Nous avons fait évoluer ensemble cet article. Ne cherchez pas des désaccords là où il y a eu de grandes convergences. Le projet de loi a pu évoluer grâce au Sénat, et je m'en réjouis, mais cette idée du respect dû au professeur par le parent était présente dès le projet de loi initial.
Selon moi, nous faisons face à la réalité historique de la France : d'un côté, la présence des parents n'est pas assez importante, de l'autre, elle l'est trop. Les systèmes scolaires qui vont bien sont ceux dans lesquels les parents sont impliqués. On le voit avec l'école primaire, et cette implication des parents dans les enjeux de l'école est la clef du succès d'un système scolaire. En revanche, les parents ne doivent pas s'immiscer dans la pédagogie. Or, en France, par tradition historique, les parents s'impliquent trop peu dans les enjeux - d'où la tendance à sous-traiter les sujets éducatifs à l'école, qui relèveraient normalement des parents -, tandis qu'ils s'immiscent de manière indue dans les questions pédagogiques et d'instruction, qui relèvent de la responsabilité des professeurs.
Par ailleurs, j'ajoute que la participation des parents d'élèves, collective ou individuelle, est trop souvent de nature conflictuelle. Pour être réussie, la participation doit être constructive ; si elle est vindicative et consumériste, elle sera contreproductive et pourra mener au pire. C'est à l'ensemble de la société française de créer les conditions d'une participation constructive des parents.
En tant que recteur et en tant que ministre, j'ai eu très souvent à gérer des cas où des parents d'élèves avaient insulté des professeurs ou une directrice d'école. J'ai eu les plus grandes difficultés à faire en sorte que ce soit le parent d'élève qui soit éloigné de l'école, et non l'inverse. Certains parents d'élèves sont très agressifs. Toutes les idées qui permettront d'accentuer la protection des enseignants sont à prendre.
Madame Lherbier, vous avez dit craindre une autocensure des établissements et des professeurs par crainte de provoquer une réaction chez certains élèves, citant le cas d'élèves refusant de chanter la Marseillaise. Malheureusement, ce phénomène existe, et nous cherchons à le réduire par l'éducation morale et civique. Pour répondre à votre question relative aux « alliés de l'institution scolaire », des associations agréées par l'éducation nationale interviennent à l'école. Toutefois, nous devons exercer toute notre vigilance. Le mieux est de faire intervenir des représentants des institutions : un juge, un policier, un gendarme, un pompier ou tout autre représentant des services publics, ou bien les élus de la République. C'est pourquoi j'ai demandé la participation de toutes ces catégories le 2 novembre prochain pour bien signifier la présence de la République et la force du monde adulte.
Au collège, en particulier, nous entendons développer les mécanismes d'engagement des adolescents, par exemple le secourisme ou les cadets de la République. Par ailleurs, je veux que le brevet reconnaisse l'engagement civique de l'élève.
Monsieur Grosperrin, vous avez raison de dire que la maîtrise insuffisante de la langue française est à l'origine de tous les maux. C'est d'ailleurs ce que déclarait peu ou prou dans un entretien récent la présidente du Conseil supérieur des programmes, Mme Souâd Ayada. Tout commence par le langage, qui est le premier vecteur de non-violence, de subtilité et d'écoute.
Oui, la maîtrise du français, avec celle des mathématiques pour développer l'esprit logique, est essentielle - et c'est la première de mes priorités, avec l'apprentissage de la lecture, du calcul et le respect d'autrui. Le dédoublement des classes doit permettre justement à tous les élèves de partir dans la vie avec les savoirs fondamentaux. Les plans de formation dans le premier degré ont été totalement transformés au cours des deux dernières années, ce qui permet désormais à tout professeur de suivre des formations en français et en mathématiques, à travers le plan « Français » et le plan « Mathématiques ».
Je suis souvent très critiqué sur ces questions et peu soutenu. Toutes les oppositions devraient comprendre, indépendamment des clivages politiques, qu'il y a là un enjeu républicain fondamental. Je lis en ce moment les mémoires de Jean-Pierre Chevènement, qui, dans les années 1980, animé des mêmes intentions, avait cherché à consolider l'apprentissage du français dès l'école primaire. Au moins pouvait-il compter sur toute la famille républicaine de gauche et de droite. Le manque de soutien des secteurs politique, médiatique et culturel est un signe d'affaissement. Je continuerai dans cette voie. Mais gardons-nous, souvent pour des raisons un peu factices, de nous opposer sur ces questions, alors que c'est un enjeu républicain fondamental. Nous avons pris de très nombreuses mesures en la matière.
Monsieur Assouline a déploré que les heures consacrées à l'éducation morale et civique soient souvent rognées en raison de l'ampleur des programmes et qu'il n'existe pas de réelle formation dans cette matière.
S'agissant du premier point, il faut distinguer les heures d'éducation morale et civique dans l'emploi du temps de l'élève, sans qu'elles constituent un grand tout avec l'histoire et la géographie. C'est ce que nous avons fait avec la réforme du lycée, avec un bloc commun comptant trois heures d'histoire-géographie et une demi-heure d'éducation morale et civique. Cela ne va pas assez loin, et il faudra sans doute, à terme, que cet enseignement soit autonomisé, même si les ponts avec l'histoire-géographie sont nombreux.
La France, étonnamment, se distingue positivement en la matière. Certes, nous avons des faiblesses, mais, en Europe et dans le monde, l'enseignement de l'histoire, de la géographie et de l'éducation morale et civique est parfois inexistant ou très édulcoré, ce qui est source de problèmes pour les temps à venir. Il faudra agir à l'échelle européenne.
L'éducation morale et civique doit donc faire l'objet d'un temps d'enseignement spécifique abordant aspects théoriques et aspects pratiques et reposant sur une formation initiale et continue très solide. Là aussi, nous avons avancé : systématicité de la formation initiale sur les valeurs de la République - c'est l'une des conséquences de la loi pour une école de la confiance qui est en train de se mettre en place -, attention accordée aux contenus, de nature universitaire. Concernant ce dernier aspect, ne soyons pas aveugles : à l'université, certains secteurs ont une conception très bizarre de la République. Au-delà des heures et des moyens, il s'agit donc de voir ce qui se passe dans les enseignements et de prévoir une matrice initiale parfaite. Ainsi, nous avons créé l'année dernière une chaire laïcité au Conservatoire national des arts et métiers (CNAM), animée par plusieurs membres du Conseil des sages de la laïcité. En lien avec Frédérique Vidal, j'ai commencé à proposer à d'autres établissements d'enseignement supérieur de dispenser ce type de formation, de créer des chaires laïcité et valeurs de la République. Comme je l'ai dit ce matin sur une radio, il existe dans l'enseignement supérieur des courants islamo-gauchistes très puissants qui font des dégâts dans les esprits.
Le 28/11/2020 à 13:30, aristide a dit :
"ce qui permet désormais à tout professeur de suivre des formations en français et en mathématiques, à travers le plan « Français » et le plan « Mathématiques" »
Comment peuvent-ils être professeur des écoles s'ils ne maîtrisent ni les maths ni le français ?
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