Intervention de Pascale Gruny

Réunion du 9 novembre 2020 à 16h00
Financement de la sécurité sociale pour 2021 — Discussion d'un projet de loi

Photo de Pascale GrunyPascale Gruny :

Madame la présidente, messieurs les ministres, mes chers collègues, cette année, la situation financière de la branche accidents du travail et maladies professionnelles (AT-MP) se détériore sous l’effet de la crise sanitaire, bien que sa situation reste enviable par rapport à celle d’autres branches.

La branche AT-MP serait ainsi déficitaire, pour la première fois depuis 2012, de 239 millions d’euros en 2020, essentiellement du fait de l’effondrement des recettes. Les excédents devraient être toutefois de retour dès l’an prochain, et les capitaux propres de la branche devraient tout de même se porter à 3, 9 milliards d’euros, à la fin de 2021. À long terme, toutes choses égales par ailleurs, les recettes de la branche AT-MP restent structurellement plus dynamiques que ses dépenses.

Dans ce contexte, le PLFSS pour 2021 se veut « neutre » pour la branche et ne contient aucune réforme, en recettes ou en dépenses, modifiant son équilibre.

En réalité, la principale mesure de ce texte, au sujet de la branche AT-MP, est particulièrement irritante. Alors que nous attendions, cette année, le rapport de la commission chargée d’évaluer tous les trois ans le coût réel pour l’assurance maladie de la sous-déclaration des AT-MP, l’article 46 en reporte la publication au 1er juillet 2021.

L’enjeu de ce rapport est pourtant important pour la branche AT-MP, car c’est sur le fondement de la fourchette proposée par cette commission qu’est fixé, chaque année, le montant du versement à la branche maladie du régime général au titre de cette sous-déclaration.

Or il nous est indiqué que la commission n’a pas pu mener à bien ses travaux en raison de la crise sanitaire. Nous sommes bien obligés de prendre acte de leur report.

Ainsi, pour la septième année consécutive, le montant du versement inscrit au PLFSS reste fixé à 1 milliard d’euros, soit aux alentours du milieu de la fourchette de 800 millions à 1, 5 milliard d’euros, qui a été proposée par la commission de 2017.

Cette somme ne représente pas moins de 7 % des prévisions de dépenses de la branche pour 2021. À titre de comparaison, le budget du Fonds national de prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles ne représentera, en 2021 que 2, 7 % des dépenses.

Le maintien de ce transfert à un niveau aussi élevé laisse entendre qu’aucun progrès n’a été accompli sur ce sujet, ce qui est faux : plusieurs des recommandations de la commission de 2017 ont été mises en œuvre ou sont en passe de l’être. Il serait d’ailleurs bienvenu d’évaluer également les AT-MP qui relèvent de la vie privée mais qui sont déclarés dans les entreprises.

Tout porte à croire que ce versement, dont le montant est pris en compte dans la détermination de la tarification AT-MP, sert principalement au rééquilibrage d’une branche maladie dont le déficit est désormais vertigineux. Ce n’est pourtant pas là la vocation de la cotisation AT-MP, censée responsabiliser les employeurs sur la sinistralité des accidents du travail et des maladies professionnelles.

J’ajoute que les troubles musculo-squelettiques et les risques psychosociaux sont en constante augmentation, ce qui nécessite des financements pour accompagner les entreprises, souvent désemparées, afin qu’elles puissent réduire ces risques.

La commission des affaires sociales a donc adopté un amendement qui tend à minorer le montant du versement pour 2021 à la branche maladie, à la hauteur du déficit de la branche AT-MP en 2020, et qui prévoit de le porter à 760 millions d’euros.

Les causes de la sous-déclaration sont d’ailleurs bien identifiées et soulignent l’importance de la médecine du travail et des services de santé au travail pour améliorer le système de déclaration. À ce sujet, nous attendons la réforme du système de santé au travail.

L’expérimentation prévue à l’article 34 ouvre une piste d’amélioration, car elle met en place des transferts de compétences aux infirmiers, dans des services de santé au travail relevant de la mutualité sociale agricole. La commission présentera un amendement pour encadrer les modalités d’évaluation du dispositif, afin d’en préciser les objectifs.

Les mesures de simplification prévues à l’article 46 bis sont également bienvenues et peuvent contribuer à favoriser les déclarations.

Sous réserve de l’adoption des amendements que je présenterai au nom de la commission, celle-ci vous invitera à adopter les objectifs de dépenses de la branche AT-MP, au sein du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2021.

Monsieur le ministre, nous attendons aussi avec impatience le décret précisant les conditions de fonctionnement du fonds d’indemnisation des victimes de pesticides, qui tarde à être publié, ainsi que la réforme du système de santé au travail, sur laquelle mon collègue Stéphane Artano et moi-même avons travaillé.

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