ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la relance, chargé des petites et moyennes entreprises. - Je souhaite tout d'abord vous remercier pour l'initiative de cette audition. Il est normal que le Gouvernement soit à votre disposition dans cette situation difficile pour tous, et en premier lieu pour les commerçants.
Nous avons tenté le maximum en matière de prévention et d'information des commerçants, afin d'essayer de maintenir ces entreprises ouvertes. La situation sanitaire est venue compromettre nos plans, avec une force terrible. L'arbitrage a donc été rendu au regard du nombre élevé de contaminations, du risque élevé d'affluence massive dans les hôpitaux, et d'engorgement des services d'urgence. Le Président de la République a donc pris la décision d'édicter des mesures de restriction qu'il a qualifiées lui-même de brutales, dans le but de ralentir la propagation du virus et de permettre aux professionnels, nous l'espérons, de travailler dans les meilleures conditions possibles fin décembre en vue des achats de Noël. Ces mesures sont en vigueur au minimum jusqu'au 1er décembre et une clause de revoyure a été fixée.
Depuis mon entrée au Gouvernement le 6 juillet, je n'ai cessé de rencontrer les très nombreux responsables du secteur commercial et de multiplier les échanges afin de suivre l'impact de la crise sanitaire. Nous avons pris des mesures d'accompagnement des entreprises dont l'ampleur est inégalée en Europe. Bien sûr, tout ne va pas bien pour les entreprises. À l'heure actuelle, toutefois, nous ne constatons pas de hausse du nombre de défaillances d'entreprises par rapport à la même période les années précédentes.
Il est évident que la fermeture d'une entreprise est toujours un crève-coeur pour un artisan ou un commerçant, indépendamment du niveau du soutien financier dont il peut bénéficier. Mais il ne s'agit, en aucun cas, d'une punition qui leur serait infligée : ils n'ont pas fauté. Au contraire, beaucoup d'entre eux ont travaillé pour adapter les gestes barrières, mettre en oeuvre des procédures sanitaires complexes, mettre en place des protocoles définis par les organisations professionnelles. Les entrepreneurs ont fait beaucoup d'efforts, lors du premier confinement, pour contribuer à limiter la propagation du virus.
J'ai proposé au ministre de l'économie, des finances et de la relance ainsi qu'au Premier ministre des mesures nouvelles d'accompagnement, fortement amplifiées, dont nous estimons le coût à 15 milliards d'euros pour le mois de novembre. Nous avons par exemple simplifié l'accès au Fonds de solidarité et augmenté l'aide financière de compensation des pertes d'activité de 1 500 à 10 000 euros. Nous avons fait tout cela en concertation avec les acteurs concernés.
J'entends les critiques et les revendications. J'ai d'ailleurs repris dès aujourd'hui contact avec les organisations professionnelles. Nous n'avons aucune garantie que le virus ne persiste pas pendant plusieurs mois. Et nous ne pourrons pas dépenser mensuellement 15 milliards d'euros pendant de nombreux mois. Des rencontres sont prévues avec l'ensemble des branches professionnelles concernées pour renforcer encore la sécurité sanitaire des entreprises, en vue de la reprise d'activité. Nous faisons tout cela avec l'espoir que la clause de revoyure, prévue pour être activée quinze jours après la date des annonces, permette le redémarrage de l'activité.
Le Premier ministre a annoncé hier la fermeture, dans la grande distribution, de certains éléments de vente, afin de rétablir une équité concurrentielle. J'entends que la mesure ne serait pas satisfaisante : réduire l'activité de chacun n'est en effet pas un objectif en soi. Mais il s'agit d'une décision indispensable, et un décret paraîtra très prochainement pour préciser les types de produits qui pourront continuer à être vendus par ces enseignes.
Les petits commerçants ont été blessés par les termes de « produits non essentiels ». Il serait moins blessant de parler de produits de première nécessité. Parallèlement, un effort d'explication des dispositifs d'aide qui sont à leur disposition est nécessaire, afin de les rendre plus faciles d'accès, plus lisibles. En outre, un fonds de 100 millions d'euros a été prévu pour accompagner les collectivités territoriales et les entreprises dans la numérisation des PME. Enfin, il a été décidé que le chiffre d'affaires réalisé en « commande-retrait » ne sera pas pris en compte dans le calcul de l'aide financière du Fonds de solidarité, afin d'inciter les commerçants à utiliser ce dispositif.
Je suis bien entendu preneur des propositions émanant des territoires, et j'ai bien noté celle du Sénat concernant la possibilité de confier aux préfets le droit d'ouvrir certains commerces lorsque la situation sanitaire le permet. Au regard de la gravité de la crise toutefois, le Gouvernement privilégie une mesure qui s'applique sur tout le territoire, avec certes le risque que certains élus locaux ouvrent certains commerces... Le sujet n'est pas la plus ou moins grande contamination qui aurait lieu chez les commerçants, mais le fait que le nombre de lieux ouverts augmente les flux de population.