Intervention de Jacques Le Nay

Réunion du 27 novembre 2020 à 21h45
Loi de finances pour 2021 — Compte de concours financiers : prêts à des états étrangers

Photo de Jacques Le NayJacques Le Nay :

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de loi de finances pour 2021 s’inscrit dans la continuité de la hausse des crédits de l’aide publique au développement depuis 2016, après une baisse continue entre 2010 et 2015.

Cette aide enregistre la plus forte hausse relative au budget de l’année 2021. Nous constatons sans équivoque qu’il s’agit d’un effort sans précédent en faveur de la solidarité internationale, effort qui s’inscrit dans le contexte économique actuel, qui pèse lourd sur nos finances publiques.

Le groupe Union Centriste salue l’effort qui contribue à concrétiser l’engagement du Président de la République, celui de rattraper notre retard et d’atteindre 0, 55 % du revenu national brut d’ici à 2022. Nous voterons donc les crédits de cette mission.

Nous encourageons le fait que l’aide publique au développement et la réforme de la politique française de développement soient consacrées comme l’une des priorités du quinquennat.

Il va sans dire que la réalisation de cet objectif est essentielle dans le contexte international, contexte où les crises successives et la montée des inégalités ne cessent de s’amplifier et où le multilatéralisme menace de se fissurer.

De même, nous approuvons, bien entendu, que les crédits de paiement de la mission « Aide publique au développement » respectent les conclusions du Conseil interministériel de la coopération et du développement de 2018.

D’une part, la priorité géographique est respectée, avec 73 % des prêts qui doivent bénéficier à la région Afrique-Moyen-Orient.

D’autre part, la priorité sectorielle est aussi constatée dans le contexte de crise sanitaire. Nous remarquons un soutien significatif en faveur de la santé mondiale, avec notamment 60 millions d’euros d’aides budgétaires globales dans le programme 110, 2 millions d’euros pour l’Institut Pasteur et plus de 10 millions d’euros en faveur du Fonds français Muskoka.

Cependant, certains points appellent notre vigilance.

Certaines évolutions relatives aux programmes 209 « Solidarité à l’égard des pays en développement » et 110 « Aide économique et financière au développement » sont à regretter. En effet, ces programmes resserrent les autorisations d’engagement puisqu’elles sont en baisse de 2, 1 milliards d’euros, alors que les crédits de paiement sont en hausse de 1, 6 milliard d’euros.

La pandémie a démontré la nécessité d’aller au-delà du renforcement du multilatéralisme. Pourtant, ce mouvement conduit à une baisse considérable de l’action Aide économique et financière multilatérale du programme 110. Cette diminution ne nous semble pas cohérente dans le contexte sanitaire que nous subissons.

La raison et le sens commun voudraient que la France se maintienne et conserve sa capacité d’orientation des fonds gérés par les banques multilatérales de développement.

Nous tenons à attirer votre attention sur un autre point. L’impact de la crise sanitaire dans l’aide publique au développement ne doit pas placer la situation d’urgence climatique au second rang de nos préoccupations.

À titre d’exemple, le sud de l’île de Madagascar, que j’ai visité l’an dernier dans le cadre d’une mission interparlementaire, connaît aujourd’hui un épisode de sécheresse exceptionnel menaçant de famine plus d’un million de Malgaches. Cette tragédie imminente nous rappelle l’importance d’annuler la dette des pays les plus vulnérables.

Dans cet élan, des efforts ont été entrepris en concordance avec les engagements du Président de la République. Je fais référence à l’instauration d’un moratoire au service de la dette des pays les plus pauvres.

Quant au Fonds monétaire international, il estime que des actions plus audacieuses sont nécessaires, comme la réduction des intérêts de la dette.

En conclusion, l’action du Gouvernement gagnerait à être mieux hiérarchisée. Elle est cependant toujours définie par cet engagement originel, fixé en 1970 par l’Organisation des Nations unies : celui d’allouer au moins 0, 70 % de notre richesse nationale brute à l’aide publique au développement.

Vos efforts doivent tendre vers cet objectif. Nous plaçons donc nos espérances dans le projet de loi de programmation relatif à la politique de développement et à la lutte contre les inégalités mondiales, très attendu au Parlement.

Aujourd’hui, l’actualité mondiale nous démontre plus que jamais à quel point l’aide publique au développement est cruciale.

Plusieurs pays, plusieurs régions du monde sont en proie à des déséquilibres, qui laissent craindre, dans un futur proche, l’émergence de situations contraires à nos intérêts. Il est important de garder en mémoire que l’aide publique au développement, levier puissant de notre diplomatie, ne pourra répondre à ces défis communs que par la pérennisation d’une large solidarité internationale.

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