Intervention de François Bayrou

Commission des affaires économiques — Réunion du 4 novembre 2020 à 9h30
Audition de M. François Bayrou haut-commissaire au plan

François Bayrou, haut-commissaire au Plan :

Je vais aborder ces questions dans mes fonctions de haut-commissaire, mais également de maire et de président de communauté d'agglomération. Mon point de vue sera donc local et prospectif. La question la plus difficile est évidemment celle de la précarité. Il nous faut réfléchir à d'autres approches de lutte contre la pauvreté qui prennent en compte tous ses aspects. En particulier, la solitude est une pauvreté, parfois plus cruelle en ville. Il me semble que la prise en charge des moyens de lutte contre la solitude est un moyen de lutter contre la pauvreté. Par exemple, une personne seule avec 700 euros est dans la misère totale. Deux personnes avec 1400 euros ou trois personnes avec 2100 euros constituent déjà une cellule de vie commune dans laquelle on peut se nourrir. Mais notre système social ne facilite pas les solutions de cet ordre. J'ai été confronté au cas d'une veuve bénéficiaire du RSA qui a recueilli chez elle son beau-père pour passer ce cap difficile : les services sociaux ont alors supprimé leurs allocations au motif de leur vie commune. Chacun est donc reparti chez lui, avec 700 euros, dans un retour à la misère. On ne se tire pas tout seul de l'extrême pauvreté. Or actuellement, la puissance publique a tendance à pousser à la solitude. Avec les bailleurs sociaux, nous avons travaillé pour permettre ce genre de cohabitation ou colocation sans perte d'allocations. À titre personnel, je pense que cela impose un changement de perspective. Ces approches différentes sont prometteuses : elles ne coûtent pas plus cher mais apportent des réponses différentes et plus humaines. Je suis convaincu que l'on peut faire mieux sans dépenser plus.

Cette question rejoint celle du logement - je souligne ici que de nombreux logements sont disponibles en France - et également celle de l'appareil productif, nécessaire pour lutter contre la pauvreté.

Monsieur Menonville, je suis convaincu que la question du travail avec les collectivités territoriales est vitale pour la société. Si nous comparions les nombres de lignes dans les journaux consacrées aux 65 millions de Français non parisiens avec le nombre de lignes susceptibles d'intéresser les deux millions d'habitants de Paris et ses environs, nous constaterions un très grand déséquilibre. Le rééquilibrage de la France est vital, encore faudrait-il que les collectivités territoriales fussent bien équilibrées elles-mêmes. À titre absolument personnel, je trouve que le découpage de certaines régions défie le bon sens. Il ne faut jamais être allé en France pour prétendre que Pau est dans la même région que Limoges, Poitiers ou Bressuire.

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