Chère collègue, merci de soulever, dans cet hémicycle, la question si importante de l’intégrité scientifique ; c’est précisément ce débat que je tiens à poursuivre.
Sur la saisine de la commission de la culture du Sénat, l’Opecst a lancé une mission relative à l’intégrité scientifique, dont notre collègue député Pierre Henriet et votre serviteur ont été chargés. Nous devrions remettre notre rapport dans une quinzaine de jours.
Aujourd’hui, la France, comme d’autres pays dans le monde, est victime de méconduites scientifiques. Ces dernières sont devenues d’ordre structurel – Mme Robert l’a dit très justement.
La course à la publication est devenue une véritable fuite en avant. À l’heure actuelle, il est important de publier rapidement, le plus possible, dans des revues de plus en plus visibles ; mais on en oublie la qualité, qui devrait être l’élément essentiel de toute recherche scientifique.
En une année, 2, 5 millions d’articles sont publiés dans le monde. On estime qu’environ un tiers d’entre eux ne seront jamais lus, mais ces textes entrent dans les logiques dites « de bibliométrie » : c’est sur des facteurs quantitatifs qu’est fondée l’évaluation des individus et des équipes.
Cette logique est dangereuse : elle aboutit systématiquement à la triche, et nous le savons. Les États-Unis en ont été victimes, comme d’autres pays anglo-saxons ; la France est touchée à son tour. Il faut absolument passer d’une production quantitative, où seul compte le chiffre, à une production et donc une évaluation qualitatives. En d’autres termes, il faut obliger les chercheurs à réduire la masse de leurs publications. La logique actuelle, c’est de l’argent et du temps dépensés en pure perte, sans compter les effets extrêmement néfastes que je viens de rappeler.
Enfin, sans aucun esprit de polémique, je rappellerai les propos du Premier ministre, M. Castex : « Nous assumons qu’il faut que les chercheurs publient, qu’ils aient des résultats à l’appui des moyens que l’on met. Nous allons mettre beaucoup de moyens dans la recherche, il faut que notre production s’en trouve améliorée. » Certes, madame la ministre, mais pas quantitativement : sinon, nous n’y arriverons pas !