Monsieur le président, madame, messieurs les ministres, mes chers collègues, la mission ministérielle « Développement et régulation économiques » qu'il nous est proposé de contrôler recoupe des domaines aussi importants que variés. Le seul programme « Développement des entreprises » comprend sept actions dans des domaines aussi essentiels que la politique industrielle, les télécommunications, le développement des PME ou le commerce extérieur. Il nous faut cependant constater que notre temps de parole n'a pas pour autant augmenté, bien au contraire.
Un autre élément demeure : l'affichage de grands principes par le Gouvernement et leur démenti immédiat par la politique budgétaire. Comment prétendre, par exemple dans l'action politique de l'énergie, renforcer l'indépendance énergétique du pays et assurer le bon fonctionnement du service public de l'énergie alors que vous bradez nos entreprises publiques ? Je reviendrai tout à l'heure sur les conséquences néfastes de tels choix politiques.
En bref, vous nommez cette mission ministérielle « Développement et régulation économiques », alors que le PIB stagne et que les dérégulations se multiplient au point de faire loi dans notre pays.
En réalité, les choix que vous avez faits et que vous confirmez dans les crédits de cette mission se traduisent par l'abandon d'une politique industrielle offensive, par une financiarisation de l'économie niant totalement les droits des travailleurs, enfin par la destruction de tous nos leviers d'action par la privatisation de nos grands établissements publics.
Or, à l'heure actuelle, la situation générale des entreprises françaises se caractérise par un faible niveau d'emplois et par une forte soumission aux exigences de la finance.
Ainsi, les fermetures d'usines se multiplient et le phénomène des délocalisations prend de plus en plus d'ampleur. Une grande partie du travail a en effet été délocalisée dans les pays les plus pauvres par des investisseurs soucieux de produire au plus faible coût. Rappelons que, le 22 novembre, la directive Bolkestein a été soumise à l'examen des eurodéputés. Si le champ d'application de la directive a été restreint, sans grande garantie pour l'avenir d'ailleurs, le principe du pays d'origine a lui été maintenu !
Face à cette situation critique, les dépenses engagées par le Gouvernement paraissent bien faibles. Les crédits de paiement demandés pour 2006 au titre du développement des entreprises sont diminués de 5 millions d'euros par rapport aux autorisations d'engagement demandées pour 2006.
Cette insuffisance de moyens est sans doute justifiée par la logique de la politique gouvernementale.
En effet, vous ne cessez de répéter que les difficultés de nos entreprises sont dues au niveau trop élevé des prélèvements obligatoires et aux contraintes administratives et réglementaires. Selon vous, le développement des entreprises passerait par des exonérations fiscales favorisant de préférence les grosses structures et par des exonérations de charges fiscales.
Les dépenses fiscales montrent d'ailleurs que tout est fait, dans votre politique, pour favoriser une financiarisation de l'économie.
Ainsi, l'une des principales initiatives de votre gouvernement, et c'est plus que révélateur, consiste dans l'allégement de l'imposition des bénéfices. Mais vous n'en restez pas là : on trouve en bonne position le crédit d'impôt sur certains revenus distribués par des sociétés françaises et étrangères, qui favorise largement les délocalisations. Et j'en passe !
Le groupe communiste républicain et citoyen a montré à plusieurs reprises qu'il serait, au contraire, nécessaire de soumettre l'impôt sur les sociétés à une progressivité incitative. Cette progressivité pourrait tenir compte du besoin de soutien aux petites entreprises, et à celles dont l'activité ne permet pas forcément de dégager une forte valeur ajoutée tout en utilisant une main-d'oeuvre importante. Ainsi, on pourrait imaginer une modulation du taux de l'impôt sur les sociétés en fonction de la part des bénéfices affectée à la création d'emplois, à la formation et aux salaires. Les bénéfices tirés de placements financiers seraient, eux, exclus de cette modulation.
La financiarisation de l'économie française s'accompagne de la privatisation d'un secteur aussi essentiel et vital pour nos concitoyens que l'énergie. Ainsi, après La Poste et GDF, c'est EDF que vous avez décidé de privatiser.
Dans le programme budgétaire, le Gouvernement se targue d'assurer à l'ensemble des consommateurs la disponibilité en quantité et en qualité de l'énergie et des matières premières qui leur sont nécessaires, tout en veillant, dites-vous, à préserver une indépendance énergétique maximale et en respectant l'environnement.
En réalité, la privatisation sert la recherche du profit contre la réponse aux besoins du peuple. Les détenteurs de capitaux, spéculateurs et investisseurs financiers vont être à la fête ! Même minoritaires dans le capital - 15 % -, ils imposeront les normes de rentabilité financière dans la gestion de l'entreprise EDF contre l'emploi. Pour le moment, cela dit, le résultat est connu : EDF a d'ores et déjà perdu un milliard d'euros lors de son entrée en bourse ! Les usagers, les salariés, les familles pauvres, les chômeurs et l'économie du pays paieront la facture !
La privatisation d'EDF rime avec l'augmentation des tarifs. La privatisation va coûter cher aux usagers. C'est déjà le cas avec la privatisation de GDF, qui a entraîné une hausse des tarifs de 14 %. L'ouverture du marché de l'électricité pour les professionnels a conduit à des augmentations allant jusqu'à 33 %, ce qui contribue évidemment à l'augmentation du coût de la vie.
Cette politique revient aussi à inciter les entreprises à accentuer l'austérité salariale en réduisant les coûts salariaux.
La privatisation rime également avec privation : le droit à l'énergie ne sera pas égal pour tous.
L'énergie fait partie de ces biens communs qui doivent rester biens publics, car elle conditionne la dignité de la vie humaine et ne peut devenir une marchandise comme les autres.
Les choix politiques doivent mettre l'économie au service des besoins et du développement des êtres humains. Des générations successives ont lutté pour créer les conditions de mise en oeuvre du droit à l'énergie pour toutes et tous, où que l'on soit en France. L'entreprise publique EDF-GDF est née de cette volonté.
Non contents de brader ces entreprises - rentables, rappelons-le -, vous diminuez encore de plus de 20 millions d'euros les crédits affectés à la politique de l'énergie par rapport à 2005. Nous ne pouvons cautionner de telles dérives !
Enfin, en ce qui concerne le programme relatif au passif financier minier, en dépit d'un effort consenti en faveur de la gestion de l'après-mines, les crédits de paiement restent globalement insuffisants pour répondre aux besoins de ce secteur.
L'exploitation minière de notre pays a duré deux cents ans, laissant derrière elle les problèmes d'affaissement minier, de remontée des eaux d'exhaure, du fonctionnement des stations de pompage, ou encore la question du devenir des terrils. L'intervention de l'État est essentielle pour répondre à ces questions. En effet, les communes minières, qui sont parmi les plus pauvres de France et qui ont un taux de chômage extrêmement élevé, ne pourront pas supporter le financement des opérations nécessaire dans le secteur minier.
Cela étant dit, je voudrais attirer plus particulièrement l'attention du Gouvernement concernant l'action « prestations à certains retraités des mines ».
Les dépenses d'intervention ont diminué de 30 millions d'euros entre 2005 et 2006. Or cette action a pour finalité de définir les droits collectifs des mineurs qui découlent, notamment, du statut des mineurs. L'État a promis de garantir ce statut aux mineurs et à leurs ayants droit jusqu'à la fin de leurs jours.
L'État a le devoir de leur garantir la retraite, la gratuité du logement et les indemnités de chauffage. La création, par la loi du 3 février 2004, de l'Agence nationale pour la garantie des droits des mineurs a apporté une première réponse. Encore faut-il qu'elle ait les moyens de remplir ses missions !
Ces crédits nous paraissent d'autant plus insuffisants qu'il faut tenir compte de la partie affectée au remboursement des retraites de certains retraités des industries électriques et gazières. Pour 2006, le montant des crédits s'élève à 19, 6 millions d'euros.
Madame, messieurs les ministres, mes chers collègues, compte tenu du temps qui m'était imparti, j'ai concentré mes propos sur ce qu'il me paraissait essentiel de dire sur les politiques concernant le commerce, l'artisanat et l'industrie. Je regrette de ne pas pouvoir m'exprimer plus en détail pour évoquer notamment le commerce extérieur ou la faiblesse des mesures prises en faveur de la formation.
Compte tenu des inquiétudes et des vives critiques que je viens d'exprimer, vous aurez compris que mes collègues du groupe CRC et moi-même ne voterons pas les crédits de la mission « Développement et régulation économique ».