Intervention de Albéric de Montgolfier

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 10 novembre 2020 à 14h05
Projet de loi de finances 2021 — Examen des rapports sur les missions « gestion des finances publiques » « crédits non répartis » « transformation et fonction publiques » et sur le compte d'affectation spéciale « gestion du patrimoine immobilier de l'état »

Photo de Albéric de MontgolfierAlbéric de Montgolfier, rapporteur spécial :

Je le répète, la fraude à la TVA est une question non pas seulement de recettes publiques, mais aussi de morale et d'équité. Les commerçants physiques, qui sont soumis à des impôts locaux et nationaux, sont concurrencés par des vendeurs d'e-commerce qui ne payent aucune taxe en France. La directrice des douanes nous a indiqué que les volumes de fret étaient en très forte augmentation depuis le confinement. Ses services seront dans l'incapacité de contrôler l'ensemble des déclarations en douane après la suppression des envois à valeur négligeable à compter du 1er juillet 2021. Les administrations sont désarmées face à l'industrialisation du e-commerce.

Les chiffres des transactions fiscales peuvent paraître importants : ils représentent plusieurs années d'impôt. J'ai eu connaissance des éléments de la transaction avec Google lorsque j'étais rapporteur général. Je ne sais pas à quel montant l'administration aurait pu prétendre, mais celle-ci a toujours perdu ses contentieux devant les tribunaux administratifs et le Conseil d'État, faute de pouvoir prouver l'existence d'un établissement stable. La jurisprudence n'est pas favorable à l'administration fiscale et recourir aux conventions judiciaires d'intérêt public permet au moins de recouvrer une partie des sommes dues.

Concernant la fonction publique, quelques décrets sont encore en attente, Amélie de Montchalin l'a reconnu. Cela me conduit à évoquer le sujet de la transformation de l'action publique, pour répondre à Vincent Delahaye ou Christine Lavarde. Pourquoi les crédits de la mission ne sont-ils jamais consommés ? Notre amendement d'appel va nous aider à obtenir des réponses. Nous constatons une politique d'affichage, qui n'est d'ailleurs pas propre à ce Gouvernement. Souvenez-vous du programme de modernisation de l'action publique (MAP) : à chaque fois, il s'agit de décisions très technocratiques, avec des comités d'experts, et cela finit dans des archives sur des étagères. Il y a quelques années, la commission avait expertisé cette question. Dans tous les pays qui ont réussi leur transformation de l'action publique - je pense notamment à la Suède, à l'Allemagne, au Canada -, ces objectifs ont été portés au plus haut niveau. En France, nous ne sommes pas capables d'assumer les choses. Donc, pour obliger le Gouvernement à se prononcer sur le bien-fondé de cet objectif de transformation, nous allons proposer un amendement de réduction des crédits.

Dernier sujet, l'immobilier de l'État. J'ai siégé, à une époque, au Conseil de l'immobilier de l'État. En ce moment, le confinement a bon dos pour ne pas répondre à un certain nombre de questions. Quoi qu'il en soit, la conclusion à en tirer est connue : l'immobilier nécessite une professionnalisation. L'État est un piètre gestionnaire, notamment par rapport aux collectivités. L'exemple à suivre nous vient d'Allemagne, où une agence s'occupe de l'entretien des bâtiments en faisant payer les administrations.

Je me souviens également d'un rapport, il y a quelques années, avec Philippe Dallier, concernant l'immobilier et la justice. Nous nous étions aperçus que l'immobilier de certains tribunaux comme celui de la cour d'appel de Versailles étaient gérés par des magistrats délégués à l'équipement, qui n'avaient aucune compétence pour s'occuper de la gestion du chauffage, par exemple. Dans beaucoup d'administrations, c'est un fonctionnaire qui, en plus de son travail, va s'occuper de gérer les fluides, les problèmes de toiture et autres. Il serait temps d'avoir un vrai gestionnaire de la cité administrative, spécialiste de l'immobilier.

Pour répondre enfin à la question de Vincent Segouin, l'IGF a estimé que le gain lié à l'impact du prélèvement à la source pourrait être de 1 466 à 1 621 ETP ; de son côté, la DGFiP n'a fait aucun chiffrage.

La mission, je le conçois, est assez décevante cette année. En temps normal, nous aurions été sur une position plus réservée. Néanmoins, avec ce contexte très particulier, nous vous proposons l'adoption des crédits. Et pour finir sur une note positive, je voudrais souligner la mobilisation de la DGFiP pour le versement du fonds de solidarité et pour les mécanismes de soutien en général.

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