Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation

Réunion du 10 novembre 2020 à 14h05

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

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  • administration
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La réunion

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Debut de section - PermalienPhoto de Claude Raynal

Nous examinons démarrons cet après-midi par l'examen du rapport en nouvelle lecture sur le projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne en matière économique et financière (Ddadue).

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Bizet

Mes chers collègues, nous sommes réunis à nouveau pour examiner le projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne en matière économique et financière. Comme vous le savez, le 22 octobre dernier, la commission mixte paritaire (CMP) n'est pas parvenue à l'adoption d'un texte commun. Ce sont les dispositions de protection des consommateurs sur les plateformes numériques, prévues à l'article 4 bis, qui ont constitué la pierre d'achoppement. Les députés de la majorité n'ont pas souhaité reprendre ces dispositions, issues elles-mêmes d'une proposition de loi de Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques, estimant inopportune une initiative française en la matière. Les députés privilégient un accord européen - que nous appelons tous de nos voeux -, mais qui risque de prendre du temps à être trouvé.

C'est pourquoi, la semaine dernière, le projet de loi a été examiné à nouveau par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture, sur la base du texte qu'elle avait adopté en octobre dernier. Sur les trente-quatre articles restant en discussion, l'Assemblée nationale en a adopté vingt-cinq sans modification. Sans surprise, elle a maintenu la suppression de l'article 4 bis. Huit articles ont par ailleurs été adoptés avec des modifications, tandis que l'article 16 a été rouvert pour corriger une référence, afin de tenir compte d'un texte entré en vigueur entretemps. Pour mémoire, en première lecture, l'examen de douze articles avait été délégué à la commission des affaires économiques, qui ne s'est pas saisie en nouvelle lecture. Il me revient donc de vous faire part de mon point de vue et de mes propositions sur l'ensemble du texte restant en discussion.

Étant donné que nous avons déjà eu l'occasion de les évoquer, je ne reviendrai pas de façon exhaustive sur les différentes modifications adoptées par l'Assemblée nationale en première, puis en nouvelle lecture. Je souhaiterais insister sur deux points.

Concernant l'article 13, en nouvelle lecture, l'Assemblée nationale a étendu le périmètre de la demande initiale d'habilitation. Il s'agit de transposer une directive adoptée en octobre dernier : le Gouvernement entend ainsi profiter du texte en navette pour y glisser une nouvelle habilitation. Cela ne me semble pas être une manière de procéder et pose de surcroît des difficultés juridiques au regard de la jurisprudence dite de « l'entonnoir » du Conseil constitutionnel. Aucune des deux assemblées n'avait été saisie de cette demande d'habilitation en première lecture. C'est pourquoi je vous propose un amendement pour supprimer cet ajout.

Le second point concerne l'article 4 bis, cause de l'échec de la commission mixte paritaire. Nos collègues Sophie Primas et Laurent Duplomb proposent de rétablir l'article 4 bis issu de la proposition de loi visant à garantir le libre choix du consommateur dans le cyberespace, qui prolonge les articles du projet de loi ayant pour objet de renforcer la protection du consommateur. Je rappelle que cette proposition de loi a été adoptée à l'unanimité par le Sénat et cosignée par plus de la moitié des sénateurs, quelles que soient les travées sur lesquelles ils siègent. L'enjeu est à la fois de conférer davantage de pouvoir au consommateur en ligne en ouvrant le champ des possibles et de donner, par voie de conséquence, plus de place à l'innovation sur des marchés numériques dominés par quelques géants. L'amendement propose ainsi de consacrer un principe dit de « neutralité des terminaux » et de favoriser l'interopérabilité des plateformes. Enfin, il prévoit de consacrer un article du code de la consommation à la lutte contre les interfaces trompeuses, toutes ces conceptions d'interface en ligne qui manipulent nos choix - l'exemple type est celui de la case pré-cochée. Notre désaccord en CMP portait sur un point de méthode : le Gouvernement ne veut pas agir au niveau national, car une proposition de texte rejoignant ces orientations doit être présentée début décembre par la Commission européenne. De plus, il semble que le secrétaire d'État chargé de la transition numérique et des communications électroniques souhaite apposer son empreinte sur un texte national, mais c'est méconnaître le fonctionnement communautaire : l'Europe, c'est le temps long, en particulier sur ces sujets d'encadrement du numérique - songeons au règlement général sur la protection des données (RGPD) !

Ce qui nous est proposé est donc l'occasion de faire de la France le fer de lance de cette adaptation de notre droit économique à l'économie numérique, en attendant qu'un texte soit adopté au niveau européen dans les années à venir. Ce texte arrive d'autant plus à point nommé que le débat fait rage autour du soutien aux petits commerces.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Raynal

En effet, la pratique européenne confirme l'intérêt d'adopter dès aujourd'hui ce texte, et nous regrettons de ne pas avoir eu de CMP conclusive.

EXAMEN DES ARTICLES

Article 1er

L'article 1er est adopté sans modification.

Article 3

L'article 3 est adopté sans modification.

Article 4

L'article 4 est adopté sans modification.

Article 4 bis

Debut de section - PermalienPhoto de Patrice Joly

Je souhaiterais souligner l'opposition de la majorité de l'Assemblée nationale, qui est allée jusqu'à dire qu'une disposition de cet article entraverait le Gouvernement dans les négociations européennes. Or, en aucun cas, le Parlement ne peut entraver le fonctionnement des institutions républicaines, et donc du Gouvernement. Il apporte au contraire sa contribution sur ce sujet essentiel, la protection des consommateurs.

Dans le cadre de cette CMP, nous étions prêts à faire un véritable effort sur le thème sensible que constitue la répartition des compétences entre l'État et les régions sur les crédits du Fonds européen agricole pour le développement rural (Feader). Malgré cela, nous n'avons pas pu faire entendre raison à la majorité de l'Assemblée nationale, et nous n'avons pas pu obtenir un accord des deux chambres. Ainsi, nous partageons le point de vue du rapporteur sur l'article 4 bis; lequel reprend la proposition de loi qui avait été adoptée à l'unanimité.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Bizet

Nous avons plusieurs moyens pour faire passer un message aux instances communautaires : le dialogue politique, les résolutions européennes, et, plus encore, le vote d'un texte. Je vous renvoie à la politique du Gouvernement concernant la taxation des GAFA- Google, Apple, Facebook, Amazon. Comme les négociations à l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) tardent à aboutir à une règle en la matière, la France s'est dotée d'une taxation propre, qui sera abrogée lorsqu'elle sera adoptée au niveau européen. Nous sommes ici dans le même cas de figure, et l'impératif de digitalisation des petits commerces rend l'adoption d'une législation d'autant plus urgente dans le contexte de pandémie que nous connaissons.

L'amendement COM-1 rectifié est adopté.

L'article 4 bis est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 5

L'amendement COM-2 est adopté.

L'article 5 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 5 bis

L'article 5 bis est adopté sans modification.

Article 6 bis

L'amendement COM-3 est adopté.

L'article 5 bis est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 7

L'article 7 est adopté sans modification.

Article 9

L'article 7 est adopté sans modification.

Article 10

L'article 10 est adopté sans modification.

Article 11

L'article 11 est adopté sans modification.

Article 12

L'article 12 est adopté sans modification.

Article 13

L'amendement COM-6 est adopté.

L'article 13 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 14

L'article 14 est adopté sans modification.

Article 15

L'article 15 est adopté sans modification.

Article 16

L'article 16 est adopté sans modification.

Article 16 ter

L'article 16 ter est adopté sans modification.

Article 17

L'article 17 est adopté sans modification.

Article 18

L'article 18 est adopté sans modification.

Article 19 bis

L'article 19 est adopté sans modification.

Article 21

L'article 21 est adopté sans modification.

Article 22 bis

L'article 22 est adopté sans modification.

Article 22 quater

L'article 22 quater est adopté sans modification.

Article 22 quinquies

L'amendement COM-5 est adopté.

L'article 22 quinquies est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 22 sexies

L'article 22 sexies est adopté sans modification.

Article 24

L'article 24 est adopté sans modification.

Article 24 bis

L'article 24 bis est adopté sans modification.

Article 24 ter A

L'article 24 ter A est adopté sans modification.

Article 24 ter

L'article 24 ter est adopté sans modification.

Article 25

L'amendement COM-4 est adopté.

L'article 25 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 26

L'article 26 est adopté sans modification.

Article 27

L'article 27 est adopté sans modification.

Article 27 bis

L'article 27 bis est adopté sans modification.

Article 28

L'article 28 est adopté sans modification.

Article 29

L'article 29 est adopté sans modification.

Le projet de loi est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Le sort des amendements examinés par la commission est retracé dans le tableau suivant :

TABLEAU DES SORTS

Habilitation à légiférer par ordonnance pour transposer deux directives relatives à la garantie légale de conformité Article 3

Adaptation du droit national au règlement européen relatif au blocage géographique injustifié Articles 4

Lutte contre le blocage géographique injustifié sur le territoire national Article 4 bis

Nouveaux instruments de régulation économique des plateformes numériques Auteur N° Sort de l'amendement Mme PRIMAS et M. DUPLOMB COM-1 Adopté Article 5

Adaptation du droit national à un règlement européen sur la coopération entre les autorités nationales compétentes en matière de protection des consommateurs Auteur N° Sort de l'amendement M. DUPLOMB COM-2 Adopté Article 5 bis

Suppression par un office d'enregistrement d'un nom de domaine sur injonction de la DGCCRF Article 6 bis

Habilitation à légiférer par ordonnance pour adapter le code de l'environnement au règlement sur la surveillance des marchés et la conformité des produits Auteur N° Sort de l'amendement M. DUPLOMB COM-3 Adopté Article 7

Habilitation à légiférer par ordonnance pour transposer une directive et un règlement européens portant sur les relations commerciales dans les secteurs alimentaire et numérique Article 9

Adaptation du droit en matière d'obligations déclaratives relatives au secteur vitivinicole Article 10 Adaptation du code des douanes aux dispositions du règlement européen 952/2013 relatives à la fin du monopole des actes de représentation en douane et à l'enregistrement préalable des représentants en douane Article 11

Adaptation du code monétaire et financier avec le règlement relatif aux contrôles de l'argent liquide (« cash control ») Article 12

Transposition de la directive (UE) 1019/2162 du Parlement européen et du Conseil concernant l'émission des obligations garanties et la surveillance publique des obligations garanties, dites « covered bonds » Article 13

Dispositions visant à transposer la directive (UE) 2019/2034 concernant la surveillance prudentielle des entreprises d'investissement Auteur N° Sort de l'amendement M. BIZET COM-6 Adopté Article 14

Habilitation du Gouvernement à prendre par voie d'ordonnance les mesures nécessaires pour transposer en droit interne la directive (UE) 2019/1160 concernant la distribution transfrontalière des organismes de placement collectif Article 15

Clarification des termes de l'habilitation portant transposition du paquet bancaire Article 16

Rétablissement d'une disposition du code de commerce portant sur la nullité de clauses interdisant la cession de créances, supprimée par l'ordonnance du 24 avril 2019 Article 16 ter

Nullité des clauses interdisant la cession de créance en matière d'assurance automobile Article 17

Dérogation à la règle du secret professionnel en matière fiscale pour la publication de certaines informations relatives aux bénéficiaires d'aides d'État à caractère fiscal Article 18

Conditions zootechniques et généalogiques applicables à l'élevage, aux échanges et à l'entrée dans l'Union de reproducteurs de race pure, de reproducteurs porcins hybrides et de leurs produits germinaux Article 19 bis

Rôle des chambres d'agriculture dans la collecte et le traitement des données relatives aux exploitations et des données relatives à l'identification et la traçabilité des animaux Article 21

Habilitation du Gouvernement à prendre par voie d'ordonnance les mesures nécessaires pour transposer en droit interne la directive (UE) 2019/1153 fixant les règles facilitant l'utilisation d'informations financières et d'une autre nature aux fins de la prévention ou de la détection de certaines infractions pénales, ou des enquêtes ou des poursuites en la matière Article 22 bis

Publicité pour les vaccins vétérinaires à destination des éleveurs professionnels Article 22 quater

Lutte contre la désertification vétérinaire Article 22 quinquies

Biostimulants Auteur N° Sort de l'amendement M. DUPLOMB COM-5 Adopté Article 22 sexies

Contrôles des matières fertilisantes Article 24

Prorogation des règles applicables à la gestion du FEADER pendant la période de transition avec la prochaine programmation et poursuite, au titre de la programmation suivante, du transfert de l'autorité de gestion du FEADER aux régions Article 24 bis

Habilitation à transposer par ordonnance la directive du 17 avril 2019 sur le droit d'auteur et les droits voisins dans le marché unique numérique Article 24 ter A

Conséquences d'un arrêt de la CJUE du 8 septembre 2020 qui fragilise les organismes de gestion collective Article 24 ter

Habilitation à transposer par ordonnance la directive 2018/1808 relative aux services de médias audiovisuels Article 25

Transposition de la directive « ECN+ » et mesures de simplification des procédures et renforcement de l'efficacité des enquêtes de l'Autorité de la concurrence Auteur N° Sort de l'amendement M. DUPLOMB COM-4 Adopté Article 26

Adaptation du droit interne au règlement européen relatif aux colis transfrontières et habilitation du Gouvernement à, d'une part, transposer par ordonnance la directive portant code européen des communications électroniques, d'autre part, procéder à diverses mesures d'adaptation et de simplification du code des postes et des communications électroniques Article 27

Relevé géographique des déploiements des réseaux Article 28

Ratification d'une ordonnance relative aux marques de produits ou de services Article 29

Projet de loi de finances 2021 - Examen des rapports sur les missions « Gestion des finances publiques », « Crédits non répartis », « Transformation et fonction publiques » et sur le compte d'affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l'État »

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Raynal

Nous passons maintenant à l'examen des rapports sur les missions « Gestion des finances publiques », « Crédits non répartis », « Transformation et fonction publiques » et sur le compte d'affectation spéciale (CAS) « Gestion du patrimoine immobilier de l'État ».

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Nougein

Je commencerai par la mission « Crédits non répartis », qui n'appelle que deux brèves remarques de ma part. Ses deux dotations sont prévues par la loi organique relative aux lois de finances (LOLF). La première, la « dotation pour dépenses accidentelles et imprévisibles » bénéficie de la même ouverture de crédits depuis 2018, soit 124 millions d'euros. Il faut néanmoins rappeler qu'elle avait servi de réserve de budgétisation massive au début de la crise sanitaire, avec une augmentation de plus de 1,5 milliard d'euros votée dans la deuxième loi de finances rectificative (LFR) pour 2020. Cette réserve a permis d'abonder différentes missions par voie réglementaire pour des dépenses urgentes, dans l'attente d'un autre projet de loi de finances rectificative (PLFR). Notre commission s'est montrée attentive à ce que de telles dépenses soient bien liées à la crise sanitaire, et que le Parlement soit par ailleurs bien informé avant que les décrets de répartition ne soient publiés, ce qui fut le cas.

La seconde dotation, qui concerne la « provision relative aux rémunérations publiques », fait de nouveau l'objet d'une ouverture de crédits, afin de financer trois mesures : le versement de la prime de fidélisation en Seine-Saint-Denis ; le déploiement du forfait mobilité durable dans la fonction publique d'État ; ainsi que des revalorisations indemnitaires, décidées lors du rendez-vous salarial de la fonction publique d'il y a trois mois.

La ventilation des crédits entre ces trois mesures n'est pas précisée par les documents budgétaires. Pour nous, c'est un manque de transparence, alors que cette dotation atteint un montant exceptionnellement élevé : près de 200 millions d'euros en 2021, contre 26 millions d'euros en 2020 ! Il faut espérer que le Gouvernement les répartisse au cours du débat en séance. Malgré ces réserves, nous vous proposerons l'adoption des crédits de cette mission - un rejet ayant peu de signification.

J'en viens maintenant à la mission « Gestion des finances publiques », la plus importante budgétairement. Elle porte les crédits des deux grandes administrations de réseau du ministère de l'économie, des finances et de la relance, c'est-à-dire la direction générale des finances publiques (DGFiP) et la direction générale des douanes et droits indirects (DGDDI). Elle porte également les crédits du secrétariat général du ministère et d'une pluralité de structures comme la direction du budget ou Tracfin.

Le périmètre de la mission est modifié dans le cadre du projet de loi de finances pour 2021, puisqu'elle perd le programme 148 « Fonction publique » rattaché à la mission « Transformation et fonction publiques ». Même retraités de cette mesure de périmètre, les crédits de la mission baissent entre les lois de finances pour 2020 et pour 2021 : de 1,11 % pour les autorisations d'engagement (AE) et de 1,28 % pour les crédits de paiement (CP). La mission continue donc de contribuer aux efforts de rationalisation de la dépense publique, certes bien rares dans ce PLF. Au total, ses crédits s'élèvent à environ 10 milliards d'euros.

La diminution des crédits provient principalement des dépenses de personnel, qui représentent 80 % des crédits de la mission. Ces dépenses diminueront de 1,42 % en 2021, du fait d'un schéma d'emplois négatif, attendu à -2 033 équivalents temps plein (ETP), dont -1 800 pour la DGFiP.

Les administrations de la mission ont été particulièrement mobilisées durant la crise sanitaire, je pense notamment à la DGFiP. La direction a dû continuer d'assurer ses missions traditionnelles essentielles, comme la gestion fiscale locale et nationale, tout en assumant de nouvelles missions. On lui a ainsi confié la gestion du fonds de solidarité, et elle a mené un travail de veille sur les entreprises, les collectivités locales et les hôpitaux.

Le secrétariat général du ministère a, quant à lui, joué un rôle de coordination très important, puisqu'il a, d'une part, coordonné les plans de continuité d'activité (PCA) des directions du ministère, et, d'autre part, coordonné le travail de la cellule de continuité économique.

Pour la DGDDI, les effets sont un peu plus particuliers et doivent être étudiés sous l'angle du Brexit. La crise sanitaire a conduit à une chute brutale du volume des échanges et des trafics, aériens comme routiers. Les effectifs ont dû être redéployés, de la même façon que les 600 ETP recrutés pour faire face au Brexit avaient dû être réaffectés après son report d'un an. Alors que le rétablissement de la frontière entre la France et le Royaume-Uni approche, les échanges moindres devraient rendre la période de transition plus facile pour la douane, qui craint beaucoup moins le risque d'embouteillages dans ces nouvelles conditions. Elle a même demandé à reporter en 2021 le recrutement des 100 derniers ETP qui devaient compléter ses effectifs face au Brexit. La direction craint en effet de les recruter pour rien, et qu'ils soient en surnuméraire.

Nous avons constaté, y compris durant nos auditions, que les crédits de la mission et de ces directions sont en réalité moins affectés par la crise sanitaire et économique que par les processus de transformation entamés par ces administrations bien avant la crise. Ces processus n'ont pas été reportés et la crise a même renforcé la nécessité de certains d'entre eux. Ils sont inscrits dans le plan de transformation ministériel publié en juin 2020 et sont suivis avec attention par le secrétariat général. Nous allons vous en présenter six.

Le premier concerne la réorganisation territoriale de la DGFiP et de la DGDDI, un sujet que nous abordons régulièrement à la commission. La DGFiP poursuit la mise en place de son nouveau « réseau de proximité », qui comprend trois axes. Le premier est la mise en place d'un réseau de 1 200 conseillers aux décideurs locaux d'ici à 2022 ; le deuxième est l'augmentation des points de contact de la DGFiP sur le territoire, par le biais d'une contractualisation avec les collectivités ; le troisième est la délocalisation de services des métropoles vers les villes moyennes. Les cinquante premières villes ont été choisies et les déménagements devraient avoir lieu entre 2021 et 2024. Pour la DGDDI, sa réorganisation tient compte des effets du Brexit, elle bascule ses emprises de l'est et du sud de la France vers les Hauts-de-France, avec l'ouverture de nouveaux bureaux et brigades.

Le second sujet concerne le transfert de la gestion du recouvrement de certaines taxes et impositions de la douane vers la DGFiP. Cette réforme doit s'accompagner de gains de productivité et d'efficacité. Deux millions d'euros sont en parallèle affectés à la création d'un portail unique de recouvrement fiscal et social pour les entreprises, un projet qui a pris du retard. Ce transfert impose aussi à la Douane de réfléchir à ce qui constitue son « coeur de métier », et nous soutenons son recentrage sur ses missions stratégiques : le contrôle des flux passagers et marchandises.

Le troisième enjeu concerne la gestion des ressources humaines, essentielle quand on se rappelle que la DGFiP et la DGDDI comptent à elles deux près de 117 000 emplois - environ 100 000 pour la DGFiP et 17 000 pour les douanes. Les transformations en cours appellent à la révision des règles de mobilité ou de rémunération. Des dispositifs d'accompagnement sont mis en place et pourraient s'avérer coûteux, mais nous manquons d'informations sur ce sujet, ce qui est regrettable. Je souligne par ailleurs que nous avons consacré un développement particulier à la gestion des ressources humaines par la DGDDI après un rapport de la Cour des comptes plutôt accablant sur ce point. La directrice a elle-même reconnu que le régime indemnitaire était assez catastrophique et l'a qualifié de « stratification indemnitaire ». Les règles de temps de travail ne sont pas non plus respectées dans toutes les branches, avec soit une durée de travail bien inférieure à la règle, soit bien supérieure, ce qui conduit certains personnels à avoir des centaines de jours à récupérer ! Heureusement, des réformes sont en cours.

Le quatrième processus de transformation concerne le recours accru aux nouvelles techniques d'analyse de données pour améliorer les résultats du contrôle fiscal. Le recours à ces techniques doit également permettre de détecter les cas de fraude les plus complexes. Comme je le rappelais avec notre ancien collègue Thierry Carcenac dans notre rapport d'information sur le contrôle fiscal, on manque encore d'indicateurs précis sur ce point.

Mon collègue Albéric de Montgolfier va évoquer les deux derniers processus de transformation en cours ainsi que la mission « Transformation et fonction publiques ».

Debut de section - PermalienPhoto de Albéric de Montgolfier

Il y a quelques années, nous avions commis, avec mon collègue Philippe Dallier, un rapport d'information sur cette mission, dans lequel nous évoquions la fraude à la TVA. Celle-ci demeure encore aujourd'hui un enjeu considérable pour les deux directions, et nous sommes encore loin d'atteindre nos objectifs. C'est d'autant plus important que le commerce électronique explose aujourd'hui, avec la crise sanitaire et le confinement, et vient concurrencer les commerces de proximité. Or, l'inspection générale des finances (IGF) avait rappelé que 98 % des vendeurs sur les plateformes internet n'étaient pas immatriculés à la TVA. De même, nous attendons toujours la traduction opérationnelle de certaines dispositions législatives votées par le Parlement, comme le principe de responsabilité solidaire des plateformes ou la concrétisation de la facturation électronique. Par ailleurs, avec la fin de l'exonération pour les envois dits de « valeur négligeable », la DGDDI nous a confirmé qu'elle s'attendait à voir exploser le fret aérien. En effet, jusqu'à maintenant, tous les envois de moins de vingt-deux euros étaient exonérés de TVA. La suppression de cette règle conduit à l'explosion du nombre de déclarations, que la DGDDI ne sera pas en mesure de contrôler. S'ajoute à cela l'impossibilité d'ouverture des commerces physiques avec le confinement et donc le report sur le commerce électronique. Ces flux sont donc sans commune mesure avec ceux d'il y a quelques années. On peut ainsi regretter l'absence de mise en priorité de la lutte contre la fraude sur la TVA. Les techniques de datamining ne seront pas suffisantes, les directions doivent aussi se doter de nouveaux moyens matériels, comme des scanners, qu'elle n'a cependant pas obtenus, malgré ses efforts, sur le plan de relance.

Le cinquième sujet que nous souhaitions aborder est celui du pilotage par les directions du ministère de leurs projets informatiques. Notre commission avait demandé un rapport à la Cour des comptes sur cette question, sur le périmètre État. Nous constatons des dépassements de délais et des coûts encore trop importants, qui traduisent un défaut de gouvernance.

Le sixième axe de transformation concerne la dématérialisation des administrations et des procédures administratives. Même si celle-ci peut offrir des gains de productivité aux administrations et une simplification pour les usagers, elle ne doit pas se faire au détriment de ces derniers, et donc il faut maintenir un accueil physique et téléphonique de qualité. Tous ne peuvent pas réaliser leurs démarches sur internet, notamment parce qu'ils n'ont pas accès au numérique. Il est assez scandaleux de voir que le numéro d'aide proposé est parfois surtaxé. On nous a dit que les numéros surtaxés prendraient fin au 1er janvier 2021, mais encore faut-il qu'ils donnent vraiment accès à un interlocuteur, ce qui n'est pas toujours le cas.

Cette réflexion me conduit naturellement vers la mission « Transformation et fonction publiques ». Cette mission correspond en réalité à la mission « Action et transformation publiques », créée en 2018. Elle a été renommée pour le PLF 2021, avec le rattachement du programme 148 « Fonction publique ». Elle se compose donc désormais de cinq programmes à vocation interministérielle, qui concernent des sujets aussi variés que la rénovation des cités administratives de l'État, les ressources humaines ou encore les start-up d'État. On ne peut qu'être dubitatifs sur les résultats de cette mission, et ce pour plusieurs raisons.

La première, c'est la consommation des crédits. En 2021, ces derniers augmenteraient de 14 % à périmètre constant et avoisineraient les 500 millions d'euros, ce qui laisse supposer une montée en charge de la mission. Toutefois, cela fait deux ans que nous constatons chaque année de fortes sous-consommations, et cela ne devrait pas changer en 2020, puisque près de 75 % des crédits sont annulés dans le quatrième projet de loi de finances rectificative (PLFR4). Autant dire que cette mission relève plutôt de l'affichage que de la réalité. C'est pour cette raison que nous vous proposerons, avec Claude Nougein, un amendement d'appel annulant 75 % des crédits des trois programmes, qui connaissent chaque année des sous-exécutions allant de 80 % à 90 %. Il est temps que le Gouvernement nous donne des explications plus convaincantes quant à la non-consommation des crédits.

La seconde raison tient à la capacité des administrations à engager tous les crédits mis à leur disposition. Les annulations pour 2020 ne tiennent pas seulement à la crise sanitaire : elles s'expliquent aussi par les retards de contractualisation et par un décalage entre les besoins anticipés des porteurs de projets et leurs besoins réels. Après trois ans, on aurait pu penser que ces problèmes aient été résolus.

Nous nous sommes enfin intéressés au changement de périmètre de la mission ; nous avons auditionné la ministre de la transformation et de la fonction publiques Amélie de Montchalin. Son ministère exerce maintenant la tutelle sur trois directions transversales : la direction interministérielle de la transformation publique, la direction générale de l'administration et de la fonction publique et la direction interministérielle du numérique. La ministre nous a dit ne pas être la ministre de la fonction publique, mais celle de la « qualité des services publics ». Si nous saluons cet objectif, nous sommes plutôt réservés sur la capacité des programmes de la mission à concourir à cet objectif. Les chantiers du ministère en matière de dématérialisation et de réforme de la fonction publique sont par ailleurs considérables et avancent plutôt lentement. Sur la fonction publique, le Gouvernement a rapidement abandonné ses objectifs de rationalisation, même sur les ministères non régaliens. Le ministère doit également finir de traduire toutes les dispositions de la loi de transformation de la fonction publique, y compris sur le télétravail en période « ordinaire ».

Je présenterai maintenant rapidement le compte d'affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l'État ». Globalement, il y a peu de changements : pour être très clair, je considère que l'État n'a pas de politique immobilière. Celle-ci souffre toujours du manque d'une gouvernance solide et d'un manque de compétences. Au 31 décembre 2019, la surface totale des bâtiments de l'État était en effet de 96,8 millions de mètres carrés, pour une valeur comptable estimée à 65,7 milliards d'euros. Force est de reconnaître que la connaissance du parc s'est améliorée, sauf pour les opérateurs, qui sont très en retard sur ce point. Cela est très inquiétant.

Le CAS est supposé servir de vecteur budgétaire pour financer des opérations immobilières structurantes et des dépenses d'entretien lourd. On peut toutefois se féliciter du fait que les dépenses d'entretien soient sanctuarisées, même si leur montant, qui s'élève à 160 millions d'euros, peut sembler faible. L'entretien est essentiel pour éviter que les biens non utilisés de l'État continuent de se dégrader.

Les recettes et les dépenses du CAS connaissent une baisse tendancielle, même si l'année 2019 a constitué une exception pour les cessions, du fait de la vente de deux biens exceptionnels, dont l'îlot Saint-Germain, ayant représenté 70 % de ses recettes. En 2021, les produits de cession sont attendus à 280 millions d'euros, un point bas, et les redevances domaniales à 90 millions d'euros. Les dépenses sont, elles, estimées à 275 millions d'euros. Résultat, la politique immobilière de l'État est fragmentée : le CAS ne représente que 15 % des dépenses d'investissement de l'État en matière immobilière et environ 4 % à 7 % du total des crédits qui sont consacrés à l'immobilier.

Selon la direction de l'immobilier de l'État, il est encore trop tôt pour avoir une estimation des effets de la crise sanitaire sur les recettes et les dépenses du CAS. Les redevances domaniales devraient largement dépasser la prévision révisée : elles s'élevaient déjà à 96 millions d'euros fin octobre. En revanche, les produits de cessions seraient faibles en 2021, en raison des effets conjugués de la conjoncture, ou encore de la difficulté de trouver des acheteurs. Si la prévision révisée pour 2020 était de 220 millions d'euros, les produits encaissés fin octobre s'élevaient seulement à 126 millions d'euros.

Marginalisé, le CAS est aussi contourné dans ses règles mêmes de fonctionnement. Les produits de cessions sont en principe répartis à égalité entre les anciens ministères occupants et le compte d'affectation spéciale, mais ce n'est pas toujours le cas. D'autres bénéficient par ailleurs d'avances sur cession, comme le ministère de la défense, de l'Europe et des affaires étrangères, ou encore la présidence de la République.

Le CAS ne suffit donc plus pour porter les grands projets de l'État dans le domaine immobilier : la rénovation des cités administratives est portée par le programme 348 de la mission « Transformation et fonction publiques » et la rénovation thermique des bâtiments publics fait l'objet d'une action dans le programme 362 « Écologie » de la mission « Plan de relance ». L'enveloppe allouée aux bâtiments publics serait de 4 milliards d'euros, dont 2,7 milliards d'euros pour les bâtiments de l'État, soit bien plus que le CAS n'est en l'état actuel capable de mobiliser.

Il faut donc s'interroger sur la réforme du CAS et de ses principes de fonctionnement. Deux objectifs doivent être plus particulièrement poursuivis : le premier est la diversification des modes de valorisation des biens non utilisés par l'État. Les cessions sont de plus en plus dépendantes de biens « exceptionnels », et cette contrainte pèse sur le solde du CAS, extrêmement sensible à la conjoncture. Les modes de valorisation du parc doivent donc être diversifiés. Le second objectif est de faire participer le parc immobilier de l'État à l'effort en faveur de la transition écologique. Les progrès réalisés sur ce point demeurent cependant bien difficiles à suivre.

Nous sommes donc très loin de l'objectif de transformation de la gestion immobilière de l'État. Néanmoins, nous vous proposerons l'adoption des crédits de l'ensemble des missions et du compte d'affectation spéciale, en raison de la conjoncture très particulière dans laquelle nous nous trouvons cette année. La DGFiP a, par exemple, montré une très grande réactivité sur le versement du fond de solidarité même si l'on peut regretter qu'un certain nombre d'objectifs aient été oubliés, parmi lesquels la lutte contre la fraude à la TVA. Cette question n'est pas simplement un problème de recettes publiques, mais aussi une question morale et d'équité de traitement, notamment entre les commerçants et le e-commerce.

Enfin, je vous précise que, sur la mission « Gestion des finances publiques », les articles 54 octies, 54 nonies et 54 decies, ainsi qu'un amendement de crédit tirant les conséquences de ces articles ont été adoptés hier après-midi à l'Assemblée nationale. Compte tenu de leur vote tardif, nous n'avons pas encore eu le temps nécessaire pour les expertiser et nous vous présenteront notre analyse le 19 novembre, lors de l'examen définitif des missions et articles rattachés.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Husson

Vous avez mentionné l'intérêt porté à la qualité des services publics par la ministre de la transformation et de la fonction publiques. Un certain nombre de citoyens regrettent parfois les conditions d'accès et la qualité des services publics en raison de leur éloignement. Comment ce sujet est-il suivi par ce ministère, et quel est votre point de vue sur le développement du « tout numérique » ?

Comment la fraude peut-elle survenir dans le cadre des dispositifs de réponse à la crise que constituent le fonds de solidarité et l'indemnisation du chômage partiel ? La DGFiP s'est-elle organisée pour les intégrer, et si oui, de quelle manière ?

Lors du troisième projet de loi de finances rectificative (PLFR3), nous avions adopté un dispositif visant à annuler les redevances domaniales pour les occupants du domaine public de l'État dans les secteurs touchés par la crise, parmi lesquels la restauration, le tourisme et l'hébergement. Avez-vous des statistiques démontrant que le dossier est suivi et que cette politique est mise en oeuvre ?

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Nougein

Dans le recours aux dispositifs de réponse à la crise, la fraude est un enjeu. Un certain nombre de sociétés dites « éphémères » déclarent beaucoup de personnels et touchent ainsi de fortes indemnités de chômage partiel. Mais elles disparaissent ensuite rapidement, ce qui les rend impossibles à contrôler ! Il en est de même pour le fonds de solidarité, où les outils du datamining ont été mobilisés pour détecter a priori les cas de « fraude manifeste », et pas forcément les plus complexes. Cela nécessite de nouvelles adaptations, qui demanderont un gros travail dans les semaines et les mois à venir, y compris pour des contrôles a posteriori. Il est évident que la fraude sera significative.

Debut de section - PermalienPhoto de Albéric de Montgolfier

Nous avions déjà eu ce débat durant l'un des derniers PLFR, notamment sur le chômage partiel : nous nous demandions pourquoi quasiment seul un numéro de système d'identification du répertoire des établissements (Siret) était demandé. La philosophie retenue par l'administration a été la volonté d'aller vite, ce qui peut être soutenu, dans un contexte de crise et dans lequel une partie des agents était également en télétravail. Il en résulte un traitement des demandes de fonds de solidarité ou de chômage partiel quasi automatisé, avec des contrôles assez sommaires. Si l'administration ne s'interdit pas des vérifications a posteriori, elle a reconnu ne procéder qu'à très peu de contrôles a priori, et les dispositifs de soutien sont accordés très largement.

Le numérique satisfait indéniablement une grande partie des usagers, mais cela ne suffit pas : certaines personnes âgées ont des difficultés à accéder à ces services, d'autres encore ne disposent pas d'une bonne connexion internet. Et même avec une bonne connexion, le système de traitement par des outils numériques ne permet pas toujours de répondre à la question posée. Aussi, un certain nombre de dossiers nécessitent un contact personnel spécifique, qu'il soit physique ou téléphonique. C'est là que le bât blesse. Par ailleurs, lorsqu'on observe les statistiques, la DGFiP a diminué ses effectifs sur le terrain en fermant des trésoreries, mais pas dans les administrations centrales, en tout cas pas dans la même ampleur. Si le Gouvernement a annoncé que toutes les créations de postes à partir de 2021 se feraient sur le territoire, dans la réalité, il semble qu'il y ait toujours autant de monde dans les couloirs de Bercy. Cela explique en partie l'insatisfaction de nos concitoyens sur le terrain, qui voient le taux de prélèvement obligatoire toujours aussi élevé, tout en ayant l'impression que les services publics ont disparu. C'est peut-être dans ce cadre qu'on oublie le service à l'usager, et le « tout numérique » n'est pas à même d'y répondre complètement.

Sur les redevances domaniales, la direction de l'immobilier de l'État (DIE) nous a indiqué ne pas encore être en mesure de fournir une estimation sur les effets de l'annulation partielle des redevances domaniales dues par les occupants du domaine public de l'État, mais ils seront modérés, seuls 20 % du domaine public de l'État environ est occupé par des établissements visés par la disposition adoptée en LFR 3. La DIE nous a également expliqué qu'il y avait des remises au cas par cas, par exemple pour les concessionnaires des équipements touristiques. Le produit de ces redevances s'élève à 96 millions d'euros à la fin du mois d'octobre 2020, contre 90 millions d'euros espérés sur l'année. C'est une ressource dynamique, en hausse depuis plusieurs années.

Les difficultés ont en réalité concerné les cessions, car la conjoncture n'a pas été bonne. On ne vend pas chaque année l'îlot Saint-Germain !

Debut de section - PermalienPhoto de Antoine Lefèvre

La réorganisation des directions des finances publiques a largement mobilisé les départements. La mise en place des conseillers aux décideurs locaux a été évoquée : un premier bilan du déploiement dans les intercommunalités a-t-il été dressé ? Quelles sont les modalités de la prise en charge de ces fonctionnaires ? Je doute que les présidents d'intercommunalités aient manifesté un grand enthousiasme pour les accueillir dans leurs locaux...

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laménie

Je remercie les rapporteurs spéciaux pour leur analyse. On constate, année après année, une diminution des effectifs de la DGFiP et la suppression de trésoreries dans nos territoires. Combien restera-t-il de trésoreries par département au final ?

Cette restructuration est-elle vraiment bénéfique ? Les trésoreries sont les interlocuteurs des élus de proximité.

Les rapports de la Cour des comptes mentionnés par les rapporteurs spéciaux ont-ils été suivis d'effets ?

Quelles mesures sont prises pour limiter la lutte contre la fraude à la TVA ?

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Bocquet

En juillet 2020, un rapport d'information de Claude Nougein et Thierry Carcenac relevait que « le Parlement ne dispose pas d'informations suffisantes pour pouvoir apprécier la portée des résultats du contrôle fiscal ». La situation s'est-elle améliorée ?

M. Macron, lors de sa conférence de presse du 25 avril 2019, avait confié à la Cour des comptes le soin d'évaluer le chiffre de la fraude fiscale. Dans le rapport rendu en décembre 2019, celle-ci indiquait qu'elle n'avait pas les capacités pour mener cette mission dans un délai aussi court. La mission avait ensuite été confiée à l'Insee. Où en est ce travail ?

Google a fait un chèque de 1 milliard d'euros au fisc français. Un article du magazine Capital d'octobre 2019 avançait que le montant aurait dû être de 7 milliards d'euros. La forte diminution de l'addition aurait été justifiée par la « coopération » de l'entreprise avec la justice française. Le secret fiscal n'est peut-être pas opposable aux rapporteurs spéciaux : disposez-vous d'éléments sur la transaction qui a eu lieu entre le fisc français et Google ?

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

Les questions d'Éric Bocquet me semblent très pertinentes.

Les rapporteurs spéciaux ont-ils pu obtenir des éléments concrets sur des améliorations permises par Action publique 2022 ? Pourquoi prévoir 500 millions d'euros à cet effet ? Une augmentation de 14 % me semble considérable, d'autant que les crédits sont sous-consommés. La mission « Transformation et fonction publiques » me laisse dubitatif. Je serai favorable à un amendement de forte réduction de ces crédits.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Canevet

Je remercie les rapporteurs spéciaux pour la qualité de leur travail.

Pour ma part, j'ai plutôt le sentiment qu'on assiste à une évolution assez forte des services de l'État. S'agissant des douanes et droits indirects, le recouvrement a été recentralisé au niveau de la DGFiP. L'absence de clarification des statuts des personnels a conduit à ce qu'une des responsables de cette direction a appelé une « stratification indemnitaire épouvantable ». Reste-t-il beaucoup de chemin à parcourir ?

Sur le terrain, j'ai également l'impression d'une grande évolution : des directions départementales interministérielles ont été créées, les directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (Direccte) vont intégrer la cohésion sociale... Fallait-il garder la même organisation alors que les trésoreries ne reçoivent pratiquement plus de visiteurs, en raison notamment de la réforme de la taxe d'habitation ? La solution retenue n'est peut-être pas la meilleure, mais des efforts sont faits.

La direction de l'immobilier de l'État est-elle assez efficiente pour parvenir à une rationalisation optimale des bâtiments de l'État ?

S'agissant de la fonction publique, il y a beaucoup à faire ! Je rappelle que nous avons voté la loi de transformation de la fonction publique l'année dernière. Assiste-t-on une évolution des cadres d'emploi, rendue nécessaire par le regroupement de services sur le terrain ?

Lorsqu'on évoque le nombre de postes dans la fonction publique d'État, y intègre-t-on les CDD ou les contrats temporaires ? Leur nombre est-il significatif ?

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Segouin

L'impôt sur le revenu est désormais géré par les entreprises, qui font de la déclaration et du recouvrement. Le nombre de fonctionnaires de Bercy a-t-il diminué en proportion ?

Quand s'attaquera-t-on véritablement au problème récurrent de la fraude à la TVA, évaluée à 15 milliards d'euros ? On se triture les méninges chaque année pour trouver de nouvelles taxes : ne faudrait-il pas d'abord s'attaquer à ce sujet ?

Debut de section - PermalienPhoto de Patrice Joly

Je salue le travail des rapporteurs spéciaux. S'agissant de la réorganisation des services des finances publiques sur le terrain, je confirme les points de vue des rapporteurs. On recense trois types d'usagers : les collectivités locales, les entreprises, les ménages.

S'agissant des ménages, la présence sur le terrain avec les maisons de services au public et les possibilités d'accès à l'information sur internet ne sont pas suffisantes pour certaines catégories de personnes.

S'agissant des collectivités locales, je m'interroge sur la qualité du service rendu en matière de tenue des comptes et d'accompagnement des plus petites collectivités. Idem en matière de recouvrement des recettes : les voies de droit pour s'assurer du recouvrement des créances ne sont, par exemple, pas mises en oeuvre. Une présence plus faible sur le terrain engendre des gains pour l'État, mais des pertes, dont il serait intéressant d'avoir une évaluation précise, pour les collectivités locales.

Pour les petites entreprises, l'accompagnement fiscal n'est également plus le même qu'auparavant.

Debut de section - PermalienPhoto de Christine Lavarde

Je pense que les rapporteurs spéciaux n'auront sûrement pas grand-chose à dire à propos d'Action publique 2022, car il ne se passe plus rien !

Je siège au Conseil de l'immobilier de l'État. J'entends avec grand intérêt les critiques qui sont émises sur la gestion immobilière : en effet, au bout de quelques années, je constate que ce sont toujours les mêmes reproches qui reviennent, notamment sur les schémas pluriannuels de stratégie immobilière. Le Conseil de l'immobilier de l'État pourrait peut-être être supprimé : aucune réunion, même en visioconférence, ne s'est tenue entre mars et septembre-octobre... Un certain nombre de parlementaires y siègent : j'observe que, si l'un des deux sénateurs est toujours là, sur les cinq députés n'est présent que le président.

J'ai du mal à comprendre l'articulation entre le Conseil de l'immobilier de l'État, la direction de l'immobilier de l'État et les directions de l'immobilier de chaque ministère. Tout le monde parle de la même chose, mais les choses ne bougent pas beaucoup...

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Cozic

Merci aux rapporteurs pour leur travail.

Je voudrais intervenir sur la mission « Gestion des finances publiques » au nom du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain (SER). Nous vivons une crise importante, et nous savons l'importance du rôle des fonctionnaires. Les coupes de budget et les baisses d'effectifs semblent être aujourd'hui des politiques difficilement conciliables avec la préservation d'un service public de proximité.

Depuis quinze ans, le nombre d'agents affectés à cette mission a diminué de 20 %. À cela s'ajoute la suppression de 1 800 équivalents temps plein annoncée par le Gouvernement. Ces agents sont essentiels pour l'accompagnement de nos concitoyens dans leurs démarches fiscales : la fracture numérique est certainement un concept très vague pour ceux qui font la « start-up nation », mais elle est pourtant bien réelle dans nos territoires.

Les agents de la DGFiP sont également des conseilleurs pour les collectivités territoriales et pour les petites entreprises. Les conseils fiscaux sont vitaux pour celles-ci, car elles n'ont pas toutes des pôles fiscalité en leur sein...

La dématérialisation ne résoudra pas tout et ne viendra pas compenser la suppression des 989 trésoreries et centres des finances publiques actée pour 2022.

Le groupe SER ne votera pas les crédits de cette mission.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Mizzon

Je remercie les rapporteurs spéciaux pour la qualité de leur travail. L'État a fort bien communiqué sur son initiative en matière de réorganisation du réseau des finances publiques dans les territoires : il a essayé de faire croire qu'il pouvait faire plus avec moins. Il a augmenté le nombre de points de contact, mais il s'agit d'une présence d'affichage. Cette réorganisation s'est par ailleurs accompagnée d'une baisse de qualité des prestations rendues par les agents des impôts en direction des collectivités locales : ils rendent des avis décontextualisés.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Nougein

La réorganisation de la DGFiP et la fermeture des trésoreries intéressent peut-être moins nos concitoyens que nos élus de proximité. Ceux qui ont parcouru l'été dernier leur département pour se faire élire ou, comme moi, réélire ont constaté que cette question était un sujet de préoccupation pour les maires des petites communes. Antoine Lefèvre, les conseillers aux décideurs locaux devraient être au nombre de 1 200 d'ici à 2022. Les trente premiers sont entrés en fonction au premier trimestre 2020, mais la crise sanitaire a retardé le processus...

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Nougein

Marc Laménie l'a souligné, on parlait d'une trésorerie par intercommunalité, puis d'une par arrondissement. Albéric de Montgolfier dit toujours que cela se terminera avec une par département... La baisse est inéluctable.

Nous avons du mal, Éric Bocquet, à obtenir des informations sur le contrôle fiscal. Avec Thierry Carcenac, nous avions fait un rapport d'information au printemps dernier sur la question. En 2019, le redressement fiscal s'est élevé à 11 milliards d'euros, contre 9 milliards d'euros en 2018. Je n'ai pas d'information sur le travail de l'Insee. Le contrôle fiscal est, semble-t-il, de plus en plus efficace grâce à de nouveaux instruments, comme le datamining, qui permettent de mieux cibler les contrôles mais il faut en améliorer les indicateurs de performance, notamment sur la fraude complexe ou la rentabilité. S'agissant du montant de la fraude fiscale, tout le monde a son chiffre ! Nombreux sont ceux qui confondent évasion fiscale et fraude fiscale.

En ce qui concerne les douanes, Michel Canevet, des progrès restent à faire en matière d'effectifs et d'indemnités. Il existe, par exemple, une indemnité de garde des chapiteaux d'alambic - elle concerne, certes, que peu d'agents ! - ou une indemnité de langue étrangère. La durée de temps de travail de certains agents est de 1 563 heures, alors qu'elle devrait être de 1 607 heures. Des primes de pénibilité sont accordées à l'ensemble d'un service sans tenir compte des fonctions réelles exercées. Il faut remettre de l'ordre dans ces primes obsolètes et injustes.

Sur les recettes, le rendement de l'impôt sur le revenu devrait être assez conforme aux prévisions en 2020, grâce à la stabilité des revenus garantie par les indemnités d'activité partielle. La TVA s'est effondrée au deuxième trimestre, mais est très fortement remontée au troisième trimestre. En revanche, l'impôt sur les sociétés sera très fortement impacté : les entreprises vont connaître des pertes énormes ou, dans le meilleur des cas, des baisses de bénéfices.

Les effectifs de la DGFiP qui étaient de l'ordre de 100 000 il y a deux ou trois ans s'élèvent maintenant à 97 000 et devraient baisser à 95 000. Le prélèvement à la source et la suppression de la taxe d'habitation expliquent ce phénomène. Je rappelle que le Gouvernement avait l'intention de supprimer 50 000 emplois de fonctionnaires : cette année, la baisse devrait être de 157 - on est loin du compte ! La DGFiP devrait supprimer 4 900 postes entre 2020 et 2022 : cela « donne du mou » aux autres ministères pour augmenter leurs effectifs...

Debut de section - PermalienPhoto de Albéric de Montgolfier

Je le répète, la fraude à la TVA est une question non pas seulement de recettes publiques, mais aussi de morale et d'équité. Les commerçants physiques, qui sont soumis à des impôts locaux et nationaux, sont concurrencés par des vendeurs d'e-commerce qui ne payent aucune taxe en France. La directrice des douanes nous a indiqué que les volumes de fret étaient en très forte augmentation depuis le confinement. Ses services seront dans l'incapacité de contrôler l'ensemble des déclarations en douane après la suppression des envois à valeur négligeable à compter du 1er juillet 2021. Les administrations sont désarmées face à l'industrialisation du e-commerce.

Les chiffres des transactions fiscales peuvent paraître importants : ils représentent plusieurs années d'impôt. J'ai eu connaissance des éléments de la transaction avec Google lorsque j'étais rapporteur général. Je ne sais pas à quel montant l'administration aurait pu prétendre, mais celle-ci a toujours perdu ses contentieux devant les tribunaux administratifs et le Conseil d'État, faute de pouvoir prouver l'existence d'un établissement stable. La jurisprudence n'est pas favorable à l'administration fiscale et recourir aux conventions judiciaires d'intérêt public permet au moins de recouvrer une partie des sommes dues.

Concernant la fonction publique, quelques décrets sont encore en attente, Amélie de Montchalin l'a reconnu. Cela me conduit à évoquer le sujet de la transformation de l'action publique, pour répondre à Vincent Delahaye ou Christine Lavarde. Pourquoi les crédits de la mission ne sont-ils jamais consommés ? Notre amendement d'appel va nous aider à obtenir des réponses. Nous constatons une politique d'affichage, qui n'est d'ailleurs pas propre à ce Gouvernement. Souvenez-vous du programme de modernisation de l'action publique (MAP) : à chaque fois, il s'agit de décisions très technocratiques, avec des comités d'experts, et cela finit dans des archives sur des étagères. Il y a quelques années, la commission avait expertisé cette question. Dans tous les pays qui ont réussi leur transformation de l'action publique - je pense notamment à la Suède, à l'Allemagne, au Canada -, ces objectifs ont été portés au plus haut niveau. En France, nous ne sommes pas capables d'assumer les choses. Donc, pour obliger le Gouvernement à se prononcer sur le bien-fondé de cet objectif de transformation, nous allons proposer un amendement de réduction des crédits.

Dernier sujet, l'immobilier de l'État. J'ai siégé, à une époque, au Conseil de l'immobilier de l'État. En ce moment, le confinement a bon dos pour ne pas répondre à un certain nombre de questions. Quoi qu'il en soit, la conclusion à en tirer est connue : l'immobilier nécessite une professionnalisation. L'État est un piètre gestionnaire, notamment par rapport aux collectivités. L'exemple à suivre nous vient d'Allemagne, où une agence s'occupe de l'entretien des bâtiments en faisant payer les administrations.

Je me souviens également d'un rapport, il y a quelques années, avec Philippe Dallier, concernant l'immobilier et la justice. Nous nous étions aperçus que l'immobilier de certains tribunaux comme celui de la cour d'appel de Versailles étaient gérés par des magistrats délégués à l'équipement, qui n'avaient aucune compétence pour s'occuper de la gestion du chauffage, par exemple. Dans beaucoup d'administrations, c'est un fonctionnaire qui, en plus de son travail, va s'occuper de gérer les fluides, les problèmes de toiture et autres. Il serait temps d'avoir un vrai gestionnaire de la cité administrative, spécialiste de l'immobilier.

Pour répondre enfin à la question de Vincent Segouin, l'IGF a estimé que le gain lié à l'impact du prélèvement à la source pourrait être de 1 466 à 1 621 ETP ; de son côté, la DGFiP n'a fait aucun chiffrage.

La mission, je le conçois, est assez décevante cette année. En temps normal, nous aurions été sur une position plus réservée. Néanmoins, avec ce contexte très particulier, nous vous proposons l'adoption des crédits. Et pour finir sur une note positive, je voudrais souligner la mobilisation de la DGFiP pour le versement du fonds de solidarité et pour les mécanismes de soutien en général.

La commission décide de proposer au Sénat d'adopter, sans modification, les crédits de la mission « Gestion des finances publiques ».

La commission décide de réserver sa position sur les articles 54 octies, 54 nonies et 54 decies.

La commission décide de proposer au Sénat d'adopter, sans modification, les crédits de la mission « Crédits non répartis ».

Article 33 (État B)

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Raynal

Nous avons à statuer sur l'amendement concernant la mission « Transformation et fonction publiques ».

Debut de section - PermalienPhoto de Albéric de Montgolfier

L'amendement n° 1 diminue les crédits des trois programmes de la mission « Transformation et fonction publiques » : le programme 348 « Rénovation des cités administratives et sites multi-occupants », le programme 349 « Fonds pour la transformation de l'action publique » et le programme 351 « Fonds d'accompagnement interministériel ressources humaines ». Comme je l'ai évoqué précédemment, la sous-consommation des crédits de la mission est assez délirante : entre 80 % et 90 % ne sont pas consommés ! Dans le projet de loi de finances rectificative (PLFR) que nous examinerons lundi prochain en séance, entre 62 % et 97 % des crédits de paiement sont annulés. Cela pose, à mon sens, un problème d'autorisation parlementaire. D'où l'intérêt de cet amendement d'appel, qui traduit le décalage persistant entre les objectifs affichés et l'exécution des crédits et qui invite à des explications du Gouvernement sur ce point.

L'amendement n° 1 est adopté.

La commission décide de proposer au Sénat l'adoption des crédits de la mission « Transformation et fonction publiques », sous réserve de l'adoption de son amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Raynal

S'agissant du compte d'affectation spéciale (CAS) « Gestion du patrimoine immobilier de l'État », que propose le rapporteur spécial ?

Debut de section - PermalienPhoto de Albéric de Montgolfier

C'est une année très particulière pour le marché immobilier même si l'État pourrait mieux faire dans le domaine de l'entretien...

La commission décide de proposer au Sénat d'adopter, sans modification, les crédits du compte d'affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l'État ».

Le compte rendu de cette réunion sera publié ultérieurement.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Raynal

Nous accueillons Hugues Saury et Rachid Témal, rapporteurs pour avis de la commission des affaires étrangères sur le budget de l'aide publique au développement. S'ils le souhaitent, nous leur donnerons la parole à l'issue de la présentation.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Canevet

L'aide publique au développement (APD) constitue une politique interministérielle, pour laquelle la mission « Aide publique au développement » représente environ les deux tiers des crédits budgétaires. On retrouve notamment une partie de l'APD dans les missions « Action extérieure de l'État », « Recherche et enseignement supérieur », « Immigration, asile, intégration ».

En 2021, les autorisations d'engagement de la mission s'élèveront à 5,1 milliards d'euros, soit une baisse de 30 %. Les crédits de paiement s'établiront à 4,9 milliards d'euros, soit une hausse de 50 %, sachant que le périmètre a évolué avec le nouveau programme 365 visant à renforcer les fonds propres de l'Agence française de développement (AFD) pour un montant de 953 millions d'euros.

Par ailleurs, le compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'État » porte les crédits liés aux dotations en capital des banques de développement à l'étranger.

Le compte de concours financiers « Prêts à des États étrangers » comprend les prêts du Trésor ou encore les opérations de traitements de dettes de certains pays. Enfin, il convient de relever que le Fonds de solidarité pour le développement (FSD) est alimenté par la taxe que nous avions instituée sur les billets d'avion, pour un montant de 210 millions d'euros, et par une part de la taxe sur les transactions financières pour un montant de 528 millions d'euros.

Pour ce qui concerne les crédits budgétaires, il y a trois programmes au sein de la mission « Aide publique au développement ». Le programme 110 est piloté par la direction générale du Trésor, au sein du ministère de l'économie, des finances et de la relance. Le programme 209 « Solidarité à l'égard des pays en voie de développement » est piloté par la direction générale de la mondialisation, de la culture, de l'enseignement et du développement international au ministère de l'Europe et des affaires étrangères. Et je viens d'évoquer le programme 365.

Les orientations mises en oeuvre nous ont semblé conformes à celles qu'avait définies le comité interministériel de coopération internationale et de développement (CICID) du 8 février 2018. Ce CICID a défini une liste de pays prioritaires, ainsi que les priorités politiques de l'aide publique au développement, telles que, par exemple, le renforcement de notre aide en matière de protection de l'environnement. Il avait enfin été décidé de réorienter la politique vers une plus grande part de dons et de subventions, car la France se distingue depuis longtemps par une politique de l'aide publique au développement qui s'appuie essentiellement sur des prêts.

Pour la première fois, dans ce budget 2021, les dépenses liées à l'environnement ont été évaluées : elles sont estimées à 1,9 milliard d'euros. La mission budgétaire « Plan de relance » comporte, pour un montant de 50 millions d'euros, des crédits consacrés à la santé et au financement de la recherche d'un vaccin contre la Covid.

Le programme 110 concerne des fonds multilatéraux alimentés par prévisions triennales. Tous les trois ans, une autorisation d'engagement assez significative nous est demandée, qui se traduit ensuite par des crédits de paiement répartis sur les trois années suivantes.

On observe une stabilisation des crédits alloués de l'AFD pour bonifier les prêts à des États étrangers, avec 1 milliard d'euros en autorisations d'engagement et 320 millions d'euros en crédits de paiement. Les taux bas font qu'il y a moins de bonifications de prêts.

Nous apprécions qu'on ne poursuive pas une politique de prêts tous azimuts, mais qu'on se concentre sur quelques actions fortes, notamment par des dons et subventions.

Nous avons noté une provision de 3 millions d'euros, qui a été réservée pour le fonctionnement d'une commission indépendante, liée au rapport Berville qui, en 2018, avait défini un certain nombre de propositions d'orientations pour la politique de développement, et qui devrait normalement trouver sa traduction dans un projet de loi à venir.

Et, dans le programme 365, 953 millions d'euros sont affectés au capital de l'AFD, car l'AFD, comme les autres établissements bancaires, doit avoir un ratio de solvabilité qui exige que ses fonds propres représentent près de 14 % des actifs pondérés par le risque. La réglementation prudentielle la conduit donc à renforcer ses fonds propres en fonction des engagements qu'elle a déjà réalisés. De plus, une évolution de la réglementation prudentielle exclut la ressource à condition spéciale dont bénéficie l'AFD du calcul de ses fonds propres pour le ratio dit « grands risques », ce qui nécessite d'augmenter ses fonds propres. Cette enveloppe de 953 millions d'euros sera-t-elle suffisante ? Nous n'en sommes pas sûrs.

Le programme 209 bénéficie d'une hausse en crédits de paiement de 388 millions d'euros par rapport à 2020, permettant, en partie, l'aide humanitaire. L'aide aux projets gérée par l'AFD augmente également de 339 millions d'euros. Et le ministère a aussi augmenté l'enveloppe qu'il destine au réseau consulaire : le Fonds de solidarité pour les projets innovants permettra, dès 2021, à hauteur de 70 millions d'euros, de financer des projets identifiés par les ambassadeurs. Le financement de ces projets ne devra toutefois pas dépasser un million d'euros tous les deux ans. Il s'agit donc de projets de taille modeste, mais cela donne au réseau consulaire une certaine réactivité pour financer des actions concrètes de développement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Requier

J'en viens désormais à l'appréciation de la politique d'aide publique au développement de la France mise en oeuvre depuis plusieurs années.

Comme l'a indiqué Michel Canevet, les crédits de la mission proposés pour 2021 poursuivent leur trajectoire haussière, conformément aux engagements pris en 2018 par le Président de la République. En réalité, l'aide publique au développement de la France a amorcé son augmentation en 2015, et elle a dépassé le montant de 10 milliards d'euros en 2017. En 2019, elle devrait atteindre 10,9 milliards d'euros.

Cette augmentation a permis à la France de maintenir son rang, à défaut d'améliorer son classement, parmi les principaux contributeurs de l'OCDE. Ainsi, en 2019, la France reste le cinquième pourvoyeur d'aide publique au développement en volume, après les États-Unis, l'Allemagne, le Royaume-Uni et le Japon. Toutefois, en termes de ratio d'aide publique au développement dans le revenu national brut (RNB), la France n'occupe que la neuvième place, alors que les pays de l'Europe du Nord, et notamment la Suède, sont largement en tête.

Comme je l'avais déjà souligné l'année dernière, le profil de l'aide publique au développement de la France continue de se caractériser par un recours important aux prêts, au regard du montant des dons, par opposition aux autres pays de l'OCDE. Cette spécialité française a été privilégiée au cours de la dernière décennie en raison de son moindre coût pour les finances publiques. Toutefois, les auditions ont rappelé qu'un rééquilibrage avait été initié, et la part des prêts devrait reculer en 2019 pour se limiter à 14 % de notre aide publique au développement.

Le pilotage de cette politique publique a fait l'objet de critiques nourries depuis quelques années, y compris devant notre commission. En effet, fortement interministérielle, la politique d'aide publique au développement paraît éclatée en raison des multiples instruments budgétaires et de l'intervention de plusieurs acteurs publics, tels que le ministère des affaires étrangères, le ministère de l'économie, et l'Agence française de développement.

Les auditions menées nous ont confortés dans l'idée que la recherche d'un meilleur pilotage était désormais une priorité des ministères en charge de ce budget.

Dans cette perspective, les conclusions du Comité interministériel de la coopération internationale et du développement (CICID) de février 2018 ont permis de fixer les priorités politiques et géographiques de notre aide publique au développement. Ce cadrage était nécessaire, et il doit désormais être confirmé par une loi de programmation qui devra redéfinir l'architecture du pilotage de la politique de développement. Annoncé à plusieurs reprises, le projet de loi devrait être examiné par le Parlement d'ici quelques semaines - mais nous le qualifions, dans le rapport, d'Arlésienne...

Il nous reviendra de définir les dispositions législatives permettant d'encadrer de façon efficace le fonctionnement de cette politique publique, qui constitue un instrument incontournable de l'action extérieure de l'État et du rayonnement de la France. L'examen de ce projet de loi nous permettra également de nous interroger sur les priorités géographiques de notre aide publique au développement.

En effet, force est de constater qu'il existe un réel déséquilibre entre les dix-neuf pays désignés comme prioritaires par la France, dont dix-huit sont situés sur le continent africain - le dix-neuvième étant Haïti - et les principaux bénéficiaires de notre aide publique au développement. L'une des raisons de cette anomalie réside en partie dans l'appétence de la France pour les prêts, au détriment des dons, l'encourageant à investir dans des pays à revenus intermédiaires, qui pourront rembourser.

Plus généralement, ce constat nous conduit à nous interroger sur la stratégie mise en oeuvre à l'égard des très grands émergents, pour lesquels l'aide publique internationale n'apparaît plus comme une nécessité - comme la Turquie, ou la Chine. Il faut reconnaître que les critères de l'OCDE nous amènent à qualifier d'aide publique au développement des financements qui relèvent davantage de partenariats économiques... En tout état de cause, les interventions dans ces pays doivent s'inscrire en parfaite adéquation avec les priorités diplomatiques de la France, au risque de nuire à la cohérence de celle-ci.

La crise sanitaire a justifié le redéploiement de crédits, tant au niveau bilatéral, avec l'initiative « Santé en commun », qu'au niveau multilatéral, avec l'initiative de suspension du service de la dette. Face à l'urgence, l'accent a été mis sur les enjeux de santé en 2020, mais la crise n'a pas remis en cause les priorités de long terme de l'aide publique au développement, telles que le soutien au climat, à l'éducation, à la lutte contre les fragilités et les vulnérabilités de certains pays. Si la préservation d'un budget ambitieux pour l'aide publique au développement peut être saluée, la dégradation des finances publiques renforce néanmoins nos exigences en matière de transparence et d'évaluation de l'efficacité de cette politique publique. Ainsi, des dispositions permettant une évaluation indépendante devraient figurer dans le projet de loi à venir.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Canevet

Les engagements de l'AFD devraient représenter 13,4 milliards d'euros d'engagement en 2020, contre 14,1 milliards d'euros en 2019. Elle compte 2 658 agents, avec 85 représentations dans le monde, dont sept sites parisiens et un centre de formation à Marseille. Elle intervient dans 110 pays.

Sa rémunération, de 105 millions d'euros, est déterminée selon une grille de prestations conventionnée qui nous a semblé cohérente avec l'évolution de l'activité - l'enveloppe de dons a été multipliée par 4,5 en 2019. Elle est aussi cohérente avec le respect de l'objectif, fixé dans le contrat d'objectifs et de moyens 2017-2019, de coefficient d'exploitation du groupe mesurant la part des frais généraux dans le produit net bancaire. Nous regrettons néanmoins que le contrat d'objectifs et de moyens 2020-2022 n'ait pas encore été signé entre l'État et l'AFD. L'AFD a un projet d'investissement immobilier, d'un coût non négligeable puisqu'il atteint 560 millions d'euros nets, pour regrouper ses services à Paris.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Canevet

Il nous semble nécessaire que l'AFD ait une bonne maîtrise de ses dépenses immobilières, et en particulier que le conseil d'administration, où siègent deux de nos collègues, examine attentivement la politique immobilière du groupe, pour s'assurer qu'on ne soit pas dans la démesure, mais dans la réalité des besoins. Le projet de loi de programmation prévoit la transformation de l'établissement public « Expertise France », qui a été créé en 2015, en société dont le capital serait détenu, au 1er juillet 2021, par l'AFD. Enfin, sachez que l'AFD organise jeudi prochain un forum international réunissant 450 banques de développement à Paris, pour réfléchir sur le verdissement des politiques financières et de développement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Requier

J'en viens à l'examen de l'article 53 rattaché à la mission, qui autorise le ministre chargé de l'économie à souscrire à l'augmentation générale de capital de la Banque africaine de développement approuvée par le Conseil des gouverneurs de 2019. Cette augmentation de capital devrait permettre à la Banque africaine de développement de passer d'un volume annuel de prêts d'environ 7 milliards d'euros à 8 milliards d'euros en 2025, puis 10 milliards d'euros en 2030. Pour la France, qui est actionnaire à hauteur de 3,8 % du capital, cette souscription à l'augmentation de capital se traduirait par des versements annuels, entre 2021 et 2028, d'un montant de 28,1 millions d'euros. Elle présente deux intérêts majeurs. D'une part, elle permet à la France de maintenir son rang parmi les principaux actionnaires non africains de la Banque. D'autre part, elle est conforme aux priorités fixées par le CICID de 2018, qui prévoit de renforcer l'aide publique au développement destinée à l'Afrique. Toutefois, cette augmentation de capital n'est pas un chèque en blanc. À l'image des exigences accrues envers l'AFD, l'activité de la Banque africaine de développement devra faire l'objet d'un suivi particulier, et d'une évaluation critique de son action. Aussi recommandons-nous à la commission l'adoption sans modification de l'article rattaché à la mission « Aide publique au développement ».

Debut de section - PermalienPhoto de Rachid Temal

J'apporte à nos deux rapporteurs spéciaux une mauvaise nouvelle : le projet de loi de programmation qui devait être présenté aujourd'hui en conseil des ministres n'a pas été mis à l'ordre du jour. Pourtant, le ministre s'était engagé pour le mois de novembre. Il y a manifestement un décalage...

Vous avez parlé du fonds de solidarité pour le développement (FSD), qui a deux sources de financement. D'une part, la taxe sur les billets d'avion, qui est cette année en chute libre... En janvier, le manque à gagner sera de 120 millions d'euros. Une compensation est prévue pour cette année, mais il y a un risque aussi pour l'an prochain. D'autre part, la taxe sur les transactions financières, qui devrait rendre 1,7 milliard d'euros, a été pensée pour financer l'aide publique au développement, mais un plafonnement fait que seuls 520 millions d'euros y sont consacrés. Pourquoi ne pas déplafonner, ou au moins partager son produit en deux moitiés ?

Debut de section - PermalienPhoto de Hugues Saury

L'essentiel a été dit. La commission des affaires étrangères est globalement satisfaite de l'augmentation du budget de l'AFD, mais s'interroge sur son fonctionnement. Elle s'intéresse aux instances qui peuvent être mises en place pour mieux piloter sa stratégie et mieux contrôler son action. Cette année, plusieurs conseils ont été créés, mais l'espoir d'un projet de loi de programmation semble déçu. Nous sommes en tous cas favorables à ces crédits.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Husson

Merci pour ce rapport spécial présenté à deux voix, avec des avis partagés. Vous avez souligné les efforts que la France conduit en matière d'aide au développement, conformément aux objectifs annoncés au début du quinquennat. L'enquête réalisée par la Cour des comptes à la demande de notre commission montrait qu'il était difficile, pour le ministère des affaires étrangères, d'assurer la tutelle de l'AFD, dont l'autonomie fait parfois l'objet de critiques.

Par ailleurs, les crédits de l'AFD augmentent de façon continue et depuis plusieurs exercices.

Comment les relations entre cet opérateur et nos postes diplomatiques et consulaires s'organisent-elles ? Ne pensez-vous qu'il serait plus efficace pour notre pays d'augmenter ses contributions à des agences humanitaires des Nations unies, comme le Haut-Commissariat pour les réfugiés, plutôt que d'accroître notre aide humanitaire bilatérale ?

Debut de section - PermalienPhoto de Patrice Joly

Où en est la loi de programmation qui avait été annoncée l'année dernière ? La perspective d'attendre 0,55 % du PIB est atteinte - mais est-ce compte tenu de la recapitalisation de l'AFD ? La Cour des comptes se préoccupe de la lisibilité de nos interventions. Quelle est l'articulation entre les financements bilatéraux et multilatéraux ? Ces derniers ne diminuent-ils pas la lisibilité sur les actions de la France ? La crise sanitaire a-t-elle été l'occasion d'améliorations ? Il y a aussi la question de l'articulation des actions menées par l'AFD avec celles du ministère des affaires étrangères. La Cour des comptes a montré que la politique de rémunération était très généreuse. Les volumes financiers concernés sont importants : y a-t-il une perspective de création d'emplois ? Est-il question d'introduire un peu de mesure dans ces rémunérations ?

La crise a conduit à suspendre la charge de la dette de certains pays en développement. Le Président de la République avait annoncé qu'il fallait largement annuler la dette des pays les plus pauvres. Quelles sont les perspectives sur ce point ? L'extrême pauvreté augmente dans les pays en développement, ce qu'on n'avait pas connu au cours des vingt dernières années. Les crédits consacrés aux mesures des secteurs sociaux et sanitaires sont-ils suffisants au regard de cette crise ?

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laménie

La France consacre 10,9 milliards d'euros en 2019 à l'aide publique au développement. Cela concerne différents ministères, certainement. Comment les crédits sont-ils répartis ? De quels moyens humains l'AFD dispose-t-elle ? Comment sont-ils organisés ?

Debut de section - PermalienPhoto de Albéric de Montgolfier

Je partage les interrogations des rapporteurs spéciaux sur la pertinence d'une aide au développement pour les très grands émergents. Le sujet revient chaque année. La Chine est bénéficiaire de l'aide au développement, ce qui prête à sourire ! Sur les 121 millions d'euros d'aide publique bilatérale en cause, 67 millions d'euros correspondent aux frais d'écolage des étudiants chinois. Ne s'agit-il pas d'une forme d'affichage ou de gonflement des chiffres ? C'est mêler à l'aide publique au développement des choses qui n'ont rien à y faire... Je vois aussi que la moitié d'une enveloppe de 11 millions d'euros est consacrée à la lutte contre la déforestation en Amazonie. Que peut-on faire en la matière avec 5 ou 6 millions d'euros ? Je sais que les petits ruisseaux font les grandes rivières, mais, en l'espèce, je soupçonne plutôt de l'affichage.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

Ce budget augmente de façon très conséquente. Jusqu'où cela ira-t-il ? Quand cela s'arrêtera-t-il ? Surtout, à quel moment allons-nous évaluer avant de continuer à augmenter ? Voilà plusieurs années qu'on appelle à davantage d'évaluations. On ne voit toujours rien venir. Je partage aussi les interrogations d'Albéric de Montgolfier sur les très grands émergents. Nous avons dépassé l'objectif de 0,55 % du RNB, alors que nous devions simplement l'atteindre. Où s'arrête-t-on ?

Je partage totalement, aussi, les réticences exprimées sur le projet immobilier. Nous ne sommes pas dans une période où l'on peut faire des projets immobiliers à 560 millions d'euros. La recapitalisation nécessaire de l'AFD coûtera 953 millions d'euros. Ces 953 millions d'euros prennent-ils en compte les 560 millions d'euros du projet immobilier ? Il y aura peut-être de l'emprunt, certes... Toujours est-il que les frais de fonctionnement et les frais généraux de l'AFD continuent à augmenter de façon substantielle. Je suis effaré par cette gestion, et très surpris qu'on puisse gérer l'argent public de cette façon. Je voterai contre ce budget, contre son augmentation démentielle et décidée sans évaluation préalable.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Requier

Vous nous interrogez sur les relations entre l'AFD et les postes consulaires et diplomatiques. Il y a des contacts permanents entre les antennes locales de l'AFD et les consulats ou les ambassades. Comme nous l'a dit l'ambassadeur au Tchad, les rapports, cela dépend des hommes et des femmes qui sont en poste !... Le Fonds de solidarité des projets innovants, géré par les ambassades, est passé de 60 à 70 millions d'euros cette année. Il s'agit d'une enveloppe directement à la main des ambassadeurs : on donne de l'argent aux ambassades pour qu'elles puissent intervenir sur de petits projets, dans un rôle d'amorçage. Ainsi, du campus franco-sénégalais, projet initié par ce Fonds avant que l'AFD ne prenne le relais après quelque mois : bon exemple de coopération entre l'AFD et les ambassades. En ce qui concerne la gouvernance, le projet de loi, qui semble quelque peu enlisé, mettra en place un conseil de coopération locale, qui sera piloté par l'ambassadeur.

Serait-il plus efficace d'augmenter nos contributions aux agences des Nations unies, comme le Haut-Commissariat pour les réfugiés, plutôt que d'augmenter l'aide humanitaire bilatérale ? Les deux leviers sont complémentaires. La présence de la France au sein des agences humanitaires de l'ONU permet d'orienter leur mobilisation et les financements. Pour répondre à des situations de crise ponctuelle, à l'inverse, l'aide humanitaire bilatérale est beaucoup plus souple et elle permet de répondre plus rapidement à des situations d'urgence, sur la base de remontées et de signalements des postes diplomatiques.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Canevet

Patrice Joly et les rapporteurs pour avis de la commission des affaires étrangères ont évoqué la loi de programmation qui devait être présentée au conseil des ministres aujourd'hui. Le projet de loi clarifiera le pilotage de l'aide publique au développement, mais aussi de la participation des collectivités territoriales à cette politique. Il devrait préciser le rôle de l'AFD et régler la question de l'intégration d'Expertise France. Il prévoit l'institution d'une commission d'évaluation indépendante, dont les contours restent à fixer, grâce à laquelle nous disposerons de tous les éléments d'information nécessaires pour procéder à une évaluation : pour l'heure, nous n'avons pas suffisamment d'éléments pour évaluer réellement la pertinence de notre politique d'aide au développement.

Vous avez évoqué la recapitalisation de l'AFD. Le renforcement des fonds propres passera par la conversion d'une ressource à condition spéciale dont bénéficie déjà l'AFD en fonds propres. L'AFD remboursera les montants associés à cette ressource - 953 millions d'euros - puis l'État recapitalisera à hauteur du même montant. L'enveloppe de 953 millions d'euros n'est pas destinée à payer l'investissement immobilier de l'AFD, mais à consolider les capitaux propres, sans imputation maastrichtienne effective, donc. Cela ne sera sans doute pas suffisant, et il faudra encore recapitaliser à l'avenir.

Patrice Joly a aussi évoqué la politique de rémunération, sujet qui a été évoqué aussi lors de l'examen de la mission précédente « Action extérieure de l'État ». Il y a une vraie différence entre les niveaux de rémunération en France, en administration centrale par exemple, et dans les réseaux.

Pour ce qui concerne la dette des pays en voie de développement, aucune annulation n'est aujourd'hui prévue, mais un rééchelonnement des paiements est envisagé, avec une suppression des paiements en 2021.

Les crédits aux secteurs sociaux et sanitaires seront-ils suffisants ? En tout cas, les enveloppes en dons et subventions sont réorientées pour accompagner la crise sanitaire, ce qui devrait permettre de répondre à un certain nombre de besoins. Dans le cadre du plan de relance, 50 millions d'euros sont consacrés, justement, aux questions sanitaires.

Marc Laménie a évoqué les moyens humains. Ils sont considérables pour l'AFD, qui dispose actuellement de 2 658 agents, sachant que ses effectifs ont beaucoup progressé ces dernières années. La direction générale de la mondialisation, de la culture, de l'enseignement et du développement international, au ministère, ne compte que 390 agents.

Albéric de Montgolfier a évoqué les très grands émergents, qui posent de vraies questions. Il nous semble important de veiller à la cohérence entre l'action diplomatique et l'action de développement. Le projet de loi prévoit justement une réunion périodique autour de l'ambassadeur pour y veiller : il ne faut pas que l'AFD intervienne sans que les ambassades soient au courant...

À l'occasion de l'examen de ce projet de loi de programmation pluriannuelle, nous devrons afficher des priorités d'action. Ce sera l'occasion de préciser, pour les années à venir, les pays et le type d'actions que nous souhaitons privilégier.

Vous avez évoqué la lutte contre la déforestation : je lisais ce matin que Jacques Rocher, président de la fondation Yves Rocher, se plaignait qu'il n'y ait pas assez d'actions contre la déforestation ! Certes, avec 11 millions d'euros, l'action de la France reste mineure. Nous avons aussi des besoins en la matière en Guyane.

Si l'on atteint l'objectif de 0,55 % du RNB dès cette année, c'est à cause du contexte, qui a fait baisser notre produit intérieur brut ! Les Britanniques, eux, ont diminué le montant de leur contribution pour qu'elle ne dépasse pas le ratio de 0,7 % qu'ils appliquent. Nous, nous avons décidé de maintenir, et même d'accroître, le montant de notre aide.

Sur les frais de fonctionnement et les frais généraux de l'AFD, il y a un travail à mener. Les membres du conseil d'administration de l'AFD doivent faire preuve d'une vigilance extrême, indépendamment de nos opérations de contrôle, pour que la gestion budgétaire de l'AFD reste aussi rigoureuse que possible.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Requier

Pendant longtemps, les rapporteurs spéciaux du budget de l'AFD siégeaient au conseil d'administration de l'AFD. Pour qu'ils ne soient plus juges et parties, nous n'y siégeons plus.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Raynal

Je me rappelle y avoir siégé moi-même... Vous émettez donc tous les deux un avis favorable sur la mission, l'article qui lui est rattaché et le compte de concours financiers.

La commission décide de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, des crédits de la mission « Aide publique au développement », ainsi que de l'article 53 rattaché.

La commission décide de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, des crédits du compte de concours financiers « Prêts à des États étrangers ».

Le compte rendu de cette réunion sera publié ultérieurement.

La réunion est close à 17 h 35.