Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, les 15 et 16 octobre, le Conseil européen a adopté ses conclusions sur les relations extérieures de l’Union européenne, sur la gestion de la crise sanitaire, sur les pourparlers avec le Royaume-Uni dans la perspective du Brexit et sur la redéfinition de nos ambitions climatiques. L’Europe est là, et bien là !
Les vingt-sept chefs d’État ou de gouvernement ont tout d’abord exprimé les inquiétudes que leur inspire la crise sanitaire en cours, alors que la deuxième vague de l’épidémie touche l’ensemble du continent. L’Irlande se reconfine : c’est une première pour un pays de l’Union européenne ; en France, un couvre-feu est mis en place, comme depuis lundi en Belgique, où tous les cafés et restaurants devront fermer pour au moins un mois. En Allemagne, l’épidémie connaît une nette accélération. En Espagne, des habitants sont appelés à rester chez eux. À Londres, et dans d’autres régions du Royaume-Uni, il est désormais interdit de recevoir chez soi des personnes extérieures au foyer. Une campagne de dépistage de tous les Slovaques de plus de dix ans va être lancée.
Notre continent paie un lourd tribut, avec plus de 250 000 décès. Dans ce contexte de crise sanitaire, la gestion collective de la pandémie s’est nettement améliorée ces derniers mois. Le Conseil européen a appelé à ce que ces efforts conjoints des États membres se poursuivent, ce que nous ne pouvons qu’approuver. L’Union est aujourd’hui au rendez-vous et apparaît, dans ce domaine aussi, comme l’échelon pertinent d’intervention pour lutter contre la pandémie. Pour être plus efficaces encore, il nous faut en effet mener, au niveau européen, des actions coordonnées sur la base des meilleures données scientifiques collectées selon une méthodologie commune, de la recherche transfrontières des contacts, des stratégies de dépistage, de la reconnaissance mutuelle des tests, de la restriction temporaire des déplacements non essentiels vers l’Union européenne.
À cet égard, je salue le travail du groupe Renew Europe, et plus particulièrement celui de notre collègue eurodéputée Véronique Trillet-Lenoir, qui a préfiguré l’adoption de recommandations par le Conseil des affaires générales du 13 octobre dernier, auquel vous avez participé, monsieur le secrétaire d’État. Nous saluons votre action décisive. Le recours à une seule et même cartographie du risque pour faciliter la prise de décisions communes, défendu par Renew Europe, est désormais effectif.
Ce combat, nous devons le mener côte à côte. Il en va de même de la lutte contre le réchauffement climatique, deuxième point à l’ordre du jour. Le Conseil européen a déclaré que « l’Union doit relever son niveau d’ambition pour la décennie à venir » en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Une certitude : l’objectif actuel d’une réduction de 40 % de ces émissions est insuffisant pour nous permettre de tenir la trajectoire conduisant à la neutralité climatique en 2050.
Alors que la Commission a présenté, il y a un mois, un plan visant à une réduction d’au moins 55 % d’ici à 2030 des émissions de gaz à effet de serre par rapport à 1990, la décision sera finalement prise en décembre, pour les cinq ans de l’accord de Paris. Il nous faudra être au rendez-vous. Je reprends les propos tenus récemment par l’eurodéputé Pierre Karleskind : « Ne soyons pas défaitistes face à l’immensité de ce qui est devant nous. »
Alors, soyons ambitieux ! C’est bien le sens de l’amendement présenté par Pascal Canfin, président de la commission de l’environnement, de la santé publique et de la sécurité alimentaire du Parlement européen. Adopté il y a deux semaines, il fixe un objectif de réduction de 60 % des émissions de gaz à effet de serre.
Ambitieux, il faudra l’être aussi pour nos pêcheurs dans les semaines à venir. S’agissant des futures relations entre l’Union et le Royaume-Uni, les négociations bloquent depuis plusieurs mois sur trois dossiers, et non des moindres : les conditions de concurrence et la gouvernance, la manière de régler les différends dans le cadre du futur accord et la pêche.
Sénatrice du Finistère, je voudrais insister sur cette dernière pierre d’achoppement. Le Président de la République l’a rappelé avec force, jeudi dernier, comme il l’avait d’ailleurs déjà fait en début d’année : sur ce sujet, pas d’accord sans un bon compromis symétrique, pas d’accord sans visibilité. Le dossier de la pêche est fondamental pour la France, en raison de l’activité des pêcheurs de ses ports du Nord-Ouest dans les très poissonneuses eaux britanniques.
Il semble toutefois que les Britanniques auraient plus à perdre que l’Union européenne à sacrifier la conclusion d’un accord global au motif de retrouver leur souveraineté sur leurs eaux, sauf, peut-être, à ce qu’ils concluent des accords de pêche bilatéraux avec d’autres États, comme ils viennent de le faire avec la Norvège. Pourriez-vous nous éclairer sur ce point, monsieur le secrétaire d’État ?
Rappelons par ailleurs que, en cas de no deal, le Royaume-Uni n’aura plus accès au système européen de l’énergie, ce qui lui coûtera plus d’un milliard d’euros par an. Londres se verra également réimposer des droits de douane et des quotas, fortement préjudiciables à son économie.
Nos pêcheurs ont conscience que la situation ne sera pas la même à l’avenir qu’aujourd’hui. Il nous faudra les accompagner, et le soutien de l’Union européenne sera absolument nécessaire dans cette perspective. Cette évolution vient en effet s’ajouter aux conséquences économiques de la crise de la covid-19, ainsi qu’à des réglementations complexes et parfois contestées.
Pas d’accord sans un bon compromis, pas d’accord sans visibilité, sans respect dans la durée : je l’ai dit, ce sera tout l’enjeu des échanges à venir. Monsieur le secrétaire d’État, vous nous en direz peut-être plus à propos de la dernière actualité des négociations.
En parlant d’Europe unie, nous nous félicitons de ce que les ministres européens de l’agriculture soient parvenus à un accord sur la nouvelle politique agricole commune, prévoyant des mesures environnementales fortes pour tous les États membres.