Intervention de Jean-Pierre Sueur

Réunion du 10 janvier 2007 à 21h30
Prévention de la délinquance — Article 25

Photo de Jean-Pierre SueurJean-Pierre Sueur :

Je formulerai une remarque à caractère général, qui vaudra aussi pour les amendements déposés sur les articles suivants.

Ainsi que nous l'avons souligné au cours de la discussion générale, sept lois sur la délinquance ont déjà été adoptées et les mesures que vous nous proposez, monsieur le garde des sceaux, dans le cadre de ce huitième texte sont également censées la faire reculer.

Ce projet de loi vise, de nouveau, à accroître une série de sanctions et de contraintes de toute nature. Or nous pensons qu'il n'est pas de bonne méthode législative d'empiler ainsi les textes, alors que les effets des textes précédents n'ont pu être ni vérifiés, ni évalués.

Je n'aborderai pas la question sur le fond, nous en avons déjà parlé, notamment lors de l'examen des sept textes précédents. Nous nous sommes exprimés sur les mesures qui nous semblaient bonnes, et qui, hélas ! sont moins nombreuses que celles avec lesquelles nous étions en désaccord.

Ainsi, la loi du 9 mars 2004, dite « loi Perben II », a créé le fichier judiciaire national automatisé des auteurs d'infractions sexuelles et a instauré certaines obligations qui découlent de l'inscription à ce fichier, en particulier celle qui est faite à la personne concernée de justifier de son adresse une fois par an ou une fois tous les six mois si elle a été définitivement condamnée à un crime ou à un délit puni de dix ans d'emprisonnement.

Par ailleurs, depuis la loi du 9 mars 2004, un autre texte a été adopté, la loi du 12 décembre 2005 sur la prévention de la récidive, qui a aussi prévu un certain nombre de dispositions.

Notre position est simple : il faut évaluer l'effet de ces mesures avant de modifier une législation qui est toute neuve.

Les magistrats ne manquent jamais de nous dire - et je vais encore entendre cette remarque, monsieur le garde des sceaux, à l'occasion de la séance solennelle de la cour d'appel de mon département à laquelle je me rendrai après-demain - lors des séances solennelles des différentes juridictions : « Pourquoi faites-vous tant de lois ? Vous rendez-vous compte, mesdames, messieurs les parlementaires ! » Nous avons envie de dire à ces magistrats : « Adressez-vous plutôt au Gouvernement ! »

Ces magistrats nous disent en substance : « Comment pouvez-vous ajouter une nouvelle loi alors que nous n'avons pas eu véritablement le temps d'assimiler celles du 9 mars 2004 et du 12 décembre 2005 ? Certes, nous les avons lues, mais nous n'avons pas encore pu assimiler les textes d'application, qui, d'ailleurs, ne sont pas tous parus. Nous n'avons pas le recul suffisant pour juger de l'effet positif ou négatif des mesures qui ont été inscrites dans ces textes. »

Monsieur le garde des sceaux, il y a là une inflation législative qui n'est pas justifiée et notre position est de précaution et de sagesse dans l'exercice législatif : deux textes ont été très récemment adoptés sur ces sujets ; attendons de voir leurs effets avant de les modifier.

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