Intervention de Guillaume Chevrollier

Réunion du 21 octobre 2020 à 15h00
Déshérence des contrats de retraite supplémentaire — Adoption d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Photo de Guillaume ChevrollierGuillaume Chevrollier :

Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, selon un rapport de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution, l’encours total du stock de contrats non réclamés souscrits par des assurés ayant atteint l’âge de 62 ans représentait 13 milliards d’euros en 2018.

Dans son rapport annuel de 2019, la Cour des comptes avait elle aussi alerté sur l’accélération du phénomène de déshérence, les stocks de contrats non liquidés augmentant avec l’ancienneté des contrats.

La somme en jeu est importante. Elle révèle qu’une partie non négligeable de l’épargne constituée par les Français est concernée par la déshérence. Un actif est dit « en déshérence » lorsqu’il n’est pas possible d’en identifier le propriétaire ou lorsque les épargnants sont dans l’incapacité de faire valoir leurs droits. Les actifs concernés sont alors devenus « orphelins » ; ils représentent aujourd’hui 13 milliards d’euros.

Cette situation est d’autant plus inacceptable et préoccupante que nombre de retraités ont vu leur pouvoir d’achat diminuer du fait de la hausse de la CSG et de la sous-indexation des pensions de retraite. Elle n’est pas juste, car, alors que les victimes de ce phénomène ont parfois versé des primes d’assurance toute leur vie, elles ne peuvent bénéficier des droits acquis.

L’ampleur du phénomène et la crise sociale conjoncturelle doivent nous pousser à agir. C’est pourquoi je remercie notre collègue Catherine Procaccia, rapporteur de cette proposition de loi, pour le travail qu’elle a fourni, ainsi que tous ceux qui ont contribué à l’amélioration de ce texte.

Cette proposition de loi est bienvenue, car elle améliorera le quotidien de nos concitoyens, ce qui n’est pas chose courante. La retraite est le fruit de toute une vie de travail. Sa préparation est un sujet d’importance : il y va de l’avenir de nos aînés, ainsi que de la prise en charge de la dépendance.

Notre responsabilité est de rendre notre système de retraites plus lisible, plus juste : il faut être clair avec nos concitoyens. Le cadre juridique visant à renforcer l’information sur les produits d’épargne retraite et à prévenir la déshérence de ceux-ci avait déjà été consolidé par la loi Pacte, la loi Eckert et les dispositions de la loi Sapin II prévoyant l’information systématique sur l’âge de la retraite. Toutefois, aucune solution n’avait encore émergé pour prévenir et limiter de manière systématique le phénomène de la déshérence.

Cette proposition de loi vise donc à répondre à deux défis auxquels sont confrontés nombre de nos concitoyens : renforcer l’information des assurés et diminuer le nombre des contrats non réclamés.

L’épargne retraite, composée de nombreux produits, peut parfois être inintelligible et ressembler à un véritable maquis. Afin de renforcer l’information des bénéficiaires, la proposition de loi prévoit de confier une nouvelle mission d’information à un groupement d’intérêt public, Union Retraite. Ce groupement mettrait à la disposition des assurés des informations relatives à l’existence des contrats de retraite supplémentaire qu’ils détiennent ou qu’ils sont susceptibles de détenir. Pour ce faire, un répertoire sera créé, au sein duquel les gestionnaires de produits d’épargne retraite supplémentaire verseront des informations concernant les bénéficiaires des contrats. Le groupement indiquera ainsi à l’assuré, au travers du site Info retraite, l’existence du ou des produits souscrits à son nom. Le compte retraite individuel numérique, accessible via le portail Info retraite, sera ainsi enrichi des informations sur les régimes de retraite supplémentaire. Les professionnels chargés de gérer les plans d’épargne retraite devront assurer la prise en charge de ce service en ligne.

Permettez-moi, à cet instant, un aparté sur l’illectronisme. Une mission d’information sénatoriale sur ce sujet a publié très récemment un rapport qui révèle que la dématérialisation généralisée des services publics laisse trois Français sur cinq sur le bord de la route, tant les démarches administratives en ligne sont complexes. Au moins 14 millions de Français ne maîtrisent pas les usages du numérique. C’est plus particulièrement le cas des retraités. Attention donc, madame la secrétaire d’État, à cette fracture numérique, qui est une réalité. Peut-être faudrait-il prévoir davantage de formation, notamment pour accompagner les retraités.

Enfin, je salue la volonté de la commission des affaires sociales de veiller à la protection des données personnelles afin de garantir à l’assuré le respect de sa vie privée.

Le système, tel qu’il a été pensé, permettra sans aucun doute de lutter contre la déshérence des contrats. C’est pourquoi je voterai cette proposition de loi.

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