Intervention de Vanina Paoli-Gagin

Réunion du 16 novembre 2020 à 16h00
Loi de finances rectificative pour 2020 — Discussion générale

Photo de Vanina Paoli-GaginVanina Paoli-Gagin :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous examinons aujourd’hui le quatrième – et dernier, nous l’espérons – projet de loi de finances rectificative pour 2020. Quelques jours avant le coup d’envoi du marathon budgétaire, ce quatrième PLFR fait un peu figure d’échauffement, mais il conclut surtout un exercice budgétaire sans précédent.

Avant de vous livrer quelques observations sur le caractère proprement extraordinaire de cette situation, je souhaite d’abord revenir sur son caractère très ordinaire.

En effet, ce PLFR remplit aussi la mission ordinaire d’un collectif budgétaire de fin de gestion. Comme lors des années précédentes, le Gouvernement n’a pris aucun décret d’avance et ne propose aucune réforme fiscale. Je tiens à le saluer, car ce n’est pas parce que les temps sont durs que nous devons nous arranger avec la discipline budgétaire, bien au contraire.

Cette rigueur renforce la lisibilité et la transparence du travail du Parlement. Alors que notre société est rongée par la défiance et le complotisme, souligner cette rigueur n’est pas pécher par excès de zèle, et pour cause : dans le contexte de crise que nous connaissons, tous nos efforts doivent viser à créer de la confiance, qui est le carburant de l’économie.

La situation des finances publiques que ce PLFR entérine est catastrophique. En moins d’un an, notre taux d’endettement aura bondi de vingt points. La dépense publique représente désormais près des deux tiers de la richesse nationale, et nous connaissons une récession à deux chiffres : cela a de quoi donner le vertige.

Dans ce contexte, nous ne pouvons maintenir la confiance qu’à deux conditions : d’une part, en préservant le tissu économique afin de ménager notre capacité de rebond ; d’autre part, en nous préparant à réduire la dette sur le long terme.

Ce quatrième PLFR nous paraît répondre à cette double exigence. Prenant acte du reconfinement actuellement en vigueur – reconfinement que la dégradation de la situation sanitaire a rendu nécessaire –, il prévoit d’amplifier en conséquence les dispositifs déjà en place pour accompagner les entreprises affectées par ces mesures. Il en est ainsi de l’abondement de près de 11 milliards d’euros du fonds de solidarité, des 3 milliards d’euros d’exonérations de cotisations supplémentaires ainsi que des 3 milliards d’euros de rallonge pour financer le chômage partiel. En tout, ce sont donc près de 20 milliards d’euros que nous injectons de nouveau dans l’économie afin d’éviter que le virus ne tue aussi nos entreprises

Je ne relancerai pas aujourd’hui les polémiques sur l’ouverture des commerces. Nous savons tous, ici, la colère des commerçants et nous la comprenons. Pour rester cohérentes avec ces mesures sanitaires lourdes, monsieur le ministre, les mesures économiques doivent être à la hauteur des restrictions imposées et de leur impact – nous y reviendrons lors de l’examen du projet de loi de finances.

Les commerçants, plus généralement l’ensemble des entrepreneurs, voudraient avoir davantage de visibilité. C’est malheureusement impossible, car les mesures sanitaires ne peuvent être actualisées et adaptées que sur des périodes courtes de deux à trois semaines, en déphasage total avec la réalité et la logique des cycles commerciaux, des cycles d’investissement et des cycles de recrutement.

Pardonnez-moi de vous le dire, monsieur le ministre, le plan de relance de 100 milliards d’euros qui doit projeter de nouveau la France dans le temps long, qui doit donner de la visibilité, manque encore de consistance pour les acteurs de terrain. Ils lui préfèrent, pour l’heure, les mesures d’urgence en euros sonnants et trébuchants : un tiens vaut toujours mieux que deux tu l’auras !

Aussi, au-delà des discussions que nous aurons sur le bon calibrage de ces mesures, je crois que le message que nous envoyons est clair et cohérent avec les mesures prises depuis le début de la crise : la santé prime, « quoi qu’il en coûte ». C’est pourquoi le groupe Les Indépendants approuve ce PLFR, qui compensera en partie les dégâts du reconfinement.

À mes yeux, son principal intérêt réside dans ce qu’il nous permet de préparer la reprise et, donc, de bâtir la confiance dans l’économie. Sans entreprise, pas de reprise ; sans reprise, pas de croissance ; sans croissance, pas de confiance.

Pour conclure, mes chers collègues, je souhaite m’attarder sur cette notion de confiance et sur celle de dette qui la menace dangereusement.

Certes, nous pouvons nous réjouir que la signature de la France continue d’inspirer la confiance. Le contexte international nous est encore favorable, de même que la politique de la Banque centrale européenne (BCE). Cependant, comme notre rapporteur général l’a souligné, nous devrons attendre plusieurs années avant d’espérer ramener notre taux d’endettement autour de 100 % du PIB. Or il y a quelques mois seulement, le Sénat s’alarmait à juste titre d’un taux aussi élevé.

Si nous voulons vraiment nous convaincre qu’il n’y a pas d’argent « magique », alors nous devons très rapidement changer de braquet et réduire drastiquement les dépenses publiques. Il y va de la soutenabilité de notre économie.

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