Intervention de Jean Bizet

Réunion du 28 novembre 2020 à 14h30
Loi de finances pour 2021 — Investissements d'avenir

Photo de Jean BizetJean Bizet :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le budget pour 2021 concernant les investissements d’avenir est caractérisé par deux éléments saillants : la poursuite du PIA 3 dans le contexte de la crise sanitaire, et le lancement d’un PIA 4 en soutien au plan de relance.

Je ne m’étendrai pas sur le PIA 3, si ce n’est pour saluer la souplesse dont cet outil a fait montre cette année. En effet, le secrétariat général pour l’investissement, le SGPI, a mobilisé plus de 1, 5 milliard d’euros pour soutenir financièrement les entreprises en difficulté ou encore renforcer les moyens dévolus à la recherche en santé.

Les programmes d’investissements d’avenir (PIA) ont permis d’apporter des réponses concrètes, ciblées et rapides aux défis posés par la crise sanitaire. La capacité de réaction du SGPI et des opérateurs mérite donc d’être saluée.

En 2021, certaines de ces initiatives devraient se poursuivre. Je pense, notamment, à la création d’une enveloppe d’investissement consacrée à la souveraineté technologique, intitulée « French Tech Souveraineté », et dotée de 100 millions d’euros dans le PLF pour 2021.

La crise a en effet souligné l’importance d’un renforcement de l’autonomie de notre pays dans le domaine des technologies d’avenir, ce qui m’amène à mon second point, à savoir le lancement d’un quatrième PIA.

Je tiens à rappeler, en préambule, qu’il avait été décidé de lancer ce programme avant l’émergence de la covid-19. Il va de soi, cependant, que la crise que nous traversons a fait émerger de nouvelles priorités.

Le PIA 4 est doté de 20 milliards d’euros et structuré en deux volets, qui répondent à des finalités distinctes.

Un premier volet, dit « dirigé », vise à financer des investissements exceptionnels, à hauteur de 12, 5 milliards d’euros.

Un second volet, dit « structurel », doit garantir, grâce à des dotations en capital, un financement pérenne aux écosystèmes d’enseignement supérieur, de recherche et d’innovation mis en place par le PIA, à hauteur de 7, 5 milliards d’euros.

Je ne m’étendrai pas sur les modalités de budgétisation et de gouvernance de ce PIA, qui sont sensiblement identiques à celles du PIA 3 et dérogent tout autant aux grands principes budgétaires.

Plusieurs aménagements sont néanmoins apportés à cette gouvernance, pour mettre en œuvre les recommandations du comité de surveillance des investissements d’avenir.

L’article 55, rattaché à la mission, détaille ces modifications : il s’agit, notamment, de la création d’un conseil interministériel de l’innovation pour décider des priorités de la politique d’innovation, du renforcement du rôle du comité de surveillance des investissements d’avenir et de la formalisation d’une doctrine d’investissement pour les investissements d’avenir.

Ces évolutions sont bienvenues ; elles contribueront à renforcer la cohérence et l’efficacité des investissements d’avenir.

Je voudrais enfin relever l’existence de plusieurs pierres d’achoppement dans ce quatrième programme.

Le lancement d’un nouveau programme semble augurer d’une pérennisation des investissements d’avenir. La prorogation de ces dispositifs dérogatoires aux règles budgétaires n’est pas problématique en tant que telle, tant que le Parlement demeure à même de suivre et de contrôler l’emploi des crédits qui sont votés.

Or il me semble que la maquette budgétaire qui nous est présentée risque d’aggraver le déficit de lisibilité dont souffrent les PIA, et ce pour deux raisons.

Tout d’abord, la liste des secteurs stratégiques qui bénéficieront d’un soutien dans le cadre du volet dirigé du PIA n’est pas encore arrêtée. Nous sommes donc appelés à voter des crédits sans savoir à quels secteurs ou filières ils seront destinés. Madame la ministre, si je comprends pleinement la logique qui sous-tend cette présentation, j’espère que vous nous exposerez dans les mois qui viennent les stratégies d’accélération qui seront retenues.

Je regrette, en parallèle, que deux programmes d’investissement d’avenir coexistent au sein de la mission.

Le suivi des montants inscrits dans le PIA 3 se révélait déjà particulièrement complexe, avec la double comptabilité induite par le circuit de la dépense, la dispersion des crédits, l’ampleur des redéploiements en cours de gestion… Avec ce nouveau PIA 4, qui financera les mêmes structures que le PIA, notre tâche risque de devenir encore plus ardue.

Pour terminer, je souhaiterais évoquer l’articulation entre les PIA et le plan de relance. En effet, le PIA 4 doit abonder le plan de relance à hauteur de 11 milliards d’euros sur les trois ans à venir.

À mes yeux, une clarification s’impose : les PIA constituent non pas un outil de relance, mais d’investissements à long terme afin de renforcer la croissance potentielle.

En pratique, le décaissement des crédits du PIA peut être particulièrement long : trois ans après le lancement du PIA 3, si 4, 7 milliards d’euros de crédits de paiement ont été consommés, seuls 750 millions d’euros ont été décaissés.

Par conséquent, madame la ministre, il me semble très ambitieux de considérer que les 11 milliards d’euros du PIA 4 pourront irriguer à très court terme le tissu économique français.

En dépit de ces quelques réserves, je vous propose d’adopter sans modification, mes chers collègues, les crédits de la mission.

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