Intervention de Éliane Assassi

Réunion du 29 octobre 2020 à 14h30
Évolution de la situation sanitaire et mesures nécessaires pour y répondre — Débat et vote sur une déclaration du gouvernement

Photo de Éliane AssassiÉliane Assassi :

La caricature de consultation du Parlement doit sonner comme une alerte forte, pour en finir avec un régime à la verticalité folle.

Nous vous demandons, de nouveau, de mettre en place un comité de suivi national de la crise, véritable comité de santé publique, pluraliste, aux réunions hebdomadaires, mobilisable jour et nuit, afin de permettre un véritable contrôle démocratique et une réelle participation de tous aux décisions.

Où en sommes-nous ? Une chose est certaine, la deuxième vague est si haute que la submersion de notre système hospitalier est envisagée.

Hier soir, le Président de la République a écarté d’un revers de main l’argument de la faiblesse de nos moyens en réanimation, de nos moyens hospitaliers, comme raison des difficultés actuelles.

Pourtant, si l’on écoute un instant les professionnels, cette situation de destruction de l’hôpital depuis des années est une évidence. Depuis vingt ans, notre système de santé, l’une des fiertés de notre pays, est saccagé par les politiques libérales successives. La fermeture des lits était considérée comme un baromètre pour juger de l’efficacité d’une politique. En vingt ans, 100 000 lits ont été fermés – ils existaient donc bien –, et avec eux tant de postes supprimés.

Emmanuel Macron n’a pas stoppé le mouvement : 4 800 lits furent fermés en 2018, 3 400 en 2019, et cela continue. Allez-vous, oui ou non, stopper cette évolution et réparer les dégâts ?

Les ravages du libéralisme ont touché toute la société, et leur description détaillée prendrait des heures. L’humanité est aujourd’hui en danger. La crise écologique masquait l’arrivée d’une soudaine crise sanitaire qui, elle aussi, ébranle le système, remettant profondément en cause le capitalisme mondialisé.

En mars dernier, le Président de la République avait semblé chanceler sur ses certitudes. Il avait eu des mots inhabituels : « rupture », « mettre à l’abri du marché ». Le « quoi qu’il en coûte » dominait le discours, bien loin de la course à la rentabilité et au profit, bien loin de ces dogmes de compétitivité et de concurrence qui font exploser notre société et contredisent fondamentalement ce concept profondément humain de solidarité.

Hier, quoi qu’il en dise, le Président de la République a placé l’économie devant l’humain. L’exercice est difficile.

Il est vrai qu’un équilibre doit être trouvé pour ne pas jeter dans la pauvreté des millions de personnes qui viendraient rejoindre les 10 millions qui se trouvent déjà, dans notre pays, sous le seuil de la pauvreté.

Mais nous n’avons pas entendu un mot – pas un mot, j’insiste ! – pour appeler ceux qui possèdent les richesses dans notre pays à participer réellement à l’effort de solidarité nationale.

Il n’y a pas de doute à avoir aujourd’hui : la priorité, c’est sauver des vies.

Oui, monsieur le Premier ministre, c’est vrai : ralentir considérablement l’économie a un coût, mais ce n’est ni aux salariés ni aux plus pauvres d’en subir les conséquences, y compris par leur mise en danger.

Nous regrettons qu’aucune mesure fiscale de solidarité ne soit imposée aux bénéficiaires de dividendes, dont le montant a explosé, y compris pendant la crise.

Nous regrettons qu’aucune mesure radicale ne soit prise pour faire participer les géants du numérique, comme Amazon, qui accumulent des profits prodigieux sur le dos de la crise et du malheur des hommes. Il faut aujourd’hui « changer de logiciel ».

Alors, nous serons responsables, comme notre peuple qui, contrairement à ce que d’aucuns ont dit, n’a pas fait preuve de légèreté. Nous serons mobilisés contre l’épidémie. Mais nous demandons au Président de la République d’être responsable démocratiquement, de cesser son exercice solitaire du pouvoir.

La responsabilité aujourd’hui, c’est accepter la démocratie, agir ensemble pour frapper ensemble cette épidémie.

La responsabilité, c’est la mise en service des richesses de notre pays au service du bien commun.

La responsabilité, c’est l’humain d’abord.

Ce qui nous est demandé aujourd’hui par notre vote, ce n’est pas d’être pour ou contre le confinement. En réalité, ce que vous nous demandez, monsieur le Premier ministre, c’est de vous accorder la confiance. Notre vote négatif mûrement réfléchi est donc un vote d’opposition à vos choix politiques et à la méthode utilisée pour les imposer.

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