Intervention de Philippe Mouiller

Réunion du 9 novembre 2020 à 16h00
Financement de la sécurité sociale pour 2021 — Discussion d'un projet de loi

Photo de Philippe MouillerPhilippe Mouiller :

Madame la présidente, messieurs les ministres, mes chers collègues, malgré les annonces faites par le Gouvernement, lors de la création de la branche autonomie, le 7 août dernier, ce projet de financement reste bref, sur ce volet.

L’objectif de dépenses de cette nouvelle branche est de 31, 6 milliards d’euros, auxquels il faut ajouter les 400 millions d’euros que vous venez d’abonder, monsieur le ministre.

Pour faire court, cet objectif représente les dépenses actuelles de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA), augmentées de celles de l’allocation d’éducation de l’enfant handicapé (AEEH) et des mesures de revalorisation salariale, ou du moins de rattrapage salarial, issues du Ségur de la santé.

Si l’on tient compte des dispositions exceptionnelles liées à la crise de la covid-19, l’objectif global de dépenses en faveur des établissements et services médico-sociaux reste inférieur à celui de 2020.

Toutefois, il suit, bon an mal an, la dynamique impulsée dans les chantiers en cours depuis quelques années, qu’il s’agisse de la convergence tarifaire en Ehpad ou des plans nationaux et solutions d’accueil pour le secteur du handicap. Le budget de la CNSA ménage même une petite place à la PCH parentalité, c’est-à-dire la prise en compte d’une aide à la parentalité au sein de la prestation de compensation du handicap, promesse issue de la Conférence nationale du handicap de février dernier.

L’article 16 du texte clarifie le rôle et les modalités d’intervention de la CNSA. Il en intègre la gestion dans le patrimoine commun de la sécurité sociale ; il simplifie l’architecture budgétaire de la caisse ; il la dote enfin de ressources propres, composées, pour l’essentiel, de recettes de CSG en remplacement des crédits d’assurance maladie. Cette avancée donnera à la caisse les moyens de gérer la branche, conformément à la mission que le législateur lui a confiée, dans la loi du 7 août dernier.

Le deuxième et dernier article significatif en matière d’autonomie est l’article 25 A, que le Gouvernement a introduit à l’Assemblée nationale. Il permet, en effet, de recourir, comme pratiquement chaque année, à la « combine » qui consiste à saupoudrer quelques millions d’euros sur les départements, en cours d’examen du PLFSS, pour les services d’aide à domicile. L’an prochain, l’enveloppe sera certes un peu plus épaisse que d’habitude, avec 200 millions d’euros en année pleine, mais les modalités de son attribution restent à préciser. Malgré ce rattrapage, les acteurs du secteur et le personnel du monde du handicap ne se sentent pas suffisamment reconnus et valorisés par le Gouvernement.

J’en viens à ce que ce PLFSS ne contient pas, et qui nous importe davantage.

Il manque d’abord une trajectoire pérenne, puisque le texte ne prévoit même pas l’équilibre à court terme de la branche. À l’issue de son examen à l’Assemblée nationale, il en fixe le déficit à 0, 3 milliard d’euros, et le maintient jusqu’au nouveau transfert de 0, 15 point de CSG, qui ne sera effectif qu’en 2024.

De toute façon, pour trouver l’équilibre en 2021, la version initiale du texte misait sur la contribution des crédits communautaires au volet médico-social du plan de relance.

Il manque ensuite une idée claire du rôle de la branche que l’on vient de créer. Le rapport de préfiguration de Laurent Vachey faisait de nombreuses propositions, qui auraient pu conduire, au sein d’un périmètre élargi, à déployer une politique plus efficace. Le Gouvernement a fait un choix prudent en n’élargissant les dépenses de la CNSA qu’à l’AEEH.

Ce qui manque surtout, c’est une politique digne de ce nom pour l’autonomie, politique dont les grandes lignes ont été tracées par des travaux récents et même, déjà, par le rapport Politique de la vieillesse de la commission d’étude des problèmes de la vieillesse, dit « rapport Laroque », de 1962. Voilà plus de deux ans que le Gouvernement nous promet une telle réforme. Or les circonstances du moment ne poussent pas forcément à l’optimisme… Concrètement, monsieur le ministre, pouvez-vous nous indiquer un calendrier précis pour l’examen du projet de loi sur le grand âge et l’autonomie ?

Quoi qu’il en soit, la commission propose de maintenir le sujet à l’ordre du jour et de « catalyser » la réflexion sur, d’une part, le financement, en invitant les financeurs de cette politique à faire, sous l’égide de la CNSA, des propositions, et, d’autre part, la gouvernance, en proposant dès maintenant d’expérimenter la délégation de la compétence de la tarification des Ehpad aux départements, comme nous l’avions fait il y a deux ans pour les établissements accueillant des personnes handicapées. En effet, des rapports sénatoriaux récents l’ont montré et la crise sanitaire l’a confirmé, nous avons plus que jamais besoin de cet échelon de proximité pour accompagner les plus vulnérables.

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