Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous nous retrouvons cet après-midi en séance pour la lecture des conclusions de la commission mixte paritaire (CMP) sur le quatrième projet de loi de finances rectificative pour 2020 (PLFR 4) – le dernier, semble-t-il.
Encore une fois, le calendrier a été particulièrement resserré, puisque, la semaine dernière, nous avons examiné ce texte en première lecture et, le lendemain, avons retrouvé nos collègues députés dans le cadre de la CMP.
À l’occasion de la première lecture, nous avons pris acte du fait que le Gouvernement a dû revoir à la baisse sa prévision de croissance pour 2020, avec une chute de 11 % du PIB. Ce scénario de croissance repose sur l’hypothèse d’une perte d’activité de 20 % par rapport au niveau d’avant-crise en novembre, contre 30 % en avril, lors du premier confinement. En réalité, cette hypothèse est sans doute un peu pessimiste, comme je l’ai déjà dit. Ainsi, la Banque de France estime que la perte d’activité atteindrait 12 % en novembre.
En tout état de cause, la prévision de croissance gouvernementale inclut déjà une prolongation du confinement en décembre. De ce fait, c’est uniquement la hausse des dépenses liées aux mesures de soutien qui explique la dégradation de la trajectoire budgétaire dans ce texte. Comme vous le savez, ce renforcement porte prioritairement sur les mesures permettant de compenser directement les pertes des entreprises, avec le fonds de solidarité, les exonérations de cotisations sociales ou encore l’activité partielle.
Le Gouvernement a donc fait le choix de la prudence. Le budget rectificatif repose sur des hypothèses extrêmement conservatoires, et le déficit annoncé ne devrait pas réellement être atteint. Des crédits budgétaires seront reportés sur 2021. Cela nous a déjà été confirmé dans le cadre de l’examen du PLF 2021, avec même l’ouverture de crédits complémentaires.
Au total, les ouvertures de crédits au fil des quatre lois de finances rectificatives de 2020 sont dix fois plus élevées que les années précédentes. C’est, d’une certaine manière, colossal, mais c’est nécessaire. C’est la raison pour laquelle nous avons voté les trois précédentes lois de finances rectificatives et que nous voterons la quatrième aujourd’hui sans en modifier l’équilibre global. Les mesures de soutien sont là et bien dotées.
Le Gouvernement garde indéniablement des marges de manœuvre pour affronter les prochaines semaines et reste très prudent. La situation peut l’expliquer, mais nous veillerons à contrôler leur usage.
Pour autant, le Sénat a procédé à quelques modifications, ajouts et suppressions qui répondaient à des attentes légitimes.
Le travail de compromis que j’ai réalisé avec le rapporteur général de l’Assemblée nationale, Laurent Saint-Martin, a permis de reprendre plusieurs des apports significatifs du Sénat.
Tout d’abord, nous avons préservé les crédits dédiés au sport, qui devaient initialement être annulés, à hauteur de 4, 7 millions d’euros, ainsi que la suppression du rétablissement du droit à l’image collective. Pour autant, il nous faut soutenir le milieu sportif touché par la crise.
De même, les crédits de la mission interministérielle de coordination anti-fraude (Micaf), qui subissait une annulation de 500 000 euros, ont été maintenus.
Ensuite, afin de répondre aux préoccupations de notre assemblée, des crédits supplémentaires ont été votés, à raison, par exemple, de 20 millions d’euros à destination des Alpes-Maritimes, département durement touché par une tempête cet automne.
Je rappelle que 8 millions d’euros ont également été dégagés pour soutenir la filière équine dans la période de crise sanitaire et pour tenir compte des difficultés particulières auxquelles elle doit faire face.
La CMP a également maintenu l’affectation de 52 millions d’euros, somme qui n’est pas nécessaire à Action Logement, au bénéfice des régimes de la sécurité sociale plutôt qu’au budget de l’État, comme le prévoyait le PLFR dans sa version initiale.
Enfin, concernant les avances remboursables faites aux autorités organisatrices de la mobilité (AOM) pour compenser leurs pertes de recettes, la proposition du Sénat a été retenue. Celle-ci prévoit une clause de « retour à meilleure fortune », selon laquelle ces autorités ne seraient tenues au remboursement des avances perçues qu’à compter de l’année suivant le retour d’un niveau de recettes équivalent aux années 2017 à 2019. Le principe d’un remboursement échelonné sur une période minimale de six ans a également été conservé.
Certaines de nos autres propositions n’ont certes pas été conservées, mais des engagements ont été pris avec Laurent Saint-Martin pour que plusieurs dossiers avancent au cours des prochains mois.
Ainsi en est-il, par exemple, du sujet de compensations des collectivités territoriales, sur lesquelles nous reviendrons tout à l’heure, lors de l’examen de la première partie du projet de loi de finances. Il conviendra de continuer de suivre avec attention les compensations aux collectivités territoriales pour couvrir les pertes de recettes subies.
Par ailleurs, je considère que nous devons convaincre le Gouvernement de la nécessité de trouver un meilleur fonctionnement du fonds de solidarité, en particulier à l’égard des travailleurs indépendants.
Nous avons été saisis de cas concrets qui montrent qu’un certain nombre d’acteurs économiques, commerçants, travailleurs indépendants et petits entrepreneurs, ne sont pas soutenus ou ne le sont pas suffisamment. Nous en sommes arrivés à la conclusion qu’il convient de prévoir, au-delà de l’aide de 1 500 euros, un renforcement du fonds de solidarité à leur profit, afin de tenir compte des charges fixes de ces structures.
L’ensemble du tissu économique français doit être préservé. Je présenterai d’ailleurs un nouvel amendement sur le sujet dans le cadre de l’examen de la mission « Plan de relance » du PLF pour 2021.
Pour conclure, je me félicite des avancées issues des travaux du Sénat auxquelles nous sommes parvenus sur ce quatrième projet de loi de finances rectificative, lequel s’inscrit dans la continuité des trois précédents textes que nous avons examinés. Je vous invite donc, mes chers collègues, à voter les conclusions de la CMP, texte de compromis avec nos collègues députés.
Cela ne nous empêchera pas de montrer les failles de votre politique, en particulier dans les choix que vous opérez pour la relance, monsieur le ministre. Mais c’est un autre débat, que nous poursuivrons dans le cadre de l’examen du projet de loi de finances pour 2021.