Intervention de Marie-Pierre Monier

Commission de la culture, de l'éducation et de la communication — Réunion du 25 novembre 2020 à 8h45
Projet de loi de finances pour 2021 — Crédits « enseignement scolaire » - examen du rapport pour avis

Photo de Marie-Pierre MonierMarie-Pierre Monier :

Je remercie notre rapporteur pour l'organisation des auditions. J'apprécie que nous ayons été associés, la parole a été parfaitement libre, cette façon de travailler est très appréciable.

Nous examinons ce budget dans ces conditions très difficiles pour l'éducation nationale. Je m'associe bien sûr à votre hommage à Samuel Paty : l'assassinat de l'un des leurs a profondément ébranlé la communauté enseignante. Les hussards noirs de la République sont toujours les piliers de notre société face à l'obscurantisme. Mais nous ne devons pas nous contenter d'hommages : il faut aussi entendre leurs alertes, lorsqu'ils disent qu'ils ne se sentent pas assez protégés, que le dialogue avec la hiérarchie est souvent compliqué, qu'ils ont besoin de plus de formations pour répondre sereinement aux nombreuses questions de leurs élèves.

Les personnels de l'éducation nationale ont été, et sont encore, en première ligne dans cette crise sanitaire, avec de nombreuses situations complexes à gérer : des protocoles sanitaires difficiles à mettre en place, un stress important pour les équipes éducatives, des élèves en difficulté après le premier confinement, des parents d'élèves inquiets...

Notre école de la République a pour mission de fournir à nos élèves un enseignement qui permette de résorber les inégalités, pour former des citoyennes et des citoyens qui, demain, pourront choisir la voie qui leur correspond, indépendamment de leur origine sociale. Nous savons que l'école manque de moyens pour parvenir à remplir convenablement cette mission. Ce projet de loi de finances pour 2021 répond-il à cette problématique ? La hausse des crédits de la mission « enseignement scolaire » s'explique également par le transfert d'une partie du budget consacré au sport et à la jeunesse qui rejoint le programme 214, et à une revalorisation salariale prévue pour le deuxième trimestre 2021. Si cette revalorisation est un signe positif - je regrette, cependant, que le point d'indice n'ait pas été revalorisé -, cela signifie également que le budget n'augmente pas en proportion suffisante pour permettre les créations de postes, en particulier dans le second degré, et l'augmentation de moyens nécessaires dans de nombreux domaines.

Les crédits prévoient une hausse du nombre de postes dans l'enseignement primaire, pour atteindre l'objectif du dédoublement des classes en REP et REP+ : c'est une bonne chose tout comme le maintien de toutes les classes en milieu rural. Mais nous regrettons que cela se fasse au détriment du dispositif « plus de maitres que de classes », qui concerne notamment les écoles rurales, et que ce progrès soit contrarié par des suppressions de postes dans les autres programmes.

La suppression de 1 800 postes dans l'enseignement secondaire est très inquiétante, d'autant qu'elle coïncide avec l'arrivée de 28 000 élèves supplémentaires dans le secondaire. La compensation de ces suppressions de postes par le recours aux heures supplémentaires n'est pas satisfaisante : les enseignants comme les chefs d'établissement disent que les enseignants ne peuvent pas absorber autant d'heures supplémentaires, beaucoup sont déjà effectuées et elles se concentrent sur peu d'enseignants.

La détresse des directeurs et directrices d'école, exprimée à de nombreuses reprises l'année dernière, ne trouve pas non plus un écho suffisant dans ce budget : même si un effort est fait pour permettre de mettre en place plus de décharges, il n'est pas suffisant.

Nous constatons également que les moyens consacrés à l'accompagnement des élèves ne sont pas suffisants : les réseaux d'aides spécialisées aux élèves en difficulté (Rased), les médecins et les infirmiers scolaires, le personnel en charge de l'accompagnement social des élèves sont plus que jamais indispensables pour surmonter les difficultés nouvelles de la crise sanitaire, et pourtant le budget qui leur est consacré n'augmente pas en proportion.

Nous notons bien entendu la volonté de mettre l'accent sur l'école inclusive, avec la création de 4 000 postes d'AESH, mais nous regrettons que leur rémunération ne progresse pas : la plupart sont payés au SMIC et sont à temps partiel, ils ont donc des revenus très faibles, alors qu'ils assurent une mission essentielle qui mériterait d'être revalorisée de façon conséquente.

Le mal-être du personnel de l'éducation nationale est grandissant. Ils et elles tirent la sonnette d'alarme depuis longtemps, tout en acceptant de faire face avec engagement pour le bien des élèves. Il faut entendre ces alertes, si nous ne voulons pas atteindre un point de non-retour pour notre école.

Le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain estime donc que ce projet de loi de finances 2021 ne répond pas suffisamment aux problèmes, nous voterons donc contre.

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