Intervention de Marc-Philippe Daubresse

Réunion du 26 novembre 2020 à 14h30
Loi de finances pour 2021 — Plan d'urgence face à la crise sanitaire

Photo de Marc-Philippe DaubresseMarc-Philippe Daubresse :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, à la suite de Dominique Estrosi Sassone, je souhaite alerter le Gouvernement sur l’inadéquation entre l’ampleur de la crise du logement qui s’annonce dans les deux ans à venir et les moyens mis en place par l’État pour y faire face.

J’ai participé à deux gouvernements ayant lancé deux plans de relance qui ont marché. Le premier, le plan de cohésion sociale, engagé sur l’initiative de Jean-Louis Borloo en 2004 et en 2005, n’était pas seulement économique ; il avait aussi un vrai volet social, avec des mesures sur l’égalité des chances, sur la politique de la ville et sur de nombreux sujets que nous avons abordés au cours de notre débat. Le second, le plan de relance mis en œuvre par le regretté Patrick Devedjian, était plus territorialisé, s’appuyant largement sur les collectivités locales.

Si les chiffres qui nous ont été fournis se confirment, la situation de l’offre de logements dans notre pays sera à peu près la même en termes de nombre de ménages à loger qu’en 1951, avant l’appel de l’abbé Pierre ! Ainsi, 330 000 constructions neuves sont prévues à l’horizon fin 2021, contre 486 000 dans le cadre du plan Borloo de 2006 et même 417 000 au début du quinquennat de M. Macron. C’est une baisse importante.

Selon les prévisions, il devrait y avoir 25 % d’agréments pour les logements sociaux en moins l’an prochain. Or les agréments sont les permis de construire de demain et les mises en chantier d’après-demain. La diminution est déjà de 15 % pour les immeubles collectifs, le logement social étant fortement concerné.

Ainsi que Mme Estrosi Sassone l’a indiqué, toute la politique de la ville est enkystée. Et les annonces sur le fameux 1 % des 100 milliards d’euros, soit un milliard d’euros, sont pour une large part de l’enfumage ! Il n’y a pas grand-chose de concret. Pourtant, nous savons bien que l’exécution, la territorialisation et la gouvernance des dispositifs sont primordiales.

Nous devons revoir un certain nombre de points, y compris en ce qui concerne le marché de l’ancien, puisqu’il conditionne celui du neuf. Contrairement à une idée reçue, les prix continuent à augmenter et la demande n’est pas du tout repartie dans l’ancien. Il faut agir simultanément sur l’offre et la demande de constructions neuves. Nous savons comment y parvenir. Nous avons une expérience en la matière. Mme Estrosi Sassone a évoqué un certain nombre de pistes.

La relance du secteur de la construction et de la transaction immobilière est tout à fait possible avec des outils fiscaux et financiers. Malheureusement, on ne les trouve pas dans votre plan de relance. Vous n’avez pas pris la mesure de la crise qui s’annonce. C’est bien joli de parler de pacte pour la relance et d’envoyer des messages politiques, mais ce n’est pas cela qui donne des crédits ! L’aide aux maires bâtisseurs qu’on empêche par ailleurs de bâtir, cela ne marche pas ! Il faut prendre des mesures sur la digitalisation des process, afin de gagner en efficacité et de moderniser les outils des services d’urbanisme, et sur l’offre, en desserrant l’accès au crédit.

C’est quand même le ministre des finances, qui est en même temps président de l’organisme chargé de piloter la politique du crédit, qui bloque l’accession à la propriété d’un grand nombre de ménages modestes ! On prévoit ainsi dans les deux années à venir une baisse d’un tiers des accédants à la propriété, dont les revenus sont inférieurs à 3 SMIC.

Nous avons tous les outils pour agir. Nous pourrions accepter l’idée de délivrer les agréments de logements sociaux a priori et de vérifier les conditions a posteriori. Nombre d’offices et de structures sont suffisamment performants pour cela. Nous pouvons desserrer les contraintes malthusiennes des prix pendant la durée du covid-19.

Monsieur le ministre, il faut changer radicalement de politique du logement. Comptez sur nous pour vous le rappeler et vous le répéter dans les mois à venir, si vous ne prenez pas la mesure de la crise qui s’annonce. De toute manière, son ampleur sera telle que vous serez obligé de faire un nouveau plan de relance pour le logement !

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