Je vais prendre un petit peu de temps pour réexpliquer l’objectif de ces CDI de mission scientifique.
Que se passe-t-il aujourd’hui lorsqu’une équipe décroche un contrat de recherche européen d’une durée de douze ans – prenons cet exemple ? Les ressources mobilisées sont des ressources propres, puisqu’elles proviennent de l’Europe et non pas de la subvention pour charges de service public. Or on ne peut pas créer d’emploi de titulaire à partir de ressources financières qui ne proviennent pas de ladite subvention. Que peuvent donc faire les établissements ? Actuellement, ils peuvent créer des CDD, qu’ils peuvent faire durer jusqu’à six ans. Au terme de ce laps de temps, s’ils veulent garder la personne, ils peuvent l’embaucher en CDI, ce qui signifie que le poste est désormais financé, en lieu et place d’un emploi de titulaire, sur les crédits afférents à la subvention pour charges de service public.
Actuellement, les établissements sont tentés de garder les personnels concernés jusqu’à la limite des six ans puis, une fois atteinte l’échéance, de ne pas renouveler leur CDD, éventuellement de leur demander de passer six mois ou un an au chômage avant de pouvoir les réembaucher sur un CDD, ce qui fait tomber le droit à « CDIsation ». Nous proposons que les ingénieurs ou les techniciens puissent plutôt être recrutés pour douze ans lorsqu’un contrat de recherche est financé pour douze ans, et qu’ils puissent l’être sur un contrat de travail qui portera le nom de CDI. Par définition, en effet, ce qui n’est pas déterminé est indéterminé, et comme les projets peuvent durer huit, dix, douze, parfois jusqu’à quinze ans, il s’agit forcément de contrats à durée indéterminée.
J’ajoute que les établissements n’ont évidemment aucun intérêt à perdre les compétences de ces techniciens ou de ces ingénieurs qui ont fait leurs preuves sur un projet de recherche, notamment lorsqu’il s’agit d’animer des grandes plateformes ou de construire des bases de données. Si un nouveau projet de recherche exige de maîtriser ces mêmes compétences, la même personne pourra donc évidemment être auditionnée et recrutée dans le cadre de ce contrat particulier que sera le CDI de mission, dont le financement pourra être adossé à des fonds propres.
Les établissements ne peuvent pas recruter en CDI sur subvention pour charges de service public les personnes qu’elles paient sur ressources propres grâce aux contrats européens – c’est l’exemple que j’ai pris ; c’est la même chose pour les contrats public-privé et pour tout un tas d’autres financements sur ressources propres. Ce nouveau contrat, donc, sécurise et « déprécarise » des personnels qui, actuellement, voient leur CDD s’arrêter sans que rien leur soit proposé, parce que les établissements ne veulent pas remplacer les emplois de titulaires par des CDI et parce qu’ils ne veulent pas utiliser leur subvention pour charges de service public pour recruter des personnels à long terme, alors que ces personnels ont été recrutés pour un projet de recherche d’une durée de douze ans, si je poursuis sur l’exemple que j’ai pris.
Il ne s’agit donc en aucun cas de précarisation ; il s’agit au contraire de pallier les manques qui existent actuellement pour ces personnes qui doivent arrêter leur activité à la fin de leur CDD, lequel ne peut jamais excéder six ans, pour les raisons que je viens d’évoquer.
Avis défavorable sur ces trois amendements – mais il me semblait important de décrire la situation actuelle, contre laquelle nous souhaitons lutter.