Limiter la liberté d'entreprendre pour préserver le bien commun qu'est la santé, c'est ce que l'ensemble de la planète essaie de faire aujourd'hui. La question est donc de savoir si nous devons en rester à la situation actuelle ou, compte tenu de ce que nous constatons, faire évoluer le droit pour encadrer davantage certains principes.
Nous constatons que notre modèle de développement est encore fondé - nous n'avons pas encore fini la transition néolithique - sur une certaine prédation des ressources naturelles, allant au-delà des capacités de régénération de la planète. Par conséquent, nous avons besoin de régulation, car nous ne pouvons pas faire face à cette situation en nous reposant sur l'idée que l'innovation nous permettra de courir plus vite. La question est donc posée et de plus en plus souvent, notamment pour la santé, le climat et la biodiversité.
La gouvernance mondiale actuelle n'est pas en mesure de faire face à la pandémie et aux défis organisationnels et scientifiques qu'elle implique. Par conséquent, nous avons besoin de prévoir des organisations différentes.
Répondre à ces questions au niveau national ne fonctionne pas. Si nous le pensons, au nom d'une souveraineté factice, nous perdons toute capacité d'agir. Sur ces enjeux, la souveraineté ne peut être que partagée. C'est la raison pour laquelle nous devons consacrer cette notion de « biens communs » et mettre notre pays au service de leur protection. La proposition de loi constitutionnelle n'est pas simplement une affirmation de ce principe. Sinon, nous déléguerions au juge constitutionnel le soin de placer le curseur là où il le souhaite. Les articles 2 et 3 donnent bien au législateur compétence pour fixer des bornes à la liberté d'entreprendre au nom de la défense des biens communs.
Ce texte n'a certes guère de chances de prospérer. Lançons toutefois le débat sans le tuer dans l'oeuf. Ce serait une bonne chose compte tenu des enjeux.