M. le président de la commission l’a dit : cette suppression d’impôt est particulièrement inopportune à l’heure où les collectivités sont confrontées à la fois à la covid et à la chute de leurs recettes fiscales, domaniales et tarifaires. Ces ressources se sont littéralement écroulées – selon les estimations, la perte est de 5 milliards à 8 milliards d’euros.
C’est ce moment particulièrement difficile que le Gouvernement choisit pour bouleverser un peu plus encore la fiscalité locale. D’une part, il poursuit la réforme de la taxe d’habitation, qui va quand même coûter 10 milliards d’euros dans les trois prochaines années : il va falloir les trouver… D’autre part, il privilégie une politique de l’offre en diminuant les impôts des entreprises de 10 milliards d’euros cette année et de 10 autres milliards d’euros l’année prochaine, sans aucune contrepartie.
Comme son nom l’indique, la CVAE est une taxe sur la valeur ajoutée. Elle est prélevée en aval du processus de production. Elle est donc adaptée à l’activité de l’entreprise. Le Gouvernement nous vend la nécessité de combler un différentiel de compétitivité, notamment par rapport à l’Allemagne, où les impôts dits « de production » seraient moins élevés.
Encore faut-il se mettre d’accord sur ce que sont les impôts de production ! Par exemple, nos voisins d’outre-Rhin disposent de la Gewerbesteuer. Cette taxe professionnelle rapporte 50 milliards d’euros aux communes. Elle n’entre pas dans la catégorie des impôts de production au sens de la comptabilité européenne, alors que, par une partie de son assiette, elle est très proche de la cotisation foncière des entreprises.
Il faut également mettre dans la balance les crédits d’impôt et les subventions versés aux entreprises pour soutenir leur développement : ces dispositifs sont beaucoup plus étoffés en France qu’en Allemagne.
Ce remplacement de la fiscalité locale par une dotation est une forme de tutelle, ni plus ni moins, les dotations pouvant évoluer à la baisse dans la durée.
Après la suppression de la taxe professionnelle en 2010, celle de la taxe d’habitation et maintenant celle, lancée, d’une partie significative des impôts des entreprises, le constat est clair : l’exécutif se dote chaque fois d’outils supplémentaires au service de sa volonté centralisatrice face aux élus, supposés vraisemblablement trop engagés dans la dépense publique.
La relation entre l’État et les collectivités territoriales est bien en train de changer de nature. Nous assistons à un recul flagrant des libertés locales. C’est la raison pour laquelle il faut refuser cette réforme de la fiscalité locale.