Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la commission des affaires sociales a entrepris l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2021 en responsabilité. Cette position l’a conduite à approuver certains des choix opérés par le Gouvernement et à s’opposer fermement à d’autres, tout en alertant sur ceux qui devront être faits demain, mais ne sont pas pour autant présents dans ce texte.
C’est en responsabilité que le Sénat a accepté des tableaux d’équilibre aux déficits historiques et un endettement record, considérant que l’urgence du moment est de tout faire pour éviter l’effondrement de notre économie et de répondre par la solidarité nationale à ceux que la crise prive de leur emploi ou revenu.
C’est en responsabilité que le Sénat a mené une « opération vérité » sur les charges respectives de l’État et de la sécurité sociale. À la sécurité sociale, les effets de la conjoncture sur les recettes et les dépenses de l’hôpital ; à l’État, la reprise de la dette hospitalière, les dépenses de Santé publique France et les compensations des mesures de compétitivité ou de pouvoir d’achat. Ce débat n’est ni théorique ni le fruit d’une vision corporatiste de la sécurité sociale. S’il faut un jour augmenter les cotisations, agir sur le niveau des prestations ou rembourser la dette, il faut que ce soit l’équilibre des assurances sociales qui le commande, et non la charge des transferts du budget de l’État.
Dans le même esprit, le Sénat a alerté sur les années à venir. Nous sommes comme anesthésiés par une mobilisation massive d’argent public, mais le réveil sera douloureux et nous n’avons pas souhaité l’occulter. Il faudra redresser la barre, certes pas aujourd’hui, ni même peut-être demain, mais certainement dès après-demain, en tout cas le plus tôt possible pour l’avenir même de la protection sociale et la préservation de cet acquis si précieux dans la crise.
Cela implique certes une réponse massive, mais pas forcément de laisser toutes les vannes ouvertes. La commission n’a pas toujours été audible sur ce point, mais elle maintient sa position et ne manquera pas de la rappeler le moment venu.
C’est encore en responsabilité que nous avons accepté la réforme de l’accès précoce aux médicaments ou la pérennisation des maisons de naissance, mais aussi fait part de nos interrogations sur l’allongement du congé de paternité et de nos questionnements, sinon de nos doutes, sur la capacité du Gouvernement à donner corps à ce projet porteur d’espoirs qu’est la nouvelle branche autonomie. Prenons garde aux promesses non tenues qui alimentent une défiance déjà très forte chez nos concitoyens !
De la même manière, la fraude aux prestations comme aux cotisations sape les fondements de notre contrat social et, à l’initiative du rapporteur général de notre commission, le Sénat a substantiellement enrichi le volet fraude de ce projet de loi.
La nécessité d’une réforme des retraites devant l’évolution de notre démographie s’était imposée avant la crise ; elle demeure d’actualité. La crise n’a pas fait disparaître ce problème, elle n’a fait que l’amplifier. Nous verrons si le Gouvernement mais aussi tous ceux à qui la position de la commission a fait pousser des cris d’orfraie ne sont pas contraints d’y revenir… Je rappelle que le texte transmis au Sénat sur le système universel de retraite n’a pas été retiré ; certains membres du Gouvernement ont rappelé l’actualité de cette réforme. Il faudra bien la mener un jour.
Nous ne pouvons pas non plus tarder sur la réforme du système de santé, dont la crise a certes montré les forces et l’excellence, mais aussi les rigidités et les cloisonnements.
L’innovation est coûteuse ; elle nous invite à revoir les organisations, à révolutionner les parcours, ou elle remettra en cause un modèle solidaire auquel nous sommes tous ici profondément attachés.
Il y a bien un modèle social « à la française » qui n’a pas fait défaut pendant la crise et continue à soutenir les malades, les retraités et les plus précaires. Pour qu’il continue de le faire demain, des réformes sont nécessaires. C’est le discours que la commission a souhaité porter.
Animé de cette même conviction, le groupe Les Républicains votera ce texte.