Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, les coprésidents du groupe de Minsk tentent depuis plus de vingt-cinq ans de faciliter la résolution du conflit entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan dans le Haut-Karabagh.
Ce conflit est en premier lieu territorial. Il oppose deux principes, celui du droit d’un peuple, les Arméniens de l’enclave, à l’autodétermination, et celui de l’intégrité territoriale d’un État, l’Azerbaïdjan.
Depuis le lancement, le 27 septembre dernier, d’une offensive militaire par Bakou, les États-Unis, la Russie et la France, comme ils le font depuis 1994, appellent les parties prenantes à la retenue et à la négociation. Par la voix de leurs chefs de diplomatie, les trois pays ont condamné l’offensive, dans une déclaration en date du 5 octobre dernier.
Mais, cette fois, l’engrenage du conflit est plus complexe, et pas seulement en raison de l’ampleur des moyens militaires déployés par l’Azerbaïdjan, qui souhaite reconquérir les territoires perdus situés entre le Haut-Karabagh et l’Arménie.
La situation s’est complexifiée du fait de l’intervention d’un nouvel acteur, la Turquie, et par le retrait d’un autre, la Russie, qui montre sa réticence à intervenir résolument en faveur de l’Arménie. Russie, qui, par ailleurs, a contribué à déstabiliser le multilatéralisme en annexant la Crimée.
Le président turc Erdogan apporte son soutien politique et militaire à l’opération déclenchée par l’Azerbaïdjan – pour rappel, l’armée turque est membre de l’OTAN et a déployé des drones, technique otanienne, sur le théâtre des opérations. La nature des récents combats, d’une violence inouïe, nourrit les soupçons d’exactions conduites par les autorités azéries, qu’il faut condamner avec la plus grande fermeté.
Le président Erdogan a également pris publiquement position en faveur de l’Azerbaïdjan en déclarant que l’Arménie devait quitter « le territoire azerbaïdjanais occupé ». Par ses agissements et ses prises de position, le président turc piétine ses engagements non seulement comme membre du groupe de Minsk, mais également comme membre de l’OTAN.
Aussi me semble-t-il nécessaire, monsieur le secrétaire d’État, de tirer les conséquences de cet échec diplomatique. Trois cessez-le-feu successifs négociés sous l’égide du groupe de Minsk n’ont eu aucun effet sur le terrain.
Ces échecs posent la question de la viabilité même du groupe de Minsk, alors que la Turquie en est membre, alors que la Russie en est coprésidente et alors que les États-Unis considèrent le dossier du Haut-Karabagh comme non prioritaire. Il ne reste que la France, mais que peut-elle peser seule ? Dans ce contexte, l’Union européenne doit jouer un rôle politique et sortir du piège du Brexit, dans laquelle elle s’est embourbée, pour projeter sa puissance à l’extérieur.
Sans doute par manque de volonté, le groupe de Minsk n’a pas su imposer jusqu’à présent une force d’interposition internationale.
Aussi, la France doit jouer un rôle moteur dans la résolution du conflit. La France doit défendre dans le cadre du groupe de Minsk la mise en œuvre immédiate de la protection des populations par le déploiement d’une force d’interposition internationale.