Intervention de Joël Labbé

Réunion du 27 octobre 2020 à 14h30
Mise sur le marché de certains produits phytopharmaceutiques — Article 1er

Photo de Joël LabbéJoël Labbé :

Dans la continuité de l’intervention de Victoire Jasmin, je veux réagir à la communication du Gouvernement sur ce projet de loi, qui nous paraît problématique.

Ces dérogations nous sont présentées comme une fatalité, une solution proposée à contrecœur, mais nécessaire pour la souveraineté alimentaire. Le projet de loi serait conçu pour limiter au minimum les effets de cette réautorisation sur l’environnement. Bref, ce serait la solution la « moins pire ».

J’ai entendu que nous serions le pays où la dérogation serait la plus encadrée. Or, ce qui nous est proposé, c’est une dérogation sur l’enrobage des semences. En d’autres termes, avant même de connaître la situation sanitaire des plantations de betteraves, le Gouvernement autorise ces produits en préventif sur plus de 400 000 hectares… En effet, au moment de la mise en production des semences et de leur plantation, il sera encore trop tôt pour estimer correctement le risque de jaunisse. Cette utilisation des néonicotinoïdes est donc tout sauf ciblée et limitée !

En commission, nos collègues ont comparé les pesticides à des médicaments pour soigner les plantes. Je ne souscris en rien à cette analogie, mais, si l’on devait accepter de parler ce langage, l’enrobage des semences avec des néonicotinoïdes reviendrait à prendre des antibiotiques en prévention d’octobre à avril pour éviter de tomber malade…

Les pratiques systémiques, vous le savez, ont aussi pour conséquence de provoquer des résistances des insectes cibles. À côté de nous, l’Allemagne, deuxième producteur européen de sucre, refuse d’autoriser les néonicotinoïdes pour traiter les semences. Le ministre allemand de l’agriculture en a pris l’engagement dès décembre 2018. Le modèle choisi par notre voisin repose donc sur le refus de tout traitement préventif de l’ensemble des surfaces de betteraves et sur l’autorisation – uniquement si les conditions de l’émergence de pucerons sont réunies – de la pulvérisation d’un néonicotinoïde, l’acétamipride. Les quantités de néonicotinoïdes répandues dans l’environnement sont alors bien moindres.

Je n’entends pas faire l’apologie de la pulvérisation, dont les inconvénients sont majeurs. Je tiens à souligner que l’enrobage des semences n’est en rien plus écologique et qu’il n’est pas un moindre mal pour l’environnement. Si nous sommes opposés à toute forme de dérogation aux néonicotinoïdes – nous l’avons répété –, nous notons que nos voisins allemands refusent les usages préventifs qui sont présentés dans ce texte comme une fatalité ou un moindre mal.

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