Cet article a sans doute quelque chose d'inopérant. Monsieur le garde des sceaux, vous imaginez qu'en doublant, dans un certain nombre de cas, le délai au terme duquel on peut bénéficier de la réhabilitation, vous allez réduire la criminalité ou les faits de délinquance dans notre pays.
Croyez-vous que les personnes qui commettent malheureusement les actes répréhensibles en question vont tout d'un coup être dissuadées parce qu'une loi sera votée dans laquelle le délai de réhabilitation aura été multiplié par deux ? La plupart des personnes concernées, j'ai le regret de vous le dire, ignorent même que la réhabilitation existe et ne savent rien du délai ! Si vous croyez vraiment qu'une telle mesure contribue à la prévention de la délinquance, monsieur le garde des sceaux, il faudra nous expliquer pourquoi.
Il y a la peine. Nous ne sommes pas laxistes, je ne sais pas combien de fois il faudra le dire : il faut que la peine soit accomplie. Mais une fois que la peine est accomplie, elle est accomplie ! Comme nous pensons que tout être humain peut s'amender et que ce principe essentiel fonde notre droit, il est très important de maintenir cette possibilité de réhabilitation qui suppose toujours l'exécution réelle de la condamnation - la remise gracieuse équivalant à l'exécution, vous le savez.
Nous considérons que les règles actuelles sont suffisamment strictes et que, comme l'a dit Mme Josiane Mathon-Poinat, la réinsertion constitue l'un des moyens les plus efficaces de prévention de la récidive.
Il serait bon, en revanche, d'éviter les sorties de prison « sèches », comme on dit. Lors de ma dernière visite de la prison de ma ville, un membre du personnel pénitentiaire m'a dit qu'une sortie « sèche » avait eu lieu la veille : un détenu est sorti en demandant où se trouvait la gare, parce qu'il ne connaissait pas la ville où il était emprisonné. Ce détenu est donc sorti sans accompagnement ou avec un accompagnement insuffisant.
Ceux qui sortent de prison en ayant purgé leur peine doivent être réhabilités et recouvrer leurs droits, en particulier leurs droits civiques, lorsque la loi le permet. Et c'est surtout par l'accompagnement, par une politique de réinsertion, qu'on luttera concrètement contre la récidive.