Les deux questions posées par le sénateur Duplomb mériteraient bien plus que deux minutes pour y répondre.
Je ne reviendrai pas en détail sur le sujet de l’export, mais je crois qu’il nous faut absolument une agriculture qui puisse exporter. Il fut un temps où mon métier était précisément d’aider à réaliser ces exportations. J’ai aidé pendant plusieurs années des céréaliers français à exporter en Égypte, car ce pays a besoin de céréales avec un taux de gluten particulier et il ne peut pas les produire.
Songez tout de même, mesdames, messieurs les sénateurs, que 40 % de l’action de Business France concerne aujourd’hui le monde agroalimentaire. Mais nous avons des défis de taille à relever sur nombre de filières, notamment le vin ou certains types de viande – nous n’arrivons pas, par exemple, à ouvrir de nouveaux marchés en Italie pour les broutards.
Nous essayons d’accompagner très fortement ces exportations. J’étais il y a dix jours avec les équipes de Business France pour accompagner le lancement d’un plan de relance export grâce auquel l’État va financer une grande partie des démarches pour conquérir de nouveaux marchés.
Moi qui suis très attaché à l’agriculture française, ce qui m’énerve le plus, au-delà de la diminution de notre balance commerciale, c’est que les Allemands sont devenus meilleurs exportateurs agricoles que nous ! Comment peut-on accepter cela quand on est, comme moi, convaincu de la pertinence des produits agricoles français ?
Je prends donc l’engagement de me battre corps et âme pour favoriser l’export.
J’en viens au deuxième élément, en lien avec le premier, la question de la démographie. Dans toute science humaine, l’approche démographique me semble essentielle. Hervé Le Bras vient de publier un ouvrage absolument éclairant, Métamorphoses du monde rural, qui explique que le monde agricole est passé en trente ans d’une agriculture de territoires, de propriétaires, à une agriculture menée par des « entrepreneurs du vivant ». Cette approche me paraît extrêmement juste.
Les enjeux démographiques doivent être considérés en lien avec la nutrition. Quand on parle par exemple de gestion de l’eau à l’échelle de la planète, l’eau importée, c’est-à-dire celle incluse dans les productions végétales qui font ensuite l’objet d’échanges commerciaux, représente un sujet massif à l’échelle démographique et géopolitique. Nous devons avoir une vision claire et donner un cap.
En la matière, l’Europe a aussi un rôle à jouer. Nous finalisons actuellement la nouvelle PAC. Faut-il privilégier tel ou tel outil ? Faut-il faire plus de redistribution ou aller vers plus de convergence ? Selon moi, la seule question que l’on doit se poser, c’est la vision de notre agriculture dans sept ans. Où veut-on amener notre agriculture à cette échéance, au regard des changements à l’œuvre dans le monde ? Je conserverai cette approche, qui est à mon avis la bonne, même si elle est plus complexe.