Intervention de Jean-Pierre Sueur

Réunion du 10 janvier 2007 à 21h30
Prévention de la délinquance — Article 30

Photo de Jean-Pierre SueurJean-Pierre Sueur :

En effet, si ces dispositions étaient adoptées, pour la première fois en ce qui concerne la justice des mineurs, certaines peines, puisque c'est bien de cela qu'il s'agit, les mesures de composition pénale étant inscrites au casier judiciaire, seraient prononcées sans audience, sans débat contradictoire et, par conséquent, sans dialogue préalable à la sentence. L'approche pédagogique serait ainsi mise de côté, et c'est une vraie difficulté.

Aucune garantie n'est prévue dans ce texte pour assurer, dans le cadre de la composition pénale, la prise en compte de l'état de minorité du mis en cause, sauf en ce qui concerne la nécessité de l'accord des représentants légaux. Il n'est notamment pas prévu d'enquête obligatoire et préalable sur la personnalité du mineur, ne serait-ce que sous la forme d'une procédure de renseignement socio-judiciaire confiée à la Protection judiciaire de la jeunesse.

Le juge des enfants, dont le rôle consiste à accompagner judiciairement l'évolution du mineur, avec le concours des services éducatifs qu'il désigne, se trouverait cantonné, si cette disposition était adoptée, à un rôle d'homologation. Nous considérons donc que l'instauration de la composition pénale pour les mineurs constituerait une tentative de contournement du juge des enfants et des procédures alternatives aux poursuites. Cette disposition, parfaitement symbolique, traduirait, en fait, le renoncement à la perspective éducative.

C'est pourquoi nous doutons de la constitutionnalité d'une telle mesure. En effet, je vous rappelle, mes chers collègues, que, par une décision du 29 août 2002, le Conseil constitutionnel a affirmé la primauté de l'action éducative dans la justice des mineurs et « de la recherche du relèvement éducatif et moral des enfants délinquants par des mesures adaptées à leur âge et à leur personnalité ».

La composition pénale est-elle compatible avec cette exigence de relèvement éducatif et moral des mineurs, proportionné à leur âge, formulée en toute clarté par le Conseil constitutionnel ?

Le texte qui nous est proposé ne peut, selon nous, être accepté, compte tenu de la définition et de la spécificité mêmes de la justice des mineurs telle qu'elle existe aujourd'hui.

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