositif expérimental nous a paru comporter des lacunes juridiques. Il nous par ailleurs semblé que sa mise en œuvre conduirait à communiquer à ces acteurs des données personnelles et bancaires, ce que nous n’avons pas jugé souhaitable. En outre, il faut noter que la déshérence porte principalement sur de petites sommes et non sur de gros contrats, qui sont bien connus de leurs souscripteurs ; or un tel dispositif ne vise pas à résoudre un problème de masse sur des contrats peu rémunérateurs. Enfin, la Caisse des dépôts et consignations assure une mission d’information, et non de recherche de bénéficiaires, sur les contrats en déshérence dont les sommes lui sont transférées.

La commission a bien veillé à ce que le dispositif fonctionne, comme elle a également tenu à ce que ce texte, qui vise à renforcer l’information des bénéficiaires de contrats d’épargne retraite supplémentaire, n’ouvre pas la porte à une grande confusion entre la retraite obligatoire et l’épargne retraite. Aussi a-t-elle émis des avis défavorables sur les amendements visant à revenir sur les clarifications et encadrements qu’elle a pu apporter.

Le texte issu des travaux de la commission répond aux préoccupations et recommandations de l’ACPR. Équilibré, il permet la mise en œuvre opérationnelle du dispositif tout en garantissant sa finalité et son encadrement.

Soucieuse de parvenir à un accord avec son homologue de l’Assemblée nationale, notre rapporteur a proposé une solution de compromis sur un point de divergence à l’article 1er. Sur son initiative, la commission a adopté ce matin un amendement levant l’interdiction de transmission au GIP de données financières sur les contrats. Ces informations devront se limiter au strict nécessaire.

Considérant les derniers échanges, je suis optimiste sur le devenir de ce texte à l’Assemblée nationale. J’espère, comme nos collègues députés, que cette utile proposition de loi trouvera à s’appliquer rapidement.

Mes chers collègues, la commission des affaires sociales vous propose donc d’adopter ce texte dans la rédaction issue de ses travaux, modifiée par l’amendement du rapporteur que je vous soumettrai tout à l’heure.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Monique Lubin

Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, nous avons bien compris le sens de la proposition de loi relative à la déshérence des contrats d’épargne retraite supplémentaire. Insuffisamment avisés de l’épargne constituée en leur faveur, de nombreux assurés ont en effet pu délaisser leurs capitaux, qui demeurent en conséquence en déshérence au bilan des compagnies d’assurances.

Cette proposition de loi instaure plusieurs garde-fous pour prévenir le phénomène de déshérence des contrats d’épargne retraite supplémentaire, en offrant une meilleure information aux assurés. Elle a pour objet d’inciter les gestionnaires à communiquer toutes les informations qu’ils possèdent sur leurs clients au GIP Union Retraite. Elle a aussi pour finalité la mise en place par le GIP d’une campagne de communication, afin d’aiguiller les retraités vers le site Info Retraite ; ceux-ci pourront ainsi vérifier s’ils sont ou non bénéficiaires d’un contrat d’assurance retraite supplémentaire. Enfin, elle tend à inciter les entreprises à informer leurs salariés qu’ils sont bénéficiaires d’un contrat d’épargne retraite supplémentaire.

Il nous paraît évident que tout ce qui peut permettre aux personnes ayant souscrit un contrat de faire valoir leurs droits va dans le bon sens. Renforcer le droit à l’information de petits épargnants est une bonne chose. Cependant, il nous semble que beaucoup a déjà été fait sur le sujet. Il s’agit en effet ici de compléter les dispositions adoptées sous la majorité socialiste en 2014 et en 2016. L’enjeu était de taille : on recensait, en 2012, 1, 8 million de comptes inactifs, pour un encours de 1, 6 milliard d’euros.

Cette situation très insatisfaisante était notamment le fruit d’un environnement insuffisamment réglementé et contraignant. Les dispositions de ce qui deviendrait la loi Eckert du 13 juin 2014 ont ainsi plutôt fait l’unanimité : ce texte a notamment renforcé les obligations de recherche et d’information pesant sur les institutions financières proposant des contrats d’assurance-vie au profit des souscripteurs et des bénéficiaires de ces mêmes contrats. Ces dispositions ont été efficacement mises en œuvre, ce qui a permis de réduire progressivement le stock de contrats non liquidés.

Toutefois, des difficultés ont demeuré concernant les contrats d’épargne retraite supplémentaire non réclamés. Le fait que l’épargne retraite soit constituée de contrats dont l’échéance ne peut être déterminée à l’avance complique en effet les choses. Les assureurs rencontrent également de nombreux obstacles pour retrouver les titulaires des contrats : ils n’ont souvent que les coordonnées des entreprises qui employaient les épargnants. La connaissance imparfaite par les épargnants des droits qu’ils ont pu constituer tout au long de leur carrière est aussi une source de difficultés.

Pour résoudre ces problèmes, la loi Sapin II du 9 décembre 2016 impose aux assureurs qui proposent des contrats d’épargne retraite supplémentaire d’informer chaque année les assurés sur leurs droits. Cette loi dispose également que les assureurs doivent soumettre un rapport à l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution et au ministre de l’économie. Ce document doit indiquer le nombre et l’encours des contrats non liquidés, ainsi que les moyens mis en œuvre pour informer les adhérents.

Malgré toutes ces dispositions, des problèmes demeurent. Cela amène à s’interroger sur les contrats dont il est question aujourd’hui : les contrats d’épargne retraite supplémentaire facultative relèvent en effet, pour la majeure partie d’entre eux, d’une logique de capitalisation qui pourrait, dans l’esprit de certains, offrir une alternative au régime de retraite par répartition. Pourtant, certains de ces fonds sont dormants, les bénéficiaires ayant fini par oublier qu’ils avaient souscrit de tels contrats. L’efficience économique et sociale de ces derniers est donc sujette à caution.

Ces dispositifs d’épargne retraite sont peu fiables : la preuve en est la nécessité de légiférer sans cesse pour leur permettre de fonctionner correctement. La présente proposition de loi a donc pour objet de corriger des difficultés inhérentes à un système de retraite facultatif qui dysfonctionne.

C’est la raison pour laquelle je m’interroge sur l’intérêt du texte discuté aujourd’hui. Ne devrait-on pas plutôt se pencher sur la forme et le fond de ces contrats ? Nombre d’entre eux ne sont jamais réclamés et des sommes d’argent dormant ne profitent pas à ceux qui devraient en être les bénéficiaires. Dans le même temps, elles permettent de financer on ne sait quoi, on ne sait où. Pourquoi donc continuer à aménager le droit pour améliorer à la marge des produits financiers qui, de toute évidence, sont insatisfaisants ? Ne devrait-on pas plutôt choisir d’améliorer les régimes généraux, puisqu’il est question de financer les retraites ?

C’est ce questionnement de fond qui nous conduit à douter de l’opportunité de cette proposition de loi et qui détermine le choix du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain de s’abstenir.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Chasseing

Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, la proposition de loi que nous examinons vise à renforcer l’arsenal juridique disponible pour lutter contre la déshérence des contrats, à renforcer les droits des épargnants et leur pouvoir d’achat.

La loi Eckert du 13 juin 2014 relative aux comptes bancaires inactifs et aux contrats d’assurance-vie en déshérence était un premier pas en direction de la sécurisation des bénéficiaires et des ayants droit de ces contrats. Elle a permis de renforcer les obligations de recherche et d’information de ces derniers par les institutions. Pourtant, les contrats sans terme que sont les contrats d’épargne retraite supplémentaire ne sont pas couverts par ces dispositions ou le sont de façon partielle. Les difficultés à retrouver les ayants droit s’ajoutent à la méconnaissance par ces derniers de leurs droits.

Malgré les avancées apportées par les lois Sapin II et Pacte, l’accès à l’information des bénéficiaires et des ayants droit de ces contrats demeure un angle mort législatif que cette proposition de loi prévoit utilement de combler. Elle s’appuie, pour cela, sur les recommandations formulées par le Comité consultatif du secteur financier, ainsi que sur les rapports de la Cour des comptes et de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution, qui se sont saisies du problème.

L’ACPR estime le montant des liquidités ainsi bloquées inscrites au bilan des sociétés d’assurances à 13 milliards d’euros en 2018. Le risque de déshérence des contrats obligatoires est plus important encore, les salariés contractants n’ayant pas toujours connaissance, en pratique, de l’existence de ces contrats supplémentaires, qui concernent pourtant 4, 5 % des cotisations et 2, 4 % des prestations, comme l’a rappelé Mme Catherine Procaccia, rapporteur du texte.

Le dispositif proposé porte essentiellement sur le renforcement de l’information de l’assuré dispensée par le site internet Info Retraite, qui devra désormais faire mention des contrats d’épargne retraite supplémentaire dont bénéficie l’assuré. Le GIP Union Retraite disposera, à cette fin, de nouveaux répertoires centralisant les données des souscripteurs fournies par les gestionnaires du produit d’épargne retraite.

La commission des affaires sociales a apporté des modifications au texte initial, en prévoyant notamment un retour d’informations du GIP vers les gestionnaires, tout en préservant la vie privée et la protection des données personnelles des contractants. Mme le rapporteur a jugé opportun de supprimer les articles 2 et 4, l’article 2 étant désormais satisfait par la nouvelle écriture de l’article 1er, l’article 4 ne présentant pas de garanties juridiques suffisantes. Pourtant, l’idée de confier à des experts en généalogie la recherche des ayants droit nous paraissait intéressante.

En libérant ces liquidités, l’adoption de cette proposition de loi contribuera à redonner du pouvoir d’achat aux retraités. Elle s’inscrit dans la lutte contre le non-recours au droit. Je souhaite saluer le travail de Mme la députée Sophie Auconie, qui avait déposé une proposition de loi similaire au mois de décembre 2019. Elle a été discutée au mois de janvier 2020, avant d’être reprise, comme nous le savons.

Il ne s’agit pas d’un texte anecdotique : ces dispositions concernent 13 millions de Français qui disposent d’un contrat d’épargne retraite complémentaire, ouvrant droit à une rente moyenne de 195 euros par mois. Ce ne sont pas des sommes très importantes, mais elles contribuent à améliorer de façon significative le pouvoir d’achat des retraités touchant une pension modeste.

Chers collègues, les produits d’épargne retraite sont difficilement lisibles. Dans le cadre des contrats d’épargne retraite sans terme, la liquidation ne s’effectuant qu’après demande de l’assuré, les situations de déshérence sont nombreuses, en particulier lorsque la multiplicité des employeurs tout au long d’une carrière entraîne une multiplicité des contrats.

La présente proposition de loi s’attaque à la cause première de déshérence : le manque d’information des contractants et des ayants droit. Nous la soutenons.

Debut de section - PermalienPhoto de Raymonde Poncet Monge

Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, la proposition de loi relative à la déshérence des contrats de retraite supplémentaire aura davantage un rôle de prévention qu’un effet sensible de résolution du stock de contrats le plus ancien.

L’importance des montants en déshérence soulignait un des points de fragilité de ce troisième étage de retraite par capitalisation appelé à se développer à la suite des réformes successives des retraites, qui conduisent à une baisse tendancielle des revenus des retraités du régime général et complémentaire obligatoire, dans un mouvement de substitution plus que de complémentarité, que nous dénonçons par ailleurs.

Il convenait donc de rétablir la confiance dans ces produits, dont une partie des bénéficiaires ne faisaient pas valoir leurs droits, faute d’information ou parce que les organismes gestionnaires avaient perdu leur trace, ce qui souligne le défaut de fiabilité du système par capitalisation.

Le montant de 13 milliards d’euros d’encours en déshérence est souvent évoqué. Il est cependant calculé à l’âge légal de départ à la retraite, soit 62 ans – tout contrat non dénoué à cet âge est réputé en déshérence –, alors même que, en 2019, en excluant les départs anticipés, l’âge moyen de liquidation de la retraite était de 63, 5 ans. Cet âge ne fait d’ailleurs que reculer à la suite des réformes successives, puisqu’en 2010 il n’était que de 61, 5 ans.

Il conviendrait donc d’étudier l’état du stock à des âges ultérieurs, notamment à l’âge de la retraite à taux plein, pour cerner véritablement l’ampleur du problème, d’autant que, même si ce n’est pas exclusif, ces contrats ont surtout été prisés par certaines catégories de salariés, employés, techniciens et agents de maîtrise (ETAM) ou cadres, ces derniers partant plus tard à la retraite. Par ailleurs, il est possible de liquider sa retraite supplémentaire après son départ à la retraite, pour bénéficier d’une rente supérieure.

Remarquons par ailleurs que la déshérence concerne plutôt des contrats collectifs, qu’il conviendrait de différencier selon qu’ils sont à adhésion facultative ou à adhésion obligatoire. Pour ces derniers, peut-être faudrait-il ne plus permettre l’adhésion par défaut des salariés.

Ainsi, les encours des contrats de retraite supplémentaire non dénoués sont estimés à un peu plus de 5 milliards d’euros à 65 ans et à 1, 8 milliard d’euros à 70 ans, le risque de déshérence totale étant élevé à cet âge. Ce montant est loin des chiffres souvent évoqués, même s’il reste non négligeable.

Le texte de la commission des affaires sociales reprend l’obligation faite aux gestionnaires de ces produits d’épargne de transférer régulièrement leurs informations au groupement d’intérêt public Union Retraite. Il ne retient pas, en revanche, la mise en place d’une campagne de communication relative au site Info retraite par le GIP. Cela nous semble pourtant nécessaire, et non d’un niveau infralégislatif, pour permettre aux retraités de rechercher la trace d’éventuels contrats de retraite supplémentaire et, au-delà du problème de la déshérence, pour faire connaître cet outil.

Par ailleurs, si la proposition de loi améliore l’information des salariés sur les éventuels contrats de retraite supplémentaire à leur nom au moment de leur départ – c’est l’objet de l’article 3 –, il nous semble que, pour favoriser la connaissance par les salariés des contrats de retraite supplémentaire détenus, l’information doit être donnée sur le reçu pour solde de tout compte, comme retenu par l’Assemblée nationale et recommandé par le Comité consultatif du secteur financier.

En conclusion, nous ne pouvons que souscrire à des améliorations dans le recours aux droits conventionnels, nonobstant notre critique de la volonté de promouvoir ce type de produits d’épargne retraite par capitalisation et de l’affaiblissement de notre régime général et complémentaire obligatoire de retraite par répartition. Nous pensons par ailleurs que ces fonds en déshérence devraient, in fine, être versés au régime général des retraites, plutôt qu’au budget de l’État.

En définitive, le texte que nous examinons nous semble modifier sans grande valeur ajoutée celui qui est issu des travaux de l’Assemblée nationale : il paraît même moins complet sur les deux points que j’ai évoqués. Nous déterminerons notre vote à l’issue de la discussion.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Rossignol

Mes chers collègues, il est dix-sept heures quinze. Je déclare clos le scrutin pour l’élection de six juges titulaires et de six juges suppléants à la Cour de justice de la République.

Dans la suite de la discussion générale, la parole est à M. Dominique Théophile.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Théophile

Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, la proposition de loi relative à la déshérence des contrats de retraite supplémentaire que nous examinons cet après-midi a été adoptée à l’unanimité le 22 juin dernier à l’Assemblée nationale. Elle tend à répondre aux critiques de la Cour des comptes et de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution, qui ont pointé, en 2018 et en 2019, l’existence d’un capital non liquidé de plus de 10 milliards d’euros revenant aux assurés ayant atteint l’âge légal de départ à la retraite.

Le manque d’information est l’explication principale de cette situation. D’abord, les assurés n’ont pas toujours conscience de détenir un ou des contrats d’épargne retraite, notamment lorsqu’il s’agit de contrats collectifs à adhésion obligatoire souscrits au sein de l’entreprise. Ensuite, l’identification des assurés et de leurs ayants droit se révèle souvent difficile, les gestionnaires perdant parfois leur trace au gré des ruptures de contrat et des changements d’adresse.

Plusieurs lois régissent pourtant les obligations des assureurs en termes d’information et de paiement de leurs clients s’agissant des contrats d’assurance-vie, et donc d’épargne retraite. Toutefois, ni la loi Eckert de 2014, ni la loi Sapin II de 2016, ni même la loi Pacte adoptée l’année dernière ne s’attaquent précisément au problème de la déshérence de ces contrats de retraite.

Le présent texte apporte une première réponse, afin d’éviter que ce phénomène ne perdure. Il prévoit ainsi que les droits relatifs aux contrats de retraite supplémentaire soient mentionnés sur le portail Info Retraite, avec obligation pour les assureurs de transmettre annuellement au groupement d’intérêt public Union Retraite un relevé de situation pour chaque assuré.

L’article 1er prévoit en outre que cette communication se fasse aux frais des assureurs via une convention négociée. L’article 3 dispose par ailleurs que les entreprises informent, au travers du solde de tout compte, leurs salariés s’ils sont bénéficiaires d’un contrat d’assurance retraite supplémentaire. Ce texte a été partiellement modifié par la commission des affaires sociales, qui a souhaité mieux encadrer les échanges d’informations prévus entre le GIP Union Retraite et les gestionnaires.

Sans remettre en cause les apports de la commission, les membres du groupe RDPI ainsi que plusieurs de nos collègues proposent de revenir sur l’interdiction de transmission au GIP, par les gestionnaires, de données financières relatives aux contrats de retraite supplémentaire. Ces informations, à savoir le montant des contrats concernés, nous semblent en effet conditionner l’efficacité du dispositif. Les gestionnaires de produits et les associations de consommateurs se sont d’ailleurs accordés sur cette mesure dans le cadre des discussions menées au sein du Comité consultatif du secteur financier.

En outre, les craintes exprimées au regard de la protection des données ne nous semblent pas justifiées. Le décret d’application du présent article sera en effet examiné par la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL), qui vérifiera la proportionnalité entre la nature des données transmises et le caractère d’intérêt général de la mission.

Dans la perspective d’un vote conforme par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture, le groupe du Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants votera cette proposition de loi ainsi que l’amendement de compromis déposé ce matin par la rapporteure, Catherine Procaccia, dont nous saluons le travail de concertation. Nous regrettons qu’elle n’ait pu se joindre à nous aujourd’hui.

Enfin, je souhaite à Mme la secrétaire d’État la bienvenue parmi nous, puisque c’est la première fois qu’elle participe à nos travaux en séance publique.

Debut de section - PermalienPhoto de Véronique Guillotin

Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, chers collègues, alors que la survenue de l’épidémie de covid conduisait à l’ajournement, il y a quelques mois, des discussions relatives au grand projet de réforme des retraites voulu par le Président de la République, nous voici aujourd’hui amenés à examiner un texte sur la problématique des retraites supplémentaires.

Dans « retraite supplémentaire », il y a « retraite », et, bien que ce dispositif ne soit pas obligatoire par principe, il n’en demeure pas moins que son analyse pourrait relever d’une discussion générale sur notre système de retraites – ou plutôt nos systèmes de retraites. À cela s’ajoutent les amalgames entre retraite complémentaire, retraite supplémentaire, etc. Bref, les Français ne s’y retrouvent pas et, naturellement, les contrats en déshérence se multiplient.

Comme le rappelait notre rapporteur, cette proposition de loi intervient après la publication de deux rapports, l’un de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution, en 2018, l’autre de la Cour des comptes, en 2019, faisant état de plusieurs milliards d’euros d’encours de contrats de retraite supplémentaire non liquidés.

Si la déshérence ne peut pas toujours être confirmée, certains bénéficiaires souhaitant attendre avant de liquider leurs droits, elle est une réalité dans de nombreux cas, notamment pour les retraités de plus de 70 ans, dont l’encours des contrats non liquidés représente tout de même 1, 8 milliard d’euros. Autant d’argent dont nos aînés auraient pourtant grand besoin !

Partant de ce constat, les auteurs de la présente proposition de loi entendent compléter la loi Pacte votée au mois de mai 2019, qui apportait une première réponse à un écueil de la loi Eckert de 2014, laquelle ne traitait que des contrats assortis d’un terme explicite ou dont le bénéficiaire était décédé. Or les contrats de retraite supplémentaire n’ont pas de terme et prévoient en principe une sortie en rente viagère. Ils ne font donc pas l’objet de recherche de bénéficiaires et, si le décès de l’assuré reste inconnu de l’assureur, la créance n’est pas éteinte.

Afin de pallier le manque d’information des assurés, notamment lorsqu’ils quittent leur entreprise, la proposition de loi crée une obligation, pour l’employeur, d’informer le salarié sur son contrat de retraite supplémentaire au moment du solde de tout compte. Elle prévoit surtout des échanges d’informations entre les assureurs et le GIP Union Retraite, qui alimente le site Info Retraite. Désormais, les Français qui s’y connecteront pourront avoir connaissance de l’ensemble des contrats de retraite souscrits à leur nom tout au long de leur carrière.

Les amendements de notre rapporteur adoptés en commission apportent globalement des précisions utiles sur les informations transmises par les gestionnaires de contrats au GIP Union Retraite, afin que ne soient communiqués que les éléments indispensables, sur les informations présentées sur le site Info Retraite, afin de préciser que les contrats de retraite supplémentaire ne relèvent pas des régimes obligatoires, enfin sur un retour d’informations du GIP vers les gestionnaires, pour qu’ils aient connaissance du succès ou non de l’identification du souscripteur. Toutes ces avancées sont bienvenues.

Je regrette néanmoins la suppression de l’article 4, qui mettait en place une expérimentation visant à confier la recherche des bénéficiaires de contrats en déshérence à des organismes volontaires spécialisés dans la révélation de successions. Nous pourrions peut-être trouver un chemin permettant la recherche active des bénéficiaires, tout en garantissant la sécurité des données personnelles. C’est pourquoi j’ai cosigné l’amendement n° 6 de notre collègue Jocelyne Guidez. Toutefois, madame la secrétaire d’État, j’ai bien entendu vos arguments, comme ceux de notre rapporteur, sur la difficulté de mise en œuvre de cette expérimentation, sachant en outre ce point reste marginal au regard de l’objet du texte.

Dans l’attente d’une grande réforme des retraites, le groupe RDSE votera en faveur de cette proposition de loi, qui apporte une réponse à la problématique des contrats non liquidés. Rappelons que la retraite supplémentaire représente tout de même 4, 5 % des cotisations, tous régimes confondus. Dans un contexte de crise sanitaire et économique, la perte de ces prestations constitue, pour les assurés, une aberration à laquelle il nous faut remédier. Espérons que l’adoption de cette proposition de loi permettra d’assurer à nos concitoyens un accès effectif à l’ensemble de leurs droits.

Debut de section - PermalienPhoto de Fabien Gay

Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, je supplée ma collègue Laurence Cohen, qui vient d’être déclarée cas contact et qui, comme le protocole sanitaire l’exige, s’est mise à l’isolement le temps de se faire tester.

Je souhaite tout d’abord remercier Mme la rapporteure et Mme la présidente de la commission des affaires sociales du travail accompli.

D’après les chiffres de l’Insee, en France, à la fin de l’année 2018, près de 2, 6 millions de retraités devaient compléter leur pension du régime obligatoire par un contrat de retraite complémentaire, soit 13, 9 % de plus que l’année précédente. Cette évolution est symptomatique de l’affaiblissement des prestations acquises dans le régime obligatoire de retraites, qui conduit un nombre de plus en plus grand de nos concitoyennes et concitoyens à adhérer à des plans de retraite volontaire.

Dans ce contexte, cette proposition de loi visant à améliorer l’information aussi bien des personnes actives que des retraités sur les contrats d’épargne retraite supplémentaire dont ils auraient perdu la trace représente une avancée, même si l’on peut s’interroger sur l’identité de ses réels bénéficiaires : est-ce que ce sont les salariés et les retraités, qui pourront véritablement récupérer plus facilement l’argent placé depuis des années, ou les assureurs, dont l’obligation de rechercher les titulaires des contrats est transférée au groupement d’intérêt public Union Retraite ?

En 2014, la société Allianz s’est vu infliger une amende de 50 millions d’euros pour avoir tardé à retrouver les bénéficiaires de contrats d’assurance-vie non réclamés.

Debut de section - PermalienPhoto de Fabien Gay

Demain, les lourdes sanctions de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution ne devraient plus concerner les assureurs, grâce à cette proposition de loi.

Après la loi Eckert de 2014, qui s’attaquait à la problématique des comptes bancaires inactifs et des contrats d’assurance-vie en déshérence, après la loi Sapin II, qui a rendu obligatoire l’information des assurés au moment de leur départ à la retraite, après la loi Pacte, dont l’article 71 prévoyait la portabilité des contrats d’épargne retraite, ce texte franchit une nouvelle étape dans la lutte contre la déshérence. Selon l’ACPR, en 2018, l’encours des contrats d’épargne retraite supplémentaire non liquidés par leurs bénéficiaires de plus de 62 ans dépassait 13 milliards d’euros.

La déshérence concerne tout particulièrement les contrats collectifs à adhésion obligatoire souscrits directement par les entreprises, pour lesquels les assurés n’ont pas eu de contact direct avec l’assureur.

Lors des débats de 2013 sur la loi relative à la sécurisation de l’emploi, qui entérinait l’accord national interprofessionnel, notre groupe avait fortement critiqué la mise en place des complémentaires santé obligatoires dans les entreprises, pointant le manque d’information des salariés et le risque de réduction des prestations couvertes par la sécurité sociale.

De plus, l’évolution de l’organisation du travail conduit bon nombre de salariés à changer souvent d’emploi, ce qui entraîne la signature de nouveaux contrats collectifs obligatoires et rend illisibles, pour ces « polyassurés », leurs droits à la retraite.

Il faut y insister, si un droit sur l’information sur les plans d’épargne retraite supplémentaire existait déjà, les assureurs ne remplissaient pas leur mission, ce qui soulève indirectement la question de l’utilité réelle de ces plans qui, en réalité, affaiblissent le système de retraites obligatoire.

Enfin, même si la réforme des retraites a été mise en sommeil par le Président de la République pour le moment, elle constitue la toile de fond de ce débat, le Premier ministre répétant qu’elle sera reprise et achevée d’ici à la fin du quinquennat.

Si tel devait être le cas, faut-il rappeler que l’article 50 du projet de loi prévoyait que, dans un délai de dix-huit mois à compter de la promulgation du texte, la Caisse nationale de retraite universelle (CNRU) continuerait à assurer la mission d’information des bénéficiaires de contrats de retraite supplémentaire. Vous conviendrez, mes chers collègues, que cela réglerait en grande partie le problème de la déshérence des contrats d’épargne retraite supplémentaire.

Nous ne sommes pas dupes de la pratique, de plus en plus fréquente, qui consiste à faire adopter des projets gouvernementaux par la voie de propositions de loi, en ne traitant qu’un aspect particulier de la problématique.

Sous ces réserves, il nous semble néanmoins positif que les salariés soient mieux informés. Nous voterons donc ce texte, tout en rappelant que les montants placés sur les marchés financiers au travers de produits d’épargne retraite seraient mieux employés s’ils étaient utilisés pour augmenter les salaires dans notre pays.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Rossignol

Mme la présidente. La parole est à Mme Annick Jacquemet.

Applaudissements sur les travées du groupe UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Annick Jacquemet

Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, le texte que nous examinons aujourd’hui porte sur la lutte contre la déshérence des contrats de retraite supplémentaire. En préambule, je tiens à saluer la qualité du travail effectué par notre collègue rapporteur Catherine Procaccia.

Les auteurs de cette proposition de loi constatent que certains épargnants sont insuffisamment informés sur l’épargne qu’ils ont constituée ou que les entreprises dans lesquelles ils ont travaillé ont constituée pour eux sans toujours les en aviser. Ainsi, un nombre important d’assurés ont délaissé leurs capitaux, qui figurent donc en déshérence au bilan des compagnies d’assurances.

Alors que la loi Eckert de 2014 visait à résorber les comptes bancaires inactifs et les contrats d’assurance-vie en déshérence, les contrats de retraite supplémentaire, dont l’échéance n’est pas déterminée à l’avance, se trouvaient hors de son champ. En dépit d’importantes avancées permises par la loi Pacte, qui étend ces dispositions aux contrats sans terme, et par la loi Sapin II, visant à renforcer l’information des salariés sur les contrats de retraite supplémentaire, le phénomène de la déshérence persiste.

Ces nouvelles dispositions sont insuffisantes aux yeux de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution. Dans son dernier rapport, elle démontre que, à la fin de 2016, « les contrats de retraite supplémentaire à adhésion obligatoire ou facultative non liquidés passé l’âge de 62 ans représentent environ 10, 6 milliards d’euros […] et s’élèvent encore à 1, 8 milliard d’euros pour les assurés âgés de plus de 70 ans ».

Comme la Cour des comptes, qui a proposé différentes pistes de travail, le Comité consultatif du secteur financier s’est saisi de la question et a rendu un rapport en janvier dernier. L’objet du présent texte était de traduire ses recommandations afin d’apporter une solution à un double problème : l’incapacité des épargnants à faire valoir leurs droits et l’immobilisation des fonds en déshérence, d’autant plus regrettable dans le contexte de crise économique que nous connaissons.

À cet égard, la finalité du texte doit être avant tout de rationaliser les dispositions visant à lutter contre le phénomène de déshérence des produits d’épargne retraite. En effet, l’essentiel du dispositif repose sur la création d’une nouvelle fonctionnalité renforçant l’information de l’assuré : ce dernier pourra désormais consulter un nouveau relevé de situation récapitulant ses droits constitués au titre des contrats de retraite supplémentaire sur le service en ligne géré et financé par le groupement d’intérêt public Union Retraite.

Il nous semble que ce dispositif répondra aux attentes des gestionnaires qu’aux recommandations de l’ACPR et de la Cour des comptes. Cependant, la formulation retenue à l’Assemblée nationale nécessitant d’être nuancée, la commission y a apporté les rectifications nécessaires. En effet, il ne s’agit pas tant de consacrer un droit nouveau à l’information que de tenter de renforcer l’accès à l’information pour les épargnants.

Sur l’ensemble des points du texte, la commission des affaires sociales a apporté plusieurs correctifs bienvenus. Elle proposera d’ajuster encore le dispositif concernant la transmission au groupement par les gestionnaires de données financières sur les contrats de retraite supplémentaire.

Toutefois, nous regrettons que ces dispositions ne concernent que le flux. On peut douter de l’efficacité du dispositif d’information pour un épargnant déjà à la retraite qui ignore l’existence d’un contrat d’assurance souscrit à son nom et n’en sera informé que s’il accède au service en ligne du GIP Union Retraite. Notre rapporteur partage d’ailleurs ce point de vue.

Dans la version du texte adoptée en première lecture à l’Assemblée nationale, un article 4 nouveau tendait à résoudre le problème du stock. Cependant, la rédaction proposée soulevant de réelles questions de conformité constitutionnelle, notre commission l’a supprimé. Dès lors, nous formulons le vœu qu’une solution à ce problème puisse être trouvée dans le cadre de la navette parlementaire, avec le soutien des services du Gouvernement.

Alors que l’on s’apprête à créer une cinquième branche de la sécurité sociale et à examiner un projet de loi sur le grand âge et l’autonomie, nous ne pouvons faire l’économie d’une réflexion sur les moyens de permettre à nos aînés ayant capitalisé pour leur retraite de percevoir le fruit de leur épargne. Celle-ci pourrait être mise à contribution pour améliorer la prise en charge de leur éventuelle dépendance.

Même si certaines données tendent à démontrer que les montants en déshérence par bénéficiaire sont relativement faibles, il n’en demeure pas moins que les intéressés doivent pouvoir être retrouvés. J’ajoute que ces près de 2 milliards d’euros seraient les bienvenus pour alimenter la relance de l’économie.

En conclusion, le groupe Union Centriste votera cette proposition de loi.

Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur des travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Rossignol

Mme la présidente. La parole est à M. Guillaume Chevrollier.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Guillaume Chevrollier

Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, selon un rapport de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution, l’encours total du stock de contrats non réclamés souscrits par des assurés ayant atteint l’âge de 62 ans représentait 13 milliards d’euros en 2018.

Dans son rapport annuel de 2019, la Cour des comptes avait elle aussi alerté sur l’accélération du phénomène de déshérence, les stocks de contrats non liquidés augmentant avec l’ancienneté des contrats.

La somme en jeu est importante. Elle révèle qu’une partie non négligeable de l’épargne constituée par les Français est concernée par la déshérence. Un actif est dit « en déshérence » lorsqu’il n’est pas possible d’en identifier le propriétaire ou lorsque les épargnants sont dans l’incapacité de faire valoir leurs droits. Les actifs concernés sont alors devenus « orphelins » ; ils représentent aujourd’hui 13 milliards d’euros.

Cette situation est d’autant plus inacceptable et préoccupante que nombre de retraités ont vu leur pouvoir d’achat diminuer du fait de la hausse de la CSG et de la sous-indexation des pensions de retraite. Elle n’est pas juste, car, alors que les victimes de ce phénomène ont parfois versé des primes d’assurance toute leur vie, elles ne peuvent bénéficier des droits acquis.

L’ampleur du phénomène et la crise sociale conjoncturelle doivent nous pousser à agir. C’est pourquoi je remercie notre collègue Catherine Procaccia, rapporteur de cette proposition de loi, pour le travail qu’elle a fourni, ainsi que tous ceux qui ont contribué à l’amélioration de ce texte.

Cette proposition de loi est bienvenue, car elle améliorera le quotidien de nos concitoyens, ce qui n’est pas chose courante. La retraite est le fruit de toute une vie de travail. Sa préparation est un sujet d’importance : il y va de l’avenir de nos aînés, ainsi que de la prise en charge de la dépendance.

Notre responsabilité est de rendre notre système de retraites plus lisible, plus juste : il faut être clair avec nos concitoyens. Le cadre juridique visant à renforcer l’information sur les produits d’épargne retraite et à prévenir la déshérence de ceux-ci avait déjà été consolidé par la loi Pacte, la loi Eckert et les dispositions de la loi Sapin II prévoyant l’information systématique sur l’âge de la retraite. Toutefois, aucune solution n’avait encore émergé pour prévenir et limiter de manière systématique le phénomène de la déshérence.

Cette proposition de loi vise donc à répondre à deux défis auxquels sont confrontés nombre de nos concitoyens : renforcer l’information des assurés et diminuer le nombre des contrats non réclamés.

L’épargne retraite, composée de nombreux produits, peut parfois être inintelligible et ressembler à un véritable maquis. Afin de renforcer l’information des bénéficiaires, la proposition de loi prévoit de confier une nouvelle mission d’information à un groupement d’intérêt public, Union Retraite. Ce groupement mettrait à la disposition des assurés des informations relatives à l’existence des contrats de retraite supplémentaire qu’ils détiennent ou qu’ils sont susceptibles de détenir. Pour ce faire, un répertoire sera créé, au sein duquel les gestionnaires de produits d’épargne retraite supplémentaire verseront des informations concernant les bénéficiaires des contrats. Le groupement indiquera ainsi à l’assuré, au travers du site Info retraite, l’existence du ou des produits souscrits à son nom. Le compte retraite individuel numérique, accessible via le portail Info retraite, sera ainsi enrichi des informations sur les régimes de retraite supplémentaire. Les professionnels chargés de gérer les plans d’épargne retraite devront assurer la prise en charge de ce service en ligne.

Permettez-moi, à cet instant, un aparté sur l’illectronisme. Une mission d’information sénatoriale sur ce sujet a publié très récemment un rapport qui révèle que la dématérialisation généralisée des services publics laisse trois Français sur cinq sur le bord de la route, tant les démarches administratives en ligne sont complexes. Au moins 14 millions de Français ne maîtrisent pas les usages du numérique. C’est plus particulièrement le cas des retraités. Attention donc, madame la secrétaire d’État, à cette fracture numérique, qui est une réalité. Peut-être faudrait-il prévoir davantage de formation, notamment pour accompagner les retraités.

Enfin, je salue la volonté de la commission des affaires sociales de veiller à la protection des données personnelles afin de garantir à l’assuré le respect de sa vie privée.

Le système, tel qu’il a été pensé, permettra sans aucun doute de lutter contre la déshérence des contrats. C’est pourquoi je voterai cette proposition de loi.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Segouin

Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, « un bon croquis vaut mieux qu’un long discours », disait Napoléon. Ne pouvant vous faire un dessin, je vous raconterai une courte histoire, qui vous permettra de comprendre tout l’enjeu de la présente proposition de loi.

Cette histoire se déroule dans un merveilleux département choisi au hasard, l’Orne. §À l’âge de 45 ans, Marguerite a eu l’occasion de s’installer à son compte et elle est devenue chef d’entreprise. Mais, au terme d’une vie de travail et à la veille d’une retraite bien méritée, notre pauvre Marguerite décède, victime d’un accident…

Commence alors un parcours du combattant pour Aristide, l’époux de Marguerite.

Rires.

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Segouin

Aristide entame des démarches afin de savoir s’il peut bénéficier d’une pension de réversion au titre de la retraite supplémentaire de sa défunte Marguerite. Mais comment faire ? Marguerite est passée par plusieurs entreprises, dont la plupart n’existent plus aujourd’hui. Dans sa vie, elle a changé trois fois de nom. En outre, en plus d’avoir souscrit des contrats sous différents noms, elle a cotisé auprès de plusieurs compagnies d’assurances, dont certaines n’existent plus ou ont été rachetées. Aristide n’a d’autre solution que de rassembler tous les bulletins de salaire de son épouse afin d’établir le détail des versements.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurent Duplomb

M. Laurent Duplomb. Heureusement qu’il est brillant !

Rires.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Segouin

Vous imaginez bien que, compte tenu de ce qu’a été la vie de sa femme et du fait qu’il ne connaît pas l’entièreté de son parcours, Aristide ne parviendra malheureusement pas à remettre la main sur les bulletins de salaire de Marguerite, définitivement perdus.

Qu’est donc devenue l’épargne de Marguerite ? On voit bien qu’il peut s’avérer très complexe de retracer le parcours d’un salarié et qu’il est difficile, pour les entreprises comme pour les salariés et les assureurs, de rassembler toutes les pièces et de retrouver les preuves de toutes les cotisations versées au cours d’une vie professionnelle.

L’assureur de la première société dans laquelle Marguerite a travaillé, il y a plus de trente ans, la connaît sous son nom de jeune fille, alors qu’elle a changé trois fois de nom par la suite. Établir l’historique des données est donc une difficulté très difficile à surmonter pour que pour les assureurs puissent remonter jusqu’au bénéficiaire et verser les prestations.

De même, il est parfois difficile, pour un assuré, de savoir s’il a cotisé à une retraite supplémentaire, quand son entreprise a souscrit le contrat sans lui en exposer les conditions. Un salarié peut ainsi perdre le bénéfice de son capital si la société n’existe plus, si elle a changé à plusieurs reprises d’assureur ou si elle a cotisé auprès d’assureurs qui n’existent plus.

Cette situation, bien réelle, explique pourquoi l’encours des contrats en déshérence à l’âge de 70 ans s’élève aujourd’hui au montant énorme de 1, 8 milliard d’euros. La déshérence résulte non pas de la mauvaise volonté des assureurs, comme certains voudraient le faire accroire, mais des parcours complexes que je viens de décrire.

Les assureurs n’ont pas intérêt à avoir des contrats en déshérence, car cela est synonyme d’argent bloqué, transféré à la Caisse des dépôts et consignations. Cet argent ne profite donc pas à l’économie. La situation est rendue complexe par l’absence de suivi du bénéficiaire et de sa situation familiale au cours de sa vie ; cette complexité tient aussi au fait que la date de départ à la retraite n’est jamais clairement définie.

La présente proposition de loi prévoit donc tout simplement que le gestionnaire du contrat informera le GIP Union Retraite lors de la souscription. Ce site permet aujourd’hui à un salarié de retracer sa carrière, d’estimer le montant de sa retraite de base et de sa retraite complémentaire obligatoire, avec un recoupement des cotisations aux différentes caisses. Je vous encourage d’ailleurs, mes chers collègues, à le consulter, afin de pouvoir mesurer sa simplicité d’utilisation et son efficacité.

Au travers du texte que nous examinons aujourd’hui, nous proposons également d’ajouter à la synthèse effectuée par le GIP Union Retraite la part de retraite complémentaire, relevant du dispositif « article 83 » ou de celui de la loi Madelin, entre autres. Il est aussi proposé que le solde de tout compte récapitule les garanties et les droits acquis, comme la réversion, pour les contrats qui seront dorénavant conclus.

Cette proposition de loi apportera donc une grande simplification et beaucoup de transparence, au bénéfice des entreprises, des assureurs et, surtout, des salariés. Ces derniers pourront connaître en un « clic » tout l’historique de leurs cotisations à un contrat d’assurance retraite supplémentaire.

Si le dispositif de l’article 1er permettra de réduire le nombre de contrats en déshérence, celui de l’article 3 ne réglera pas le problème pour les contrats de retraite surcomplémentaire non liquidés. La loi Eckert ayant permis des évolutions pour les contrats d’assurance-vie, il serait utile, comme tend à le prévoir l’amendement de notre collègue Savary, d’étendre ses dispositions aux sur-retraites. Il est temps, aujourd’hui, de régler cette question afin que les assurés puissent bénéficier de l’épargne qu’ils ont constituée au cours de leur vie active.

Ce texte allant dans son ensemble en ce sens, j’y suis favorable. Il importe vraiment d’endiguer le phénomène de la déshérence des contrats de retraite supplémentaire.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Rossignol

La discussion générale est close.

Nous passons à l’examen du texte de la commission.

TITRE Ier

(Division et intitulé supprimés)

I. – Après l’article L. 224-7 du code monétaire et financier, il est inséré un article L. 224-7-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 224 -7 -1. – Toute personne bénéficie gratuitement d’informations relatives aux produits d’épargne retraite auxquels elle a souscrit au cours de sa vie. Le service en ligne mentionné au III de l’article L. 161-17 du code de la sécurité sociale donne accès à tout moment à ces informations. Il est créé un répertoire consacré à la gestion de ces informations, qui sont mises à disposition par les gestionnaires dans les conditions prévues à l’article L. 132-9-6 du code des assurances, à l’article L. 223-10-5 du code de la mutualité et à l’article L. 312-21-1 du présent code. Ces informations, qui peuvent comprendre les références et la nature des produits ainsi que la désignation et les coordonnés des gestionnaires des contrats, ne peuvent contenir de données financières relatives aux droits constitués auxquels le souscripteur des produits est susceptible d’être éligible.

« Les informations mentionnées au premier alinéa du présent article ne peuvent figurer au sein du relevé de situation personnelle prévu au III de l’article L. 161-17 du code de la sécurité sociale. Lors de la mise à disposition des informations, le service en ligne mentionné au même III indique de manière claire au souscripteur que les produits dont l’existence lui est notifiée en vertu des dispositions du premier alinéa ne relèvent pas de régimes de retraite légalement obligatoires.

« Dans le cas où le traitement des informations transmises par les gestionnaires au groupement mentionné au premier alinéa de l’article L. 161-17-1 du code de la sécurité sociale ne permet pas de déterminer avec certitude l’identité du souscripteur d’un produit d’épargne retraite et si plusieurs souscripteurs potentiels ont pu être identifiés pour ce même produit, le groupement précité peut notifier aux souscripteurs potentiels l’existence de droits éventuels constitués en leur faveur au titre de l’épargne retraite. Cette notification s’effectue au moyen du service en ligne mentionné au III de l’article L. 161-17 du même code.

« Les gestionnaires assurent le financement des moyens nécessaires au développement, au fonctionnement et à la publicité des dispositions prévues au présent article, dans les conditions prévues par une convention conclue entre le groupement mentionné au premier alinéa de l’article L. 161-17-1 du code de la sécurité sociale et les représentants professionnels de ces gestionnaires. Cette convention précise également la nature des informations adressées au groupement ainsi que les modalités d’échanges avec les gestionnaires.

« Le groupement mentionné au même premier alinéa peut notifier périodiquement aux gestionnaires le succès ou l’échec d’identification du souscripteur ainsi que l’accès de celui-ci au service en ligne mentionné au III de l’article L. 161-17 du même code au cours des douze derniers mois. Cette notification peut s’effectuer au moyen du répertoire mentionné au premier alinéa du présent article. Il n’est pas autorisé à communiquer d’autres informations concernant le souscripteur identifié.

« Les gestionnaires concernés par le présent article sont les entreprises d’assurance, les mutuelles ou unions, les institutions de prévoyance ou unions, les organismes de retraite professionnelle supplémentaire, les établissements de crédit, les entreprises d’investissement ou les établissements habilités pour les activités de conservation ou d’administration d’instruments financiers.

« Un décret en Conseil d’État définit la liste des produits d’épargne retraite concernés, outre les produits mentionnés à l’article L. 224-1 du présent code. »

I bis. – L’article L. 224-7-1 du code monétaire et financier entre en vigueur à une date fixée par décret, et au plus tard dix-huit mois après la promulgation de la présente loi.

II. – Après le deuxième alinéa de l’article L. 161-17-1 du code de la sécurité sociale, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« L’union assure le pilotage et la mise en œuvre des dispositions de l’article L. 224-7-1 du code monétaire et financier. Elle peut percevoir des recettes correspondant à des prestations facturées aux représentants professionnels des gestionnaires de produits d’épargne retraite en application du même article L. 224-7-1. »

III. –

Supprimé

IV. – Après l’article L. 132-9-5 du code des assurances, il est inséré un article L. 132-9-6 ainsi rédigé :

« Art. L. 132 -9 -6. – Les entreprises d’assurance adressent par voie électronique au moins une fois par an au groupement mentionné au premier alinéa de l’article L. 161-17-1 du code de la sécurité sociale les informations nécessaires à la mise en œuvre des dispositions de l’article L. 224-7-1 du code monétaire et financier. »

V. – Après l’article L. 223-10-4 du code de la mutualité, il est inséré un article L. 223-10-5 ainsi rédigé :

« Art. L. 223 -10 -5. – Les mutuelles et unions adressent par voie électronique au moins une fois par an au groupement mentionné au premier alinéa de l’article L. 161-17-1 du code de la sécurité sociale les informations nécessaires à la mise en œuvre des dispositions de l’article L. 224-7-1 du code monétaire et financier. »

VI. – Le livre III du code monétaire et financier est ainsi modifié :

1° La section 4 du chapitre II du titre Ier est complétée par un article L. 312-21-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 312 -21 -1. – Les établissements de crédit mentionnés au titre Ier du livre V du présent code adressent par voie électronique au moins une fois par an au groupement mentionné au premier alinéa de l’article L. 161-17-1 du code de la sécurité sociale les informations nécessaires à la mise en œuvre des dispositions de l’article L. 224-7-1 du présent code. » ;

2° À l’article L. 321-4, la référence : « et L. 312-20 » est remplacée par les références : «, L. 312-20 et L. 312-21-1 ».

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Rossignol

Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 1 rectifié quater, présenté par MM. Lévrier, Théophile, Iacovelli, Patriat, Bargeton, Buis, Dennemont, Gattolin et Hassani, Mme Havet, MM. Haye, Kulimoetoke, Marchand, Mohamed Soilihi et Patient, Mme Phinera-Horth, MM. Rambaud, Richard et Rohfritsch, Mme Schillinger, MM. Yung, de Belenet, Cadic et Chasseing, Mme Dindar et MM. Laménie, Levi, Maurey et Pellevat, est ainsi libellé :

Alinéa 2, dernière phrase

Supprimer cette phrase.

La parole est à M. Dominique Théophile.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Théophile

Cet amendement vise à revenir sur les restrictions introduites à l’article 1er concernant les informations susceptibles d’être transmises au groupement d’intérêt public Union Retraite par les gestionnaires de contrats, et donc de figurer sur le site Info retraite.

La transmission de données financières, c’est-à-dire en l’espèce du montant des contrats, nous paraît essentielle au bon fonctionnement du dispositif. Une information complète et facilement accessible permettra en effet aux bénéficiaires de juger en toute connaissance de cause s’il leur est utile d’entreprendre des démarches.

Ce partage d’informations sera par ailleurs encadré. Le décret d’application de l’article 1er sera examiné par la CNIL, qui vérifiera la proportionnalité entre la nature des données transmises et le caractère d’intérêt général de la mission.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Rossignol

L’amendement n° 7, présenté par Mme Procaccia, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Alinéa 2, dernière phrase

Rédiger ainsi cette phrase :

Ces informations peuvent comprendre les références et la nature des produits ainsi que la désignation et les coordonnées des gestionnaires des contrats.

La parole est à Mme la présidente de la commission, pour présenter l’amendement n° 7 et donner l’avis de la commission sur l’amendement n° 1 rectifié quater.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Deroche

L’amendement n° 1 rectifié quater vise à lever l’interdiction, pour les gestionnaires, de transmettre au GIP des données financières sur les contrats de retraite supplémentaire.

Ainsi, le texte n’interdira plus la communication de données financières : celles-ci pourront faire partie des informations transmises, si et seulement si les gestionnaires y voient un intérêt et décident de l’inscrire dans la convention prévue à l’alinéa 5 de ce même article 1er. Le partage de ces données doit être limité au strict nécessaire.

Je demande cependant le retrait de l’amendement présenté par M. Théophile au profit de celui qu’a déposé Mme Procaccia et qui a été adopté ce matin en commission. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Rossignol

Quel est l’avis du Gouvernement sur les deux amendements ?

Debut de section - Permalien
Olivia Grégoire

Ces amendements vont dans le même sens. Le premier tend à prévoir la suppression pure et simple du dispositif, le second à l’aménager et à l’assouplir.

Je demande le retrait de l’amendement défendu par M. Théophile, au profit de celui de Mme la rapporteure, qui est le fruit d’un compromis, que je salue, avec son homologue Daniel Labaronne de l’Assemblée nationale. Il s’agit d’une demande de retrait constructive !

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Théophile

Alors que la déshérence des contrats de retraite supplémentaire concerne un grand nombre de nos concitoyens et que l’encours du stock des contrats non liquidés atteint plus de 10 milliards d’euros, il est important que le Parlement apporte une réponse efficace.

Les explications du Gouvernement et de la rapporteure me paraissant convaincantes, je retire cet amendement, en me félicitant du compromis trouvé.

L ’ amendement est adopté.

L ’ article 1 er est adopté.

(Supprimé)

(Non modifié)

Le premier alinéa de l’article L. 3341-7 du code du travail est complété par les mots : « ainsi que dans le cadre d’un régime de retraite supplémentaire mentionné au 2° de l’article 83 du code général des impôts, d’un dispositif de retraite à prestations définies répondant aux caractéristiques des régimes mentionnés aux articles L. 137-11 et L. 137-11-2 du code de la sécurité sociale ou d’un régime supplémentaire de retraite dont les cotisations sont assujetties à l’impôt sur le revenu dans le cadre de l’article 82 du code général des impôts ». –

Adopté.

(Supprimé)

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Rossignol

Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 6 rectifié quater, présenté par Mmes Guidez, Jacquemet et Sollogoub, M. Henno et Mme Guillotin, est ainsi libellé :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

À titre expérimental, pour une durée de deux ans à compter de la publication de la présente loi, la recherche des bénéficiaires des encours de contrats d’assurance-vie ou de contrats de retraite supplémentaire en déshérence placés à la Caisse des dépôts et consignations peut être confiée à des organismes volontaires spécialisés dans la révélation de succession. La liste et les conditions de rémunération de ces organismes, le seuil d’encours des contrats concernés et le nombre minimum de dossiers confiés sont fixés par voie réglementaire.

Les conditions dans lesquelles les organismes visés au premier alinéa peuvent obtenir des éléments d’information et des données à caractère personnel sont fixées par voie réglementaire, dans le respect des dispositions de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés.

Au plus tard six mois après la fin de cette expérimentation, le Gouvernement remet au Parlement un rapport pour juger de l’opportunité de généraliser ce dispositif.

La parole est à Mme Jocelyne Guidez.

Debut de section - PermalienPhoto de Jocelyne Guidez

Cet amendement vise à résoudre le problème du stock des contrats en déshérence, qu’il s’agisse de contrats d’assurance-vie ou de retraite supplémentaire.

Ces deux produits d’épargne peuvent être souscrits afin de compléter la retraite de base des bénéficiaires. Toutefois, il arrive que ces contrats ne soient pas liquidés. Les assureurs ont parfois des difficultés à retrouver les bénéficiaires, leurs héritiers ou encore les bénéficiaires désignés des contrats d’assurance-vie. Dès lors, ces contrats sont transférés à la Caisse des dépôts et consignations, au motif de vaines recherches.

Cet amendement tend donc à prévoir une expérimentation, en permettant le recours aux services de généalogistes professionnels pour identifier les bénéficiaires.

Mes chers collègues, nous parlons ici de près de 7 milliards d’euros d’épargne en déshérence : 5 milliards d’euros au titre des contrats d’assurance-vie et 1, 8 milliard d’euros au titre des contrats de retraite supplémentaire. Dans le contexte du plan de relance, ces 7 milliards ne seraient-ils pas plus utiles à notre économie s’ils étaient débloqués ? La règle devrait être celle de l’identification des bénéficiaires. Cette expérimentation permettrait d’atteindre cet objectif.

Par ailleurs, si l’existence de difficultés juridiques était démontrée, il me paraîtrait néanmoins opportun d’adopter cette disposition, afin de permettre au Gouvernement de travailler en deuxième lecture à sa sécurisation avec les parlementaires, en comptant sur la bienveillante contribution des services de l’État. Je note d’ailleurs, madame la secrétaire d’État, que le Gouvernement avait retiré son amendement de suppression de l’article 4 avant la séance publique à l’Assemblée nationale.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Rossignol

L’amendement n° 4 rectifié bis, présenté par MM. Savary et Belin, Mmes Berthet et Bonfanti-Dossat, MM. Bonne, Bouchet, Brisson et Calvet, Mme Canayer, M. Cardoux, Mme Chauvin, M. Courtial, Mme L. Darcos, M. Daubresse, Mmes Delmont-Koropoulis, Deromedi, Deseyne et Di Folco, MM. B. Fournier et Grand, Mme Gruny, M. Husson, Mme Imbert, MM. Karoutchi, Klinger et Laménie, Mme Lassarade, MM. D. Laurent, Lefèvre et H. Leroy, Mmes Lherbier, M. Mercier et Micouleau, MM. Milon, Mouiller, Paccaud et Piednoir, Mmes Raimond-Pavero et Richer et MM. Savin, Segouin, Sol, Somon et Vogel, est ainsi libellé :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

À titre expérimental, pour une durée de deux ans à compter de la publication de la présente loi, la recherche des bénéficiaires des encours de contrats de retraite supplémentaire en déshérence placés à la Caisse des dépôts et consignations peut être confiée à des organismes volontaires spécialisés dans la révélation de succession. La liste et les conditions de rémunération de ces organismes, le seuil d’encours des contrats concernés et le nombre minimum de dossiers confiés sont fixés par voie réglementaire.

Les conditions dans lesquelles les organismes visés au premier alinéa peuvent obtenir des éléments d’information et des données à caractère personnel sont fixées par voie réglementaire, dans le respect des dispositions de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés.

Au plus tard six mois après la fin de cette expérimentation, le Gouvernement remet au Parlement un rapport pour juger de l’opportunité de généraliser ce dispositif.

La parole est à M. René-Paul Savary.

Debut de section - PermalienPhoto de René-Paul Savary

Je tiens tout d’abord à souligner l’intérêt du travail réalisé par Catherine Procaccia, qui permettra d’apporter une première réponse au problème de la déshérence.

L’amendement n° 4 rectifié bis va dans le même sens que celui de Mme Guidez : il tend également à autoriser les recherches généalogiques pour identifier plus efficacement les bénéficiaires de contrats en déshérence. L’amendement n° 6 rectifié quater est toutefois plus complet, puisqu’il porte à la fois sur l’épargne retraite et sur les contrats d’assurance-vie, le mien ne visant que l’épargne retraite. Je vais donc retirer mon amendement.

Je tiens toutefois à souligner, madame la secrétaire d’État, qu’il serait tout à fait intéressant d’expérimenter le recours aux recherches généalogiques. Sinon, si nous devions nous trouver dans la même situation dans deux ans, soit la durée de l’expérimentation proposée, avec des sommes importantes transférées à la Caisse des dépôts et consignations, au détriment du pouvoir d’achat des bénéficiaires des contrats en déshérence, accepteriez-vous alors de reparler avec nous de ce dispositif ?

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Deroche

Ces deux amendements soulèvent en effet un sujet important. Néanmoins, la commission des affaires sociales a considéré que leurs dispositifs, tels qu’ils sont conçus, présentaient des lacunes juridiques. En effet, ils ne satisfont pas aux exigences constitutionnelles de précision, tant pour l’objet que pour la mise en œuvre du dispositif d’expérimentation.

La commission a estimé en outre que, les montants des contrats en déshérence étant souvent très faibles, les professionnels en question ne seraient peut-être pas intéressés par cette expérimentation.

Surtout, des questions se posent s’agissant du respect du secret bancaire et du droit à la vie privée, compte tenu des informations qu’il s’agirait de transmettre. Je rappelle en effet que les généalogistes, même s’ils adhèrent à une charte, n’appartiennent pas à une profession réglementée.

Je rappelle enfin que les bénéficiaires des produits d’épargne en déshérence transférés à la Caisse des dépôts et consignations qui seraient concernés par l’expérimentation sont connus comme étant décédés depuis dix ans au moins ou comme ayant dépassé l’âge théorique de 120 ans !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Deroche

Sur 430 millions d’euros d’encours de comptes bancaires transférés dans ce cadre à la Caisse des dépôts et consignations en 2019, un seul contrat a été répertorié comme étant un plan d’épargne retraite. Les transferts à la Caisse des dépôts et consignations sont donc assez faibles au regard des chiffres qui nous ont été transmis. Néanmoins, le sujet est intéressant.

À défaut de retrait, l’avis de la commission sera défavorable.

Debut de section - Permalien
Olivia Grégoire

Tout d’abord, la Caisse des dépôts et consignations ne dispose pas de la mission de recherche des bénéficiaires des sommes transférées, mais uniquement de celle d’organiser la publicité des informations sur le portail Cyclades, de conserver et de restituer les fonds sur demande. Elle ne peut donc pas déléguer.

Ensuite, les organismes d’assurance sont déjà chargés de la mission de recherche des bénéficiaires et ils l’assument plutôt bien. Il n’apparaît donc pas nécessaire de dupliquer cette mission en la confiant à des cabinets privés, qui devront par ailleurs être rémunérés, d’autant que la proposition de loi va contribuer à résoudre dans une mesure significative le problème de la déshérence de l’épargne retraite.

De surcroît, le fait de confier une même responsabilité à de multiples acteurs tend à les déresponsabiliser, alors que les assureurs comme les gestionnaires d’actifs s’acquittent plutôt bien de leur mission.

Enfin, cette expérimentation dérogerait à la fois au secret bancaire et, possiblement, à la protection de la vie privée, des données personnelles, dans des proportions qui ne pourraient pas vraiment être justifiées par un motif d’intérêt général. Je souscris aux propos de Mme Deroche concernant la protection des données personnelles et à l’éventualité de confier une telle responsabilité à une profession qui n’est pas réglementée.

Telles sont les raisons pour lesquelles le Gouvernement émet un avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Rossignol

La parole est à M. Vincent Segouin, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Segouin

Madame la secrétaire d’État, madame la présidente de la commission, j’ai entendu vos arguments : la rédaction de l’amendement ne vous convient pas, mais la commission ne pourrait-elle en proposer une meilleure ?

Par ailleurs, vous invoquez le respect de la vie privée et la protection des données. Cela étant, j’imagine mal des personnes appelées par un généalogiste qui leur apprend qu’elles sont bénéficiaires d’un capital en déshérence se soucier beaucoup de cet aspect des choses… À ma connaissance, cela n’a jamais posé de problème majeur en ce qui concerne les contrats d’assurance-vie en déshérence.

Enfin, l’État a-t-il réellement intérêt à trouver un bénéficiaire pour tous les contrats en déshérence ?

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Rossignol

La parole est à M. Philippe Mouiller, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Mouiller

J’avais cosigné l’amendement de notre collègue Savary, qui est le spécialiste, au sein de notre groupe, des retraites et de l’assurance-vie. C’est un vrai sujet et l’idée est intéressante.

Toutefois, au regard des observations de Mme la présidente Deroche sur le risque juridique et sur le calendrier de mise en place d’une telle expérimentation, et compte tenu du fait qu’il n’est pas dans la culture de la maison de demander des rapports, je soutiens la demande de retrait de l’amendement formulée par la commission.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Rossignol

La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Chasseing

Comme je l’avais indiqué, l’idée de confier à des experts en généalogie la recherche des ayants droit me paraît intéressante. Je voterai donc l’amendement de Mme Guidez, étant favorable à une telle expérimentation.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Rossignol

La parole est à Mme Jocelyne Guidez, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jocelyne Guidez

Après avoir entendu exprimer les positions des uns et des autres, je me rallie aux arguments de Mme la présidente de la commission et de Mme la secrétaire d’État. Je retire donc l’amendement n° 6 rectifié quater, à regret, car il faudrait, me semble-t-il, approfondir la réflexion pour trouver le moyen d’avancer sur le sujet.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Rossignol

L’amendement n° 6 rectifié quater est retiré.

Monsieur Savary, confirmez-vous le retrait de l’amendement n° 4 rectifié bis ?

Debut de section - PermalienPhoto de René-Paul Savary

Madame la présidente, ce qui est dit est dit : je ne vais pas revenir sur les propos que j’ai tenus, même si Mme Guidez a décidé, en responsabilité, de retirer l’amendement n° 6 rectifié quater, bien plus complet que le mien, qui ne porte que sur l’épargne retraite. J’en avais déposé un autre, relatif à l’assurance-vie, mais il a été logiquement déclaré irrecevable au titre de l’article 45 de la Constitution, puisqu’il n’avait pas de lien avec le texte.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Rossignol

L’amendement n° 4 rectifié bis est retiré.

En conséquence, l’article 4 demeure supprimé.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Rossignol

Avant de mettre aux voix l’ensemble de la proposition de loi, je donne la parole à Mme Monique Lubin, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Monique Lubin

Mme Monique Lubin . Je voudrais signaler à M. Segouin que Marguerite n’a pas pu changer trois fois de nom : nous gardons notre nom de naissance, quels que soient les événements de la vie.

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Monique Lubin

Je m’associe aux remerciements adressés à Mme la rapporteure pour son travail. Comme je l’ai indiqué lors de la discussion générale, le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain s’abstiendra. Nous ne sommes pas défavorables aux avancées techniques introduites par cette proposition de loi, mais, pour les salariés, ces contrats de retraite supplémentaire ne durent que le temps de leur présence dans l’entreprise. S’ils sont oubliés, ils ont tout de même un coût pour l’entreprise, et dans une moindre mesure pour le salarié. Que la solution ne soit pas inscrite dans le contrat dès sa souscription pose problème. C’est sur l’existence même de ce type de contrat que nous devrions nous interroger. Notre abstention n’a aucun caractère agressif !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Rossignol

Personne ne demande plus la parole ?…

Je mets aux voix, dans le texte de la commission, modifié, l’ensemble de la proposition de loi.

La proposition de loi est adoptée.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Rossignol

Voici le résultat du scrutin pour l’élection de six juges titulaires et de six juges suppléants à la Cour de justice de la République :

Nombre de votants : 273

Suffrages exprimés : 269

Majorité absolue des suffrages exprimés : 135

Bulletins blancs : 4

Bulletins nuls : 0

Ont obtenu :

Mme. Chantal Deseyne, titulaire, et M. Stéphane Le Rudulier, suppléant, 269 voix ;

Mme Catherine Di Folco, titulaire, et Mme Brigitte Lherbier, suppléante, 269 voix ;

M. Jean-Luc Fichet, titulaire, et Mme Corinne Féret, suppléante, 269 voix ;

M. Antoine Lefèvre, titulaire, et Mme Nadine Bellurot, suppléante, 269voix ;

Mme Évelyne Perrot, titulaire, et Mme Catherine Fournier, suppléante, 269 voix ;

M. Teva Rohfritsch, titulaire, et M. Bernard Buis, suppléant, 269 voix.

Ces candidats ayant obtenu la majorité absolue des suffrages exprimés, ils sont proclamés juges à la Cour de justice de la République.

Applaudissements.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Rossignol

Mmes et MM. les juges titulaires et Mmes et MM. les juges suppléants à la Cour de justice de la République vont être appelés à prêter, devant le Sénat, le serment prévu par l’article 2 de la loi organique du 23 novembre 1993 sur la Cour de justice de la République.

Je vais donner lecture de la formule du serment. Il sera procédé ensuite à l’appel nominal de Mmes et MM. les juges titulaires, puis à l’appel nominal de Mmes et MM. les juges suppléants.

Je les prie de bien vouloir se lever à l’appel de leur nom et de répondre, en levant la main droite, par les mots : « Je le jure. »

Voici la formule du serment : « Je jure et promets de bien et fidèlement remplir mes fonctions, de garder le secret des délibérations et des votes, et de me conduire en tout comme un digne et loyal magistrat. »

Successivement, Mmes Chantal Deseyne, Catherine Di Folco, MM. Jean-Luc Fichet, Antoine Lefèvre et Mme Évelyne Perrot, juges titulaires, Mmes Nadine Bellurot, Corinne Féret, Catherine Fournier, M. Stéphane Le Rudulier et Mme Brigitte Lherbier, juges suppléants, se lèvent et disent, en levant la main droite : « Je le jure. »

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Rossignol

Acte est donné par le Sénat du serment qui vient d’être prêté devant lui.

M. Teva Rohfritsch, juge titulaire, et M. Bernard Buis, juge suppléant, qui n’ont pu assister à la séance d’aujourd’hui, seront appelés ultérieurement à prêter serment devant le Sénat.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Rossignol

Mme la présidente. Mme la secrétaire d’État, mes chers collègues, comme le président du Sénat l’a rappelé dans cet hémicycle lundi, la République a été attaquée vendredi dernier, à Conflans-Sainte-Honorine et à Éragny.

Mmes et MM. les sénateurs, ainsi que Mme la secrétaire d ’ État chargée de l ’ économie sociale, solidaire et responsable, se lèvent.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Rossignol

Le terrorisme islamiste s’en est pris à l’un de ses serviteurs, Samuel Paty, un professeur d’histoire-géographie, assassiné dans des conditions odieuses pour avoir enseigné la liberté de penser, la liberté d’écrire, la liberté de caricaturer, pris pour cible pour avoir porté les valeurs de la République.

La Nation lui rendra hommage dans quelques minutes dans la cour de la Sorbonne. Pour que nous puissions tous nous associer à cet hommage, je vous propose d’observer un instant de recueillement en la mémoire de Samuel Paty.

Mmes et MM. les sénateurs, ainsi que Mme la secrétaire d ’ État chargée de l ’ économie sociale, solidaire et responsable, observent un moment de recueillement.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Rossignol

Mes chers collègues, l’ordre du jour de cet après-midi étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à dix-huit heures quinze, est reprise à vingt-et-une heures trente, sous la présidence de M. Pierre Laurent.