Séance en hémicycle du 30 novembre 2020 à 21h30

Résumé de la séance

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La séance

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La séance, suspendue à vingt heures, est reprise à vingt et une heures trente, sous la présidence de M. Georges Patient.

Debut de section - PermalienPhoto de Georges Patient

Nous reprenons la discussion du projet de loi de finances, adopté par l’Assemblée nationale, pour 2021.

Debut de section - PermalienPhoto de Georges Patient

Nous poursuivons la discussion des crédits de la mission « Culture ».

La parole est à M. Bernard Fialaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Fialaire

Monsieur le président, madame la ministre, madame, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, la culture fait partie des secteurs les plus fortement touchés par la crise sanitaire ; tous les orateurs l’ont rappelé.

C’est en effet un véritable « baisser de rideau » qui s’est abattu sur le monde culturel, avec les conséquences économiques que l’on connaît : dès juillet, les pertes de chiffre d’affaires étaient évaluées pour 2020 à 4, 2 milliards d’euros pour le spectacle vivant, à 3 milliards d’euros pour les arts visuels et à 640 millions d’euros pour les patrimoines hors architecture.

Malheureusement, ce n’est probablement qu’un début pour un secteur économique important en temps ordinaire : il a représenté 2, 3 % de notre PIB en 2019.

Aussi, nous attendons beaucoup de ce budget et de toutes les mesures prises en marge de celui-ci dans le cadre des lois de finances rectificatives. J’ajoute, madame la ministre, que vous défendez vos priorités avec énergie et passion.

Face à ce séisme sans précédent, les moyens doivent être exceptionnels pour sauver la culture, cet « héritage de la noblesse du monde » comme l’avait qualifiée Malraux. Au-delà de ce qui constitue l’empreinte de notre pays, il s’agit, bien entendu, de conserver les milliers d’emplois directs et indirects du secteur.

La seule hausse de 4, 65 % des moyens, initialement prévue en 2021 pour la mission « Culture », n’aurait pas suffi à répondre à l’ampleur du défi. On peut se réjouir que ces crédits soient abondés par la mission « Plan de relance », soit d’un peu plus de 1 milliard si l’on agrège toutes les dépenses ministérielles et les dépenses fiscales liées à la culture. C’est un effort sans précédent que nous nous apprêtons à voter.

Deux axes me semblent importants : maintenir les capacités du rayonnement culturel de la France par un soutien incontournable à ses opérateurs et impulser une dynamique profitable à tous les territoires.

Préserver le rayonnement culturel de la France, c’est préserver l’attractivité globale de notre pays. Le tourisme est un levier fort, sinon essentiel de l’économie culturelle à travers ses grands événements, ses monuments ou encore ses châteaux. Je ne citerai qu’un seul chiffre : 81 % des visiteurs du château de Versailles étaient des touristes étrangers en 2019.

Dans ces conditions, vous avez identifié des priorités, madame le ministre, et l’on ne peut qu’y souscrire. Oui, il faut soutenir les grands opérateurs qui sont affaiblis, en particulier ceux qui ont un taux élevé de ressources propres. Comme je l’ai rappelé, la culture est indissociable de l’identité de la France, et il serait impensable de laisser nos grands musées fermer leurs portes et licencier, comme c’est le cas aux États-Unis.

Cependant, ce soutien massif ne doit pas reléguer la nécessité de repenser le modèle financier de certains opérateurs pour lesquels la Cour des comptes a émis des observations. Je pense, par exemple, à l’Opéra de Paris qui, dans son modèle de financement, n’est pas soutenu par les collectivités locales de sa région, alors que son public est parisien et francilien aux deux tiers. Cette équation interroge…

Le deuxième axe qui me semble important est la nécessité que l’élan budgétaire profite à tous les territoires. Je pense, bien entendu, madame la ministre, que vous avez ce principe à l’esprit, mais je souhaitais insister.

À l’échelon local, le secteur de la culture irrigue tout un écosystème qui touche de nombreux métiers, allant du commerce à l’artisanat. Nous devons par conséquent être vigilants quant à la répartition équitable des nouveaux moyens.

Dans cette perspective, l’augmentation de la dotation de 10 millions d’euros pour les musées territoriaux, de 3 millions d’euros pour les archives territoriales ou encore l’élargissement de l’avantage fiscal associé au label de la Fondation du patrimoine en faveur des centres-villes et des centres-bourgs sont de bonnes mesures.

La restauration du patrimoine est également encouragée, franchissant pour la première fois le milliard d’euros.

S’agissant de ce volet, nous comptons sur le Gouvernement pour que soit mise en œuvre la promesse d’au moins une opération par département.

Je n’oublie pas non plus la question de la survie des festivals. Les crédits du fonds de soutien aux festivals ont été consommés. La dotation initiale de 10 millions d’euros n’a donc pas suffi. Le plan de relance le réabonde à hauteur de 5 millions. Ces soutiens sont importants, mais ce que veulent les festivaliers, c’est reprendre leurs activités au plus vite, comme ils l’ont exprimé dans une tribune le 27 novembre dernier. Que leur répondez-vous, madame le ministre, ainsi qu’aux élus très attachés à leurs festivals locaux ?

Mes chers collègues, le groupe RDSE soutiendra ce projet de budget, qui reflète une mobilisation exceptionnelle. J’espère cependant que la politique de relance n’entraînera pas une année blanche pour les autres politiques du ministère, en particulier celle de l’élargissement d’une culture accessible à tous, qui fait partie du pacte républicain.

Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Ouzoulias

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le budget qui nous est proposé comporte d’indéniables mesures financières en faveur de la culture.

De la même façon, il convient de reconnaître que le Gouvernement a consacré, cette année, des moyens budgétaires considérables pour aider les opérateurs, les entreprises et les artistes. À ce titre, l’aide forte apportée aux intermittents du spectacle distingue notre pays de ceux dans lesquels les compagnies sont dissoutes et les musiciens invités à changer de métier.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Ouzoulias

Néanmoins, cette exception culturelle ne constitue pas une garantie absolue de sa préservation, et avec les difficultés reviennent les incertitudes sur l’essentialité de la culture et l’impérieuse nécessité d’accéder aux biens et aux services culturels.

Plus que tout autre, le monde de la culture doit justifier en permanence son utilité. Cela le fragilise, mais cela lui donne aussi une grande force, car chacun de ses acteurs sait qu’il défend beaucoup plus qu’une activité. Dans le cadre de leur mission, les parlementaires de la commission de la culture que nous sommes partagent cet engagement militant, mais mesurons aussi pleinement la difficulté de notre sacerdoce.

Tout en saluant les mesures d’aides mises en œuvre par l’État et les collectivités, nous pressentons confusément qu’elles risqueraient in fine d’être insuffisantes si la vie culturelle ne se rétablissait pas rapidement, dans les meilleures conditions sanitaires et économiques.

La crise pandémique a montré l’extrême dépendance de nos institutions et de nos entreprises culturelles aux soutiens de toutes natures. Ce constat nous oblige à poursuivre ces actions au risque de tout perdre. Déjà se pose la question de la possibilité d’organiser les festivals et de pouvoir donner du travail à tous les intermittents, alors que leur année blanche s’achèvera cet été.

D’autres secteurs de la culture ont été tout aussi fortement touchés, mais les pertes de ressources ont peut-être été moins perceptibles. Je pense particulièrement à la filière du patrimoine et de l’architecture, dont le chiffre d’affaires global a sans doute été amputé du tiers.

Je reconnais l’effort budgétaire sans précédent consenti pour les monuments historiques. Toutefois, avec notre rapporteur de la commission de la culture, Philippe Nachbar, dont je salue la qualité de l’analyse, je note la part prépondérante des grands monuments dans la liste des restaurations projetées et, dans celle-ci, le très grand nombre des bâtiments appartenant à l’État.

Les conditions calendaires imposées pour la mise en œuvre du plan de relance imposaient certainement ces choix. Néanmoins, ils accentuent des déséquilibres récurrents que notre commission dénonce régulièrement en faveur d’un patrimoine très parisien, aux dépens d’un petit patrimoine plus rural, moins visible et un peu délaissé. Les moyens drainés par le loto du patrimoine ne suffiront pas à sa préservation.

La mobilisation de ce croît budgétaire pose plus fondamentalement la question récurrente des moyens humains dont disposent encore les directions régionales des affaires culturelles pour préparer les dossiers de restauration et pour aider les collectivités de petite taille à les porter.

La capacité de l’État à assurer sa mission d’aide à la maîtrise d’ouvrage est déterminante, car elle interroge finalement le rôle de l’administration culturelle de l’État en région et son aptitude à soutenir localement un effort décidé nationalement. Il serait très dommageable que la mise en œuvre des moyens budgétaires supplémentaires de l’État soit compromise par l’insuffisance des moyens humains des Drac.

Parmi les édifices qui recevront la manne, certains choix posent question. Je pense, notamment, au château de Villers-Cotterêts. La nécessité de sa restauration est indiscutable, mais les délais de réalisation nous semblent peu réalistes, même si nous avons bien compris que l’achèvement des travaux devait coïncider avec celui de l’actuel quinquennat…

Par ailleurs, comme l’an passé, je m’interroge sur les missions, le programme, le fonctionnement et la pérennité de la Cité internationale de la langue française, que le château de Villers-Cotterêts devrait accueillir.

Je partage totalement l’idée d’une action résolue de la puissance publique en faveur de la défense et de l’illustration de la langue française, mais je suis persuadé qu’une telle politique doit mobiliser un grand nombre de ministères : elle ne peut être seulement portée par celui de la culture.

Comme l’an passé, l’exécution de ce budget devra être suivie avec grande attention par notre commission, non seulement pour s’assurer de son adéquation avec les urgences du moment, mais aussi pour vérifier que le ministère de la culture a encore les moyens humains de ses ambitions.

Applaudissements sur les travées du groupe CRCE.

Debut de section - PermalienPhoto de Georges Patient

M. le président. La parole est à Mme Sonia de La Provôté.

Applaudissements sur les travées du groupe UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Sonia de La Provôté

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le président de la commission, madame, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, impossible d’aborder ce budget 2021 pour la culture et le patrimoine sans évoquer la crise traversée, qui réduit nos objectifs à la protection sanitaire de nos concitoyens.

Dès lors, les « essentiels » n’ont pas été culturels, la madeleine l’a emporté sur Proust. Plutôt qu’une critique, c’est un constat qui donne à ce budget des obligations spécifiques.

Si la culture et ses acteurs n’ont pas totalement disparu des écrans, au sens propre comme au sens figuré, la dimension humaine de partage, liée à la présence physique de la culture, sort de cette période très amoindrie. S’ajoute à cela le risque de perdre de la diversité culturelle aux dépens des professionnels et des structures les plus fragiles, pourtant fondement de notre exception culturelle.

Si en juillet le ministère indiquait une baisse d’au moins 25 % du chiffre d’affaires du secteur, la situation s’est depuis aggravée. Les incertitudes demeurent. Nous saluons ici les efforts budgétaires à destination de la culture et du patrimoine. Le ministère accompagne : c’est objectif si l’on regarde les masses financières.

Mon propos se concentrera donc sur les choix et les rééquilibrages souhaités, ainsi que sur les points saillants qui nécessitent de la vigilance pour passer ce cap difficile.

En ce qui concerne le programme 131, « Création », l’augmentation budgétaire est nette. Saluons aussi les efforts conjoints des collectivités. Ce sont 37 millions d’euros de mesures nouvelles, auxquels s’ajoute le renfort du plan de relance.

La crise est sans précédent et frappe tous les secteurs. Nous saluons donc l’attention portée aux intermittents du spectacle, le renforcement du fonds national pour l’emploi pérenne dans le spectacle, le Fonpeps, le soutien à la commande publique, les moyens pour la réforme des aides aux équipes indépendantes, les aides portées par le Centre national de la musique, le CNM, ou encore celles pour la présence artistique dans les territoires et les résidences d’artistes.

Ajoutons aussi le crédit d’impôt, prolongé, bonifié et élargi par le Sénat à toutes les esthétiques du spectacle vivant.

Néanmoins, des points de vigilance sont à noter. D’abord, les mesures citées vont devoir être prolongées, si nécessaire. Ensuite, les arts visuels, une fois encore, ne sont pas la partie du programme « Création » la plus accompagnée. Pourtant, très présents et actifs dans tous les territoires, ils contribuent largement à l’accès à la culture pour tous.

Le ministère doit accélérer leur structuration, comme pour les schémas d’orientation pour le développement des arts visuels, les Sodavi. Aussi, si les états généraux des festivals sont positifs, nous sommes en attente de solutions concrètes. Par ailleurs, si une seconde saison consécutive était annulée, c’est beaucoup du lien avec le public, et singulièrement avec la jeunesse, qui en pâtirait.

Concernant le spectacle vivant, l’impératif est de ne perdre aucun lieu ni aucune structure. À ce titre, l’activité partielle doit pouvoir être accessible à tous.

Enfin, nous ne saurions trop insister sur la nécessité de voir s’installer une véritable gouvernance territoriale de la culture entre le ministère et les collectivités, qui assurent près de 70 % de la dépense de création. L’objectif de maintenir la fertilité de l’écosystème culturel ne peut être garanti qu’à cette condition. Loin des grands-messes, c’est plutôt d’agilité et de confiance qu’il est ici question.

J’en viens au programme 361. Les crédits de la démocratisation culturelle sont en hausse, mais surtout pour le pass culture. Pourtant, c’est l’éducation artistique et culturelle qui est une des clés de sa réussite.

Le confinement n’a pas permis de maintenir nombre de projets d’éducation artistique et culturelle, ou EAC, dans les écoles. En 2021, un effort doit être fait avec l’éducation nationale pour garantir une programmation de rattrapage en 2022.

Les difficultés que rencontrent les acteurs associatifs engagés dans l’EAC sont un écueil supplémentaire. Certains d’entre eux menacent de disparaître.

Il y a donc une certaine amertume à voir le budget du pass culture s’envoler, sans garantie de réussite. Généraliser, alors que les structures ne savent pas où elles vont, alors que le numérique a largement préempté l’offre, est-ce raisonnable ?

Clairement, une part du budget aurait dû se déployer sur l’EAC. Vous avez rappelé l’objectif 100 % EAC. Au-delà du slogan, c’est surtout important pour 100 % des enfants !

Concernant l’enseignement supérieur Culture, l’effort budgétaire porte sur la rénovation et le développement numérique. Le rehaussement des bourses amène plus de moyens contre la précarisation accrue des étudiants.

Néanmoins, la situation des écoles d’architecture interpelle : 20 000 étudiants dans vingt écoles depuis vingt ans. Seuls soixante-quinze postes d’enseignants chercheurs ont été créés sur les cent cinquante prévus. L’architecture occupe une part importante dans la société de demain : il est légitime de permettre enfin aux écoles nationales supérieures d’architecture, les ENSA, de prendre leur essor.

Concernant les écoles d’art, une solution reste à trouver à la question du statut des enseignants.

Enfin, j’évoquerai les territoires, les collectivités, les crédits déconcentrés, bref les politiques locales. Peu de mots sur la stratégie mise en œuvre pour ce qui est tout simplement l’accès à la culture partout et pour tous. Dans les territoires, coconstruire la culture est rendu plus vital encore par la crise.

Le patrimoine est le deuxième secteur le plus touché. Des grands sites aux plus petits, c’est l’ensemble d’une filière qui est menacé : 2021 et 2022 sont cruciales. L’effort budgétaire est marqué face à cette situation, auxquels s’ajoutent les 614 millions du plan de relance.

Dans les faits, une grande part de l’effort porte sur le soutien aux opérateurs de l’État. Fers de lance de notre attractivité, ils subissent de plein fouet la situation : chute de fréquentation, du mécénat, des touristes étrangers, quasi-arrêt des expositions, des événements, retards de chantiers.

L’État a renforcé son aide, c’est justifié. L’effort devra sûrement être réévalué si la situation sanitaire devait perdurer. À ce titre, les contraintes encadrant le mécénat des grandes entreprises mises en place cette année tombent mal.

Concernant le patrimoine, l’accent s’est porté sur les monuments historiques. Retards de certains chantiers, difficultés financières des propriétaires, installation tardive des équipes municipales et intercommunales : le danger est grand de voir mis en péril certains patrimoines, faute d’entretien, de moyens et de projets.

Dans ce budget et dans le plan de relance, l’essentiel de l’effort porte sur les monuments historiques dont l’État est propriétaire – citons Villers-Cotterêts ou le plan Cathédrales - ou sur les monuments gérés par le centre des monuments nationaux.

Si les besoins sont réels, pour autant ceux de tout le reste du patrimoine le sont aussi. Ce sont des monuments historiques, qu’ils soient propriétés des collectivités ou des personnes privées. Ce sont donc des maillons essentiels, s’il en est, du patrimoine français.

La faible part du plan de relance qui leur est dédiée montre bien que le regard porté n’est pas le même. Pourtant, c’est bien aussi le maillage patrimonial des territoires qui fait de notre pays ce qu’il est. La complémentarité aurait pu et dû se concrétiser davantage dans les budgets.

On comprend que le court délai pour consommer les crédits nécessite de gros projets budgétaires, et que le plus simple était de prioriser les chantiers de l’État. Il eût pourtant été légitime de créer des conditions plus favorables pour accompagner les autres projets, notamment – j’y insiste – en redonnant à l’État son rôle d’assistance à maîtrise d’ouvrage pour pallier parfois les carences en ingénierie sur le terrain.

Enfin, j’évoquerai le patrimoine « diffus » non protégé, oublié de ce budget. Il est pourtant un levier simple et efficace dans les territoires : 90 % des entreprises de restauration sont des entreprises locales, les emplois concernés sont non délocalisables.

À cet effet, nous proposons un amendement pour créer une ligne budgétaire destinée exclusivement à ce patrimoine non classé.

Pour conclure, l’effort budgétaire et la volonté de sauver, de sauvegarder, d’accompagner, sont là. Il faudra surveiller et ajuster l’utilisation des crédits dans un contexte bien incertain.

Que l’on considère la culture ou le patrimoine, l’enjeu est de maintenir au maximum cet écosystème aux cofinancements multiples. Il repose sur la capacité en région à s’adapter pour préserver la diversité des acteurs, des structures, des lieux, des opérateurs et des patrimoines, des plus emblématiques aux plus modestes. Cela signifie une interaction plus grande et structurée entre l’État, les collectivités et les acteurs privés et associatifs.

Le défi, en somme, est autant budgétaire qu’organisationnel : il s’agit de coconstruire les politiques en matières culturelle et patrimoniale. La culture pour tous, c’est la culture par tous. Le groupe Union Centriste émet un avis favorable sur les crédits de la mission « Culture ».

Applaudissements sur les travées des groupes UC et SER. – M. Pierre Ouzoulias applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Decool

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, c’est un lieu commun que de le dire, mais l’année qui s’achève a été marquée par de profonds bouleversements.

Le monde entier a été affecté par la pandémie ; la France ne fait pas exception en la matière. Nos compatriotes continuent d’endurer la crise et ses conséquences. De nombreux secteurs ont été affectés par les mesures de lutte contre la covid-19.

Ces derniers mois, cette lutte nous a contraints à connaître quantité de choix cornéliens. Essentielle, mais jugée non vitale, la culture figure à ce titre parmi les secteurs les plus sinistrés. Alors que les professionnels ont fait tout leur possible pour respecter scrupuleusement le protocole sanitaire, les salles de spectacles ont néanmoins dû fermer. Nous devons assumer l’ensemble des mesures prises, car elles l’ont été pour protéger la vie de nos concitoyens.

La culture était déjà, avant la crise, un secteur fragile. Les restrictions l’ont encore davantage affaiblie. Conscients du sacrifice demandé, nous devons impérativement la soutenir autant que possible. À cet égard, je voudrais rappeler que la diversité est au cœur de la richesse culturelle de notre pays, nous gagnerons donc à la préserver en soutenant les acteurs les plus fragiles.

Le Gouvernement a mis en place des mesures de soutien au profit des professionnels concernés, pour tenter d’amortir les conséquences de la crise. Certaines sont appelées à durer.

La réouverture ne se fera pas sans jauge, il semble donc indispensable que le dispositif d’activité partielle et la mesure d’année blanche soient prolongés, comme vous l’avez proposé très justement, madame la ministre.

Tant que la situation ne sera pas redevenue normale, il conviendra de veiller à l’actualisation du dispositif d’aide en fonction de l’évolution des circonstances. Nous saluons, à cet égard, l’augmentation des fonds dédiés à la pérennisation de l’emploi et la prise en compte de la situation particulière des artistes auteurs.

À ces crédits de soutien, s’ajoutent les fonds prévus par le plan de relance. Ils contribueront à maintenir à flot les opérateurs concernés et également à faire repartir l’activité dans notre pays.

La culture n’est pas seulement liée à notre économie, elle est aussi pleinement connectée à nos territoires. J’aime à dire que la culture n’est pas un luxe urbain. Notre pays compte en effet un patrimoine culturel parmi les plus riches au monde.

Nous soutenions pleinement la stratégie menée jusqu’à présent, qui consistait à inciter les différents acteurs à développer des ressources propres, sans compter forcément sur des subventions de l’État.

Parmi ces ressources, figurait en bonne place le mécénat, favorisé en France par une politique fiscale avantageuse. Si les crédits de la mission culture ne pèsent « que » 3 milliards d’euros, le soutien total apporté par l’État à la culture dépasse les 15 milliards d’euros. Ce soutien prend notamment la forme de dépenses fiscales, certes moins visibles, mais qui n’en contribuent pas moins à l’essor du secteur.

La crise économique risque fort de changer la donne en la matière. Il est en effet à craindre que les budgets des grandes entreprises dédiés au mécénat ne soient drastiquement réduits au regard du contexte économique.

Face à ces circonstances exceptionnelles, un soutien de la part de l’État en la matière semble incontournable. Les particuliers comme les collectivités territoriales concernées doivent pouvoir en bénéficier.

Une fois la crise passée et pour renforcer le financement de la culture, il conviendra également de mener une étude afin de déterminer la bonne stratégie en matière de ressources propres pour les opérateurs.

Je veux enfin saluer l’effort consenti pour la restauration des cathédrales de notre pays. Si la plus emblématique d’entre elles a très vite bénéficié de dons privés, qui permettront sa restauration, il existe en France beaucoup de cathédrales qui ont besoin d’être restaurées, mais qui sont bien moins médiatisées.

L’augmentation des crédits du plan Cathédrales traduit cette prise en considération et doit être saluée. C’est un sujet important pour nos territoires, pour leur attractivité et pour notre histoire. Madame la ministre, vous y avez donné une véritable impulsion.

La culture est au centre du rayonnement de notre pays. C’est aussi un secteur en grande difficulté qu’il nous faut protéger. En investissant dans la culture, nous pouvons lui donner un nouvel élan et participer à la relance de notre économie. Le groupe Les Indépendants – République et Territoires votera vos propositions.

Applaudissements sur les travées des groupes INDEP et UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Julien Bargeton

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, « je ne cherche pas, je trouve » disait Pablo Picasso, selon une formule devenue désormais célèbre.

Pas besoin de chercher longtemps dans votre budget, madame la ministre, pour trouver l’effort massif réalisé en faveur de la culture. Ce point a été souligné par tous les orateurs, y compris par ceux qui ne sont pas toujours les plus à même de le reconnaître

Exclamations sur les travé es du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Julien Bargeton

Une politique culturelle doit être vue dans son ensemble, en faisant le lien entre passé, présent et avenir.

Je commencerai par le patrimoine, qui bénéficie, comme cela a été relevé, d’une augmentation de 4, 6 %, notamment de 345 millions d’euros dans le plan de relance.

Le patrimoine comprend le grand patrimoine, qui a été cité, celui des opérateurs, mais aussi le patrimoine de proximité. Un effort supplémentaire est consenti dans ce budget en sa faveur, car c’est le patrimoine des collectivités locales qui est l’âme et l’identité de la France. Nos concitoyens y sont particulièrement attachés. Ils ne doivent pas être des « trésors engloutis », oubliés. Au contraire, il faut les faire « remonter à la surface », les valoriser davantage, les faire connaître et mieux les entretenir. Tel est le sens de l’effort consenti dans ce budget.

Le passé, le présent, faire vivre le patrimoine, c’est aussi la création. Évidemment, il n’y a pas de culture sans création et sans artistes. Le secteur enregistre le même montant de hausse, soit 4, 5 % sur la partie création, à quoi s’ajoute une masse totale de 260 millions d’euros dans le plan de relance, repartie en deux programmes différents. Ici encore, il s’agit de montants considérables, à la hauteur des circonstances.

Le général de Gaulle avait dit, lors de l’inauguration avec André Malraux d’une maison de la culture, « la culture domine tout ». Dans notre pays, la culture n’est pas un supplément d’âme, ce n’est pas quelque chose qui viendrait s’ajouter : c’est la base de tout et c’est un élément tout à fait fondamental.

Dans cette base, il y a d’abord et avant tout la création par les artistes. Or les droits d’auteur ont été extrêmement touchés. Les écrivains qui ne peuvent plus produire de pièces nouvelles. Les plasticiens ne peuvent plus présenter leurs créations. Les musiciens rencontrent les plus grandes difficultés à produire des œuvres musicales nouvelles. Là aussi, l’effort consenti est extrêmement bienvenu et indispensable au regard du choc de cette crise.

La culture, c’est le passé, notre identité, notre âme, le présent, la création ; mais c’est aussi l’avenir, c’est-à-dire la jeunesse. Le pass culture est doté de 20 millions supplémentaires pour atteindre 60 millions d’euros. C’est un effort de 50 %. Il est critiqué, commenté, certains suggèrent de l’amender fortement, voire de le supprimer. Je pense au contraire qu’il s’agit d’un outil adapté. Quoi de plus pratique pour les jeunes qu’une application ? C’est ce qu’ils utilisent le plus, c’est leur environnement !

Par ailleurs, ce pass fonctionne : 85 % des jeunes éligibles s’en sont servis. L’expérimentation commence donc à porter ses fruits : 82 000 jeunes ont effectué des réservations, pour un total de 610 000 réservations à ce jour.

Fait notable, ce sont d’abord les biens matériels qui font l’objet de réservation via le pass culture, notamment le livre, à hauteur de plus de 50 % ; c’est très satisfaisant, notamment en cette période où les libraires ont beaucoup souffert. Ensuite viennent la musique puis, en troisième place seulement, l’audiovisuel. On constate donc encore une appétence pour le livre de la part de nos jeunes.

Le pass culture permet de décloisonner le type de pratiques – par exemple, le numérique par rapport aux pratiques traditionnelles – et de les démocratiser, notamment en favorisant l’accès à la culture de ceux qui en sont le plus éloignés. Favoriser l’accès aux œuvres de l’esprit pour un public le plus large possible, c’est d’ailleurs l’un des principaux objectifs du ministère de la culture depuis sa création, puisqu’il figure dans le décret fondateur du 24 juillet 1959 du ministère chargé des affaires culturelles.

Le pass culture permet aussi de dépasser certains clivages, certaines inégalités, pour aller dans le sens de la cohésion sociale. Il est donc important de décloisonner, de démocratiser et de dépasser les inégalités.

Sans doute faut-il adapter le dispositif, en y associant davantage la notion de pratiques musicales, entre autres, et en le connectant mieux aux parcours de l’enseignement artistique et culturel. Il convient d’élargir la dimension de médiation culturelle, notamment en direction de certains publics plus éloignés de la culture, car l’accès direct aux œuvres ne suffit pas forcément.

Ces éléments importants méritent que l’on y réfléchisse, mais ne perdons pas de vue l’objectif fondamental de cette mesure.

Émile Biasini, personnalité importante, même si ce n’est pas la plus connue de notre histoire culturelle, qui fut notamment secrétaire d’État chargé des grands travaux et l’un des fondateurs du ministère de la culture, disait : « Il faut transformer un privilège en bien commun. »

Tel était son objectif, et celui-ci a toujours persisté, comme la crise l’a paradoxalement révélé, en montrant l’attachement plus que profond des Français à la culture.

Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.

Debut de section - PermalienPhoto de Claudine Lepage

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le monde de la culture a été durement touché par l’épidémie de covid-19, mais cette crise aura aussi permis de mesurer combien les Français sont attachés à la culture, aux livres, au théâtre, au cinéma, aux festivals, aux concerts.

Le projet de loi de finances pour 2021, en octroyant des moyens financiers significatifs pour relancer l’activité artistique et soutenir l’emploi dans le secteur de la création, répond au désir de nos concitoyens de préserver notre modèle culturel.

Au-delà de l’appui financier indispensable au spectacle vivant, l’élargissement du crédit d’impôt, qui concernait en premier lieu les spectacles musicaux, à l’art dramatique, au théâtre en général, à la danse et aux spectacles d’humour est une bonne mesure, puisqu’il permettra de soutenir la relance de l’activité.

Si cet effort doit être souligné, l’incertitude quant à la durée de la crise sanitaire n’efface pas toutes les inquiétudes, loin de là. Des inquiétudes demeurent sur l’avenir des intermittents, ces femmes et ces hommes qui font vivre la culture au quotidien, sur les modalités de l’année blanche et sur sa possible prolongation ; je n’ose même pas évoquer ceux qui n’ont pas le statut d’intermittent…

Des inquiétudes existent également quant aux modalités de reprise des activités culturelles en 2020, notamment des festivals, qui font vivre l’ensemble de nos territoires. Face à l’incertitude, certaines structures pourraient prendre la décision d’annuler leurs représentations plusieurs mois à l’avance, et des faillites ne sont pas à exclure.

La crise sanitaire aura aussi mis en avant les difficultés structurelles que peuvent rencontrer au quotidien certains secteurs. Je pense notamment aux arts visuels, qui se sentent insuffisamment pris en compte par le ministère de la culture.

Si une meilleure structuration du secteur est à l’avenir indispensable, des mesures devront également être prises par le ministère. On peut d’ores et déjà regretter l’absence de moyens affectés au fonctionnement du Conseil national des professions des arts visuels, le CNPAV. C’eût été pourtant un premier pas important.

Les écoles d’art et d’architecture ne sont pas en reste, et elles ont aussi exprimé un certain malaise. Pour ce qui est des écoles d’art, le manque de cohérence au niveau national est une réalité, et l’on peut regretter les différences de statut entre les écoles nationales et les écoles territoriales.

L’intégration des établissements de l’Éducation socioculturelle, l’ESC, dans Parcoursup n’est pas sans poser de difficultés. Je pense ainsi à la transmission des dossiers de candidature, qui peut se révéler problématique.

Quant aux écoles nationales d’architecture, la faiblesse de leur dotation et l’absence de moyens suffisants font craindre leur appauvrissement, aussi bien sur le plan pratique de l’accueil des étudiants que sur celui de la qualité de l’enseignement.

Nous redoutons que cet affaiblissement ait un impact à moyen terme sur notre capacité à penser l’urbanisme et la ville de demain. Le manque d’enseignants-chercheurs face au défi que représente, notamment, la transition écologique ne fait qu’accentuer cette crainte. Mais un amendement a été voté ce matin qui pourrait pallier cette faiblesse, s’il survit à la navette parlementaire.

Si ce projet de loi de finances va donc globalement dans le bon sens, l’ampleur de la crise sanitaire, les incertitudes qu’elle a fait naître et ses conséquences en cascade doivent faire réfléchir, au-delà de l’urgence, au modèle culturel que nous voulons construire pour les années à venir. Cela devra passer par un travail de concertation entre tous les acteurs.

Malgré ces quelques remarques et réserves, nous voterons les crédits de la mission.

Applaudissements sur les travées du groupe SER. – M. Pierre Ouzoulias applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Georges Patient

M. le président. La parole est à M. Jean-Raymond Hugonet.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Raymond Hugonet

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, ce budget inédit est le reflet de la situation dramatique que traverse la culture depuis le début de la crise sanitaire.

La mission « Culture » dans le budget pour 2021 est en hausse de 4, 6 % par rapport à 2020, pour atteindre 3, 8 milliards d’euros. Une deuxième ligne de crédit pour ce secteur gravement touché par la crise sanitaire est, de plus, prévue dans le plan de relance.

Vous avez obtenu, madame la ministre, que le volet culturel du plan de relance mobilise une enveloppe exceptionnelle de 2 milliards d’euros, et c’est une performance que je souhaite souligner ici.

Comme l’a rappelé notre collègue Philippe Nachbar, la part belle des crédits sera allouée au patrimoine, avec plus de 1 milliard d’euros, auquel vont s’ajouter 345 millions d’euros issus du plan de relance. Un plan de rénovation des musées territoriaux est budgété à hauteur de 52 millions d’euros sur deux ans. Et il ne faut pas oublier la mise en œuvre d’un plan Cathédrales, à hauteur de 180 millions d’euros sur deux ans.

Le budget en faveur des patrimoines permettra notamment de soutenir l’activité dans les territoires et de renforcer l’attractivité culturelle en France. Pour cela, un plan de rénovation, de 52 millions d’euros sur deux ans, des musées territoriaux bénéficiant de l’appellation « musées de France » sera lancé.

En termes d’investissements et de rénovations, les monuments historiques seront l’une des priorités. Les cathédrales verront notamment leur budget passer de 40 à 50 millions d’euros en 2021. Parallèlement, la restauration des monuments historiques appartenant aux communes et aux propriétaires privés sera accompagnée.

L’archéologie, chère à notre collègue Pierre Ouzoulias, ainsi que les archives bénéficieront également d’un soutien sans précédent de 24 millions d’euros.

Pour ce qui concerne le patrimoine français, les musées et les monuments historiques ont été très largement désertés, du fait de l’absence de touristes étrangers.

Cependant, tout n’est pas négatif, car la crise a permis de mesurer l’attachement des Français à leur patrimoine. Contraints de rester sur le territoire pour les vacances d’été, ils ont redécouvert les régions de France et leurs innombrables attraits culturels, atténuant ainsi la baisse de fréquentation des monuments et musées de province.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Raymond Hugonet

On ne consacre pas suffisamment de moyens à la restauration des monuments historiques que possèdent les collectivités territoriales et les propriétaires privés : seulement 40 millions d’euros sur deux ans sont prévus à cette fin.

Si les crédits consacrés à la culture sont globalement stables, il faut rappeler qu’ils succèdent aux coupes sévères des années 2012 à 2014. Le patrimoine français souffre depuis des années d’un sous-financement qui n’est pas à la hauteur des besoins d’entretiens et de rénovation des 44 000 bâtiments inscrits ou classés.

Deux grands projets pèsent lourd dans la programmation pluriannuelle des crédits.

Il s’agit, tout d’abord, du château de Villers-Cotterêts, dont tout le monde sait qu’il ne se trouve pas en région d’Île-de-France. Il a été laissé dans un état de délabrement avancé par la Ville de Paris, laquelle y accueillait jusqu’en 2014 un établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes, ou Ehpad.

Il est certes nécessaire de rénover ce magnifique château de la Renaissance, mais on peut être surpris par les moyens disproportionnés qui lui sont consacrés. Le projet initial fixait un investissement de 110 millions d’euros. Le plan de relance prévoit 100 millions d’euros supplémentaires : 25 millions pour compenser le fait que l’État n’a pas trouvé de mécène pour ce projet et 75 millions pour compenser l’absence d’investisseur privé pour restaurer et exploiter les communs. N’est pas la cathédrale de Paris qui veut !

J’en viens au Grand Palais. Les ambitions premières du projet pharaonique de sa rénovation sont revues à la baisse. Vous êtes passée par là, madame la ministre, et c’est heureux. Pourtant, le nouveau projet est présenté avec le même budget de 466 millions d’euros.

Par ailleurs, chaque année, des crédits manquent par rapport à la programmation pluripluriannuelle. Les crédits inscrits dans le projet annuel de performance, le PAP, sont insuffisants et des crédits supplémentaires sont consommés en cours d’exercice au détriment d’autres actions du programme 175, « Patrimoines ».

Le principe de sincérité budgétaire est mis à mal. Où ont été pris les crédits nécessaires pour le Grand Palais en 2020 et où le seront-ils en 2021 ?

Je souhaite évoquer maintenant le programme 131, « Création », cher à notre collègue Sylvie Robert, qui couvre à la fois le spectacle vivant – musique, théâtre, danse, etc. – et les arts visuels : peinture, sculpture, photographie, métiers d’art, design. C’est précisément l’un des secteurs qui paie le plus lourd tribut à la crise sanitaire, avec une grande incertitude sur la date à laquelle les différents acteurs pourront travailler de nouveau.

La perte de chiffre d’affaires pour l’ensemble de la création artistique est estimée à plus de 7 milliards d’euros par le ministère de la culture. Le spectacle vivant aurait, par exemple, perdu 72 % de son chiffre d’affaires.

Le programme « Création » augmente de 37 millions d’euros, soit + 4, 5 %, pour soutenir les dépenses d’investissement, les réseaux artistiques dans les territoires et le Fonds national pour l’emploi pérenne dans le spectacle, le Fonpeps.

Dans le plan de relance, 168 millions d’euros en crédits de paiement sont ouverts pour la création. Différents dispositifs de soutien ont été mis en place par le Gouvernement pour soutenir le secteur, ce que je tiens à saluer ici : prolongation des droits des intermittents ; création de fonds d’urgence par l’association pour le soutien du théâtre privé, l’ASTP, et le Centre national de la musique, le CNM, qui m’est cher ; création d’un fonds pour les festivals dans la loi de finances rectificative du 30 juillet 2020 ; exonération de cotisations foncières pour certaines entreprises culturelles ; création d’un fonds d’urgence spécifique de solidarité pour les artistes et les techniciens du spectacle.

La question qui se pose maintenant est celle de la poursuite de ces aides d’urgence sur la durée et lorsqu’il y aura réouverture, puisqu’il faudra certainement une période longue et délicate pour retrouver un niveau suffisant dans cet écosystème.

Par ailleurs, un rééquilibrage des moyens accordés au spectacle vivant et aux arts plastiques est sans doute nécessaire. En effet, le spectacle vivant est plus directement touché par le confinement, les mesures de distanciation et le couvre-feu. Mais les artistes plasticiens subissent, eux aussi, l’annulation des expositions, et ils ne bénéficient pas d’un régime d’assurance chômage.

Permettez-moi d’évoquer à présent l’Opéra de Paris. Nous sommes dans l’attente du rapport de la mission de MM. Georges-François Hirsch et Christophe Tardieu, qui devra se prononcer notamment sur l’opportunité des travaux prévus sur le site de Bastille : le déménagement des ateliers Berthier et l’aménagement d’une seconde salle modulable.

La situation de l’Opéra de Paris est particulièrement critique : pertes de billetterie de 55, 4 millions d’euros, tous les spectacles ayant été annulés de mars à début décembre ; diminution du mécénat d’un tiers ; chute des recettes de visites, locations et concessions.

En raison du développement de l’opérateur sur les dix dernières années et de l’essor de sa capacité d’autofinancement, la subvention de l’État a diminué de 15 millions d’euros en dix ans, rendant l’établissement plus vulnérable.

On peut donc se réjouir du soutien de 81 millions d’euros apporté par le plan de relance, mais toujours avec une inquiétude pour l’avenir, l’État ayant posé comme condition à son soutien la mise en œuvre d’une réforme durable du fonctionnement de l’établissement, qui risque d’avoir de lourdes conséquences sur la création.

Président d’un groupe de travail pluraliste consacré au pass culture, je conclurai mon propos en évoquant ce dispositif. Il est l’arbuste qui cache la forêt de la mission « Culture » et sur lequel ruisselle joyeusement et abondamment l’argent public, quoi qu’il se passe dans notre pays.

Au moins la constance est-elle de mise. Le cahier des charges change tous les quatre matins : condition d’âge à 18 ans, puis à 20 ans, 500 euros, puis 300 euros…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Raymond Hugonet

M. Jean-Raymond Hugonet. On est informé des évolutions du dispositif à la fumée des cierges !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Raymond Hugonet

Toutefois, alors que l’on peut légitimement s’interroger sur la pertinence de son maintien, le fait du prince donne la réponse : le pass culture sera l’œuvre culturelle du quinquennat ; fermez le ban !

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Pierre Ouzoulias applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Pierre Monier

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, comme l’ensemble du monde de la culture, le patrimoine a souffert et continue de souffrir des conséquences de la crise sanitaire.

En mai dernier, le département des études de la prospective et des statistiques, le DEPS, du ministère de la culture a estimé les pertes du secteur du patrimoine à près de 36 % du chiffre d’affaires de ce dernier. Et c’était sans tenir compte du deuxième confinement !

Les pertes estimées sont très importantes pour toutes les activités patrimoniales fortement liées au tourisme, comme les musées, les sites et les monuments historiques.

La restauration du patrimoine et les opérations archéologiques sont aussi affectées, avec des chantiers d’abord contraints à l’arrêt, puis rendus plus coûteux en raison des mesures barrières. Dans ce contexte, les crédits du programme 175 connaissent une augmentation remarquable de + 4, 5 % en crédits de paiement et + 3, 97 % en autorisations d’engagement, pour dépasser le milliard d’euros ; il faut le souligner.

Pour autant, les inquiétudes restent grandes quant à la capacité de ce budget à répondre efficacement aux conséquences économiques et sociales de la crise sanitaire, en dépit des aides d’urgence en trésorerie du PLFR 3 et des dispositions « patrimoine » du plan de relance.

N’oublions pas que, derrière le patrimoine, il y a des territoires, des personnes et des entreprises, parfois en grande difficulté. Les orientations des moyens budgétaires doivent contribuer à les aider à passe le cap. Pour cela, il faut veiller à la répartition des crédits en faveur du patrimoine sur tous les territoires.

C’est une orientation que nous défendons régulièrement lors de l’examen des projets de loi de finances. Nous notons avec satisfaction que, cette année, nos demandes de moyens supplémentaires pour la restauration des monuments historiques dans les territoires ont été entendues, au niveau tant du fonds partenarial et incitatif en faveur des collectivités à faibles ressources financières, fonds spécifique en faveur des monuments historiques, que des crédits d’investissement déconcentrés mis à disposition des directions régionales des affaires culturelles, les DRAC.

Il faudra cependant porter une attention à la répartition de ces moyens et des projets retenus entre tous les services déconcentrés départementaux des DRAC.

Par ailleurs, il nous semble qu’en complément au fonds partenarial et incitatif, la mise en place d’une aide à la maîtrise d’ouvrage à titre gracieux pour les collectivités permettrait de donner un coup de pouce à des projets de restauration de monuments historiques qui n’auraient pu être réalisés, faute d’ingénierie.

Nous saluons aussi la hausse des crédits en faveur des petits musées, qui vient compenser des baisses constatées les années précédentes. Ce choix est favorable au développement touristique et au développement économique de nos communes et de nos territoires.

Dans le même ordre d’idées, nous avons souvent souligné les besoins de rénovation et d’agrandissement des bâtiments de conservation des archives. La nette réévaluation du budget consacré à cette action est un point positif, mais un effort plus important dans le plan de relance aurait constitué un signal incitatif pour ces investissements rarement prioritaires dans les territoires.

En revanche, nous notons que les crédits pour l’architecture et les espaces protégés sont en stagnation depuis quatre exercices budgétaires. Or le dispositif « Sites patrimoniaux remarquables », ou SPR, est un outil très efficace qui mériterait plus de considération, notamment pans le cadre de la reconquête des centres-villes et centres-bourgs anciens.

Nous proposerons que des moyens supplémentaires soient affectés à cette action, afin que les outils de restauration du patrimoine prennent toute leur place dans les dispositifs « Action cœur de ville » et « Petites villes de demain ».

Je conclurai en évoquant les crédits en faveur du patrimoine archéologique, qui traduisent des efforts importants pour maintenir l’équilibre de l’archéologie préventive en apportant une compensation aux dépenses entraînées par les diagnostics réalisés tant par l’Institut national de recherches archéologiques préventives, l’INRAP, que par les services habilités des collectivités territoriales.

Néanmoins, toutes les charges de service public spécifique qui incombent à l’INRAP ne sont pas prises en compte, notamment la restitution des fouilles réalisées et leur mise en valeur locale auprès des différents publics, en particulier scolaires.

Nous proposerons de compenser à l’INRAP ce coût supplémentaire entraîné par l’augmentation des fonds et du mobilier issus des découvertes de l’archéologie préventive, et, parallèlement, d’augmenter significativement les crédits destinés à développer les centres de conservation et d’étude, sources d’attractivité et de vulgarisation, mais aussi d’acceptation des contraintes de l’archéologie préventive sur les territoires.

Pour conclure, le budget du programme « Patrimoines » traduit un effort financier notable, même si nous restons vigilants sur les points cités précédemment. Le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain y sera favorable.

Je profite de cet examen de la mission « Culture » pour saluer et féliciter Hervé Le Tellier, qui vient d’obtenir le prix Goncourt. Sachez, madame la ministre, mes chers collègues, qu’il a la particularité de résider dans la Drôme

Exclamations amusées.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Pierre Monier

, dans un petit village qui s’appelle Montjoux !

Applaudissements.

Debut de section - PermalienPhoto de Brigitte Lherbier

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la culture fait battre le cœur des Français. Elle structure la vie de nos concitoyens et les relations humaines.

Dans ce débat sur les enjeux budgétaires de la culture, permettez-moi, madame la ministre, de prendre mon département du Nord pour exemple ; pour être vrai et direct, rien de tel que de s’appuyer sur ce qu’on le connaît le mieux, son territoire.

Le Nord a toujours été une terre d’accueil pour les artistes, de par sa situation géographique et son attachement à la création. Partout, des résidences d’artistes encouragent cette création depuis de longues années. Les Nordistes sont attachés à leur histoire et à leurs traditions. Carnavals, Géants et fanfares mettent en lumière notre culture populaire, festive et familiale. Notre patrimoine architectural est diversifié. Il fait partie de notre identité culturelle. Les élus locaux se battent pour le préserver et le valoriser.

Nous comptons plus de 10 000 objets protégés au titre des monuments historiques, qui font du Nord l’un des départements les plus dotés. Nos musées sont reconnus pour leurs collections et leur engagement en faveur de l’accès à la culture pour tous, notamment pour les jeunes. Les bibliothèques et médiathèques publiques participent, elles aussi, à cet effort.

Aujourd’hui, j’ai une pensée pour ces professionnels, qui ont rouvert leurs salles et repris leurs activités artistiques dès qu’ils en ont eu l’autorisation. Ils l’ont fait dans des conditions difficiles, y compris d’un point de vue économique.

Le secteur du spectacle vivant public, par exemple, a été le premier à reprendre ses activités dans le cadre de « l’été apprenant ». Il a créé des emplois. Les salles, les théâtres et les cinémas se sont toujours montrés exemplaires dans l’application des protocoles sanitaires. Ils se sont adaptés aux jauges limitées de spectateurs, puis au couvre-feu, avec le soutien des artistes. Mais le reconfinement a stoppé tous leurs efforts.

Le monde de la culture est l’un des plus affectés par la crise sanitaire. Les intermittents du spectacle et les musiciens indépendants sont très fragilisés. De nombreuses structures sont menacées. Elles ont des trésoreries très éprouvées. Qu’elles soient publiques, associatives, privées avec délégation de service public ou totalement privées, elles ont continué à investir, pour produire, recréer des spectacles et des films, faire répéter les comédiens, construire des décors et fabriquer des costumes.

Les musées se sont engagés dans la numérisation de leurs collections, pour permettre à nos concitoyens d’accéder, malgré tout, à la culture. Les musiciens indépendants ont innové pour garder un lien avec leur public. Mais les plus grandes menaces pèsent sur ce secteur pour 2021, sur l’emploi, les artistes, l’accès à la culture et la diversité culturelle. C’est l’équilibre des territoires qui s’en trouve touché.

Le spectacle vivant public est dans une situation particulièrement préoccupante, car il dépend des financements des collectivités locales, dont on connaît les tensions financières actuelles.

L’année prochaine, le ministère de la culture disposera de 167 millions d’euros de plus, pour un total de 3, 82 milliards d’euros. C’est une augmentation exceptionnelle et justifiée tant le secteur est sinistré. Il doit être soutenu massivement, car il a besoin de dispositifs d’accompagnement à la hauteur des enjeux pour se relancer. Mais la répartition doit être équitable sur le territoire et bénéficier à tous les domaines culturels et à toutes les structures. Tous sont indispensables au dynamisme du secteur en France.

Il n’est pas normal que, aujourd’hui encore, prédomine la culture parisienne au détriment de celle des territoires. Une concertation entre l’État et les collectivités territoriales est nécessaire pour continuer à soutenir la déconcentration culturelle. Celle-ci est à l’origine de la richesse et de la diversité de l’offre et de la création en France.

Le patrimoine bénéficiera aussi d’une hausse de budget. Les besoins sont immenses, les édifices et les objets remarquables étant nombreux.

Le plan de relance pouvait être jugé suffisant dans un contexte de reprise de l’activité culturelle. Dès lors que le Président de la République parle d’un virus présent jusqu’à l’été 2021, la reprise totale d’activité est repoussée. Aussi, la question des loyers de ces structures est essentielle, tant elle pèse sur leur trésorerie.

La question du remboursement des prêts garantis par l’État, les PGE, représente aussi une échéance majeure qui fragilise leurs perspectives. Il semble impossible, à ce jour, qu’elles remboursent en avril 2021 des prêts contractés en avril 2020, alors que la reprise ne sera pas totalement au rendez-vous.

Le fonds de compensation des pertes de billetterie a été un outil incitatif. Il leur a permis de redémarrer leurs activités au début de l’été. Mais il est désormais nécessaire qu’il soit prolongé au-delà du premier semestre 2021 et qu’il soit associé à un accompagnement à l’investissement.

Madame la ministre, il n’est plus seulement question de démocratiser la culture, mais bien de continuer à la faire vivre dans toute sa diversité après la crise.

Le groupe Les Républicains se prononcera en faveur des crédits de la mission.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot

Monsieur le président, monsieur le président de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication, messieurs les rapporteurs spéciaux, madame, monsieur les rapporteurs pour avis, mesdames, messieurs les sénateurs, l’examen du projet de budget pour 2021 intervient dans un contexte particulier pour le monde de la culture, très durement frappé par les mesures liées à la crise sanitaire, comme l’ont souligné Philippe Nachbar et nombre d’entre vous.

L’augmentation exceptionnelle de 4, 8 % du budget du ministère de la culture en 2021, qui représente 167 millions d’euros de moyens supplémentaires, manifeste la volonté du Gouvernement de conforter dans la durée le rôle essentiel que joue la culture dans la vie démocratique, sociale et économique de notre pays.

Cet effort budgétaire sans précédent s’inscrit dans le cadre de la mobilisation totale – Sylvie Robert en parlait – dont l’État a fait preuve dès le début de la crise sanitaire, pour soutenir les acteurs culturels.

Depuis le mois de mars dernier, le monde de la culture dans son ensemble a d’ores et déjà bénéficié de plus de 5 milliards d’euros de mesures d’urgence, dont 3, 3 milliards d’euros de mesures transversales et 949 millions d’euros pour l’année blanche de l’intermittence ; merci de l’avoir souligné, Pierre Ouzoulias : vous ne parlez pas seulement d’archéologie…

Sourires.

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot

Au-delà de ces aides immédiates, j’ai obtenu que le volet culturel du plan France Relance mobilise une enveloppe exceptionnelle de 2 milliards d’euros dès le 1er janvier 2021. Ce soutien massif – sans précédent, disait Bernard Fialaire – bénéficiera à l’ensemble des secteurs culturels.

Depuis la rentrée, dans un contexte de plus en plus tendu du point de vue sanitaire, 220 millions d’euros ont été mobilisés pour soutenir les salles de cinéma ou de spectacle qui se sont trouvées confrontées à une baisse importante de leur fréquentation, en raison des mesures de distanciation physique, puis de couvre-feu.

Face aux conséquences de la période de confinement qui a commencé voilà un mois et qui va se prolonger encore quelques jours, l’État est et sera toujours au rendez-vous.

Comme l’ensemble de nos concitoyens, je me réjouis que, à la suite des commerces culturels, des bibliothèques et des archives, les cinémas, les salles de spectacle, les musées et les monuments puissent rouvrir leurs portes à partir du 15 décembre prochain, en suivant un protocole sanitaire renforcé et selon des modalités compatibles avec les règles du couvre-feu.

Dans ces conditions, qui resteront particulières, je continuerai, bien entendu, d’échanger avec les professionnels de la culture, afin d’adapter nos dispositifs à la réalité des situations très diverses dans lesquelles se trouvent les différents acteurs de chacune des filières.

C’est donc dans ce contexte exceptionnel qu’a été élaboré le budget de la mission « Culture » soumis à votre examen.

En 2021, ce budget connaîtra une hausse exceptionnelle de 4, 6 %, soit de 141 millions d’euros, pour atteindre un montant total de plus de 3, 2 milliards d’euros.

Le budget de cette mission sera complété par 733 millions d’euros, issus du plan France Relance, qui seront déployés, à périmètre équivalent, pour cette première année de mise en œuvre. Au total, ce sont donc près de 4 milliards d’euros qui seront consacrés l’an prochain au patrimoine et à la création, ainsi qu’à la transmission et à la démocratisation culturelles.

Ces moyens, d’une ampleur historique, nous permettront d’engager une ambitieuse refondation de notre modèle culturel, car, au-delà de la situation d’urgence à laquelle nous faisons face, il est urgent que nos politiques culturelles apportent une réponse aux défis majeurs qui s’imposent à nous.

La crise sanitaire n’est pas seulement une parenthèse qui se refermera quand la pandémie sera derrière nous – je partage bien entendu le diagnostic de Thomas Dossus à ce sujet – ; elle marque un véritable tournant pour le monde de la culture, elle révèle, et parfois exacerbe, des fragilités structurelles, que nous surmonterons en tenant compte des mutations profondes qui sont en cours. Voilà pourquoi nous devons agir sans attendre, pour faire en sorte que notre modèle culturel repose sur des fondements encore plus solides.

Comme l’a montré l’étude sur les pratiques culturelles des Français, dont je me suis emparée dès mon arrivée rue de Valois, il est indispensable d’engager une action résolue afin de réconcilier la culture patrimoniale et la culture numérique, la culture savante et la culture populaire – je suis d’accord sur ce point avec Brigitte Lherbier –, qui sont trop souvent cloisonnées dans les usages de nos concitoyens. Les moyens inscrits dans chacun des programmes de cette mission budgétaire vont nous permettre d’œuvrer en ce sens.

Le patrimoine bénéficiera d’un budget de 1, 015 milliard d’euros, ce qui représente une hausse de 4, 4 % par rapport à 2020, auquel s’ajouteront 345 millions d’euros issus du plan de relance.

Ces investissements contribueront au développement de l’économie. Ils renforceront l’attractivité et la cohésion de nos territoires. Ils financeront notamment un plan de rénovation des musées territoriaux – chers à nombre d’entre vous –, doté de 52 millions d’euros sur deux ans, dont 6 millions d’euros proviendront du plan de relance, et des mesures de soutien pour les archives et l’archéologie destinées aux équipements patrimoniaux dans les territoires.

Nous mettrons également en œuvre, dès l’an prochain, un vaste plan Cathédrales. Je remercie Vincent Éblé de s’en réjouir ; c’est effectivement indispensable. La hausse des crédits budgétaires pérennes dédiés à ces édifices permettra de porter le financement structurel annuel à 50 millions d’euros, auxquels s’ajouteront 40 millions d’euros par an, issus du plan de relance.

Au total, 180 millions d’euros, sur deux ans, seront consacrés à ces édifices emblématiques, qui réconcilient ceux qui croient au ciel et ceux qui n’y croient pas. Ces moyens permettront de réaliser les travaux nécessaires de mise en sécurité et en sûreté et d’accélérer les projets de conservation et de restauration de plus de quatre-vingts cathédrales dans le pays.

Par ailleurs, l’enveloppe de 40 millions d’euros du plan de relance destinée à soutenir la restauration des monuments historiques appartenant aux communes et aux propriétaires privés complètera l’effort budgétaire de 5 millions d’euros, qui permettra la montée en charge du fonds incitatif et partenarial en faveur des collectivités à faibles ressources.

Dans le même temps, nous poursuivrons notre programme d’investissement pour les grandes institutions nationales, dans le domaine tant du patrimoine que de la création.

Alors que le plan de relance apportera à nos opérateurs nationaux un soutien à la fois important et indispensable, les crédits du PLF pour 2021 permettront de poursuivre les grands projets déjà engagés, comme le chantier de relogement du Centre national des arts plastiques, le CNAP, à Pantin ou l’équipement des deux scènes de l’Opéra de Paris.

Jean-Raymond Hugonet m’a interrogée sur le Grand Palais ; j’aurai l’occasion, au cours de l’examen des amendements, de lui répondre plus précisément, mais je puis d’ores et déjà lui indiquer que j’ai décidé de réorienter le projet de restauration de cet édifice, afin qu’en soient maîtrisés les coûts et les délais, condition qui n’était plus garantie par le projet initial.

Le nouveau projet, plus sobre, permettra d’assurer la préservation de cet édifice monumental, qui se trouve aujourd’hui dans un état terriblement dégradé, tandis que le réaménagement de ses espaces intérieurs offrira de meilleures conditions d’accueil aux visiteurs.

En contrepartie du soutien que nous leur apportons, j’attends de toutes ces institutions qu’elles incarnent encore davantage leur responsabilité nationale, en se rapprochant de l’ensemble de nos concitoyens et en diffusant leurs actions dans tous les territoires.

Le programme « Création » connaîtra, lui aussi, une forte augmentation – + 4, 5 % –, puisqu’il bénéficiera de mesures budgétaires nouvelles à hauteur de 37 millions d’euros, auxquelles s’ajouteront 320 millions d’euros issus du plan de relance.

L’une des priorités de ce programme est de mieux accompagner les établissements de création, notamment en région.

Quelque 15 millions d’euros seront consacrés à la restauration et à la consolidation des marges artistiques des labels ainsi qu’au soutien des compagnies artistiques. Sur ce total, 3 millions d’euros iront aux arts visuels ; nombre d’entre vous m’en ont parlé. Les mesures du plan de relance viendront compléter cet effort budgétaire, en finançant des chantiers de rénovation et en soutenant la programmation des établissements de création dans nos territoires.

Les moyens du Centre national de la musique seront renforcés : les 7, 5 millions d’euros inscrits au programme 334 assureront le respect de la trajectoire triennale, fixée l’an dernier, pour accompagner sa montée en puissance. Surtout, le CNM pilotera la gestion d’une dotation exceptionnelle de 200 millions d’euros, dans le cadre du plan de relance, au service de l’ensemble la filière musicale.

L’activité des salles de spectacle sera également soutenue au travers des dispositifs fiscaux inscrits dans le PLF. Je pense notamment à la prorogation du crédit d’impôt pour le spectacle vivant, dont les critères ont été assouplis, mais également à la création du crédit d’impôt pour le théâtre.

Une autre priorité du budget 2021 réside dans le renforcement du soutien des artistes et des créateurs, en particulier de ceux qui n’entrent pas dans le champ des dispositifs transversaux ; Jean-Pierre Decool a appelé notre attention sur ce point.

Au-delà du grand plan de commande artistique, doté de 30 millions d’euros dans le cadre du plan de relance, le PLF pour 2021 prévoit de consacrer 5 millions d’euros supplémentaires au Fonds national pour l’emploi pérenne dans le spectacle, le Fonpeps, afin d’assurer la montée en puissance de ce dispositif de réduction de la précarité des artistes et des techniciens intermittents – il existe des situations dramatiques dans ce domaine –, et de mobiliser 2 millions d’euros pour mettre en œuvre, avant la fin du premier trimestre 2021, les premières mesures à destination des artistes-auteurs.

La mission « Culture » comporte également le nouveau programme 361, « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture », qui, à périmètre constant, bénéficiera, en 2021, de 46 millions d’euros de crédits supplémentaires par rapport à 2020, ce qui traduit une forte hausse, de 8, 5 %.

À partir du 1er janvier prochain, c’est la nouvelle délégation générale, que j’ai souhaité créer au sein du ministère de la culture, qui aura la charge de ces moyens ; je remercie Didier Rambaud de s’en féliciter.

Cette délégation assurera un pilotage transversal de notre action en matière d’accès à la culture dans les territoires et d’éducation et de formation culturelles et artistiques, chères à Marie-Pierre Monier. Elle entretiendra un lien fort avec les autres ministères concernés par ces enjeux, en particulier avec le ministère de la cohésion des territoires et les ministères de l’éducation nationale et de l’enseignement supérieur.

En complément de l’action que nous menons pour progresser vers l’objectif de 100 % d’éducation artistique et culturelle, ou EAC, qui tient au cœur de Sonia de La Provôté, les crédits du pass culture seront rehaussés de 20 millions d’euros, afin d’accompagner le développement de cet outil ; je remercie Julien Bargeton de l’avoir souligné.

Je souhaite faire évoluer les modalités de ce pass, afin que celui-ci s’articule davantage avec la fin du parcours d’éducation artistique et culturelle et qu’il contribue véritablement à la diversification des pratiques culturelles des jeunes. En effet, il n’est pas question d’opposer le pass culture et l’EAC ; les deux dispositifs se complètent.

Notre politique en faveur de l’accès à la culture et de la participation à la vie culturelle dans tous les territoires bénéficiera également de moyens supplémentaires. Ainsi, en 2021, sera désignée la première « capitale française de la culture », nouveau label qui distinguera, tous les deux ans, l’innovation artistique et l’attractivité d’une ville ou d’un groupement de collectivités.

Quant à l’enseignement supérieur culturel, chère Claudine Lepage, il bénéficiera, après des années de stagnation, d’un accroissement budgétaire notable de 3, 3 %, auquel s’ajouteront 70 millions d’euros du plan de relance.

Nous améliorerons ainsi les conditions d’études et de vie des étudiants de nos écoles culturelles et artistiques, et nous renforcerons les mesures d’accompagnement à la vie étudiante et à l’insertion professionnelle. Dans le contexte difficile que nous connaissons, il est encore plus important d’accorder une attention particulière à la situation de ceux que nous formons et qui seront les acteurs de la vie culturelle de demain.

Mesdames, messieurs les sénateurs, voilà quelles sont, dans les grandes lignes, les priorités de la mission « Culture » pour 2021, soumise à votre vote. Les nouveaux moyens budgétaires mobilisés pour cette mission témoignent, en ces temps difficiles, de notre confiance en l’avenir et de notre détermination à accompagner et à soutenir la vitalité de la vie culturelle dans notre pays.

La culture est l’un des fondements de notre République ; le Gouvernement a voulu y consacrer tous ses efforts et je vous remercie de l’opinion unanimement positive que vous avez portée sur ces crédits.

Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et INDEP, ainsi que sur des travées des groupes Les Républicains, UC et SER.

Debut de section - PermalienPhoto de Georges Patient

Nous allons procéder à l’examen des crédits de la mission « Culture », figurant à l’état B.

En euros

Mission / Programme

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Culture

Patrimoines

Création

Transmission des savoirs et démocratisation de la culture

Soutien aux politiques du ministère de la culture

Dont titre 2

665 213 470

665 213 470

Debut de section - PermalienPhoto de Georges Patient

Je suis saisi de neuf amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° II-897, présenté par Mme Brulin, MM. Bacchi, Ouzoulias et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

I. – Créer le programme :

Éducation artistique et culturelle

II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :

En euros

Debut de section - PermalienPhoto de Georges Patient

Programmes

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Patrimoines

Création

Transmission des savoirs et démocratisation de la culture

dont t itre 2

Soutien aux politiques du ministère de la culture

dont t itre 2

Éducation artistique et culturelle

TOTAL

SOLDE

La parole est à M. Pierre Ouzoulias.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Ouzoulias

Mon éminent collègue Jean-Raymond Hugonet a livré précédemment une analyse acérée et très juste du pass culture ; je n’y reviens pas.

Il a suggéré de « fermer le ban » ; pour ma part, je vous propose, au travers de cet amendement, un De profundis clamavi, pour supprimer purement et simplement ce pass. Cela fait trois ans que nous l’expérimentons sans résultat ; à un moment, il faut savoir tirer les conclusions d’une expérimentation, y mettre fin et passer à autre chose…

Cet amendement vise ainsi à transférer les sommes affectées à cette expérimentation vers à l’éducation artistique et culturelle, qui en a bien besoin.

Le seul regret que j’aurai est que le pass culture permettait, dans cette mission, de gager aisément les réaffectations de fonds. Si on le supprime, nous serons ennuyés de ce point de vue ; mais c’est bien la seule chose qui me fasse hésiter…

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Georges Patient

L’amendement n° II-898, présenté par Mme Brulin, MM. Bacchi, Ouzoulias et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

En euros

Debut de section - PermalienPhoto de Georges Patient

Programmes

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Patrimoines

Création

Transmission des savoirs et démocratisation de la culture

dont t itre 2

Soutien aux politiques du ministère de la culture

dont t itre 2

TOTAL

SOLDE

La parole est à M. Pierre Ouzoulias.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Ouzoulias

Il s’agit de reporter des crédits sur les directions régionales des affaires culturelles, les DRAC.

Nombreux sont les membres de la commission de la culture qui estiment que cet échelon déconcentré est déterminant pour accompagner les politiques de l’État au plus près des collectivités territoriales, notamment pour l’aide à la maîtrise d’ouvrage. C’est un élément fondamental, qui permettra, je l’espère – si les DRAC disposent d’un peu plus de personnel –, d’utiliser, dans les deux ans, les sommes considérables du plan de relance. C’est un point important.

Il existe des points de comparaison ; l’exemple de la DRAC de Bretagne démontre bien que, quand ces directions régionales ont la capacité d’aider les collectivités à assumer leur maîtrise d’ouvrage, il y a une consommation beaucoup plus intéressante des crédits. Dans les autres cas, je crains une remontée des autorisations d’engagement, ce qui serait très préjudiciable.

Debut de section - PermalienPhoto de Georges Patient

L’amendement n° II-36 rectifié ter, présenté par Mme Dumas, MM. E. Blanc, J.-B. Blanc, Bouchet, Brisson, Cambon, Courtial, B. Fournier, D. Laurent, Lefèvre, Menonville et Panunzi et Mmes Vérien, Joseph et Garriaud-Maylam, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

En euros

Debut de section - PermalienPhoto de Georges Patient

Programmes

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Patrimoines

Création

Transmission des savoirs et démocratisation de la culture

dont t itre 2

Soutien aux politiques du ministère de la culture

dont t itre 2

TOTAL

SOLDE

La parole est à Mme Catherine Dumas.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Dumas

Si vous me le permettez, monsieur le président, je défendrai en même temps l’amendement n° II-37 rectifié ter.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Dumas

Ces deux dispositions s’appuient sur le constat selon lequel les crédits affectés à l’expérimentation du pass culture ont été sous-consommés.

Devant nos collègues députés de la commission des affaires culturelles de l’Assemblée nationale, vous avez vous-même reconnu, madame la ministre, que « le crédit de 500 euros [était] excessif à [votre] sens », que « 300 euros correspond[ai]ent davantage à la consommation des jeunes » et que « cette somme sera[it] suffisante pour faire du pass culture un succès ».

Nous sommes nombreux, au Sénat, à partager cet avis – certains collègues viennent d’ailleurs de l’indiquer – et nous appuyons votre volonté d’ouvrir la voie à une refonte du dispositif, afin de le destiner davantage aux 16-18 ans, dans le cadre d’une enveloppe revue à la baisse.

Ainsi, avant de généraliser le pass culture, il convient que le Gouvernement nous présente un rapport précis et détaillé sur l’usage que font les jeunes de l’argent du pass culture, de la consommation des crédits et de l’opportunité d’en revoir le périmètre.

Dans ce contexte, l’augmentation de 20 millions d’euros du budget alloué au pass culture paraît peu justifiée, alors que, dans le même temps, le patrimoine français, notamment privé, souffre de sous-financement ; cela a été souligné.

C’est la raison pour laquelle l’amendement n° II-36 rectifié ter tend à réduire de 20 millions d’euros, en autorisations d’engagement et en crédits de paiement, le programme 361, au profit du programme 175.

Par ailleurs, alors que l’échéancier des investissements prévoyait 15 millions d’euros en 2021 pour la Réunion des musées nationaux-Grand Palais, le projet de loi de finances n’annonce que 12 millions d’euros de crédits de paiement. Le plan de relance ne saurait se substituer aux engagements précédents de l’État.

C’est pourquoi, je le répète, l’amendement n° II-37 rectifié ter vise à réduire de 3 millions d’euros en crédits de paiement le programme 361, au profit du programme 175.

Debut de section - PermalienPhoto de Georges Patient

Les deux amendements suivants sont identiques.

L’amendement n° II-823 est présenté par Mmes Monier et S. Robert, MM. Kanner, Antiste et Assouline, Mme Lepage, MM. Lozach, Magner et Stanzione, Mme Van Heghe et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

L’amendement n° II-928 est présenté par Mme Brulin, MM. Bacchi, Ouzoulias et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

En euros

Debut de section - PermalienPhoto de Georges Patient

Programmes

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Patrimoines

Création

Transmission des savoirs et démocratisation de la culture

dont t itre 2

Soutien aux politiques du ministère de la culture

dont t itre 2

TOTAL

SOLDE

La parole est à Mme Marie-Pierre Monier, pour présenter l’amendement n° II-823.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Pierre Monier

Cet amendement vise à apporter un soutien supplémentaire à l’Inrap, au titre de la compensation des charges de service public spécifiques qui lui incombent, en tant qu’opérateur national d’archéologie préventive dans le champ concurrentiel.

En effet, outre le traitement, l’exploitation et la valorisation scientifique des données de fouilles, dont le volume s’accroît grâce à la politique d’archéologie préventive – il faut s’en féliciter –, cet institut doit s’occuper de la restitution des fouilles réalisées et de leur mise en valeur locale auprès des différents publics, en particulier des enseignants du secondaire et de leurs classes.

Ces actions contribuent grandement à la vulgarisation scientifique et à l’acceptation locale des contraintes de l’archéologie préventive. Aussi, il est nécessaire de donner à l’Inrap les moyens de les réaliser.

Debut de section - PermalienPhoto de Georges Patient

La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour présenter l’amendement n° II-928.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Ouzoulias

M. Pierre Ouzoulias. C’est la première fois que je défends l’archéologie en séance, madame la ministre ; c’est sans doute votre présence qui me désinhibe, et j’en suis très heureux…

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Ouzoulias

Ma collègue Monier l’a très justement souligné, l’Inrap est confronté, d’une part, à un problème de compensation pour la partie de l’archéologie préventive soumise à la concurrence et, d’autre part – c’est plus grave, selon moi –, à un problème relatif à ses missions de recherche et de valorisation spécifique, qui sont essentielles pour favoriser l’acceptation sociale des chantiers.

Nous le savons tous ici, il est parfois difficile pour des élus de faire comprendre à la population que l’archéologie préventive est nécessaire. Or, quand il y a une restitution des travaux de l’archéologie à la population, au public, on s’aperçoit que les choses se passent nettement mieux ensuite.

Il ne faut pas abandonner cette mission. Elle est aujourd’hui budgétée autour de 5 millions d’euros. D’après les dirigeants de l’Institut, il faudrait, au minimum, le double.

Je profite de ce point important sur l’archéologie pour souligner, madame la ministre, la nécessité du travail interministériel.

Il n’est pas normal que le ministère de la culture porte la totalité du fardeau de l’archéologie préventive, alors que l’Inrap est sous la double tutelle de vous-même et du ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation. En effet, depuis la création de l’Institut, ce dernier n’a jamais mis un euro dans le dispositif.

On vient d’adopter un projet de loi sur la programmation de la recherche ; il est important que le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche contribue, même symboliquement, au financement de ce domaine.

Par ailleurs, je me souviens avoir travaillé, lorsque j’étais au ministère de la culture, à un projet de coordination interministérielle plus vaste associant le ministère des affaires étrangères ; l’interaction entre la France et l’étranger, dans le domaine de l’archéologie, est fondamentale mais encore peu organisée.

Debut de section - PermalienPhoto de Georges Patient

L’amendement n° II-37 rectifié ter, présenté par Mme Dumas, MM. E. Blanc, J.-B. Blanc, Bouchet, Brisson, Cambon, Courtial, B. Fournier, D. Laurent, Lefèvre, Menonville et Panunzi et Mmes Vérien, Joseph et Garriaud-Maylam, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

En euros

Debut de section - PermalienPhoto de Georges Patient

Programmes

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Patrimoines

Création

Transmission des savoirs et démocratisation de la culture

dont t itre 2

Soutien aux politiques du ministère de la culture

dont t itre 2

TOTAL

SOLDE

Cet amendement a déjà été défendu.

L’amendement n° II-824, présenté par Mmes Monier et S. Robert, MM. Kanner, Antiste et Assouline, Mme Lepage, MM. Lozach, Magner et Stanzione, Mme Van Heghe et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

En euros

Debut de section - PermalienPhoto de Georges Patient

Programmes

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Patrimoines

Création

Transmission des savoirs et démocratisation de la culture

dont t itre 2

Soutien aux politiques du ministère de la culture

dont t itre 2

TOTAL

SOLDE

La parole est à Mme Marie-Pierre Monier.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Pierre Monier

Cet amendement vise à affecter des moyens supplémentaires au développement des centres de conservation et d’études, les CCE.

L’accroissement considérable des collections archéologiques à conserver et la nécessité de restituer au public, notamment aux habitants des territoires concernés, les résultats des fouilles d’archéologie préventives réalisées rendent nécessaire la création de nouveaux centres, en plus des projets déjà engagés.

Ces centres, qui reçoivent des dépôts archéologiques adaptés à la réalité de l’archéologie professionnelle, doivent garantir une conservation et une exploitation optimales des collections, mais ils sont également des lieux d’accueil du public, notamment scolaire – j’y suis très attachée – et de vulgarisation des recherches archéologiques.

Ils contribuent à développer l’attractivité des territoires et à susciter une activité économique locale. Or les crédits qui leur sont consacrés sont stables et le plan de relance ne les prend en compte qu’indirectement, au travers d’une ligne de rénovation d’autres équipements patrimoniaux.

Debut de section - PermalienPhoto de Georges Patient

L’amendement n° II-821, présenté par Mmes Monier et S. Robert, MM. Kanner, Antiste et Assouline, Mme Lepage, MM. Lozach, Magner et Stanzione, Mme Van Heghe et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

En euros

Debut de section - PermalienPhoto de Georges Patient

Programmes

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Patrimoines

Création

Transmission des savoirs et démocratisation de la culture

dont t itre 2

Soutien aux politiques du ministère de la culture

dont t itre 2

TOTAL

SOLDE

La parole est à Mme Marie-Pierre Monier.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Pierre Monier

Cet amendement tend à créer un fonds d’expérimentation permettant aux DRAC de proposer une assistance gratuite à maîtrise d’ouvrage aux collectivités à faibles ressources, en complément du fonds incitatif et partenarial visant à aider ces collectivités à financer les travaux d’entretien, de restauration et de mise en valeur des monuments historiques.

En effet, dans de nombreuses collectivités, il existe un besoin d’ingénierie et d’accompagnement technique des porteurs de projets publics, dont la non-satisfaction contribue à entretenir la sous-consommation des crédits consacrés aux monuments historiques.

Ce point, particulièrement mis en lumière par la « mission flash » relative à l’évaluation du cadre législatif et réglementaire existant pour le soutien au patrimoine protégé, menée début 2018 à l’Assemblée nationale, est corroboré par le dispositif mis en place depuis plus d’une dizaine d’années par la DRAC de Bretagne.

L’expérience menée dans cette région paraissant probante, nous proposons que d’autres territoires puissent développer, de manière expérimentale, des conventions d’assistance à maîtrise d’ouvrage à titre gracieux, en vue de l’entretien, de la restauration ou de la mise en valeur de monuments historiques appartenant à des collectivités à faibles ressources.

Debut de section - PermalienPhoto de Georges Patient

L’amendement n° II-822, présenté par Mmes Monier et S. Robert, MM. Kanner, Antiste et Assouline, Mme Lepage, MM. Lozach, Magner et Stanzione, Mme Van Heghe et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

En euros

Debut de section - PermalienPhoto de Georges Patient

Programmes

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Patrimoines

Création

Transmission des savoirs et démocratisation de la culture

dont t itre 2

Soutien aux politiques du ministère de la culture

dont t itre 2

TOTAL

SOLDE

La parole est à Mme Marie-Pierre Monier.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Pierre Monier

Cet amendement vise à renforcer le soutien à la revitalisation des centres anciens ; je l’ai évoqué lors de la discussion générale.

Alors que se déploient des politiques visant à restaurer l’attractivité des centres-villes et des centres-bourgs, le budget de l’action 2 du programme « Patrimoines », qui comporte notamment le financement des sites patrimoniaux remarquables, des abords des monuments historiques et des sites inscrits au patrimoine mondial, n’a pas évolué depuis 2018.

Or la réussite des politiques telles que le plan Action cœur de ville ou le plan Petites villes de demain requiert d’agir, de manière combinée, sur tous les leviers qui permettront d’améliorer la qualité de vie des habitants et l’attractivité des centres-villes et centres-bourgs.

Des moyens doivent donc être apportés à ces dispositifs patrimoniaux en direction des centres anciens, afin qu’ils prennent toute leur place comme outils au sein des dispositifs de revitalisation, de la même manière sur tous les territoires.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Rambaud

L’amendement n° II-897 vise à transférer les crédits du pass culture vers l’EAC, mais cette annulation remettrait en question la dynamique observée, au cours des derniers mois, quant à l’utilisation de ce pass. En effet, on compte 85 % d’utilisateurs chez les jeunes concernés par l’expérimentation. La commission demande donc le retrait de cet amendement.

L’amendement n° II-898 vise à transférer 59 millions d’euros des crédits du programme 361, « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture », vers le programme 175, « Patrimoines », en prélevant ces sommes sur le pass culture. La commission demande également le retrait de cet amendement.

L’amendement n° II-36 rectifié ter tend à transférer 20 millions d’euros des crédits du programme 361 vers le programme 175. Là encore, c’est le pass culture qui est ciblé, mais la majoration, de 20 millions d’euros, des crédits de ce dispositif, qui est actuellement expérimenté dans seulement quatorze départements, vise au contraire à l’étendre à tout le territoire français. La commission vous demande donc de bien vouloir retirer cet amendement, madame Dumas.

Les amendements identiques n° II-823 et II-928 ont pour objet de transférer 5 millions d’euros des crédits du programme 361 vers le programme 175, « Patrimoines », afin de majorer la dotation de l’Inrap. La ligne ciblée pour le prélèvement des sommes est l’action n° 02, Soutien à la démocratisation et à l’éducation artistique et culturelle.

Sans analyser le bien-fondé de l’affectation de ces crédits à l’Inrap, une telle baisse des crédits de l’action n° 02 annulerait la majoration des crédits dédiés à l’éducation artistique et culturelle enregistrée au sein du PLF pour 2021.

En outre, 2 millions d’euros supplémentaires sont dédiés aux contrats territoire-lecture, quand la dotation accordée aux pratiques artistiques et culturelles en temps scolaire progresse de 1 million d’euros. La baisse des crédits du pass culture remettrait en question sa généralisation sur l’ensemble du territoire. La commission demande donc, là encore, le retrait de ces amendements identiques.

L’amendement n° II-37 rectifié ter vise à transférer 3 millions d’euros des crédits du programme 361 vers le programme « Patrimoines », en ciblant, là encore, le pass culture. Compte tenu de la réorientation du chantier du Grand Palais, visant au respect d’une enveloppe budgétaire définitive, nous doutons qu’une majoration des crédits dédiés soit pertinente. C’est pourquoi la commission sollicite le retrait de cet amendement.

L’amendement n° II-824 tend à transférer 2 millions d’euros des crédits du programme 361 vers le programme 175, pour le développement des centres de conservation et d’étude. Je formulerai la même observation que précédemment : c’est le pass culture qui est ciblé. Nous vous saurions donc gré de bien vouloir retirer cet amendement, madame Monier.

L’amendement n° II-821 a pour objet de transférer 1 million d’euros des crédits du programme 361 vers le programme 175 dans le but de créer un fonds d’assistance à la maîtrise d’ouvrage, en ciblant le pass culture. La commission souhaite donc que cet amendement soit retiré.

Enfin, l’amendement n° II-822 vise à transférer 2 millions d’euros des crédits du programme 361 vers le programme 175, afin de financer un dispositif de restauration des centres anciens.

Une fois encore, la mesure cible le pass culture. Or, je le répète, la majoration de 20 millions d’euros des crédits doit permettre d’étendre ce dispositif à toute la France, son montant étant par ailleurs revu à la baisse, puisqu’il passerait de 500 à 300 euros. La commission demande donc le retrait de cet amendement.

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot

J’ai bien lu tous ces amendements, dont les objets peuvent se justifier, mais dont les dispositions relèvent toutes de la même démarche : prélever des crédits sur le pass, voire supprimer ce dernier. Vous ne vous étonnerez donc pas que j’émette un avis défavorable sur tous ces amendements.

Cela étant, je souhaite formuler une réponse plus complète, parce que ces propositions d’amendements ont ouvert un certain nombre de dossiers qui méritent d’être expliqués et clarifiés.

J’aurais peut-être dû être plus explicite, dans mon propos introductif, à propos du pass culture : où en est-on quant à sa phase d’expérimentation ?

J’ai ici les chiffres les plus récents – presque sortis du four, si j’ose dire, puisqu’ils datent du 20 novembre 2020 ; ils permettent de dresser le bilan du pass culture.

Dans les quatorze départements d’expérimentation, on note, au 20 novembre 2020, un taux d’inscription de 88 %, 119 000 comptes sur 135 000 éligibles et un taux d’utilisation de 82 %. Ces montants sont donc tout à fait encourageants et tranchent avec les premiers chiffres qui nous avaient été apportés et qui avaient suscité des doutes ou des interrogations.

Quelque 131 euros ont été dépensés, en moyenne, sur une période de neuf mois, 4 400 lieux culturels ont été actifs, pour près de 3 millions d’offres disponibles, et 640 000 réservations ont été effectuées depuis le lancement du pass en février 2019.

Les catégories les plus réservées sont à 59 % les livres, à 15 % la musique, à 10 % l’audiovisuel et à 4 % le cinéma. Quant aux types de biens, il s’agit de biens physiques à 65 %, de biens numériques à 26 % et d’événements à 9 %.

Pour ma part, je considère que ce bilan est très positif. On peut, bien sûr, regretter que des politiques événementielles, par exemple la fréquentation des spectacles, soient moins importantes que nous pourrions le souhaiter. Mais n’oublions pas que cette expérimentation s’est déroulée dans un contexte de crise sanitaire, qui a sans doute empêché de se tourner vers ces événements.

En outre, nous ne pourrons communiquer sur le pass culture qu’à partir du moment où celui-ci sera généralisé sur l’ensemble du territoire ; on ne peut pas communiquer sur ce que l’on peut en attendre alors qu’il est encore au stade de l’expérimentation dans quatorze départements.

Le pass culture a vraiment participé à la relance du secteur culturel, grâce à une communication des offreurs physiques auprès des jeunes inscrits. On ne peut absolument pas parler de crédits « perdus pour la culture ».

La nouvelle délégation que je crée au ministère, ce qui a d’ailleurs été salué sur certaines de ces travées, sera chargée de la transmission, des territoires et de la démocratie culturelle. Elle permettra de faire dialoguer les dispositifs d’éducation artistique et culturelle et le pass culture au service d’une même ambition : renforcer l’accès et la participation de tous les habitants, tout au long de leur vie et sur l’ensemble du territoire, à la vie culturelle.

Un certain nombre d’amendements ont proposé d’affecter cet argent à des actions différentes : l’amendement n° II-898, défendu par M. Ouzoulias, tendait à ce que les crédits participent à l’entretien et à la conservation des monuments historiques.

Je signale que 210 millions d’euros sont consacrés aux monuments historiques n’appartenant pas à l’État, dont 170 millions sur le programme 175, soit 70 % des crédits déconcentrés, et 40 millions d’euros dans le cadre du plan de relance.

Ces moyens bénéficient aux immeubles protégés au titre des monuments historiques, répartis sur l’ensemble du territoire national, et représentent déjà la diversité que vous souhaitez défendre à juste titre : édifices religieux, cathédrales, mais aussi chapelles rurales, châteaux, grands palais nationaux, demeures plus modestes, calvaires, pigeonniers et maisons. Ils bénéficient également aux anciennes usines – je tiens beaucoup au patrimoine industriel, qui est très important. L’ensemble représente plus de 44 000 monuments. Un effort tout à fait considérable est donc réalisé sur ce sujet.

L’amendement n° II-36 rectifié ter, présenté par Mme Dumas, vise à déployer 20 millions d’euros, prélevés sur le pass culture, pour l’entretien et pour la conservation des monuments historiques. Ma réponse sera la même que précédemment.

L’amendement n° II-37 rectifié ter, toujours présenté par Mme Dumas, me permet, comme je m’y étais engagée lors de la discussion avec Jean-Raymond Hugonet, d’aborder la question du Grand Palais, au sujet de laquelle je souhaite apporter un certain nombre de précisions.

J’ai voulu une profonde réorientation du projet de restauration et d’aménagement du Grand Palais, défini en 2016. J’ai souhaité le redéfinir dans un sens plus économique et plus écologique. Il faut, évidemment, sauver ce bâtiment absolument magnifique, qui structure le paysage parisien dans un environnement patrimonial et urbanistique tout à fait extraordinaire. Certains se sont étonnés que le coût de la restauration n’ait pas évolué et ont prétendu que je parlais d’économies sans en avoir fait en réalité.

En fait, ces évaluations étaient datées. Le coût de restauration du Grand Palais est beaucoup plus élevé que les 466 millions d’euros qui ont été prévus au départ. On aboutissait à des sommes qui dépassaient largement les 500 millions d’euros – on était plutôt à 100 millions d’euros supplémentaires.

En outre, il y avait, dans la restauration, un certain nombre d’éléments patrimoniaux de façade, de statuaire, de corniche qui n’avaient pas été pris en compte lors de la première évaluation. Ceux qui se promènent au droit du Grand Palais peuvent constater qu’une partie des façades est mise sous filets, pour éviter que des chutes d’éléments architecturaux n’attentent à l’intégrité physique des promeneurs. Tout cela n’avait pas été pris en compte dans l’évaluation.

Ces 466 millions d’euros représentent donc une véritable économie de plus de 100 millions d’euros. De plus, il y a une réserve de précaution de 30 millions d’euros pour sécuriser la bonne fin des travaux et s’assurer que l’on reste bien dans l’enveloppe de 466 millions d’euros. Je tenais à apporter ces éléments clés.

L’amendement n° II-824 a également pour objet de prélever 2 millions d’euros sur le pass culture, pour créer de nouveaux centres de conservation et d’étude.

Je partage tout à fait l’avis de Mme Monier sur l’utilité de ces centres, dont l’action scientifique et le rôle dans l’attractivité du territoire sont tout à fait majeurs. Toutefois, leur déploiement sur le territoire nécessite du temps pour bâtir des projets pérennes, à la fois sur le plan culturel et sur le plan scientifique. Ils ne peuvent être menés à bien qu’avec le soutien et l’appui des collectivités territoriales.

Je signale que le plan de relance permettra, grâce à l’enveloppe destinée à la rénovation des équipements patrimoniaux, d’assurer le réaménagement du site de Bibracte, en Bourgogne-Franche-Comté, ainsi que l’achèvement des travaux d’aménagement des communs du domaine de Campagne, en Nouvelle-Aquitaine.

Ce sont donc près de 6 millions d’euros, sur une enveloppe de 20 millions d’euros, qui bénéficieront à la rénovation des équipements dans le domaine de l’archéologie.

L’amendement n° II-821 vise à accompagner les petites communes dans la protection de leurs monuments historiques. Il y a là un vrai sujet pour la culture, et je partage les préoccupations exprimées sur différentes travées.

Des moyens juridiques et financiers existent déjà ; les services de l’État peuvent apporter une assistance à maîtrise d’ouvrage, ou AMO, aux propriétaires de monuments historiques pour leurs travaux de restauration. Cette assistance peut être gratuite lorsque le propriétaire ne dispose pas des moyens nécessaires à l’exercice de cette maîtrise d’ouvrage. De nombreuses petites communes bénéficient donc déjà de cette assistance à la maîtrise d’ouvrage.

Lorsque les DRAC ne sont pas en capacité de répondre favorablement à toutes les demandes d’aides à la maîtrise d’ouvrage, les propriétaires doivent bénéficier d’aides financières. Ils peuvent, en effet – ceci est souvent ignoré, et il faut vraiment en informer les partenaires –, inclure le coût du recours à une AMO payante dans le montant des travaux de restauration subventionnés par l’État. Il y a là une petite tuyauterie financière tout à fait utile.

Votre demande me semble donc déjà satisfaite. En revanche, je crois souhaitable que, à côté de l’offre de l’État, se développe une offre des collectivités territoriales, comme le font certains départements, que je salue, notamment pour la réalisation des études préalables aux travaux.

Mesdames, messieurs les sénateurs, l’acharnement de ces amendements contre le pass culture m’a permis de donner des réponses circonstanciées sur un certain nombre de dossiers qui ont attiré, à juste titre, votre attention !

L’avis du Gouvernement est donc défavorable sur l’ensemble de ces amendements.

Debut de section - PermalienPhoto de Georges Patient

La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Ouzoulias

M. Pierre Ouzoulias. Je vous remercie beaucoup, madame la ministre, de la qualité de nos échanges et du soin que vous mettez à nous répondre précisément sur chacun des amendements. Il n’est pas fréquent qu’un membre du Gouvernement nous fasse des réponses précises ; cela méritait donc d’être souligné.

Marques d ’ approbation sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Ouzoulias

J’ai bien entendu vos explications, mais j’en reste fermement à l’analyse de notre collègue Hugonet, qui a réalisé un travail de suivi exemplaire et extrêmement difficile. Je tire de ces trois ans de suivi la conclusion que, malheureusement, une expérimentation qui s’éternise s’appelle un échec. Et il faut, à un moment donné, sanctionner cet échec.

Je juge donc important que le Sénat affirme clairement son mécontentement par le vote d’amendements, même si ce ne sont sans doute pas les nôtres qui seront adoptés. Je retirerai d’ailleurs les amendements n° II-897 et II-898, au profit du II-36 rectifié ter, qui a plus de chance d’être voté. À un moment donné, le Sénat doit dire qu’il faut s’arrêter.

Sur le fond, cela fait trois ans que le groupe CRCE ne vote pas les crédits du pass culture, pour une raison fondamentale, qui touche, d’ailleurs, à notre vision assez républicaine de la culture. Nous ne considérons pas, contrairement à une vision en quelque sorte néo-libérale, que l’individu puisse être maître de son destin, notamment artistique, seul, sans une intermédiation. Et cette intermédiation absolument fondamentale manque à notre société.

La relation d’un individu avec la culture, simplement par le biais de son téléphone et d’une application, ne nous convient pas. Nous sommes un peu vieillots : nous en restons à l’idée de la maison de la culture, telle que Malraux l’a développée, j’en suis désolé.

Je retire donc les amendements n° II-897 et II-898.

Debut de section - PermalienPhoto de Georges Patient

Les amendements n° II-897 et II-898 sont retirés.

La parole est à M. Jean-Raymond Hugonet, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Raymond Hugonet

Madame la ministre, je vous remercie de vos explications, notamment à propos du Grand Palais.

Nous avons un point de désaccord sur le pass culture. Ce n’est pas une fixette de la part du Sénat. C’est tout simplement, comme l’a dit Pierre Ouzoulias, le fruit de trois ans de suivi de cette affaire.

Je ne dénie pas au Président de la République le droit de laisser l’empreinte de son quinquennat sur la culture par un label pass culture. Mais voilà trois ans que nous patinons, voilà trois ministres qui sont passés, voilà des crédits qui pleuvent sur le pass culture ! Je ne remets pas vos chiffres en question, mais, sincèrement, d’où sortent ces évaluations ? En ce qui nous concerne, nous devons glaner ces informations et les quémander auprès de la SAS pass culture.

Or c’est au moment même où la culture est à l’arrêt dans notre pays et où les artistes crèvent que l’on déverse 59 millions d’euros sur le pass culture. On ferme les bibliothèques, on ferme les librairies et on paye des livres ?

Mme la ministre fait un signe de dénégation.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Raymond Hugonet

Je salue Pierre Ouzoulias pour le retrait de ses amendements au profit de celui de Catherine Dumas. Madame la ministre, nous partageons, sur ces travées, l’avis qu’il n’est pas décent de continuer obstinément sur ce pass culture. Peut-être est-il légitime : nombre de territoires, départements, régions et communes pratiquent déjà de tels pass. Il n’y a donc pas de problème à ce sujet.

Toutefois, ce n’est ni le moment, ni la bonne formule, ni le bon procédé. Il est donc clair, madame la ministre, que nous voterons l’amendement de notre collègue Catherine Dumas.

Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Pierre Ouzoulias applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Georges Patient

La parole est à M. Jérôme Bascher, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Bascher

Je vais aller dans le même sens que mon excellent collègue Jean-Raymond Hugonet. Madame la ministre, ce n’est pas nous qui faisons une fixette sur cette unique mesure ; c’est le ministère. Et c’est bien dommage, car il faut reconnaître que vous êtes battue pour les crédits du ministère. Dire le contraire serait un tour de force absolument incroyable.

Les sommes incroyables que vous dépensez seront finalement dispersées là où le public n’a pas payé. Telle est la vérité : on déverse des tonnes de dette publique, parce que le public ne va plus dans les musées ou les librairies, ni voir du spectacle vivant ou des films au cinéma. Quant aux mesures de compensations justes, vous le savez, le Sénat vous suit.

Toutefois, comme l’a dit Jean-Raymond Hugonet, ce pass culture est une mesure qui n’est bonne qu’à l’échelon local, à l’instar de celle qui concerne le patrimoine rural non protégé. Vous le savez aussi bien que nous, madame la ministre, car vous avez été élue locale. La région Hauts-de-France, tout comme plusieurs départements, a mis en œuvre ce genre de dispositif.

Sauf que Jupiter a oublié de descendre de son Olympe pour venir constater sur les territoires que ces mesures fonctionnent beaucoup mieux lorsqu’elles sont mises en œuvre localement que lorsqu’elles le sont depuis en haut !

Sourires. – Mme la ministre proteste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Bascher

Voilà pourquoi, madame la ministre, la chambre des territoires vous demande d’arrêter ce mécanisme, pour vous diriger vers des dispositifs plus proches du terrain. Il serait dommage, en vous entêtant, de nuire à tout ce que vous avez fait pour la culture.

Debut de section - PermalienPhoto de Georges Patient

La parole est à Mme Catherine Dumas, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Dumas

Madame la ministre, vous nous dites que tous ces amendements tendent à alimenter d’autres budgets. Je ne puis vous laisser dire cela. Ces amendements visent tous le pass culture, à propos duquel nous sommes nombreux, sur ces travées, à nous interroger.

En effet, le pass est sous-consommé et souffre de problèmes de conception ; l’un de nos collègues a parlé du cahier des charges qui change tous les matins. Même notre collègue Bargeton, pourtant dithyrambique à votre égard, …

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot

Mme Roselyne Bachelot, ministre. Il a le droit de dire du bien de moi. Ce n’est pas interdit !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Dumas

… a reconnu qu’il fallait l’adapter et le reconnecter.

Je réitère ma demande d’un rapport précis et détaillé sur l’utilisation du pass culture. Les chiffres que vous nous avez donnés, nous les découvrons à l’instant !

Vous avez répété, devant la commission de la culture à l’Assemblée nationale, qu’il fallait diminuer le montant de ce pass, et, aujourd’hui, vous nous donnez des chiffres allant en sens contraire.

Quant à l’expérimentation, je crois que tout a été dit à ce sujet. Malgré vos explications, nous ne sommes, malheureusement, pas convaincus.

Debut de section - PermalienPhoto de Georges Patient

La parole est à Mme Sonia de La Provôté, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Sonia de La Provôté

Je crois que nos interventions ont été suffisamment claires à propos du pass culture. Elles traduisent des interrogations qui ne datent pas d’aujourd’hui. À l’époque de la mise en place du pass, nous étions, sinon bienveillants, du moins prêts à travailler et à suivre l’évolution de ce projet, qui, au bout de trois ans, est resté à l’état d’expérimentation.

En effet, ses financements nous paraissent d’autant plus excessifs que le système budgétaire, en ce moment où les choses vont mal, est quelque peu schizophrénique. Madame la ministre, vous distribuez le pass culture précisément au moment où il y a urgence et où tout ce qui, dans le domaine culturel, a été identifié comme ayant fait ses preuves a justement des besoins réels. Vous distribuez les crédits au pass culture au détriment de ce qui va servir vraiment !

En outre, vous proposez sa généralisation au moment où les structures sont fermées, rendant impossible tout déploiement d’une véritable offre culturelle, hormis numérique.

Cette expérimentation nous semble donc devoir durer – je ne sais pas pour combien de temps. Il faut attendre un peu et consolider cette expérimentation, là où elle a été mise en pratique. Compte tenu de la situation actuelle et des immenses besoins du patrimoine, il n’est pas cohérent de persévérer comme vous le faites.

Nous constatons que le patrimoine de l’État et des grands opérateurs doit être accompagné. Bon nombre de chantiers d’entretien ne se font pas ou se font mal, faute de moyens et d’ingénierie ; selon nous, c’est le moment de mettre un coup accélérateur en la matière. L’objectif de relance économique n’en sera que mieux atteint.

Debut de section - PermalienPhoto de Georges Patient

La parole est à M. Max Brisson, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Max Brisson

Je vais tenter de faire baisser la pression, qui est forte. Madame la ministre, c’était une belle soirée : tout le monde, et pas seulement M. Bargeton, saluait vos efforts, la qualité de votre budget et la manière dont vous avez défendu les artistes.

Toutefois, les mêmes, à l’exception de MM. Bargeton et Rambaud, pointent du doigt le pass culture. Nous avons trouvé assez curieuse cette expérimentation, alors qu’il était quasiment impossible de se rendre cette année dans une salle de spectacle, dans une librairie ou dans une bibliothèque. Je ne sais comment vous avez pu expérimenter !

Il me semble, madame la ministre, qu’après tant de satisfecits vous devez écouter la voix du Sénat. Sans exagération aucune, sans vous mettre la pression, celui-ci vous dit simplement : cela ne marche pas, tirez-en les conclusions.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot

Mesdames, messieurs les sénateurs, les chiffres que je vous transmets en temps réel sur le pass culture sont, bien sûr, vérifiés et vérifiables, et je m’en porte garante. Je ne vais pas donner à la Haute Assemblée des chiffres faux, qui pourraient être contredits ! Je vous demande donc de me faire confiance sur les chiffres, à défaut du reste.

Une durée de trois ans ne me semble pas avoir délégitimé l’expérimentation menée sur le pass culture. Au contraire, expérimenter durant trois ans une opération aussi complexe, touchant un public a priori peu friand de ce genre de consommation, ne me paraît pas délégitimer le processus !

Ensuite, il est intéressant d’observer que la montée en charge a été continue durant les trois années de sa mise en œuvre. C’est d’autant plus remarquable que la dernière année, 2020, a été marquée par de très grandes difficultés pour l’offre culturelle. Cette montée en charge doit donc être saluée.

Certains pointent des besoins qui ne sont pas satisfaits. Pardon, mais jamais les crédits de la culture et du patrimoine n’ont été aussi élevés – vous l’avez d’ailleurs tous salué. Permettez-moi également de rappeler que, sur plus de 4 milliards d’euros de crédits de la culture, le pass culture représente 59 millions d’euros, soit à peine plus de 1 %.

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot

On ne peut donc pas dire que nous avons focalisé sur le pass culture les crédits destinés aux autres actions.

À la lumière de ces chiffres mis en comparaison les uns avec les autres, on voit qu’il n’y a pas un détournement des crédits de la culture pour financer le pass culture.

Vous avez dit que l’on n’a pas pu consommer de livres, qui représentent les principaux objets physiques achetés avec le pass. Ce n’est pas vrai !

J’en profite pour faire un certain nombre de commentaires, aussi bien à propos des bibliothèques, qui vont rouvrir dans peu de temps, que des librairies. Quoique ces dernières aient été fermées pour des raisons sanitaires, je tiens à saluer le fait que les livres ont continué à se vendre, grâce à des dispositions prises par le Gouvernement. Je pense notamment aux opérations « cliquer et emporter ». J’ai visité deux librairies : grâce à ce système, l’une a réalisé 80 % de son chiffre d’affaires, l’autre 65 %.

En outre, les librairies ont réalisé, avant la période de confinement, des ventes remarquables de livres, qu’elles ont toutes saluées. Leurs chiffres d’affaires ont augmenté de façon considérable depuis la fin de la première période de confinement, ce dont il faut se réjouir.

Un libraire qui, dans la semaine qui a précédé le confinement, voyait 150 clients par jour, en a vu 600, les paniers moyens d’achats étant multipliés par deux ou trois. C’est tout à fait remarquable.

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot

Non, je ne dis pas que tout va bien. Je donne des chiffres et des faits ! Je vais dans les librairies, je parle avec les libraires.

Bien sûr, c’est un crève-cœur que de voir des librairies fermées, mais celles-ci ont pu continuer à vendre et elles ont bénéficié du prêt garanti par l’État, de l’aide aux salaires et des aides apportées par le Centre national du livre. Allez écouter les libraires : ils vous le diront.

Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot

Ils n’ont aucune raison de me mentir pour me dresser je ne sais quels lauriers !

Je me réjouis que l’on ait continué à lire, et je suis heureuse de constater que la première journée de réouverture des librairies a été marquée par un déplacement en masse des lecteurs. Avant d’être des lieux commerciaux, ce sont des lieux de culture ; félicitons-nous-en.

Mesdames, messieurs les sénateurs, il faut aussi faire preuve d’un peu d’optimisme ! Nous devons surmonter cette crise, ensemble. Cessons de tenir seulement des discours misérabilistes dans ce domaine.

Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot

Mme Roselyne Bachelot, ministre. Il faut continuer à lire et à aller dans les librairies !

M. François Patriat applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Georges Patient

Je mets aux voix l’amendement n° II-36 rectifié ter.

L ’ amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Georges Patient

Je mets aux voix les amendements identiques n° II-823 et II-928.

Les amendements sont adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Dumas

Je retire l’amendement n° II-37 rectifié ter, monsieur le président !

Debut de section - PermalienPhoto de Georges Patient

L’amendement n° II-37 rectifié ter est retiré.

Je mets aux voix l’amendement n° II-824.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Pierre Monier

Je retire l’amendement n° II-821, monsieur le président !

Debut de section - PermalienPhoto de Georges Patient

L’amendement n° II-821 est retiré.

Je mets aux voix l’amendement n° II-822.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Georges Patient

L’amendement n° II-878, présenté par M. Dossus, Mme de Marco, M. Benarroche, Mme Benbassa, MM. Dantec, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme Taillé-Polian, est ainsi libellé :

I. – Créer le programme :

Fonds de revitalisation pour les initiatives culturelles

II. – En conséquence, modifier ainsi les ouvertures de crédits des programmes :

En euros

Debut de section - PermalienPhoto de Georges Patient

Programmes

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Patrimoines

Création

Transmission des savoirs et démocratisation de la culture

dont t itre 2

Soutien aux politiques du ministère de la culture

dont t itre 2

Fonds de revitalisation pour les initiatives culturelles

TOTAL

SOLDE

La parole est à M. Thomas Dossus.

Debut de section - PermalienPhoto de Thomas Dossus

Cet amendement est le premier d’une série visant à porter un modèle de développement culturel plus durable, solidaire et ancré dans nos territoires.

Ces amendements ont été rédigés en coordination avec l’Union fédérale d’intervention des structures culturelles et l’Appel des indépendants, qui sont issus de Lyon, mais qui essaiment maintenant avec 1 600 structures. L’objectif est de lancer un plan de revitalisation culturelle.

Les petites structures culturelles – associations, TPE-PME et indépendants – sont touchées de plein fouet par la crise ; cela a été dit et abondamment commenté dans les médias comme dans cet hémicycle. Ce qui est moins souligné, c’est l’extrême interdépendance de tous ces acteurs.

À la différence des structures de l’économie de marché, ces initiatives culturelles et citoyennes fonctionnent souvent dans des logiques de coopération, et moins de compétition. Cette interdépendance qui s’est créée au fil du temps donne une grande résilience à l’ensemble du système et permet d’affronter avec une relative sérénité les crises passagères. Mais elle fait peser un risque systémique majeur sur tous les acteurs en cas de crise prolongée, comme celle du covid.

En effet, pour de nombreux festivals, spectacles, rencontres et expositions, l’activité est à l’arrêt depuis le mois de mars dernier et pourrait ne pas redémarrer à 100 % avant le printemps prochain. Par des effets de faillites en cascade, ce sont ainsi des milliers de petites structures qui pourraient définitivement disparaître, entraînant avec elles des milliers de chômeurs supplémentaires.

Pour nous, il est temps d’acter dès aujourd’hui un plan de relance pour les oubliés de la culture. Les prêts garantis par l’État, les PGE, le chômage partiel, l’année blanche pour les intermittents et les fonds de solidarité mis en place par des collectivités leur ont permis de survivre, mais il est temps maintenant de leur donner des moyens de vivre et de participer à la relance du pays.

Nous vous proposons ainsi de créer un fonds transversal, doté de 100 millions d’euros et destiné à apporter une aide à tous ces projets culturels citoyens, sur la base d’une instruction de dossiers, avec des critères d’intérêt général simples et transversaux aux disciplines comme aux activités.

Ce fonds devra inciter à la coopération entre acteurs – c’est important – et associer le plus largement à son pilotage et à son évaluation tous les acteurs de la culture, c’est-à-dire l’État, les collectivités, les associations, les organisations syndicales et les citoyens.

Madame la ministre, comme je l’ai dit lors de la discussion générale, le patrimoine reçoit une large part du soutien de l’État dans ce budget.

Nous ne doutons pas de la nécessité de soutenir ce témoignage de notre histoire, mais nous appelons à un rééquilibrage en faveur de la culture vivante d’aujourd’hui et de demain, celle qui est pratiquée par toutes et tous sur l’ensemble du territoire, qui est peu subventionnée et peu mercantile, qui émancipe et relie les hommes et les femmes et qui, peut-être, sera le patrimoine que nous laisserons à nos enfants.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Rambaud

Cet amendement vise à créer un fonds de revitalisation pour les initiatives culturelles, doté de 100 millions d’euros. Il paraît déjà en large partie satisfait par les crédits de la mission « Plan de relance ».

Il en va ainsi de la relance de la programmation des institutions musicales classiques installées en régions, sous l’égide des DRAC, afin d’accompagner la reprise d’activité des artistes, ensembles et orchestres.

Un dispositif équivalent, dédié aux institutions de spectacle vivant – théâtre, arts de la rue, danse, cirque – installées en régions, est également prévu.

Un fonds de transition écologique pour les institutions de la création installées en régions vient s’ajouter à ces dispositifs.

Enfin, 50 millions d’euros en autorisations d’engagement et 20 millions d’euros en crédits de paiement viendront financer des équipements patrimoniaux et des monuments n’appartenant pas à l’État.

Aussi, la commission sollicite le retrait de cet amendement.

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot

Ce n’est pas un petit amendement qui nous est présenté, puisque son adoption priverait le patrimoine de 100 millions d’euros !

Il y a eu un très large accord sur les travées de cet hémicycle pour dire que les crédits du patrimoine étaient absolument indispensables, à la fois pour le patrimoine lui-même et pour l’effet d’entraînement économique qu’il suscite, sur les territoires, par la restauration des bâtiments, mais aussi par leur fréquentation et l’animation culturelle qui en découle.

Pour cette raison, j’émets un avis défavorable sur cet amendement.

Je reviens brièvement sur l’amendement n° II-36 rectifié ter, qui vient d’être adopté : si j’ai bien compris, vous souhaitez, mesdames, messieurs les sénateurs, que l’expérimentation du pass culture dure une quatrième année supplémentaire… En effet, vous n’avez voté que les 20 millions d’euros d’extension du dispositif. Je salue cette volonté de poursuivre l’expérimentation !

Sourires sur les travées du groupe RDPI.

Debut de section - PermalienPhoto de Georges Patient

La parole est à M. Jérôme Bascher, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Bascher

Vous avez évoqué l’expérimentation, madame la ministre. Nous aurions effectivement pu supprimer tous les crédits, mais des idées intéressantes peuvent émerger à l’occasion.

Je veux rebondir sur ce qu’a proposé mon collègue Thomas Dossus. Un certain nombre d’enseignements artistiques ont été arrêtés. Or, l’avenir, ce sont tous ces jeunes que leurs parents ont choisi de ne pas réinscrire à l’éducation artistique. C’est peut-être pour eux que votre chèque pourra être utile, parce que les parents qui ne réinscrivent pas leurs enfants sont, bien souvent, les plus modestes.

Il y a peut-être des choses à inventer, avec l’argent qui vous reste, pour renforcer les enseignements dispensés, dans les campagnes ou ailleurs, par des professeurs souvent indépendants. C’est extrêmement important.

Vous pouvez avoir de nouvelles idées et penser à de nouvelles expérimentations. Nous vous laissons la chance de les concrétiser !

Debut de section - PermalienPhoto de Georges Patient

La parole est à Mme Marie-Pierre Monier, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Pierre Monier

Sur le fond, nous sommes d’accord avec l’amendement de notre collègue Thomas Dossus, mais il ne serait pas cohérent pour nous de le voter, compte tenu des amendements que nous avons présentés en vue d’augmenter les crédits du patrimoine.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Georges Patient

L’amendement n° II-879, présenté par M. Dossus, Mme de Marco, M. Benarroche, Mme Benbassa, MM. Dantec, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme Taillé-Polian, est ainsi libellé :

I. – Créer le programme :

Pacte pour l’emploi artistique et culturel

II. – En conséquence, modifier ainsi les ouvertures de crédits des programmes :

En euros

Debut de section - PermalienPhoto de Georges Patient

Programmes

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Patrimoines

Création

Transmission des savoirs et démocratisation de la culture

dont t itre 2

Soutien aux politiques du ministère de la culture

dont t itre 2

Pacte pour l’emploi artistique et culturel

TOTAL

SOLDE

La parole est à M. Thomas Dossus.

Debut de section - PermalienPhoto de Thomas Dossus

Cet amendement s’inscrit dans la continuité du précédent. Il vise à soutenir l’emploi du secteur culturel. Ce dernier repose sur un tissu constitué à 95 % de très petites structures de moins de 10 salariés permanents, en large partie dans le champ de l’économie sociale et solidaire.

C’est cet emploi de proximité, au plus proche des territoires et des projets, qu’il nous faut aujourd’hui protéger de la crise.

Pour ce faire, nous proposons un fonds, doté de 80 millions d’euros et reposant en grande partie sur des dispositifs déjà existants. Les crédits de ce fonds seront ventilés sur cinq priorités.

Premièrement, nous souhaitons abonder le budget du fonds national pour l’emploi pérenne dans le spectacle, le Fonpeps, à hauteur de 58 millions d’euros, et élargir ses critères afin qu’il puisse notamment prendre en charge une part de la masse salariale des artistes et des techniciens, soutenir les postes d’enseignement et de formateurs occasionnels pour les activités d’enseignement et d’accompagnement des pratiques artistiques, prendre en charge une part de la masse salariale des postes structurants, et pas seulement des artistes, ouvrir le fonds aux associations des arts visuels, soutenir davantage les postes mutualisés.

Deuxièmement, 7, 5 millions d’euros du fonds serviront à ouvrir 1 000 postes au titre du fonds de coopération de la jeunesse et de l’éducation populaire, le Fonjep. Ces postes, soutenus à hauteur de 7 500 euros par CDI ou CDD long, devront être ouverts dans le champ des arts visuels, les associations du livre et du jeu, les territoires ruraux et les quartiers populaires, là où les besoins se font le plus sentir.

Troisièmement, nous souhaitons que le fonds permette un soutien appuyé aux indépendants, à hauteur de 10 millions d’euros.

Quatrièmement, nous voulons développer des mécanismes de solidarité pour les prestataires du champ culturel, pour 2 millions d’euros.

Cinquièmement, il est urgent de renforcer l’information des TPE et des structures culturelles, afin qu’elles puissent connaître les dispositifs auxquels elles ont droit et de les accompagner dans les dossiers.

Ces cinq axes peuvent être déployés dès aujourd’hui, parce qu’ils reposent sur des dispositifs déjà existants. L’objectif est de relancer l’emploi artistique et de sécuriser la filière.

En conclusion, si les outils existants assurent un soutien ponctuel en termes d’investissements ou d’ingénierie, celui que nous proposons et acte un soutien massif direct aux acteurs culturels. En un mot, notre proposition permet une véritable relance !

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Rambaud

Cet amendement a pour objet d’affecter 80 millions d’euros du programme « Patrimoines » vers un fonds dédié à l’emploi artistique et culturel.

Or il est déjà pour partie satisfait par le budget de la mission « Culture », qui intègre cette préoccupation, avec une montée en charge du Fonpeps et la mise en œuvre d’un plan dédié aux artistes-auteurs.

La commission sollicite donc le retrait de cet amendement.

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot

Je suis tout à fait d’accord avec l’argumentation que M. le rapporteur spécial vient de développer.

J’ajoute que le Fonpeps ne peut être élargi aux arts visuels, car il est conçu pour soutenir les emplois des annexes VIII et X au règlement d’assurance chômage dans le spectacle vivant et enregistré. J’en profite pour préciser qu’il a déjà fait l’objet d’une mesure nouvelle de 5 millions d’euros sur le programme 131.

Enfin, le renforcement des exonérations de charges sociales pour les auteurs et les entreprises du secteur culturel a bien été prévu dans le Gouvernement, par amendement au PLFSS. Il n’est donc pas nécessaire de prévoir une compensation sur le budget du ministère de la culture ; franchement, cela ne se justifie pas !

Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Georges Patient

L’amendement n° II-877, présenté par M. Dossus, Mme de Marco, M. Benarroche, Mme Benbassa, MM. Dantec, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme Taillé-Polian, est ainsi libellé :

I. – Créer le programme :

Fonds de soutien pour les musiques actuelles et électroniques

II. – En conséquence, modifier ainsi les ouvertures de crédits des programmes :

En euros

Debut de section - PermalienPhoto de Georges Patient

Programmes

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Patrimoines

Création

Transmission des savoirs et démocratisation de la culture

dont t itre 2

Soutien aux politiques du ministère de la culture

dont t itre 2

Fonds de soutien pour les musiques actuelles et électroniques

TOTAL

SOLDE

La parole est à M. Thomas Dossus.

Debut de section - PermalienPhoto de Thomas Dossus

Madame la ministre, cet amendement d’appel ne fait pas partie de la série d’amendements que j’ai évoquée.

J’ai déjà défendu une disposition similaire auprès d’Olivier Dussopt, mais elle n’a pas reçu un écho très favorable… §Le regard de comptable de votre collègue y est peut-être pour quelque chose !

L’amendement vise à briser le silence concernant un pan de la culture française : je veux parler des musiques actuelles et, surtout, de la musique électronique, vitrine de la création musicale française à l’étranger. Tout le secteur est aujourd’hui à l’agonie, puisque les festivals sont arrêtés et les établissements de nuit fermés.

La vie nocturne, comme espace de création, est devenue silencieuse. Elle va le rester longtemps – au moins jusqu’à l’été prochain, si j’ai bien compris le message du Président de la République.

Actuellement, ce secteur se sent ignoré et craint de passer du spectacle vivant au « spectacle mort », pour reprendre les mots du chevalier de la Légion d’honneur Laurent Garnier.

Aujourd’hui se joue la survie de milliers d’artistes, de l’écosystème qui les entoure et d’un secteur qui pèse plus de 400 millions d’euros. Compte tenu du contexte, ils n’auront pas de perspectives avant très longtemps. Or ils passent à travers les mailles des différents soutiens que pourrait leur apporter le ministère de la culture.

C’est pourquoi, par la création d’un fonds de soutien pour les musiques actuelles et électroniques, nous souhaitons leur apporter à la fois une reconnaissance de leur place dans le patrimoine culturel, ainsi que des moyens pour traverser la crise actuelle.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Rambaud

Cet amendement tend à créer un fonds de soutien pour les musiques actuelles et électroniques, doté de 20 millions d’euros prélevés sur les crédits du programme « Patrimoines ».

Le Centre national de la musique, le CNM, a vu ses missions élargies, afin de faire face aux difficultés des professionnels de la musique, y compris ceux qui sont situés dans l’angle mort de cet établissement, à l’image des musiciens classiques.

Cet amendement semble satisfait. En conséquence, la commission sollicite son retrait.

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot

Monsieur Tissot, je note que c’est le troisième amendement consécutif que vous proposez afin de diminuer très fortement les crédits du patrimoine !

Si tous vos amendements avaient été votés, 300 millions d’euros auraient déjà été retirés au programme « Patrimoines » – à hauteur de 200 millions d’euros pour le premier, 80 millions d’euros pour le deuxième et 20 millions d’euros pour celui-ci –, avec les effets économiques et artistiques et les conséquences sur l’animation que l’on connaît et que l’on peut chiffrer.

Effectivement, le CNM a été doté de 200 millions d’euros. Aucun genre musical n’est écarté de la possibilité de bénéficier de ces crédits. Les musiques actuelles et les musiques électroniques peuvent évidemment être elles aussi soutenues, notamment au travers des aides à la production ou du soutien aux festivals ou aux salles. Les aides ne sont pas réservées aux festivals classiques et aux pièces de théâtre du répertoire ! Il n’y a pas de hiérarchie entre musiques dans les aides que nous apportons.

Au reste, les entreprises qui gravitent autour du secteur des musiques électroniques ont fait l’objet d’attentions particulières du Gouvernement, qui a renforcé son niveau d’intervention pour les discothèques au-delà des paramètres de droit commun, afin de tenir compte des difficultés spécifiques rencontrées, que vous avez signalées.

Les indépendants, qui sont eux aussi très fragilisés, ont bénéficié de dispositifs comme le fonds de solidarité. Il n’y a donc aucun abandon des musiques actuelles et des musiques électroniques.

Aussi, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Georges Patient

La parole est à Mme Marie-Pierre Monier, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Pierre Monier

Il me semble que tous les spectateurs qui assistent aux concerts de musiques actuelles et électroniques restent debout ! La crise va donc les frapper tout particulièrement.

Cependant, je suis gênée que l’auteur de l’amendement puise sur les crédits du patrimoine, même si le montant ponctionné est moindre que pour ses précédentes propositions.

Par ailleurs, madame la ministre, lèverez-vous le gage ?

Debut de section - PermalienPhoto de Sylvie Robert

Je veux remercier notre collègue Thomas Dossus d’avoir présenté cet amendement d’appel. Je formulerai deux petites réflexions.

Il est vrai que c’est une jauge debout qui s’applique aux musiques actuelles. À la différence des autres salles qui vont rouvrir le 15 décembre, les scènes de musique actuelle, les SMAC, et les autres équipements qui ont des jauges debout devront donc rester fermés.

Aujourd’hui, les acteurs du secteur sont dans l’incertitude. On peut le comprendre, car ils ne savent pas à quelle date les spectacles pourront reprendre.

Je rappelle que les jauges debout concernent également tous les festivals. Comme je l’ai souligné en commission, l’ensemble du secteur doit pouvoir avoir une visibilité au début du mois de février ou du moins pour le printemps, parce que les festivals se tiennent en été. Je veux vraiment y insister, même si je sais que c’est difficile.

Vous avez tout à fait raison, madame la ministre : les acteurs bénéficient d’autres aides, notamment via le CNM et le crédit d’impôt pour le spectacle vivant. Cependant, je veux souligner que les députés et les sénateurs ont prolongé ce crédit d’impôt et assoupli ses critères d’accès, pour permettre à ce secteur d’en bénéficier.

Pour conclure, je rappelle que nous avons voté – à l’unanimité, me semble-t-il – l’élargissement du crédit d’impôt sur le théâtre, afin que ce dernier ne soit pas réservé aux auteurs dramatiques. Nous avons, en effet, considéré qu’il était plus judicieux qu’il soit élargi aux autres secteurs de spectacles non musicaux : le théâtre, bien sûr, mais aussi la danse, la marionnette ou encore d’autres esthétiques.

Madame la ministre, nous comptons sur vous pour que l’élargissement de ce périmètre élargi survive à la navette.

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot

Mesdames, messieurs les sénateurs, vous avez tout à fait raison de le signaler, les concerts de musiques actuelles et de musiques électroniques sont en général des spectacles debout.

Or, dans la situation de pandémie que nous connaissons, autoriser les spectacles debout n’est pas possible, pour des raisons sanitaires évidentes.

On sait très bien que, dans les spectacles debout, les spectateurs s’agglutinent au pied de la scène. On a pu le constater à l’occasion d’un festival de musiques actuelles qui s’est tenu durant le premier confinement à Nice, dans un énorme parc permettant tout à fait de respecter la jauge recommandée.

Les risques d’aérosolisation sont tout à fait majeurs lors des spectacles debout, puisque les jeunes qui y participent ne sont pas masqués et dansent ; je ne dis pas que les gens de mon âge n’assistent pas à des spectacles de musique électronique, car cela m’arrive aussi, mais je dois bien reconnaître qu’ils ne forment pas le gros de la troupe… §Nul besoin d’être un épidémiologiste ou un infectiologue chevronné pour le comprendre.

J’entends la demande de visibilité exprimée par le secteur, mais la crise sanitaire ne me permet pas de la satisfaire. Ce que je puis dire, c’est que nous détenons chacun une petite parcelle de la réponse.

Il est très évident que l’impact sur la diffusion du coronavirus de ce qui va se passer pendant les fêtes de fin d’année sera un élément d’appréciation tout à fait important. Un rendez-vous a été pris le 20 janvier prochain. Nous saurons alors si nous pouvons aller plus loin dans le déconfinement. Finalement, ce sont les Français qui nous donneront la réponse !

Au-delà, si nous disposons, demain, d’un vaccin dont l’administration est généralisée à l’ensemble de la population, ce que, je crois, tout le monde espère, nous pourrons évidemment revenir à la normale.

Quoi qu’il en soit, si je vous disais aujourd’hui que les spectacles debout pourront de nouveau se tenir à la fin du mois de janvier, je tiendrais, en tant que ministre de la culture, ancienne ministre de la santé et professionnelle de santé, des propos totalement irresponsables.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Georges Patient

L’amendement n° II-880, présenté par M. Dossus, Mme de Marco, M. Benarroche, Mme Benbassa, MM. Dantec, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme Taillé-Polian, est ainsi libellé :

I. – Créer le programme :

Fonds pour la transition urbaine et rurale

II. – En conséquence, modifier ainsi les ouvertures de crédits des programmes :

En euros

Debut de section - PermalienPhoto de Georges Patient

Programmes

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Patrimoines

Création

Transmission des savoirs et démocratisation de la culture

dont t itre 2

Soutien aux politiques du ministère de la culture

dont t itre 2

Fonds pour la transition urbaine et rurale

TOTAL

SOLDE

La parole est à M. Thomas Dossus.

Debut de section - PermalienPhoto de Thomas Dossus

Il s’agit du dernier des trois amendements de soutien aux initiatives culturelles, visant à amorcer des changements structurels du secteur, sur tous les territoires, afin de faire émerger un modèle plus solidaire, plus durable et plus respectueux des droits culturels et humains.

Cette mesure prend elle aussi sur les crédits du patrimoine, mais j’assume cette volonté de rééquilibrer un peu le budget de la mission vers la culture, les petites structures et le spectacle vivant.

La crise est un défi pour le monde de la culture et menace les acteurs. Nous l’avons dit et répété ; je n’y reviendrai pas.

Nous proposons ici un fonds pour la transition urbaine et rurale, doté de 20 millions d’euros par an. Ce programme s’appuie sur une convention d’objectifs et de moyens, qui décline des actions structurantes sur deux ans, autour de trois axes principaux.

Premièrement, l’objectif est de renforcer les coopérations. Une aide en fonctionnement – jusqu’à 50 000 euros – pourra être versée aux groupements territoriaux et aux mutualisations d’emplois à but non lucratif. Cela permettra de soutenir les dispositifs de transfert de savoir-faire et d’appuyer les démarches de coconstruction sur tous les territoires.

Deuxièmement, il s’agit de développer la solidarité financière. Nous proposons la création d’un fonds national et l’expérimentation de fonds territoriaux solidaires, en lien avec la Banque des territoires et l’Institut pour le financement du cinéma et des industries culturelles, l’Ifcic, afin d’accompagner des financements de projets complexes associant plusieurs acteurs. Nous proposons également de créer un mécanisme de partage des excédents associatifs pour renforcer les fonds propres.

Troisièmement, nous voulons soutenir l’expérimentation, ce qui est peut-être le plus important. Ainsi, 20 millions d’euros devront encourager les pratiques innovantes et les recherches d’actions autour du développement durable, des droits culturels, de la lutte contre les discriminations, de la transition vers une sobriété écologique, de la participation citoyenne ou encore de la solidarité internationale.

Ce programme pourra s’appuyer sur des partenariats actifs et financiers transversaux, avec des acteurs du financement solidaire, de l’accompagnement et de la formation et de la recherche.

Nous sommes nombreux ici à rappeler que le Sénat est la chambre des territoires. Il est temps de le prouver aujourd’hui en soutenant cette initiative, qui permettra d’ancrer localement les projets culturels, dans une logique d’écosystème, de manière à redynamiser toute l’économie locale de la culture, qui est, par essence, non délocalisable.

J’avais déposé cet amendement sur les crédits de la mission « Plan de relance ». Il m’a été répondu que 14 millions d’euros avaient déjà été prévus pour l’Ifcic et que les quartiers culturels et créatifs seraient dotés de 3 millions d’euros.

Je ne nie ni l’un ni l’autre de ces deux points, mais notre projet va beaucoup plus loin. Nous proposons non seulement un soutien financier direct, mais aussi des pratiques, des méthodes, des voies à suivre pour amorcer une réelle transition, toujours dans l’esprit de reconnaître l’existence d’écosystèmes.

Enfin, les quartiers culturels et créatifs sont situés dans les aires urbaines métropolitaines ou moyennes, alors que le dispositif de notre amendement prend en compte tous les acteurs, y compris ceux de la ruralité.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Rambaud

Le soutien aux industries culturelles et au maillage culturel des territoires fait l’objet, dans le plan de relance, d’une dotation quasi équivalente à celle que propose notre collègue Thomas Dossus. Ainsi, 14 millions d’euros sont prévus en faveur de l’Ifcic, afin de soutenir des projets innovants.

La mise en place de quartiers culturels et créatifs, en particulier au sein de certains centres urbains dévitalisés, serait dotée de 3 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 1, 5 million d’euros en crédits de paiement.

Dans ces conditions, cet amendement me paraît en large partie satisfait. Aussi, la commission sollicite son retrait.

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot

C’est peut-être le but que vous visez, mais je ne puis souscrire à ces différents amendements.

C’est d’autant plus vrai qu’un effort tout à fait considérable est d’ores et déjà consenti, ainsi que vous venez d’ailleurs de l’évoquer.

Ainsi, le ministère de la culture est notamment associé à l’appel à projets « Réinventons nos cœurs de ville », qui permet à 112 villes de développer des projets innovants pour réinventer les usages de sites emblématiques de centre-ville qui sont en attente d’affectation : des friches industrielles, un ancien hôpital, une caserne, un commerce vacant, un bâtiment patrimonial réhabilité… C’est tout à fait intéressant.

Je rappelle, en outre, que la nouvelle « délégation générale à la transmission, aux territoires et à la démocratie culturelle », dont la création a été saluée par beaucoup d’entre vous, permettra de renforcer les échanges et les partenariats avec toutes les collectivités territoriales.

Cette élaboration avec les communes, les structures intercommunales, les régions, mais aussi les départements, même si ces derniers sont un peu moins impliqués sur les questions patrimoniales, compte tenu de la répartition des compétences, me tient véritablement à cœur. À cet égard, l’existence de conseils territoriaux de la culture au niveau de chaque région me semble tout à fait fondamentale : ils permettront que nous marchions ensemble, que nous nous écoutions et que nous développions des politiques ayant de mutuels effets de levier.

C’est la raison pour laquelle j’ai réuni – en visioconférence, étant donné le contexte – les représentants des grandes associations d’élus pour bâtir ces politiques, en coopération avec les collectivités et les élus territoriaux.

Pour l’heure, j’émets un avis défavorable sur l’amendement.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Georges Patient

L’amendement n° II-771, présenté par Mmes de La Provôté et Sollogoub, M. Lafon, Mme Billon, MM. Hingray, Kern, Laugier et Levi, Mme Morin-Desailly et les membres du groupe Union Centriste, est ainsi libellé :

I. – Créer le programme :

Petit patrimoine non-protégé

II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :

En euros

Debut de section - PermalienPhoto de Georges Patient

Programmes

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Patrimoines

Création

Transmission des savoirs et démocratisation de la culture

dont t itre 2

Soutien aux politiques du ministère de la culture

dont t itre 2

Petit patrimoine non-protégé

TOTAL

SOLDE

La parole est à Mme Sonia de La Provôté.

Debut de section - PermalienPhoto de Sonia de La Provôté

Cet amendement vise à créer un programme dédié au patrimoine non protégé, grand oublié des politiques publiques et patrimoniales.

Il s’agit de ces églises dont on ne sait que faire et qui ne sont pas classées – soit que l’on n’ose en demander le classement, de peur de devoir assumer trop de charges, soit que l’on souhaite les remettre en état sans supporter trop de contraintes. Mais il s’agit aussi des granges dimières, des écoles, des gares, du patrimoine industriel, de tous ces bâtiments qui, au-delà de leur intérêt esthétique, sont partie prenante de l’histoire des communes et de nos territoires, offrant un témoignage du passé, parfois très lointain.

Ce patrimoine, certes bâti, appartient au paysage de nos territoires et fait toute la qualité de notre pays. Or il est souvent mal identifié, peu répertorié, sauf événement particulier – menace d’effondrement ou foudre qui frappe un calvaire, par exemple, comme je l’ai vu récemment dans mon département. Alors, on se rend compte de son importance et on se dit qu’il eût fallu faire quelque chose plus tôt, avant que ce patrimoine ne se dégrade de manière irrémédiable.

Cet amendement vise à proposer une action patrimoniale en faveur de ce patrimoine, qui participe du paysage et de notre culture patrimoniale et dont une partie, je le répète, mériterait d’être inscrite ou classée – on est souvent à la limite.

Nous voulons attirer l’attention sur la nécessité de le considérer comme partie prenante des politiques publiques patrimoniales de notre pays.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Rambaud

Cet amendement vise à déplacer 20 millions d’euros de crédits du programme « Patrimoines » vers un nouveau programme « Petit patrimoine non protégé ». Ce fonds serait financé par une diminution à parts égales des crédits des actions n° 01, Monuments historiques et patrimoine monumental, et n° 03, Patrimoine des musées de France.

L’intention de Mme de La Provôté rejoint les préoccupations que nous avons exprimées dans le rapport de Vincent Éblé quant au nécessaire soutien au patrimoine appartenant à des propriétaires privés.

La création d’un nouveau programme limite cependant la fongibilité des crédits entre diverses actions au sein du programme 175, qui pourrait également profiter au soutien du petit patrimoine.

Par ailleurs, le déplacement de 20 millions d’euros remettrait en cause l’augmentation des crédits en faveur des collectivités territoriales relevée dans notre rapport : 5 millions d’euros supplémentaires en faveur du Fonds incitatif et partenarial et 10 millions d’euros à destination des musées territoriaux.

Pour ces raisons, la commission sollicite le retrait de cet amendement.

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot

Je sais combien la Haute Assemblée est soucieuse du respect des responsabilités et des compétences des collectivités territoriales et de l’État, ce qui est bien normal d’ailleurs.

Or les crédits que l’État consacrait au patrimoine rural non protégé ont été transférés aux départements en 2004. Il est donc de la responsabilité des collectivités territoriales d’assurer la protection de ce patrimoine, et l’État n’a pas à participer au financement des travaux réalisés sur les immeubles non protégés. Aujourd’hui, on s’étonne, on s’indigne même parfois, que l’État ne participe plus, mais c’est la loi de 2004 !

Nonobstant cela, je suis extrêmement attentive aux 44 000 bâtiments et monuments qui structurent le paysage de nos communes et qui font de la France la première destination touristique du monde, en espérant du moins qu’elle le redevienne au terme de cette crise.

Sourires.

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot

Soucieux de ce patrimoine non protégé, nous avons créé des outils. Je pense à la Fondation du patrimoine, instituée en 1996, sur l’initiative du ministère de la culture, et qui bénéficie d’une fraction du produit des successions en déshérence. Elle a notamment pour mission de soutenir les projets de restauration de ce patrimoine non protégé.

Je pense également à la création du loto du patrimoine, avec des modalités de financement innovantes, dans le cadre de la mission confiée en 2017 à Stéphane Bern sur le patrimoine en péril. Ce dispositif permet là encore de soutenir les monuments en péril, classés ou non, sur l’ensemble du territoire. Le loto du patrimoine a permis de récolter entre 20 et 25 millions d’euros – nous pourrions peut-être obtenir encore plus en 2020, ce dont nous nous réjouissons – et 40 % des 119 monuments sélectionnés pour l’édition 2020 sont des immeubles non protégés.

L’État est donc déjà allé au-delà des compétences qu’il avait attribuées aux collectivités territoriales dans le cadre des lois de décentralisation de 2004, pour intervenir sur ce patrimoine, grâce à des outils spécifiques.

Pour ces raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Georges Patient

La parole est à M. Jean-Raymond Hugonet, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Raymond Hugonet

Je m’associe à l’esprit de l’amendement de ma collègue Sonia de La Provôté.

Comme vous l’avez souligné, madame la ministre, ces crédits ont été transférés aux départements. Néanmoins, il s’agit toujours d’un sujet de préoccupation dans nos territoires. La question de la protection de ce patrimoine pose problème dans presque toutes les communes de petite taille, confrontées, comme les départements, à une profusion de demandes. C’est la raison pour laquelle je tenais à m’associer à cet amendement.

J’en profite pour rebondir sur les propos de Mme la ministre, qui, en professionnelle accomplie qu’elle est, a reconnu la sagesse du Sénat. Il ne s’agissait pas, et vous l’avez parfaitement compris, de supprimer tous les crédits du dispositif pass culture, mais seulement les 20 millions d’euros de bonus de cette année.

Dans sa sagesse, le Sénat a tout de même souhaité conserver 40 millions d’euros pour maintenir cette expérimentation, qui tourne quelque peu en rond, et la laisser progresser gentiment jusqu’en 2022… Nous verrons ensuite ce qu’il en adviendra.

Toujours est-il que le Sénat n’a pas tué dans l’œuf le pass culture, mais limité l’exagération des crédits pour cette année ô combien particulière.

Debut de section - PermalienPhoto de Georges Patient

La parole est à Mme Nadia Sollogoub, pour explication de vote.

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot

Mme Roselyne Bachelot, ministre. Excellent département : j’y suis née !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Nadia Sollogoub

… et toutes les petites communes que je visite me font part de trois préoccupations principales : les zones blanches, l’accès aux soins et la réparation des églises. Telles sont leurs trois priorités, madame la ministre – parmi beaucoup d’autres problèmes, bien évidemment…

La France compte près de 36 000 communes et donc autant de clochers. Il faut toutefois en soustraire un dans mon département, puisque la commune d’Asnan a dû se résoudre à détruire son église, malgré le combat très courageux de sa maire, faute d’avoir trouvé à temps les financements nécessaires. C’est une épouvantable tragédie pour n’importe quelle commune.

Concrètement, quand il faut faire réparer une église, on monte d’abord un dossier au titre de la dotation d’équipement des territoires ruraux, la DETR, pour obtenir une subvention d’environ 40 %. On se tourne ensuite vers la Fondation du patrimoine pour « gratter » quelques fonds. Le département, quant à lui, nous explique en général qu’il ne peut rien faire, car il y a plus de 300 communes dans la Nièvre. Enfin, quelques communautés de communes donnent un petit coup de pouce, mais le financement n’est jamais bouclé.

Madame la ministre, il faut donc absolument mettre en place un fonds spécifique, qui permette d’organiser des cofinancements.

L ’ amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Georges Patient

L’amendement n° II-899 n’est pas soutenu.

Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Culture », figurant à l’état B.

Je n’ai été saisi d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.

Je mets aux voix ces crédits, modifiés.

Les crédits sont adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Georges Patient

Nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Culture ».

Debut de section - PermalienPhoto de Georges Patient

M. Jean Bizet a fait connaître à la présidence qu’il se démettait de son mandat de sénateur de la Manche à compter du 30 novembre 2020, à minuit.

En application de l’article L.O. 320 du code électoral, il est remplacé par Mme Valérie Blondet, dont le mandat de sénatrice a commencé aujourd’hui, 1er décembre, à zéro heure.

En notre nom à tous, je souhaite la plus cordiale bienvenue à notre nouvelle collègue.

Debut de section - PermalienPhoto de Georges Patient

Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, mardi 1er décembre 2020 :

À neuf heures trente :

Trente-cinq questions orales.

À quatorze heures trente et le soir :

Suite du projet de loi de finances pour 2021, adopté par l’Assemblée nationale (texte n° 137, 2020-2021) ;

Mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales » ;

Compte spécial : « Développement agricole et rural » ;

Mission « Cohésion des territoires » ; article 54 bis et 54 ter.

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

La séance est levée le mardi 1 er décembre 2020, à zéro heure dix.