Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la mission « Stratégie économique et pilotage des finances publiques » affiche des objectifs ambitieux puisqu'elle concerne les moyens consacrés à la « mise en oeuvre de la politique économique et financière du pays ». En réalité, sur les 865 millions d'euros affectés à cette mission pour 2006, plus de la moitié portent sur les dépenses de personnel, les dépenses de fonctionnement s'élevant quant à elles à 369 millions d'euros.
Tout en précisant d'emblée que la commission des affaires économiques a donné un avis favorable à l'adoption des crédits de cette mission, je souhaiterais faire plusieurs observations.
Tout d'abord, j'ai un premier sujet d'étonnement. En dépit du rôle moteur que devrait jouer le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie dans la mise en oeuvre de la LOLF, sa performance, comme vient de le souligner M. le rapporteur spécial en faisant référence aux réponses au questionnaire budgétaire, s'est avérée cette année désastreuse, puisque le 10 octobre, délai limite fixé par la loi, six réponses seulement sur soixante-sept nous étaient parvenues. Ce retard est très regrettable, car pour la première année de mise en oeuvre de cette importante réforme budgétaire, il était particulièrement important que les parlementaires puissent disposer d'une information de qualité, délivrée dans les temps.
En second lieu, je m'étonne du rattachement, inédit à ce jour, de la réforme de l'État au ministère du budget. M. Jean-François Copé, ministre délégué au budget et à la réforme de l'État, a ainsi justifié ce rattachement : « Ce n'est pas le ministère qui absorbe la réforme de l'État, mais la réforme de l'État qui absorbe le ministère. »
Pour ma part, ce rattachement ne me paraît pas constituer une solution efficace pour parvenir aux objectifs visés, c'est-à-dire une réelle modernisation de l'action de l'État. En effet, l'autorité chargée de la réforme doit disposer d'une compétence interministérielle affirmée pour inciter l'ensemble des ministères à se réformer. Un très récent rapport du Commissariat général du Plan partage cette analyse, puisqu'il préconise qu'un ministre, qui serait rattaché au Premier ministre, s'y consacre à part entière. A rebours de ces préconisations, le rattachement de la réforme de l'État au ministère de l'économie enferme la modernisation de l'État dans des considérations purement budgétaires, ce qui ne crée pas les conditions de sa réussite.
De même, la volonté de réformer à moyens constants n'est pas à mes yeux de nature à permettre la réussite de l'entreprise. Le rapport précité, qui a étudié des exemples locaux, très concrets, de mise en oeuvre réussie de réformes, montre ainsi que réformer exige des moyens budgétaires permettant d'accompagner le changement, par exemple pour faciliter le reclassement ou une nouvelle implantation géographique des agents. En conséquence, vouloir réformer à coût constant, c'est prendre le risque d'un échec.
Du reste, c'est ce qu'ont exprimé de manière très forte cette semaine les fonctionnaires du ministère de l'économie à l'occasion de leur manifestation. Ils ont voulu adresser une mise en garde sur les conséquences de la réforme qui, sous couvert de productivité et de rentabilité, porte atteinte en réalité à la qualité du service public de l'impôt.
En troisième lieu, je ferai une observation sur l'amélioration de l'administration en ligne, l'un des objectifs du programme, qui est effectivement intéressant. Celui-ci est accompagné d'indicateurs très généraux alors qu'il serait opportun de disposer en la matière d'éléments plus précis sur les publics touchés. L'usage d'Internet reste en effet très marqué sociologiquement et, pour progresser, l'administration électronique doit aller vers des publics qui lui sont moins acquis et tenter de réduire la fracture numérique dont souffre la France. Dès lors, il convient de diversifier les lieux d'utilisation d'Internet afin qu'il puisse devenir un mode essentiel de relation avec l'administration.
Enfin, ma dernière observation concerne le programme relatif aux crédits de l'INSEE. La commission des affaires économiques a tenu à saluer les efforts de rationalisation menés par l'institut, qui visent à réaliser des gains de productivité. Pour ce qui me concerne, je ne peux que déplorer que la recherche de ces gains de productivité s'accompagne de la suppression de cent douze emplois budgétaires en 2006. Cette réduction est le signe d'une contradiction flagrante entre les objectifs affichés d'un service public de qualité et des réductions importantes d'effectifs. Cette insuffisance est d'autant plus regrettable que les missions de l'INSEE, en raison notamment de la décentralisation, étant appelées à s'élargir, celui-ci à besoin d'une meilleure visibilité en région par rapport à d'autres institutions.
Sur tous ces points, je vous remercie, madame la ministre, de nous apporter des éclaircissements, et je rappelle que la commission des affaires économiques a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Stratégie économique et pilotage des finances publiques ».