Au-delà de ces aides immédiates, j’ai obtenu que le volet culturel du plan France Relance mobilise une enveloppe exceptionnelle de 2 milliards d’euros dès le 1er janvier 2021. Ce soutien massif – sans précédent, disait Bernard Fialaire – bénéficiera à l’ensemble des secteurs culturels.
Depuis la rentrée, dans un contexte de plus en plus tendu du point de vue sanitaire, 220 millions d’euros ont été mobilisés pour soutenir les salles de cinéma ou de spectacle qui se sont trouvées confrontées à une baisse importante de leur fréquentation, en raison des mesures de distanciation physique, puis de couvre-feu.
Face aux conséquences de la période de confinement qui a commencé voilà un mois et qui va se prolonger encore quelques jours, l’État est et sera toujours au rendez-vous.
Comme l’ensemble de nos concitoyens, je me réjouis que, à la suite des commerces culturels, des bibliothèques et des archives, les cinémas, les salles de spectacle, les musées et les monuments puissent rouvrir leurs portes à partir du 15 décembre prochain, en suivant un protocole sanitaire renforcé et selon des modalités compatibles avec les règles du couvre-feu.
Dans ces conditions, qui resteront particulières, je continuerai, bien entendu, d’échanger avec les professionnels de la culture, afin d’adapter nos dispositifs à la réalité des situations très diverses dans lesquelles se trouvent les différents acteurs de chacune des filières.
C’est donc dans ce contexte exceptionnel qu’a été élaboré le budget de la mission « Culture » soumis à votre examen.
En 2021, ce budget connaîtra une hausse exceptionnelle de 4, 6 %, soit de 141 millions d’euros, pour atteindre un montant total de plus de 3, 2 milliards d’euros.
Le budget de cette mission sera complété par 733 millions d’euros, issus du plan France Relance, qui seront déployés, à périmètre équivalent, pour cette première année de mise en œuvre. Au total, ce sont donc près de 4 milliards d’euros qui seront consacrés l’an prochain au patrimoine et à la création, ainsi qu’à la transmission et à la démocratisation culturelles.
Ces moyens, d’une ampleur historique, nous permettront d’engager une ambitieuse refondation de notre modèle culturel, car, au-delà de la situation d’urgence à laquelle nous faisons face, il est urgent que nos politiques culturelles apportent une réponse aux défis majeurs qui s’imposent à nous.
La crise sanitaire n’est pas seulement une parenthèse qui se refermera quand la pandémie sera derrière nous – je partage bien entendu le diagnostic de Thomas Dossus à ce sujet – ; elle marque un véritable tournant pour le monde de la culture, elle révèle, et parfois exacerbe, des fragilités structurelles, que nous surmonterons en tenant compte des mutations profondes qui sont en cours. Voilà pourquoi nous devons agir sans attendre, pour faire en sorte que notre modèle culturel repose sur des fondements encore plus solides.
Comme l’a montré l’étude sur les pratiques culturelles des Français, dont je me suis emparée dès mon arrivée rue de Valois, il est indispensable d’engager une action résolue afin de réconcilier la culture patrimoniale et la culture numérique, la culture savante et la culture populaire – je suis d’accord sur ce point avec Brigitte Lherbier –, qui sont trop souvent cloisonnées dans les usages de nos concitoyens. Les moyens inscrits dans chacun des programmes de cette mission budgétaire vont nous permettre d’œuvrer en ce sens.
Le patrimoine bénéficiera d’un budget de 1, 015 milliard d’euros, ce qui représente une hausse de 4, 4 % par rapport à 2020, auquel s’ajouteront 345 millions d’euros issus du plan de relance.
Ces investissements contribueront au développement de l’économie. Ils renforceront l’attractivité et la cohésion de nos territoires. Ils financeront notamment un plan de rénovation des musées territoriaux – chers à nombre d’entre vous –, doté de 52 millions d’euros sur deux ans, dont 6 millions d’euros proviendront du plan de relance, et des mesures de soutien pour les archives et l’archéologie destinées aux équipements patrimoniaux dans les territoires.
Nous mettrons également en œuvre, dès l’an prochain, un vaste plan Cathédrales. Je remercie Vincent Éblé de s’en réjouir ; c’est effectivement indispensable. La hausse des crédits budgétaires pérennes dédiés à ces édifices permettra de porter le financement structurel annuel à 50 millions d’euros, auxquels s’ajouteront 40 millions d’euros par an, issus du plan de relance.
Au total, 180 millions d’euros, sur deux ans, seront consacrés à ces édifices emblématiques, qui réconcilient ceux qui croient au ciel et ceux qui n’y croient pas. Ces moyens permettront de réaliser les travaux nécessaires de mise en sécurité et en sûreté et d’accélérer les projets de conservation et de restauration de plus de quatre-vingts cathédrales dans le pays.
Par ailleurs, l’enveloppe de 40 millions d’euros du plan de relance destinée à soutenir la restauration des monuments historiques appartenant aux communes et aux propriétaires privés complètera l’effort budgétaire de 5 millions d’euros, qui permettra la montée en charge du fonds incitatif et partenarial en faveur des collectivités à faibles ressources.
Dans le même temps, nous poursuivrons notre programme d’investissement pour les grandes institutions nationales, dans le domaine tant du patrimoine que de la création.
Alors que le plan de relance apportera à nos opérateurs nationaux un soutien à la fois important et indispensable, les crédits du PLF pour 2021 permettront de poursuivre les grands projets déjà engagés, comme le chantier de relogement du Centre national des arts plastiques, le CNAP, à Pantin ou l’équipement des deux scènes de l’Opéra de Paris.
Jean-Raymond Hugonet m’a interrogée sur le Grand Palais ; j’aurai l’occasion, au cours de l’examen des amendements, de lui répondre plus précisément, mais je puis d’ores et déjà lui indiquer que j’ai décidé de réorienter le projet de restauration de cet édifice, afin qu’en soient maîtrisés les coûts et les délais, condition qui n’était plus garantie par le projet initial.
Le nouveau projet, plus sobre, permettra d’assurer la préservation de cet édifice monumental, qui se trouve aujourd’hui dans un état terriblement dégradé, tandis que le réaménagement de ses espaces intérieurs offrira de meilleures conditions d’accueil aux visiteurs.
En contrepartie du soutien que nous leur apportons, j’attends de toutes ces institutions qu’elles incarnent encore davantage leur responsabilité nationale, en se rapprochant de l’ensemble de nos concitoyens et en diffusant leurs actions dans tous les territoires.
Le programme « Création » connaîtra, lui aussi, une forte augmentation – + 4, 5 % –, puisqu’il bénéficiera de mesures budgétaires nouvelles à hauteur de 37 millions d’euros, auxquelles s’ajouteront 320 millions d’euros issus du plan de relance.
L’une des priorités de ce programme est de mieux accompagner les établissements de création, notamment en région.
Quelque 15 millions d’euros seront consacrés à la restauration et à la consolidation des marges artistiques des labels ainsi qu’au soutien des compagnies artistiques. Sur ce total, 3 millions d’euros iront aux arts visuels ; nombre d’entre vous m’en ont parlé. Les mesures du plan de relance viendront compléter cet effort budgétaire, en finançant des chantiers de rénovation et en soutenant la programmation des établissements de création dans nos territoires.
Les moyens du Centre national de la musique seront renforcés : les 7, 5 millions d’euros inscrits au programme 334 assureront le respect de la trajectoire triennale, fixée l’an dernier, pour accompagner sa montée en puissance. Surtout, le CNM pilotera la gestion d’une dotation exceptionnelle de 200 millions d’euros, dans le cadre du plan de relance, au service de l’ensemble la filière musicale.
L’activité des salles de spectacle sera également soutenue au travers des dispositifs fiscaux inscrits dans le PLF. Je pense notamment à la prorogation du crédit d’impôt pour le spectacle vivant, dont les critères ont été assouplis, mais également à la création du crédit d’impôt pour le théâtre.
Une autre priorité du budget 2021 réside dans le renforcement du soutien des artistes et des créateurs, en particulier de ceux qui n’entrent pas dans le champ des dispositifs transversaux ; Jean-Pierre Decool a appelé notre attention sur ce point.
Au-delà du grand plan de commande artistique, doté de 30 millions d’euros dans le cadre du plan de relance, le PLF pour 2021 prévoit de consacrer 5 millions d’euros supplémentaires au Fonds national pour l’emploi pérenne dans le spectacle, le Fonpeps, afin d’assurer la montée en puissance de ce dispositif de réduction de la précarité des artistes et des techniciens intermittents – il existe des situations dramatiques dans ce domaine –, et de mobiliser 2 millions d’euros pour mettre en œuvre, avant la fin du premier trimestre 2021, les premières mesures à destination des artistes-auteurs.
La mission « Culture » comporte également le nouveau programme 361, « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture », qui, à périmètre constant, bénéficiera, en 2021, de 46 millions d’euros de crédits supplémentaires par rapport à 2020, ce qui traduit une forte hausse, de 8, 5 %.
À partir du 1er janvier prochain, c’est la nouvelle délégation générale, que j’ai souhaité créer au sein du ministère de la culture, qui aura la charge de ces moyens ; je remercie Didier Rambaud de s’en féliciter.
Cette délégation assurera un pilotage transversal de notre action en matière d’accès à la culture dans les territoires et d’éducation et de formation culturelles et artistiques, chères à Marie-Pierre Monier. Elle entretiendra un lien fort avec les autres ministères concernés par ces enjeux, en particulier avec le ministère de la cohésion des territoires et les ministères de l’éducation nationale et de l’enseignement supérieur.
En complément de l’action que nous menons pour progresser vers l’objectif de 100 % d’éducation artistique et culturelle, ou EAC, qui tient au cœur de Sonia de La Provôté, les crédits du pass culture seront rehaussés de 20 millions d’euros, afin d’accompagner le développement de cet outil ; je remercie Julien Bargeton de l’avoir souligné.
Je souhaite faire évoluer les modalités de ce pass, afin que celui-ci s’articule davantage avec la fin du parcours d’éducation artistique et culturelle et qu’il contribue véritablement à la diversification des pratiques culturelles des jeunes. En effet, il n’est pas question d’opposer le pass culture et l’EAC ; les deux dispositifs se complètent.
Notre politique en faveur de l’accès à la culture et de la participation à la vie culturelle dans tous les territoires bénéficiera également de moyens supplémentaires. Ainsi, en 2021, sera désignée la première « capitale française de la culture », nouveau label qui distinguera, tous les deux ans, l’innovation artistique et l’attractivité d’une ville ou d’un groupement de collectivités.
Quant à l’enseignement supérieur culturel, chère Claudine Lepage, il bénéficiera, après des années de stagnation, d’un accroissement budgétaire notable de 3, 3 %, auquel s’ajouteront 70 millions d’euros du plan de relance.
Nous améliorerons ainsi les conditions d’études et de vie des étudiants de nos écoles culturelles et artistiques, et nous renforcerons les mesures d’accompagnement à la vie étudiante et à l’insertion professionnelle. Dans le contexte difficile que nous connaissons, il est encore plus important d’accorder une attention particulière à la situation de ceux que nous formons et qui seront les acteurs de la vie culturelle de demain.
Mesdames, messieurs les sénateurs, voilà quelles sont, dans les grandes lignes, les priorités de la mission « Culture » pour 2021, soumise à votre vote. Les nouveaux moyens budgétaires mobilisés pour cette mission témoignent, en ces temps difficiles, de notre confiance en l’avenir et de notre détermination à accompagner et à soutenir la vitalité de la vie culturelle dans notre pays.
La culture est l’un des fondements de notre République ; le Gouvernement a voulu y consacrer tous ses efforts et je vous remercie de l’opinion unanimement positive que vous avez portée sur ces crédits.