Intervention de Kristina Pluchet

Réunion du 27 octobre 2020 à 14h30
Mise sur le marché de certains produits phytopharmaceutiques — Exception d'irrecevabilité

Photo de Kristina PluchetKristina Pluchet :

S’agissant de la constitutionnalité du dispositif, nos collègues estiment que ce projet de loi est « manifestement inconstitutionnel en ce qu’il méconnaît gravement plusieurs articles de la Charte de l’environnement, qui fait partie intégrante du bloc de constitutionnalité depuis la révision constitutionnelle du 1er mars 2005 ».

Je veux donc rappeler immédiatement l’article qui, dans la Charte de l’environnement, doit présider aux réflexions des parlementaires dans l’élaboration des politiques publiques. Il s’agit de l’article 6, qui dispose : « Les politiques publiques doivent promouvoir un développement durable. À cet effet, elles concilient la protection et la mise en valeur de l’environnement, le développement économique et le progrès social. »

Je ne vais l’apprendre à personne, les politiques écologiques ne se construisent pas dans un vide économique et social. Derrière chaque mesure, il y a une activité humaine, une production économique et des enjeux sociaux : c’est à l’aune de ces critères que nous devons adopter ou rejeter un texte.

Chaque disposition légale et réglementaire doit être jugée à l’aune d’une analyse coût-avantage.

Nous discutons ici de produits phytopharmaceutiques de la famille des néonicotinoïdes, dont il serait vain de nier l’impact sur l’environnement.

Dès 2012, l’Anses a étudié le rôle des coexpositions aux pesticides et aux agents infectieux sur le phénomène de mortalité des abeilles.

Petit à petit, la connaissance sur la dangerosité de ces produits a progressé et nous sommes arrivés à la situation actuelle, où seules deux substances sont autorisées au niveau européen : l’imidaclopride, uniquement pour les usages sous serre, et l’acétamipride.

Concrètement, depuis 2016, 92 % des usages de néonicotinoïdes ont été éliminés.

Pour certains, l’enjeu serait donc bénin, il s’agirait simplement « de finir le travail ». Mais c’est oublier deux éléments. D’abord, entre 2016 et 2018, l’Anses a réalisé une évaluation des alternatives chimiques et non chimiques des produits à base de néonicotinoïdes. Son expertise comporte trois volets : la mise au point d’une méthodologie, la définition des indicateurs de risque et une étude de l’impact de l’interdiction.

Or, dans six cas, aucune alternative répondant aux critères d’efficacité et d’opérationnalité fixés, qu’elle soit chimique ou non chimique, n’a été identifiée. Dans 22 % des cas, il n’existe que des alternatives chimiques. En conséquence, l’usage de certains de ces produits phytopharmaceutiques est indispensable.

Croyez bien que je le regrette, car quiconque connaît le monde agricole sait que les agriculteurs n’utilisent pas par plaisir ou par commodité des produits qui, d’une part, ont un impact sur l’environnement, et, d’autre part, représentent un coût parfois prohibitif.

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