Intervention de Marie-France Beaufils

Réunion du 3 décembre 2005 à 23h00
Loi de finances pour 2006 — Remboursements et degrevements

Photo de Marie-France BeaufilsMarie-France Beaufils, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la mission « Remboursements et dégrèvements » est, de par son volume, la mission la plus importante du budget général de l'État. Elle regroupe, en effet, pour 2006, 68, 4 milliards d'euros de crédits, soit plus, notamment, que la mission « Enseignement scolaire », qui représente, elle, 59, 7 milliards d'euros de crédits.

Cette mission est composée de deux programmes, inégalement dotés : le programme « Remboursements et dégrèvements d'impôts d'État », dans lequel sont inscrits 55 milliards d'euros de crédits, et le programme « Remboursements et dégrèvements d'impôts locaux », qui, lui, s'élève à 13, 3 milliards d'euros pour 2006.

La commission des finances du Sénat s'interroge sur la raison d'être de cette mission, qui retrace des dépenses résultant de divers textes, notamment législatifs, qui participent de politiques publiques différentes. Ces dépenses, comme telles, présentent donc un caractère essentiellement hétéroclite.

Dans son rapport d'information relatif à la mise en oeuvre de la LOLF, paru en 2005, la commission des finances du Sénat avait jugé nécessaire de ventiler entre les différentes missions concernées les crédits de cette mission, afin d'accroître la lisibilité des dépenses de l'État.

Le Gouvernement avait alors justifié son refus de procéder à une semblable ventilation par finalité en invoquant deux arguments. D'une part, cette opération n'aurait pas été possible du point de vue technique, pour le projet de budget pour 2006 ; d'autre part, il ne souhaitait pas la coexistence, au sein d'une même mission, de crédits limitatifs et de crédits évaluatifs.

La commission des finances s'interroge toujours sur la pertinence de ces arguments. Elle estime que, pour le prochain projet de loi de finances initiale, rien ne paraît sérieusement s'opposer à une ventilation par finalité entre les différentes missions du budget de l'État des remboursements et dégrèvements d'impôts nationaux ou locaux.

De plus, pour s'en tenir à l'existant, il est frappant de constater que la plus lourde mission du budget fasse l'objet d'une stratégie de performances des plus sommaires.

Tout d'abord, les indicateurs actuels ne permettent pas d'évaluer de manière satisfaisante dans quelle mesure on a atteint l'objectif unique associé à la mission, objectif qui consiste à « permettre aux usagers de bénéficier de leurs droits le plus rapidement possible ». Par exemple, dans le cadre du programme relatif aux impôts locaux, le seul indicateur porte sur le « taux de réclamations contentieuses relatives à la taxe d'habitation traitées dans le délai d'un mois ». En ne concernant que la taxe d'habitation, cet indicateur ne couvre que 20 % du programme environ !

Par ailleurs, l'objectif unique de « permettre aux usagers de bénéficier de leurs droits le plus rapidement possible » n'est pas, à l'évidence, suffisant. En effet, aucun indicateur ne permet de mesurer la performance des dégrèvements et des remboursements législatifs.

Une autre anomalie, et non la moindre, réside dans le fait que le « bleu » budgétaire indique que « le premier objectif » de chacun des programmes « consiste à permettre progressivement l'identification précise et complète des dégrèvements et des remboursements concernés [...], grâce à la mise en oeuvre des systèmes d'information futurs ». Ce faisant, la présentation des programmes fixe un « objectif » qui, paradoxalement, ne figure pas parmi ceux qui sont associés aux programmes eux-mêmes.

Madame la ministre, je tiens à insister de nouveau sur la nécessité de remettre les remboursements et les dégrèvements au sein des missions auxquelles ils sont rattachés. En effet, apprécier l'intérêt ou non des décisions législatives nécessite une évaluation de l'intérêt ou non des décisions fiscales qui donnent lieu à ces dégrèvements ou à ces remboursements.

Nous attendons de savoir quelles améliorations seront apportées sur les différents points que je viens d'aborder, et je souhaiterais attirer votre attention sur les risques que posent des remboursements trop automatiques ou trop rapides, qui ne seraient pas fondés sur une vérification suffisante des impôts les justifiant.

La commission des finances vous fixe en quelque sorte rendez-vous pour l'examen du projet de loi de règlement, en espérant que nous aurons des réponses dans ce domaine.

Sous réserve de ces observations, la commission des finances, à la majorité, vous recommande, mes chers collègues, l'adoption de la mission « Remboursements et dégrèvements ».

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