Nous avons mis en place des webinars pour communiquer. Avant que la vague n'arrive en Île-de-France, nous avons mis en place un webinar avec la région Grand Est qui a permis aux régions, notamment l'Île-de-France, de se préparer à ce qui allait nous arriver. Ce partage d'informations a été important. Nous avons beaucoup communiqué avec la SFAR et la SRLF car les patients qui vont en réanimation sont majoritairement adressés par le SAMU et les urgences. Dans les critères d'admission et les techniques d'oxygénation, nous avons modifié nos pratiques grâce à ce partage d'expériences afin d'obtenir une meilleure pertinence d'admission des patients en réanimation et développer notamment les techniques d'oxygénothérapie haut débit, afin de permettre aux patients de passer un cap sans aller en réanimation, si possible. Nous organisons régulièrement des sessions communes afin de poursuivre cet échange d'expériences et ce travail commun.
Tout a été dit quant à ce qui nous a manqué. J'ajouterais que des transporteurs sanitaires urgents nous ont manqué également, en médecine d'urgence, pour adresser les patients aux hôpitaux, notamment au tout début de la première vague. Cela dit, cette difficulté a finalement constitué un facteur de succès car elle nous a conduits à travailler avec des partenaires que nous ne sollicitions sans doute pas assez, des acteurs associatifs, qui n'ont pas les mêmes missions que les pompiers et ambulanciers privés (qui se sont fortement mobilisés). Les associatifs permettent de gérer le médico-social en évaluant la possibilité de laisser le patient à domicile, plutôt que de mobiliser à tort le service hospitalier. Cela requiert du personnel ayant l'empathie du médico-social afin de déterminer si les patients peuvent être laissés à domicile ou non. Cette diversité d'acteurs, qui a constitué une difficulté au départ, apparaît finalement comme un atout qui me semble à conforter.
Au SAMU centre 15, les appels sont en augmentation continue concernant des patients présentant une suspicion de Covid. Certains patients sont plus jeunes et certains présentent des pathologies graves. J'étais également de garde la nuit dernière. Nous sommes confrontés au manque de lits de réanimation et au manque d'unités de médecine pour adresser les patients Covid et les patients non-Covid. Lorsque la situation se tend dans les services de réanimation, cela entraîne l'immobilisation des unités de SMUR et la stagnation des patients dans les services d'urgences. Or, comme le montrent des données publiées depuis longtemps, la surcharge des services d'urgence entraîne une surmortalité de 9 %, tous patients confondus et de 30 % pour les patients les plus graves. La régulation médicale a joué un rôle central dans la gestion de la vague, en phase 1. Nous n'avons pas été confrontés aux difficultés qu'ont connues l'Italie et l'Espagne, car la régulation médicale a permis d'adresser les patients directement aux services spécialisés sans surcharger les services d'urgence. Il s'agit là aussi d'un point essentiel qu'il faut conforter.
A l'heure actuelle, lorsqu'il n'y a plus de place en réanimation, nous n'avons d'autre solution que d'adresser le patient à des structures d'urgence qui ne sont pas en mesure, au regard du nombre de personnels et des compétences qui s'y trouvent, de créer des unités d'hospitalisation éphémères dans les box des salles d'accueil d'urgences vitales.
60 % de nos lits, dans le département, sont actuellement occupés par des patients Covid et nous ne pouvons pas faire de déprogrammation, comme en première vague, car les patients semi-urgents sont devenus des patients urgents. La situation commence à se tendre de façon importante.