Cet article vise à durcir les conditions de la réhabilitation légale pour les récidivistes, d'une part, en doublant les délais de réhabilitation et, d'autre part, en prévoyant le maintien de la condamnation réhabilitée au bulletin n° 1 du casier judiciaire.
Une telle disposition n'est qu'une surenchère sécuritaire entretenue par le Gouvernement sans aucune garantie quant à son efficacité en termes de lutte contre la récidive, encore moins en termes de prévention de la délinquance. À cet égard, monsieur le garde des sceaux, la démonstration que vous nous avez faite précédemment ne fait que confirmer un peu plus mon propos.
Faut-il rappeler que si la réhabilitation légale est automatique, elle varie en revanche selon la gravité de la condamnation ? Ainsi, le délai est de trois ans après l'exécution de la peine pour les amendes, de cinq ans à compter de l'exécution d'une peine unique n'excédant pas un an emprisonnement et de dix ans à compter de l'exécution d'une condamnation unique à un emprisonnement n'excédant pas dix ans et, s'il y a plusieurs peines d'emprisonnement, à compter de l'exécution de celles ne dépassant pas cinq ans.
La réhabilitation légale est donc impossible pour les peines correctionnelles supérieures à dix ans et les peines criminelles qui concernent les délinquants les plus dangereux. De plus, elle n'est envisageable que si l'intéressé a effectivement purgé sa peine et s'il n'a pas été condamné durant ces délais à une autre peine criminelle ou correctionnelle. Les règles entourant la réhabilitation sont donc suffisamment strictes.
La réhabilitation, par l'effacement du bulletin n° 1 du casier judiciaire qu'elle induit après un certain délai, permet l'oubli, l'amendement de la personne, et ce dans le but d'une meilleure réinsertion.
Dans la pratique du casier judiciaire, chacun sait que l'enjeu de la mémoire ou de l'oubli n'est pas anodin. En effet, le choix opéré entre oubli et mémoire détermine la nature de la politique pénale voulue : dans le premier cas, elle sera préventive, contribuant à la réinsertion du condamné ; dans le second, elle sera répressive, stigmatisant la carrière criminelle de l'individu.
Pour toutes ces raisons, nous estimons qu'il convient d'en rester au droit actuel et demandons, en conséquence, la suppression de l'article 26.
Enfin, les présentes dispositions étant relatives aux récidivistes, elles auraient donc dû figurer dans la loi du 12 décembre 2005 relative au traitement de la récidive des infractions pénales plutôt que dans un texte censé prévenir la délinquance.
Sous prétexte que l'actuel système de réhabilitation légale - qui a pour effet d'effacer la condamnation ainsi que toutes les interdictions, incapacités et déchéances qui peuvent l'accompagner - affaiblirait l'application des dispositions concernant la récidive, on nous propose d'en modifier les règles tout juste un an après le vote d'une loi sur la récidive.
Ce qui était encore valable il y a quelques mois ne le serait donc plus aujourd'hui ! Vous n'êtes toujours pas en mesure de nous prouver que vous avez raison de proposer une telle mesure dans ce projet de loi. Légiférer au coup par coup, au gré des faits divers, c'est tout ce que vous faites, monsieur le ministre !