Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je souhaite tout d'abord rappeler la position de la commission des lois, qui regrette le rattachement de la justice administrative à une mission distincte « Conseil et contrôle de l'État.
En effet, la justice administrative et la justice judiciaire sont les deux versants d'une même politique publique, qui consiste à rendre la justice.
Monsieur le ministre, je formulerai deux observations et poserai trois questions.
Première observation, la hausse des crédits du programme 165 « Conseil d'État et autres juridictions administratives » est de 6, 4 %, hors transfert de charges, contre 3, 5 % pour l'exercice précédent. Cette augmentation, qui peut paraître importante, est due, pour une bonne part, à la création d'un tribunal administratif à Nîmes, dont je me réjouis profondément en tant que sénateur gardois. Sont prévus à cet égard 3, 7 millions d'euros en investissements et la création de 18 emplois ETPT, équivalents temps plein travaillés.
Ma seconde observation concerne l'évaluation des frais de justice, qui perdront leur caractère limitatif à compter du 1er janvier 2006. En effet, au cours des auditions, les représentants du Conseil d'État m'ont indiqué que l'abondement de 2, 3 millions d'euros prévu cette année, qui porte le montant total de l'enveloppe alloué à 7, 7 millions d'euros, risquait d'être insuffisant.
Cette remarque me conduit à me demander, à l'instar de mon collègue Jean-Claude Frécon, rapporteur spécial, si la somme consacrée aux frais de justice dans le projet de loi de finances pour 2006 est vraiment conforme au principe de sincérité budgétaire.
J'en viens à mes trois questions.
Tout d'abord, la création de 22 postes de magistrats et de 27 postes d'agents de greffes, ce qui représente 25 ETPT, est très inférieure aux engagements inscrits dans la loi d'orientation et de programmation pour la justice du 9 septembre 2002. En outre, 18 postes sont créés - je viens de m'en réjouir ! -, uniquement pour la mise en place du tribunal administratif de Nîmes, à compter, certes, du 1er septembre 2006. Cette échéance tempère ma satisfaction, puisque les effectifs sont évalués en ETPT.
Dans ces conditions, monsieur le ministre, le plan quinquennal adopté en 2002 pourra-t-il être respecté ? Pouvez-vous m'assurer qu'un rattrapage interviendra l'année prochaine ? Quel sera son ordre de grandeur ?
Ensuite, la progression très soutenue du contentieux nous conduit à réfléchir sur l'organisation du travail dans les juridictions administratives. Sans doute un recentrage des magistrats sur l'activité juridictionnelle, qui constitue le coeur de leur activité, est-il nécessaire, en particulier en limitant leur participation à des commissions administratives.
À cet égard, les dispositions relatives à la présidence des instances disciplinaires de neuf professions de santé prévues par la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé devraient entrer en vigueur au cours de l'année 2006.
Le Conseil d'État, qui évalue à quarante magistrats supplémentaires les besoins induits par ce nouveau dispositif, préconise de détacher auprès du ministère de la santé quelques magistrats administratifs, qui assureront ces présidences. Que pense le Gouvernement de cette proposition ?
Enfin, certains contentieux, qui paraissent inutiles, pourraient être évités. Par exemple, les arrêtés de reconduite à la frontière des étrangers en situation irrégulière, qui sont notifiés par voie postale, contribuent à alimenter l'inflation des recours. De 2003 à 2004, dans les tribunaux administratifs, une augmentation de 78 % a été constatée. Cette procédure complexe donne lieu à une exécution très faible, de l'ordre de 1 %. Dans ces conditions, le Gouvernement est-il prêt à engager une réflexion dans ce domaine ?
Au bénéfice de ces observations, la commission des lois a donné un avis favorable à l'adoption des crédits consacrés au programme « Conseil d'État et autres juridictions administratives » dans le projet de loi de finances pour 2006.