Intervention de Roger Karoutchi

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 19 novembre 2020 à 9h05
Projet de loi de finances pour 2021 — Mission « médias livres et industrie culturelle » et compte de concours financiers « avances à l'audiovisuel public » - examen du rapport spécial

Photo de Roger KaroutchiRoger Karoutchi, rapporteur spécial :

Je vais d'abord répondre à la seule question qui ne concerne pas l'audiovisuel. Vincent Delahaye, les 200 millions d'euros consacrés à Presstalis ont servi, sans illusion et dans la perspective de sa disparition, à apurer les comptes et à payer les dettes, à faire en sorte que les débiteurs reçoivent un minimum d'indemnisations, pour éviter des procès. J'ajoute que, au fil des années, nous avions déjà couvert les dettes de Presstalis, qui a été un puits sans fond.

Quelles sont les pistes de réflexion par rapport au gel ou à la suppression de la CAP ? Monsieur le rapporteur général, les pistes sont toujours les mêmes. Ceux qui souhaitent conserver la contribution envisagent de l'étendre aux tablettes et téléphones portables pour en baisser son montant ; c'était, par exemple, l'idée de Franck Riester. Les associations qui défendaient les utilisateurs de tablettes et téléphones ont poussé des hurlements, affirmant qu'on ne regardait pas forcément la télévision sur ces outils. On parle aussi d'une augmentation de la taxe sur certains biens et services télécom, les objets connectés, les abonnements. On envisage enfin dans certaines études une augmentation de la TVA liée au financement de l'audiovisuel public. Mais, pour être franc, alors que nous savons que la taxe d'habitation est vouée à disparaître, les réflexions sur le substitut sont embryonnaires. Le seul qui avait commencé à travailler sur le sujet, c'était M. Darmanin, mais j'ai cru comprendre qu'Olivier Dussopt avait d'autres priorités.

J'entends les propos de Vincent Éblé, mais on aura un audiovisuel public quand son périmètre sera réellement clarifié et que les missions de service public seront réellement prédéterminées. Un certain nombre d'émissions, de jeux ou de films ne correspondent pas à des missions de service public. Je ne souhaite pas que les chaînes privées deviennent les maîtres du jeu audiovisuel, mais pour autant, il faut donner à l'audiovisuel public des missions strictes. C'est une erreur de le soumettre au même système d'audimat que les chaînes privées. Avec 3,6 milliards d'euros, le service public a les moyens de faire des émissions éducatives, pour la jeunesse, concernant la vie publique, la diversité, même si celles-ci sont moins attractives que les émissions de variétés. Il faut qu'on retrouve le « génie » de la création française. Lorsque je vois les séries proposées par Salto, la plateforme mise en place par France Télévisions, celles-ci ressemblent en tout point à celles que l'on retrouve sur les chaînes privées. Par ailleurs, les chaînes publiques n'ont pas les moyens financiers d'entrer dans un système de concurrence.

Je suis peu favorable à la disparition de France 4. La chaîne a eu un rôle essentiel, notamment pendant les périodes de confinement. De plus, les crédits qui lui sont consacrés sont tellement marginaux. Mais si France 4 est la seule chaîne du groupe France Télévisions à incarner le service public, une refonte du périmètre du groupe apparaît indispensable. Il faut un vrai débat au Parlement. On évoque d'ailleurs souvent le CSA, mais celui-ci reste constamment en retrait sur les missions de service public. De la même manière, France Télévisions a justifié le remplacement de France O par plus de visibilité de l'outre-mer sur France 3. Je ne suis pas convaincu. Je suis agacé par la volonté de vouloir fermer des chaînes qui finalement coûtent peu, et qui ne sont pas celles pour lesquelles on attendait une rationalisation.

Le sujet de la diversification des radios musicales de Radio France n'est pas le principal problème. Radio France a fait beaucoup d'efforts. Par ailleurs, le groupe a eu à faire face à des dépenses liées au chantier de la Maison de la radio.

Pourquoi voter pour ces crédits ? D'abord parce que la partie relative au livre, au cinéma et à la musique, bénéficie de moyens conséquents pour faire face à la crise sanitaire, même si c'est au travers de la mission « Plan de relance ». Sur la partie relative à l'audiovisuel public, ma critique porte surtout sur « l'enterrement » de la réforme de l'audiovisuel. Je fais crédit aux responsables de l'audiovisuel public d'avoir l'ambition de se réformer, mais tant qu'aucune réflexion ne sera engagée au travers d'une loi, le changement restera lettre morte. Ils ne sont toutefois pas les seuls responsables, et on peut noter quelques efforts. Ainsi, encore cette année, nous pouvons imaginer un vote positif, quitte à indiquer à la ministre, lors du débat dans l'hémicycle, que c'est la dernière fois. Si la réforme de l'audiovisuel ne parvient pas à être mise en place, nous ne pourrons pas voter éternellement ces crédits.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion