Intervention de Vincent Eblé

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 19 novembre 2020 à 9h05
Projet de loi de finances pour 2021 — Mission « culture » - examen du rapport spécial

Photo de Vincent EbléVincent Eblé, rapporteur spécial :

Je concentrerai mon intervention sur le programme 175, dédié à la protection des patrimoines, et le programme 131, dédié à la création.

Le programme 175 « Patrimoines » devrait être doté en 2021 de 1,016 milliard d'euros en CP, soit une progression de 44,3 millions d'euros, correspondant à une hausse de 4,6 %, par rapport à la loi de finances pour 2020. Le plan de relance vient largement compléter ces crédits, puisqu'il comprend en effet un plan d'investissement culturel en faveur des patrimoines et pour l'emploi, appelé à être abondé de 344,7 millions d'euros en CP en 2021 ; cette dotation complémentaire représente près de 34 % de crédits supplémentaires pour le programme 175.

Les deux tiers restants des crédits de paiement du plan d'investissement - 231,7 millions d'euros - sont fléchés vers le réarmement budgétaire des établissements patrimoniaux, afin de relancer leur activité, fortement fragilisée par la crise. Cette aide répond à une double logique : renflouer les opérateurs en effaçant leurs pertes et permettre un rebond de leurs investissements, créant ainsi de l'activité chez leurs prestataires.

Une première estimation, réalisée en mai 2020 à notre demande, faisait état d'une perte cumulée pour ces établissements de 252 millions d'euros. Ce chiffre est aujourd'hui à réévaluer compte tenu des incidences des mesures de contraintes sanitaires mises en oeuvre lors du déconfinement, de l'instauration d'un couvre-feu à partir du 16 octobre, puis de la mise en place, le 30 octobre, d'un deuxième confinement. Le château de Versailles tablait ainsi sur une perte de 35 millions d'euros avant le reconfinement et le musée du Louvre, plus impacté encore, sur 85 millions d'euros.

De fait, la crise remet en cause le choix effectué par le ministère ces dernières années de diminuer les subventions de certains opérateurs pour les inciter à développer leurs ressources propres. Parmi celles-ci, les recettes tirées du mécénat suscitent également une inquiétude, au regard des baisses attendues des budgets dédiés au sein des grandes entreprises et d'une possible réorientation des dons vers des causes sanitaires.

Si l'initiative du Gouvernement doit être saluée, elle pourrait s'avérer d'ores et déjà insuffisante pour permettre aux opérateurs de recouvrer leurs marges financières d'avant la crise. La direction générale des patrimoines (DGP) nous a confié qu'elle n'attendait pas un retour à la normale avant l'exercice 2023, l'impact du deuxième confinement exacerbant les difficultés rencontrées. Le musée du Louvre, quant à lui, nous a indiqué craindre de se retrouver en cessation de paiement au cours de l'exercice 2022.

S'agissant des autres monuments, le PLF témoigne d'un réel souci pour les collectivités territoriales. Les crédits dédiés à l'entretien et à la restauration des monuments n'appartenant pas à l'État - mais aux collectivités territoriales et propriétaires privés - devraient progresser de 5 millions d'euros. Les musées territoriaux devraient bénéficier d'une augmentation de leur dotation de 10 millions d'euros supplémentaires et les archives territoriales d'une majoration de crédits de 3 millions d'euros

Ce soutien réaffirmé doit être salué. Il aurait pu être complété par de nouvelles mesures spécifiques pour les propriétaires privés, dont le soutien essentiel à la préservation du patrimoine est fragilisé par la réforme du régime fiscal du mécénat en loi de finances pour 2020 ou l'absence de révision du dispositif Malraux, en faveur des centres-villes.

Nous saluons également la montée en puissance du plan Cathédrale, avec une hausse de 5 millions d'euros en CP au titre du programme 175 et de 30 millions d'euros dans le cadre du plan de relance. Elle ne saurait cependant occulter l'absence de financement public pour les travaux de conservation et de restauration de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Les donateurs privés contribuent aujourd'hui seuls au financement de l'établissement public chargé des travaux, ce qui peut apparaître en contradiction avec la loi du 29 juillet 2019 et semble trahir l'intention des donateurs.

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