Intervention de Marc Laménie

Réunion du 10 décembre 2009 à 15h00
Droits syndicaux en europe — Rejet d'une proposition de résolution européenne

Photo de Marc LaménieMarc Laménie, rapporteur de la commission des affaires sociales :

Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, sous des aspects techniques, comme vient de le rappeler fort justement M. Yung, la proposition de résolution déposée par le groupe socialiste aborde en réalité une question politique majeure, celle de la protection des droits des salariés et de leurs organisations syndicales dans le cadre du marché unique européen. Ce sujet est pleinement d’actualité.

Historiquement, la Communauté européenne s’est attachée à supprimer les obstacles aux échanges à l’intérieur du marché unique. À cette fin, elle a consacré quatre libertés économiques fondamentales : la liberté de circulation pour les travailleurs, la liberté d’établissement pour les entreprises, la liberté de circulation des marchandises et la libre prestation de services. Cette politique d’ouverture des marchés a pour objectif de stimuler la croissance, et donc les créations d’emplois sur son territoire.

Cependant, dans une Union élargie à vingt-sept États, dont les niveaux de développement sont très inégaux, la libéralisation des échanges pourrait conduire, si elle n’était pas soigneusement encadrée, à une mise en concurrence des systèmes économiques et sociaux préjudiciable aux salariés.

Lorsqu’une entreprise détache des salariés dans un autre État européen pour y exécuter une prestation de services, un chantier de construction par exemple, les salariés sont soumis, en application d’une directive de 1996, aux règles protectrices de l’État d’accueil, notamment en matière salariale. Ainsi, un salarié polonais ou lituanien détaché en France bénéficie au moins du SMIC ou du salaire minimum conventionnel s’il lui est supérieur.

Dans la plupart des cas, la directive a atteint son objectif et a permis d’écarter le risque de dumping social. La jurisprudence récente de la Cour de justice des Communautés européennes, qui en a interprété les termes de manière restrictive, a cependant suscité de légitimes inquiétudes. Elle a en effet donné l’impression qu’une primauté était donnée aux libertés économiques au détriment de la protection des salariés et du droit à l’action collective reconnu aux syndicats.

La Cour de justice a tout d’abord fait valoir que la directive garantit seulement le respect des normes sociales d’application générale, ce qui pose un problème dans les pays où la négociation est très décentralisée et où les conventions collectives s’appliquent seulement dans une entreprise ou dans une localité. Elle a ensuite jugé qu’une action collective menée par un syndicat, un mouvement de grève par exemple, pouvait être contraire, dans certaines circonstances, à la liberté d’établissement ou à la libre prestation de services reconnue aux entreprises. Elle a enfin décidé que le droit à l’action collective des syndicats devait être conforme au principe de proportionnalité.

Dans sa proposition de résolution, le groupe socialiste vise à revenir sur cette jurisprudence. Pour cela, il recommande de réviser la directive de 1996.

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