Intervention de Laurence Cohen

Réunion du 9 novembre 2020 à 16h00
Financement de la sécurité sociale pour 2021 — Question préalable

Photo de Laurence CohenLaurence Cohen :

Malheureusement, en fixant l’augmentation des dépenses de santé, à périmètre constant – en neutralisant les mesures pour 2021 liées à la covid et au Ségur de la santé –, à 2, 5 %, ces dépenses seront maintenues au-dessous de leur évolution naturelle, estimée à 4, 4 %. Cela revient à imposer à la santé des coupes budgétaires de 4 milliards d’euros, dont 800 millions d’euros pour l’hôpital. C’est incompréhensible et intolérable !

La covid-19 fait rage et, croyez-le bien, nous en sommes conscients, car les membres de mon groupe se rendent souvent auprès du personnel de santé de leurs territoires ; nous étions encore, vendredi dernier, à l’Hôtel-Dieu, où les urgences ont été fermées afin que le personnel y travaillant aille renforcer les équipes de Cochin. Indépendamment de l’ineptie d’une telle décision pour un hôpital situé au cœur de Paris, en pleine pandémie et en pleine menace terroriste, l’ordre est tombé sans aucune concertation. Avec de telles méthodes de direction, appliquées un peu partout sur le territoire, comment s’étonner que le personnel soit écœuré et quitte l’hôpital, voire la profession de soignant ?

Ce projet de budget est loin d’être historique, ce qu’imposerait pourtant la crise que nous vivons. La création de 15 000 postes, dont seulement 7 500 supplémentaires par rapport à ceux qui étaient prévus par votre prédécesseur, n’est pas à la hauteur des besoins. L’argument avancé à l’appui de cette décision repose sur le fait que, aujourd’hui, faute de volontaires, des postes sont vacants ; mais à qui la faute, si ce n’est aux choix politiques qui ont été faits et qui perdurent ?

Il faut en urgence développer un véritable plan de formation et de recrutement de personnel, à hauteur de 100 000 postes pour les hôpitaux et de 300 000 postes sur trois ans dans les Ehpad, sans oublier les aides à domicile. Cela passe nécessairement par l’augmentation des moyens alloués à la formation et par l’amélioration de l’attractivité des métiers. Nous avons des propositions qui permettraient amplement de financer cela, messieurs les ministres ; n’hésitez pas à piocher dedans…

Enfin, que dire de la création d’une cinquième branche de la sécurité sociale, pour la perte d’autonomie, dont le financement se fera non par des cotisations mais par des recettes fiscalisées, dont la CSG et des transferts entre branches ? C’est la porte ouverte aux assurances privées et c’est un coup supplémentaire porté à notre système de protection sociale tel que créé par Ambroise Croizat, ministre communiste.

En réalité, le Sénat examine aujourd’hui un budget de la sécurité sociale comme s’il n’y avait pas de rebond de la pandémie de covid-19. Les projections ayant conduit seulement à une enveloppe pour l’achat de matériel de protection et au financement d’une éventuelle campagne de vaccination sont dépassées, et l’on attend toujours la prise en charge à 100 % des masques devenus obligatoires pour tous dès l’âge de 6 ans.

Le reconfinement du pays pour une durée minimale de quatre semaines entraînera nécessairement un nouveau ralentissement de l’économie et, par conséquent, de moindres rentrées de cotisations sociales et une augmentation des dépenses de santé liées à la prise en charge des patients.

Le ministre de l’économie lui-même a chiffré à 15 milliards d’euros le coût pour l’État d’un mois de reconfinement et il a présenté un nouveau projet de loi de finances rectificative. Accepter de débattre de ce budget de la sécurité sociale pour 2021 reviendrait à accepter de discuter de chiffres largement sous-évalués, même en tenant compte de votre amendement de révision de l’Ondam de 2020, à hauteur de 800 millions euros, monsieur le ministre. D’ailleurs, vous auriez dû être favorable à nos amendements de l’an dernier visant à réévaluer cet objectif, au lieu de clamer que c’était impossible…

Pour toutes ces raisons, le groupe communiste républicain citoyen et écologiste a déposé cette motion tendant à opposer la question préalable, afin de dénoncer l’insuffisance des moyens destinés à notre système de santé et un budget caduc au regard des récentes décisions prises face à la pandémie de la covid-19.

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