Merci pour votre soutien, nous avons travaillé en bonne intelligence, c'est effectivement une marque de fabrique de la Haute Assemblée. Nombre de vos questions s'adressent en fait au ministre, et sans pouvoir répondre à sa place, je vais tâcher de vous communiquer les éléments dont je dispose et mon point de vue.
Le périmètre du ministère évolue, effectivement, parce que le Gouvernement y a ajouté la jeunesse et les sports, pour qu'il y ait plus de rapprochements entre l'éducation nationale, la jeunesse et les sports. Cela se voit notamment au niveau territorial avec les créations des délégations régionales académiques à la jeunesse, à l'engagement et au sport.
Le problème des heures supplémentaires est sérieux : on peut comprendre que le ministère y recoure, connaissant l'évolution démographique des effectifs, mais il doit le faire sans excès, parce qu'on sait qu'en pratique, cela ne fonctionne pas et qu'on se retrouve alors avec des heures d'enseignement non effectuées.
Nous allons suivre le débat sur les directeurs d'école, une proposition de loi a été adoptée en première lecture à l'Assemblée nationale. Nous ne savons pas exactement quelle est la position du Gouvernement, mais il semble que le texte puisse prospérer. Nous suivrons aussi de près la situation sur la médecine scolaire, c'est un enjeu très important. Le nombre de médecins scolaires diminue. Ils étaient 974 en 2019 et 935 en 2020.
Les résultats de l'école ne sont pas à la hauteur, et nous constatons que le confinement a provoqué un décrochage en particulier dans les milieux populaires, car des familles ne sont pas équipées en matériel informatique, certaines ne sont pas abonnées à des fournisseurs d'internet. Nous constatons également que trop d'enseignants ne sont pas remplacés, c'est de plus en plus courant. La formation rémunérée pendant les vacances, c'est un tabou pour les organisations syndicales, mais la difficulté est bien là, on peut y voir une nouvelle manière de travailler. On doit pouvoir aussi réfléchir à la distinction entre le temps de présence et le temps d'enseignement, si l'on augmentait le temps de présence de 3 heures, cela représenterait l'équivalent de 50 000 enseignants de plus, c'est considérable. Nous savons aussi que les rémunérations sont trop faibles, avec, en début de carrière, 1 690 euros nets pour un certifié et 1 875 euros nets pour un agrégé. C'est quelque part honteux de payer si mal nos enseignants à ce niveau de qualification, d'autant qu'en réalité, ils travaillent 44 heures par semaine en moyenne, il faut en tenir compte. De mon point de vue, il serait donc intéressant de voir comment les faire rester plus longtemps à l'école, les faire travailler un peu différemment, mais on sait combien cela est difficile.
Je suis très inquiet aussi de voir que tous les chefs d'établissement nous disent qu'ils apprennent à la télévision ce que leur ministre leur réserve, le manque de communication est criant, les équipes sont très fatiguées - il faudrait peut-être songer à arrêter de réformer sans cesse, et consolider le travail accompli.
Le rapport sur « Les nouveaux territoires de l'éducation » de nos collègues Laurent Lafon et Jean-Yves Roux, est effectivement décisif pour que la ruralité soit enfin prise en compte dans les politiques éducatives, les problèmes sont trop identifiés à la ville, alors qu'ils se posent partout dans nos territoires. Des expérimentations sont en cours, nous les suivrons de près, de même que nous suivons la réforme du baccalauréat et son évaluation. Vous avez raison de souligner que les chiffres ne suffisent pas, qu'une augmentation même de 1,9 milliard d'euros peut se perdre dans les méandres d'une organisation qui ne saurait pas se changer ni évoluer : il faut prendre en compte les orientations des politiques éducatives, bien voir l'aspect qualitatif des choses.
Je partage vos inquiétudes sur la laïcité. Je m'interroge sur la lettre de Jean Jaurès qui a été lue dans nos écoles, je me demande s'il n'aurait pas été préférable de se référer à celle de Jules Ferry aux enseignants, quand il leur demande de faire attention à ne pas blesser les autres. Le rapport de l'inspection que j'évoquais soulignait qu'une partie du corps enseignant considère la laïcité comme une affaire de croyance personnelle, plutôt qu'un droit effectif : c'est un problème. Il y a une dérive dont nous devons tenir compte dans le recrutement, il faut peut-être une épreuve qui permette de choisir ceux des candidats qui sont disposés à défendre la laïcité telle que nous l'entendons dans notre droit positif.
La géographie prioritaire, telle qu'elle est pratiquée dans le cadre des REP et REP+, a mobilisé beaucoup de moyens sans résultats suffisamment tangibles, en particulier sur la réduction des inégalités sociales grâce au parcours scolaire. Il est donc logique qu'on expérimente un autre système, celui du contrat, qui donne plus de latitude à l'établissement scolaire ; certains pensent qu'on perd en universalité, mais il faut quand même faire sa place à l'efficacité, ou bien les principes d'universalité sont contestés eux-mêmes par manque d'effectivité.
Nous n'avons pour l'instant pas assez de recul pour savoir si l'enveloppe de 100 millions d'euros pour compenser les communes de l'obligation d'instruction à trois ans est suffisante ; il va falloir suivre ce dossier. Toutefois, nous avons auditionné le secrétariat général de l'enseignement catholique. Ce dernier nous a indiqué que la situation s'était apaisée sur le terrain. Les communes ont appliqué la loi et augmenté leur contribution aux écoles privées pour les élèves de 3 à 6 ans, en application du principe de parité.
Le numérique a un coût très important, mais l'enjeu est décisif. Le ministère doit s'en saisir davantage qu'il ne le fait - les choses avancent dans ce domaine, en particulier avec la mise en place d'un référentiel commun.
Nous allons déposer un amendement avec Nathalie Delattre, dans le cadre de l'enseignement agricole. Nous voulons abonder l'enseignement agricole depuis l'enseignement scolaire, sans incidence sur le fonctionnement des établissements scolaires. Les crédits, d'un montant de 6 millions d'euros pour soutenir les maisons familiales rurales, seront prélevés sur le programme transversal 214 « soutien de la politique de l'éducation nationale ».