Intervention de Françoise Gatel

Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale — Réunion du 27 octobre 2020 à 15h00
Projet de loi organique relatif à la simplification des expérimentations mises en oeuvre sur le fondement du quatrième alinéa de l'article 72 de la constitution — Examen du rapport et du texte de la commission

Photo de Françoise GatelFrançoise Gatel, rapporteur :

Alors que nous examinions la semaine dernière une réforme d'ampleur du droit des collectivités territoriales, au travers des propositions de loi organique et constitutionnelle issues des cinquante propositions formulées par le groupe de travail oecuménique constitué sur l'initiative du président du Sénat, qui visait à donner un nouvel élan aux libertés locales et à consacrer la pleine reconnaissance des responsabilités locales, le Gouvernement nous présente aujourd'hui un texte au souffle court, si je puis dire. Il s'agit de simplifier le recours aux expérimentations locales et de prévoir explicitement de nouvelles issues au terme de l'expérimentation.

Le droit français a progressivement fait une place assez large aux expérimentations. Ce n'est toutefois qu'en 2003, après la révision constitutionnelle, que le législateur a pu permettre aux collectivités territoriales de déroger, à titre expérimental et pour un objet et une durée limités - une durée de cinq ans, renouvelable une fois, pour une durée maximale de trois ans -, aux dispositions législatives ou règlementaires qui régissent l'exercice de leurs compétences.

Cette forme d'expérimentation, que nous appellerons les expérimentations locales, est désormais inscrite au quatrième alinéa de l'article 72 de la Constitution. Les modalités de ces expérimentations ont été précisées par la loi organique du 1er août 2003 relative à l'expérimentation par les collectivités territoriales, dont les dispositions ont été codifiées dans le code général des collectivités territoriales. Toutefois, cette forme d'expérimentation n'a pas prospéré. Comme nous l'indiquions la semaine dernière, seules quatre expérimentations ont été menées sur cette base. L'expérimentation concernant la répartition des fonds non affectés de la taxe d'apprentissage a été abandonnée, à la suite de la réforme de l'apprentissage ; celles qui concernent le revenu de solidarité active (RSA), la tarification sociale de l'eau et l'accès à l'apprentissage jusqu'à trente ans ont été généralisées avant même leur évaluation.

Ce faible recours aux expérimentations locales s'explique notamment par un cadre excessivement contraignant. C'est ce qu'a relevé le Conseil d'État dans une étude sur les expérimentations, qu'il a rendu publique en octobre dernier, adressant deux reproches : la procédure est trop lourde, et les issues des expérimentations sont binaires, avec une généralisation à l'ensemble des collectivités ou un abandon. Pour notre part, nous y ajouterons un troisième reproche : l'évaluation de ces expérimentations est lacunaire.

En ce qui concerne la procédure tout d'abord, pas moins de sept étapes sont nécessaires pour qu'une expérimentation locale soit lancée. La loi autorise une expérimentation ; l'organe délibérant de la collectivité prend une délibération pour demander à bénéficier de l'expérimentation ; la délibération est transmise au préfet, qui la transmet alors au Gouvernement assortie de ses observations, et le Gouvernement vérifie que la collectivité remplit les conditions de participation à l'expérimentation. Le Gouvernement fixe alors par décret la liste des collectivités autorisées à participer à l'expérimentation, lesquelles peuvent prendre des actes dérogatoires. Ceux-ci sont transmis au préfet, qui les transmet au Gouvernement afin qu'ils soient publiés au Journal officiel, et ils peuvent alors enfin entrer en vigueur.

Le Gouvernement propose donc en premier lieu de simplifier les conditions de participation à l'expérimentation. Toute collectivité entrant dans le champ d'application de l'expérimentation pourra décider d'y participer, par délibération motivée. Cette délibération, dont la légalité sera vérifiée par le préfet, sera publiée au Journal officiel à titre informatif. Il prévoit en second lieu de rapprocher le régime juridique des actes pris pendant l'expérimentation du droit commun. Ces actes seront contrôlés au titre du contrôle de légalité dans les conditions de droit commun, et la publication au Journal officiel ne sera plus nécessaire à leur entrée en vigueur, mais sera réalisée à titre informatif. Ces mesures constituent une véritable simplification de la procédure.

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