Séance en hémicycle du 28 novembre 2020 à 14h30

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

  • PIA
  • administrative
  • hausse

La séance

Source

La séance, suspendue à treize heures cinq, est reprise à quatorze heures trente-cinq, sous la présidence de M. Roger Karoutchi.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour un rappel au règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, vous n’ignorez pas l’émotion qu’ont suscitée certains événements récents, dans notre pays ; le Président de la République a lui-même parlé de « honte » devant certaines images. Vous n’ignorez pas non plus l’émotion qu’a causée l’annonce, par M. le Premier ministre, de la création d’une commission constituée de personnes nommées – j’ai bien dit « nommées » – pour traiter de l’article 24 d’une proposition de loi adoptée à l’Assemblée nationale.

À cet égard, vous l’aurez remarqué, tant M. le président du Sénat que M. le président de l’Assemblée nationale ont marqué leur vive opposition à un tel procédé. Mes chers collègues, nous ne pouvons accepter d’être dépossédés de la prérogative qui nous échoit en vertu de la Constitution : l’élaboration et le vote de la loi.

En conséquence, monsieur le président, je souhaiterais que vous fissiez part de l’émotion ressentie par le groupe socialiste et républicain, que je représente, devant cet événement, et de l’accord total de ce dernier avec la demande de mettre fin à l’idée de cette commission, d’autant que, si celle-ci avait été initialement instaurée en vue de travailler sur l’article 24 et d’en proposer une nouvelle rédaction, il a été dans un second temps indiqué par le Premier ministre que tel n’était plus le cas et que cette commission traiterait d’autres sujets connexes, annexes ou subséquents. On n’y comprend donc plus rien. Cela n’est ni clair ni acceptable.

Par ailleurs, puisque vous êtes parmi nous cet après-midi, monsieur le ministre chargé des relations avec le Parlement, nous avons pris note de votre déclaration, tout à fait conforme à la Constitution, selon laquelle c’est le Parlement qui fait la loi. Vous aurez donc à cœur, je pense, de faire en sorte qu’il soit mis fin, purement et simplement, à cette mauvaise initiative qui consiste à créer une commission se substituant au Parlement, quels que soient, par ailleurs, la compétence, le talent et les convictions des personnes qui la composeraient.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Acte vous est donné de ce rappel au règlement, mon cher collègue.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Nous reprenons la discussion du projet de loi de finances pour 2021, adopté par l’Assemblée nationale.

Nous poursuivons l’examen, au sein de la seconde partie du projet de loi de finances, des différentes missions.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Le Sénat va examiner les crédits des missions « Pouvoirs publics », « Conseil et contrôle de l’État » (et article 54 quater), « Direction de l’action du Gouvernement » et du budget annexe « Publications officielles et information administrative ».

La parole est à M. le rapporteur spécial.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Michel Arnaud

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, vous le savez, la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) prévoit qu’une mission spécifique regroupe les crédits alloués sous forme de dotations aux pouvoirs publics, dont le juge constitutionnel a rappelé le principe d’autonomie financière, qui relève de la séparation des pouvoirs.

Ce budget est relativement constant depuis 2012, puisqu’il tourne autour de 1 milliard d’euros pour l’ensemble des institutions de la République. Par rapport à 2020, le montant total de la mission est même en légère diminution.

Avec 105, 3 millions d’euros, la dotation demandée pour la présidence de la République est quasi identique à celle de 2020, après une hausse constatée entre 2019 et 2020.

La mise en œuvre du schéma pluriannuel de stratégie immobilière se poursuit. Ce programme, estimé à près de 52 millions d’euros, est financé grâce à des crédits pris sur le budget de la présidence, à la restitution à l’État de l’une de ses emprises immobilières et à un financement en provenance du ministère de la culture. Je regrette, à la suite de mon prédécesseur Jérôme Bascher, que ces financements extérieurs ne permettent pas d’appréhender la totalité des crédits dont dispose la présidence de la République et que devrait refléter la dotation.

En revanche, nous pouvons nous féliciter des efforts financiers importants maintenus par la présidence de la République pour veiller à la sécurité informatique et physique des locaux, ainsi qu’à la sécurité physique de la personne du chef de l’État, face à une menace de plus en plus présente.

De même, d’un point de vue interne, la réorganisation des services de l’Élysée, achevée en 2019, semble commencer à produire ses effets.

Enfin, pour ce qui concerne l’exécution 2020, la crise sanitaire que nous traversons a conduit à une baisse des déplacements présidentiels, dont les crédits ont été réorientés pour financer des dépenses sanitaires et d’investissement. Malgré cela, l’exercice 2020 devrait être légèrement excédentaire.

En ce qui concerne les dotations des assemblées parlementaires, elles sont stables, puisque gelées depuis 2012. Pour ce qui concerne la Haute Assemblée, ce gel avait été estimé en 2020, à 388 millions d’euros, soit une somme supérieure à une année de dotation. Malgré une baisse des dépenses en 2021, la stabilité de la dotation conduit les assemblées à prévoir un nouvel important prélèvement sur trésorerie, qui permet de financer les dépenses d’entretien et d’investissement immobilier nécessaires au bon déroulement du travail parlementaire et à la préservation du patrimoine historique.

Toutefois, comme mes prédécesseurs, j’appelle votre attention sur ce recours croissant aux réserves. Ces dernières vont s’amenuiser au fil des années, ce qui pose inévitablement la question de la soutenabilité de ce modèle à long terme.

Le budget des chaînes parlementaires est stable. Il s’agit toutefois d’un sujet auquel je souhaite m’intéresser dans les prochains mois, en lien avec nos autorités et avec l’Assemblée nationale, car je sais l’importance de l’autonomie de chaque chambre en la matière.

Je terminerai cette présentation par quelques observations sur le budget du Conseil constitutionnel et de la Cour de justice de la République. Le budget du Conseil constitutionnel est relativement stable si l’on tient compte de la non-reconduction, cette année, du budget exceptionnel qui lui avait été affecté, en 2020, pour le contrôle de la première procédure de référendum d’initiative partagée relatif au fameux dossier d’Aéroports de Paris.

Je salue la volonté du Conseil constitutionnel de mettre en place, dès 2021, en lien avec les juridictions, un véritable suivi de la question prioritaire de constitutionnalité, qui prend une importance significative, puisqu’elle représente désormais près de 80 % de son activité.

Enfin, la dotation de la Cour de justice de la République est identique à celle de l’an passé, avec 871 500 euros, alors que son activité est et sera, en 2021, largement affectée, comme nombre d’institutions, par la crise sanitaire que nous connaissons. En effet, au 12 novembre 2020, le nombre de plaintes était en augmentation, avec un total de 178 plaintes, dont 113 sont en rapport avec la covid. Pour 2021, cette hausse d’activité devrait se traduire par une augmentation des frais de justice, qui devrait néanmoins pouvoir être financée par un report des crédits de 2020. Il faudra toutefois demeurer vigilant quant aux frais éventuels générés par ce regain d’activité.

Eu égard à l’ensemble de ces observations, la commission des finances s’est prononcée pour l’adoption de ces crédits.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Bilhac

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de loi de finances pour 2021 prévoit un budget de 718, 7 millions d’euros pour la mission « Conseil et contrôle de l’État », en hausse de 1, 9 %. Cette augmentation bénéficiera, pour près de 90 % – 19, 5 millions d’euros –, au programme « Conseil d’État et autres juridictions administratives ».

Les juridictions administratives font face à une hausse considérable des recours. Depuis près de cinquante ans, cette hausse atteint plus de 5 % en moyenne annuelle et l’on observe une augmentation de 110 % au total sur les vingt dernières années.

De même, la Cour nationale du droit d’asile (CNDA) a enregistré en 2019 le nombre de recours le plus important depuis sa création, avec 59 091 entrées enregistrées ; cela représente une augmentation de 40 % par rapport à 2018. Pis encore, la crise sanitaire a entraîné un nouvel allongement des délais de jugement, alors que ces derniers sont déjà supérieurs de près d’un mois aux délais inscrits dans la loi du 29 juillet 2015 relative à la réforme du droit d’asile. C’est pourquoi le renforcement du budget de la CNDA est indispensable.

J’insiste toutefois sur le fait que celui des autres juridictions administratives ne doit pas être oublié.

Grâce à un important travail de réforme, le délai prévisible moyen de jugement devant les tribunaux administratifs a été divisé par deux en vingt ans, il convient de le souligner. Néanmoins, cette dynamique vertueuse pourrait être interrompue par l’augmentation du contentieux. C’est pourquoi nous devons maintenir une vigilance particulière sur les délais de jugement des juridictions administratives au cours des prochaines années.

Les crédits demandés pour la justice administrative augmentent de 2 %, sauf ceux qui sont accordés à la Cour nationale du droit d’asile. Cette évolution permettra de créer, en 2021, 29 emplois autorisés, destinés, d’une part, au renforcement des tribunaux administratifs, d’autre part, à la nouvelle cour administrative d’appel de Toulouse. Là encore, cette évolution me paraît non seulement souhaitable, mais encore nécessaire.

Je serai plus bref sur les crédits des autres programmes, qui, dans l’ensemble, évoluent peu par rapport à 2020.

Le budget du Conseil économique social et environnemental (CESE) est stable en 2021, malgré le réel accroissement de son activité. Le CESE a bénéficié d’une augmentation de 10 % de ses crédits en 2020, afin d’organiser la Convention citoyenne pour le climat. En intégrant les moyens mobilisés par le CESE, le coût de l’organisation de cette convention s’est élevé à 6, 3 millions d’euros, le budget initial étant de 4, 2 millions d’euros. Vous le savez, l’activité du CESE devrait également être renforcée en 2021, selon le projet de loi organique relatif au Conseil économique, social et environnemental que nous avons récemment examiné, en première lecture.

Je conclus mon intervention par les crédits de la Cour des comptes et autres juridictions financières. Le budget des juridictions financières demeure quasiment stable en 2021 – on observe une légère augmentation de 0, 3 % par rapport à 2020 –, malgré la création de 10 emplois supplémentaires, sur un total de 1 700 agents.

Enfin, les crédits du programme 340 « Haut Conseil des finances publiques » augmentent de 213 % du fait du recrutement de cinq économistes supplémentaires. Même s’il convient de replacer ces chiffres dans leur contexte budgétaire, puisqu’ils ne portent que sur 0, 2 % de l’ensemble des crédits de la mission, l’Assemblée nationale a adopté, en première lecture, un amendement ayant recueilli un avis favorable du Gouvernement tendant à limiter l’augmentation du plafond d’emplois du Haut Conseil des finances publiques. Ce plafond est porté à cinq, soit deux équivalents temps plein (ETP) supplémentaires sur les cinq qui sont demandés. La hausse des crédits du programme 340 serait ainsi contenue à 130 %.

Selon moi, cette réduction devrait permettre au Haut Conseil de bénéficier de moyens supplémentaires tout en restant dans des limites raisonnables, eu égard au contexte actuel des finances publiques.

Mes chers collègues, j’en ai terminé avec la présentation des crédits de cette mission, que je vous invite à adopter avec les modifications apportées par l’Assemblée nationale.

Applaudissements sur les travées du groupe du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Paul Toussaint Parigi

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la mission « Direction de l’action du Gouvernement » est l’une des rares missions budgétaires à ne pas être affectée par la crise sanitaire et économique que connaît notre pays. À périmètre constant, cette mission bénéficie d’une hausse modérée de 3 % de ses crédits de paiement, soit 21 millions d’euros, par rapport au précédent projet de loi de finances.

Cette hausse reflète les deux priorités stratégiques de la mission, qui font l’objet de moyens renforcés que nous saluons.

La première priorité est le renforcement de la coordination interministérielle en matière de sécurité et de défense. L’actualité ne cesse d’en démontrer l’importance, en matière tant de lutte contre le terrorisme que de gestion de crise. L’action afférente, qui comprend notamment le budget du secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale (SGDSN), voit ainsi ses crédits augmentés de 9 millions d’euros. Cette hausse permettra notamment d’accompagner la montée en puissance de l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information (Anssi), dont les effectifs seront renforcés de 40 agents à équivalent temps plein.

La seconde priorité concerne la protection des droits et des libertés. Le budget qui nous est présenté prévoit ainsi le renforcement de plusieurs autorités administratives indépendantes exerçant leurs missions dans ce domaine, en particulier la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) et le Défenseur des droits.

Ces dernières années, le législateur a étendu plusieurs fois le champ de compétences de ces autorités, qui ont connu une hausse considérable de leur activité. Le nombre de plaintes adressées à la CNIL a ainsi doublé en trois ans, tandis que le nombre de saisines du Défenseur des droits a augmenté de 50 % en cinq ans. Pour accompagner cette hausse, ces deux autorités indépendantes bénéficieront, en 2021, d’un renforcement bienvenu de leurs effectifs, à hauteur, respectivement, de 20 ETP et de 5 ETP.

Si ces nouvelles dépenses nous semblent justifiées, deux autres points ont en revanche retenu notre attention, pour ce qui concerne la lisibilité budgétaire de la mission.

D’une part, certaines dépenses des services du Premier ministre, considérées comme exceptionnelles en 2020, n’ont pas été budgétées dans les crédits de la mission pour 2021, alors même qu’elles seront vraisemblablement reconduites. Il s’agit notamment des dépenses de communication du Gouvernement sur la crise sanitaire, qui s’élevaient à un total de 17 millions d’euros au 30 septembre 2020. Cette démarche consistant à occulter ces dépenses pour l’année 2021 a suscité des interrogations au sein de la commission des finances.

D’autre part, certaines dépenses courantes des services du Premier ministre sont, quant à elles, présentées comme des dépenses exceptionnelles et figurent à ce titre dans le plan de relance, pour un montant total de plus de 500 millions d’euros. Il s’agit, par exemple, de dépenses destinées à renforcer la sécurité numérique de l’État ou à moderniser les postes de travail des agents publics. La majeure partie de ces dépenses ne présente, semble-t-il, qu’un lien ténu avec la relance économique du pays et aurait donc pu figurer dans les crédits de la mission « Direction de l’action du Gouvernement ».

Je terminerai mon propos par quelques mots sur le budget annexe « Publications officielles et information administrative », qui connaît une forte baisse de ses recettes en raison du ralentissement de l’activité économique. Pour l’année 2021, les recettes du budget annexe s’élèveront ainsi à 159 millions d’euros, traduisant une baisse de 39 millions d’euros par rapport aux recettes perçues en 2019.

Malgré ces prévisions en baisse, ce budget annexe pourrait dégager en 2021 un léger excédent, évalué à 6, 7 millions d’euros et rendu possible par une nouvelle réduction des dépenses de personnel et de fonctionnement. Si cette érosion des recettes venait à se poursuivre, le modèle économique du budget annexe pourrait toutefois être durablement remis en cause.

Telles sont, mes chers collègues, les différentes observations que je pouvais formuler au nom de la commission des finances. Au regard de ces éléments, celle-ci a décidé de proposer au Sénat d’adopter sans modification les crédits de la mission « Direction de l’action du Gouvernement » et ceux du budget annexe « Publications officielles et information administrative ».

Debut de section - PermalienPhoto de Olivier Cadic

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, avec l’évolution technologique et la généralisation du numérique, la menace cyber ne cesse de se développer. La cybercriminalité s’est beaucoup professionnalisée et progresse à grande échelle grâce à des « rançongiciels » de plus en plus performants. Les organismes publics et les opérateurs critiques, comme les hôpitaux, ne sont désormais plus épargnés et l’on voit se multiplier les attaques contre les collectivités territoriales, qui commencent tout juste à prendre la mesure du problème.

Cela dit, les autres formes de cybermenaces, comme l’espionnage et les piratages, qui ciblent particulièrement les institutions et administrations publiques, progressent également. Il faut nous préparer aux cyberconflits de demain, qui sont déjà une réalité, sans bien sûr oublier les opérations de désinformation transitant sur les réseaux, qui cherchent à déstabiliser les démocraties, voire à déclencher des actes terroristes.

Face à cette menace cyber protéiforme, l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information (Anssi) joue un rôle essentiel depuis dix ans. Sa montée en puissance a permis de renforcer la protection de l’État et des opérateurs critiques, mais elle a aussi contribué à la prise en compte du risque numérique par les opérateurs privés et par les particuliers.

Ainsi, l’Agence participe notamment au groupement d’intérêt public Action contre la cybermalveillance (Acyma), qui mène des actions tout à fait essentielles de sensibilisation, de prévention et d’assistance aux victimes d’actes de cybermalveillance. À cet égard, je vous recommande la plateforme www.cybermalveillance.gouv.fr. ; vous y apprendrez les « gestes barrières » numériques, par exemple pourquoi et comment bien gérer ses mises à jour. En 2021, l’essaimage de l’Anssi au pôle cyber de Rennes et au campus cyber d’un immeuble de La Défense sera une contribution significative à la construction d’un écosystème français de la cybersécurité.

La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées se félicite des progrès considérables accomplis ces dernières années sous l’égide de l’Anssi. C’est en grande partie grâce à elle que, en matière de cybersécurité, la France fait partie des pays du premier cercle.

Nous tenons toutefois à formuler deux recommandations.

Malgré les avancées, les administrations publiques restent, dans l’ensemble, insuffisamment réceptives au risque cyber et ne prennent vraiment en compte celui-ci qu’après la survenue d’un problème majeur. Il est donc tout fait urgent d’appliquer la politique de sécurité des systèmes d’information de l’État, récemment refondue. En effet, celle-ci conforte le pilotage de l’Anssi sur les administrations et permettra, nous l’espérons, d’améliorer la diffusion des mesures préventives.

Par ailleurs, nous recommandons d’accélérer la désignation des opérateurs de services essentiels afin d’étendre l’application de normes de cybersécurité à des activités ou fonctions qui, sans être critiques, sont pourtant essentielles à la vie de la Nation ; on perçoit bien, en ce moment, la différence… La recrudescence actuelle des cyberattaques plaide en ce sens ; il s’agit bel et bien d’une course de vitesse.

L’augmentation des crédits soumis à notre examen est le signe que cet enjeu important est bien pris en compte par le Gouvernement. La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées s’est donc prononcée favorablement à leur adoption.

M. Alain Richard applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

M. le président. Je rappelle à tous les orateurs que je n’accorde pas 20 % de TVA supplémentaire en plus du temps imparti…

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Trois minutes, c’est trop peu, monsieur le président !

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Ce n’est pas moi qui fixe les règles, monsieur Sueur, et elles sont acceptées par tous.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Il faudrait alors les revoir, monsieur le président !

Debut de section - PermalienPhoto de Mickaël Vallet

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, mon propos, complémentaire à celui de mon collègue Olivier Cadic, porte plus précisément sur la sécurité des réseaux mobiles de cinquième génération (5G).

La commercialisation des offres 5G vient de démarrer et la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a souhaité saisir l’occasion offerte par ce débat budgétaire pour faire le point sur l’application de la loi du 1er août 2019 sur la sécurité des réseaux mobiles. Cette loi confie à l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information, dont nous examinons aujourd’hui les moyens budgétaires, le soin de délivrer aux opérateurs de télécoms les autorisations d’utiliser des équipements destinés à constituer leurs réseaux.

Via les objets connectés, les réseaux de téléphonie mobile conditionnent le fonctionnement de notre économie et de notre vie quotidienne, ce qui est d’autant plus vrai en période de crise sanitaire. Ils doivent donc être tout à fait sûrs et protégés des interruptions de service.

Un tel risque existe lorsque les équipements proviennent d’une entreprise étrangère soumise aux lois de son pays et aux éventuelles pressions de ses gouvernants. L’hypothèse d’un acte offensif étranger qui emprunterait ce canal est une menace majeure pour la sécurité de la Nation et doit être prise en compte.

Par cette loi, la France a fait le choix de ne pas exclure a priori un fournisseur en particulier, pour tenir compte de l’équilibre nécessaire du marché et de la situation des opérateurs de télécoms qui ne recourent pas tous aux mêmes fournisseurs.

Dans le courant de l’année 2020, quelque 157 demandes ont été déposées auprès de l’Anssi concernant près de 65 000 équipements. Néanmoins, 22 de ces demandes ont fait l’objet d’un refus. En pratique, et pour plus de clarté, toutes les décisions de refus et toutes les autorisations de durée plus réduite que la durée demandée, ont concerné l’équipementier chinois Huawei.

L’application du régime d’autorisation apparaît donc bien conforme à l’objectif de réduction des risques de sécurité inhérents au développement de la technologie 5G.

L’Anssi, dont on peut se réjouir de voir les moyens augmenter, a parfaitement respecté le calendrier d’examen et n’a pas pénalisé les opérateurs, motif d’inquiétude exprimé auparavant.

Pour la commission des affaires étrangères et de la défense, le bilan est donc positif. Elle en prend acte et suivra attentivement les développements ultérieurs de ce dossier.

Elle souhaite également insister sur la mise en place, à l’échelle européenne, d’une approche commune des risques de sécurité induits par la 5G. À cet égard, la France n’a pas démérité, la loi du 1er août 2019 étant une bonne loi produisant de bons effets, tout comme l’Anssi qui a fait montre d’efficacité. Il serait dommage que, par manque de coordination au sein des États européens, se créent des failles par où se glisseraient des gens mal intentionnés.

La commission des affaires étrangères et de la défense émet donc un avis favorable à l’adoption des crédits de ce programme.

Applaudissements sur les travées du groupe SER.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

M. le président. La parole est à Mme Catherine Deroche, au nom de la commission des affaires sociales.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Deroche

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je m’exprime donc au nom de Brigitte Micouleau, rapporteure pour avis.

Chaque année, l’examen des crédits de la Mission interministérielle chargée de l’élaboration et du pilotage de la politique gouvernementale de lutte contre les drogues et les conduites addictives (Mildeca) nous donne l’occasion de faire un point sur les addictions dans notre pays.

Dans un premier temps, la crise sanitaire n’a pas majoré les consommations de substances addictives, mais l’épidémie de covid-19, la crise économique et les angoisses qu’elles provoquent doivent nous inciter à redoubler de vigilance face aux risques de nouvelles addictions chez nos concitoyens les plus fragiles. Le tabac et l’alcool demeurent, en dépit de la diminution globale des usages, des tueurs en série responsables, respectivement, de 75 000 et 41 000 décès annuels. Il demeure nécessaire de faire reculer, par tous moyens, l’âge du premier usage.

En matière de drogues illicites, la politique de réduction des risques et des dommages doit pouvoir s’appuyer, dans l’année à venir, et avant la fin de l’expérimentation, sur l’ouverture de nouvelles salles de consommation à moindre risque.

Enfin, il nous faut combattre le mésusage de certains produits, comme le protoxyde d’azote, l’acide gamma-hydroxybutyrique (GHB) ou la kétamine, dont les effets peuvent s’avérer dramatiques.

Pour la treizième année consécutive, le budget de la Mildeca est en baisse, atteignant désormais la moitié de son niveau de 2009. Cette baisse est, toutefois, à mettre en perspective avec la mise en place du Fonds national de lutte contre les addictions qui favorise une coopération étroite entre les acteurs institutionnels engagés dans la lutte contre les conduites addictives. Doté de 115 millions d’euros et abondé, à partir de cette année, par les recettes liées à l’amende forfaitaire pour usage de substance illicite, le fonds garantit une plus grande efficacité de l’action publique.

La Mildeca s’assure, par sa participation à ces instances de décision, de la cohérence entre les opérations de marketing social, programmées chaque année par Santé publique France, les dépenses de prévention de l’assurance maladie et les priorités gouvernementales de la politique de lutte contre les drogues et les conduites addictives.

Se fondant sur ce constat, la commission des affaires sociales a émis un avis favorable à l’adoption des crédits de la Mildeca.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.

Applaudissements sur les travées du groupe SER.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je dois d’abord, s’agissant du budget de la Présidence de la République, informer le Sénat des conditions particulières dans lesquelles le rapporteur pour avis de la commission des lois a été conduit à rédiger son rapport.

En effet, monsieur le ministre, pour la deuxième année consécutive, M. le directeur de cabinet du Président de la République a refusé de me recevoir.

Mme Nathalie Goulet s ’ exclame.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Je répète ce que j’ai dit l’année dernière : il s’agit d’une attitude peu républicaine, d’autant plus que le même directeur de cabinet avait reçu longuement le même rapporteur en 2017 et 2018 pour parler du même budget.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Je tenais à en informer le Sénat.

En réalité, monsieur le ministre, il ne s’agit pas exactement du même budget, parce que celui de cette année connaît une diminution de 0, 02 %. S’il faut souligner tout effort vertueux, il ne vous a pas échappé que, entre 2017 et 2020, nous sommes passés de 100 millions à un peu plus de 105 millions d’euros. À une grande augmentation succède donc une très faible diminution, que je salue néanmoins.

Permettez-moi de pointer le problème de la trésorerie, qui était de 17 millions d’euros en 2018. Je crains que les prélèvements successifs qu’elle subit n’amenuisent les réserves. Bien qu’un rapport de la Cour des comptes indique qu’elles sont aujourd’hui de 20 millions d’euros, je ne sais pas ce qu’il en est exactement, n’ayant pu interroger M. le directeur de cabinet.

Je soutiens fortement les efforts effectués dans ce budget, par la compression des dépenses de fonctionnement, pour la sécurité de l’Élysée et du Président de la République.

Mes chers collègues, il est clair que, dans la situation actuelle, très lourde en termes de menaces internationales pesant sur notre pays et la personne du chef de l’État, nous ne devons pas lésiner sur ces crédits de sécurité. Ceux-ci sont importants ; quand M. Strzoda me recevait, il me disait que le blindage d’une voiture coûte 800 000 euros. Ces efforts de sécurité, tant physique qu’informatique, sont absolument nécessaires.

Monsieur le président, permettez-moi d’aborder, ne serait-ce que succinctement, la question du Conseil constitutionnel. Notre rapport présente des considérations sur la question prioritaire de constitutionnalité (QPC) dont, après dix ans d’existence, le Conseil constitutionnel propose d’analyser de manière exhaustive l’ensemble du processus. Cette initiative me semble tout aussi pertinente que la proposition de réflexions sur l’application de l’article 11 de la Constitution qui a entraîné un surcroît de dépenses…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

… mais celles-ci vont connaître quelques réductions cette année, qui seront les bienvenues.

Pour toutes ces raisons, et pour satisfaire, monsieur le président, à votre vigilance sur le temps de parole, je conclus en disant que la commission des lois émet un avis favorable à l’adoption de ce budget de la mission « Pouvoirs publics ».

Applaudissements sur les travées du groupe SER.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Benarroche

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les juridictions administratives bénéficieraient, en 2021, d’une hausse de crédits de paiement de 2, 7 % et d’un schéma d’emploi en augmentation de 28 équivalents temps plein (ETP).

C’est un renfort bienvenu, mais qui reste modeste au regard de la hausse importante du nombre d’affaires que les juridictions administratives enregistrent depuis plusieurs années. En 2019, l’augmentation des requêtes déposées devant les tribunaux administratifs est de 8, 7 % et près de 6 % devant les cours administratives d’appel.

Parmi les contentieux traités par les juridictions administratives, le contentieux des étrangers a pris, au fil des ans, une place centrale. Il représente, en 2019, 51 % des affaires enregistrées dans les cours administratives d’appel et 41 % de celles enregistrées dans les tribunaux administratifs.

Dans ces conditions, le défi reste le même : comment faire face, sans dégrader ni la qualité des décisions ni les délais de jugement ?

Le Conseil d’État avance quelques pistes, notamment sur l’aide à la décision qu’il s’agirait de mieux mobiliser ou sur le développement de la médiation. Ces pistes ne semblent toutefois pas en mesure d’avoir des effets perceptibles en 2021 ni même à moyen terme.

Cette année encore, les performances des juridictions administratives reposeront avant toutes choses sur l’engagement individuel des personnels des juridictions administratives et sur leur sens du service public. Cette situation ne peut être pérenne et le programme 165 ne pourra pas échapper, selon moi, à un questionnement sur le renforcement des moyens humains et la revalorisation indemnitaire des personnels.

La Cour nationale du droit d’asile (CNDA) a atteint un pic historique, en 2019, en rendant 66 464 décisions. Les délais de jugement, qui avaient presque atteint l’objectif légal de cinq mois pour les formations collégiales en février 2020, à la veille du confinement, ont été fortement dégradés et sont désormais estimés à onze mois pour l’année 2020.

Il est donc important d’accompagner la reprise d’activité de la CNDA dont la commission soutient la demande de report à l’année 2021 de la vingtaine d’emplois qui n’ont pu être pourvus en 2020 en raison de la crise sanitaire. Il s’agit d’une mesure a minima.

Concernant le programme 164, « Cour des comptes et autres juridictions financières », les moyens prévus par le PLF pour 2021 seraient stables avec un schéma d’emploi prévoyant la création de 10 équivalents temps plein, dont 5 pour renforcer les fonctions de contrôle.

Compte tenu de l’extension du périmètre des compétences des juridictions financières, la stabilité des moyens humains entraîne de facto une nécessaire et toujours plus forte priorisation des contrôles des comptes et de la gestion. Or la baisse d’intensité des contrôles est une vraie question qui peut, à terme, entraîner une érosion de la confiance des citoyens envers leurs décideurs publics.

Dans le cadre du chantier de réflexions stratégiques des juridictions financières « JF 2025 » lancé par le nouveau Premier président de la Cour des comptes, M. Moscovici, il me semble important de dégager, d’ores et déjà, quelques lignes de force. Il convient de conserver l’indépendance de programmation des chambres régionales et territoriales des comptes (CRTC) et de maintenir les missions traditionnelles qu’elles exercent auprès des collectivités territoriales, etc.

En conclusion, pour une meilleure lisibilité des crédits alloués, il semble utile qu’une ventilation des crédits soit opérée entre la Cour des comptes et les CRTC, à l’instar de ce qui est fait dans le programme 165 entre le Conseil d’État, les cours administratives d’appel et les tribunaux administratifs.

Malgré les réserves exprimées sur certains points, la commission des lois a rendu un avis favorable sur l’adoption des crédits des programmes 164 et 165.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

La parole est à M. Jean-Yves Leconte, rapporteur pour avis.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Leconte

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la commission des lois émet, concernant les crédits de la mission « Direction de l’action du Gouvernement », du budget annexe « Publications officielles et information administrative » et du nouveau programme 359, « Présidence française du Conseil de l’Union européenne en 2022 », un « oui, mais ».

« Oui », car c’est la première année, depuis 2017, que nous n’avons pas à tirer la sonnette d’alarme sur la situation de la cybersécurité, des crédits de l’Anssi, des moyens du Groupement interministériel de contrôle (GIC), ainsi que sur les moyens des autorités administratives indépendantes et l’augmentation de leurs compétences.

« Mais », car nous devons noter une certaine absence de sincérité et de cohérence pour un certain nombre de propositions. Nous observons ainsi le manque de sincérité quant au fait que 130 ETP mis à disposition du secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale (SGDSN) ne sont pas inclus dans ce programme, mais pris en charge par le programme 212, ce qui permet de mieux respecter la trajectoire de la loi de programmation militaire.

Deuxième insincérité : le Gouvernement, nous semble-t-il, considère le plan de relance comme un supermarché où les administrations font leurs courses. Ainsi, 136 millions d’euros devant figurer au titre du programme 129 pour la sécurité numérique se trouvent dans la mission « Plan de relance », tout comme 398 millions d’euros de modernisation des postes de travail des agents de l’État. Cela rendra difficile à suivre, année après année, l’évolution des dépenses des missions que nous étudions.

Dernière incohérence, on nous avait annoncé la suppression de petites structures, au nom d’une certaine simplification et rationalisation. Parmi elles, la Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (Miviludes) est passée, en particulier, au ministère de l’intérieur, malgré les inquiétudes de la représentation nationale. Nous constatons pourtant la création d’un Haut Conseil pour le climat, dont on se demande à quoi il sert face au Conseil économique, social et environnemental ou au Haut-Commissariat au plan.

La pandémie a conduit à une accélération de la révolution numérique, mais aussi à plus de vulnérabilité, compte tenu de la manière assez improvisée avec laquelle nous nous sommes tous mis aux visioconférences. C’est la raison pour laquelle il est absolument indispensable de soutenir l’évolution des crédits de l’Anssi.

Saluons également la direction de l’information légale et administrative (DILA) qui, malgré des baisses de moyens, a mis en place un nouveau site Légifrance, très critiqué, mais qui apportera peut-être de nouvelles fonctionnalités. Faisons attention à ce que ces plateformes ne perdent pas en utilité.

Monsieur le ministre, où en est-on de la fusion entre le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) et la Haute Autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur internet (Hadopi) ? Nous avions, d’ailleurs, voté un allongement de la mission des membres de Hadopi. Que se passera-t-il après 2021 ?

Qu’adviendra-t-il de la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement (CNCTR), petit collège réactif, mais fortement touché par la pandémie ?

Nous saluons les nouvelles personnalités nommées Défenseure des droits et Contrôleure générale des lieux de privation de liberté tout en regrettant que pendant trois mois, ce dernier poste n’ait pas été pourvu.

S’agissant de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL), nous notons des moyens supplémentaires qui nous semblent, néanmoins, insuffisants. La CNIL est submergée de plaintes, alors que son rôle serait de veiller à un certain nombre d’enjeux majeurs, en particulier l’intelligence artificielle, sujet de préoccupation en termes de collecte et de gestion de données.

Ce budget fait mieux que d’habitude, mais nécessite des efforts de sincérité. Ses programmes ont besoin de moyens et, compte tenu des enjeux, devront les voir augmenter les prochaines années.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque unité de discussion comprend le temps de l’intervention générale et celui de l’explication de vote.

Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Franck Menonville.

Debut de section - PermalienPhoto de Franck Menonville

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, cette discussion budgétaire réunit trois missions qui, sans être les plus volumineuses de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2021, revêtent une importance singulière.

D’une grande diversité, ces crédits sont tous indispensables au bon fonctionnement de notre État de droit. Ils visent à garantir aux pouvoirs publics, aux organes chargés de leur contrôle ainsi qu’aux autorités indépendantes qui s’assurent du respect d’un certain nombre de libertés individuelles, les moyens nécessaires à leur action.

Permettez-moi de saluer et de souligner le renforcement des moyens alloués à l’Agence nationale de sécurité des systèmes d’information. Une partie des crédits sera consacrée au financement de l’installation d’un site à Rennes, afin de constituer un pôle de compétence en matière de cyberdéfense. Cette nouvelle antenne permettra d’accueillir 200 agents. Je me félicite de l’ouverture de ces crédits indispensables pour notre stratégie en matière de cyberdéfense, enjeu ô combien essentiel en ces temps.

En ce qui concerne le budget des juridictions administratives, les crédits de personnel sont en hausse pour les juridictions de premier ressort, d’appel et de cassation. Cela mérite d’être souligné, car, en raison de la crise sanitaire, les indicateurs du délai moyen de jugement des affaires et la proportion de celles en attente se sont notablement détériorés. Il en sera, sans aucun doute, de même au début de l’année 2021.

Je souhaite donc saluer le renforcement des effectifs dans les juridictions administratives, puisque 28 ETP supplémentaires viendront grossir leurs rangs. Quant aux juridictions financières, elles gagneront 5 ETP, ce qui permettra, notamment, de préparer le mandat de de la Cour des comptes en tant que certificateur des comptes de l’ONU pour la période 2022-2028. En effet, la Cour des comptes et les juridictions financières ont moins souffert des conséquences de la crise sanitaire, puisque leurs modes de fonctionnement sont davantage dématérialisés.

Leurs crédits sont en légère progression, notamment sous l’effet de schémas d’emploi positifs. Cette augmentation conduira à 10 recrutements supplémentaires en 2021, hausse qui s’inscrit dans la tendance de l’année passée.

Concernant le CESE, son budget se stabilise à l’approche d’une réforme majeure. La réduction du nombre de membres du CESE permettra une baisse des dépenses liées aux indemnités des conseillers économiques permettant de dégager des moyens qui seront absolument nécessaires pour mettre en œuvre ses nouvelles prérogatives, notamment en matière de participation citoyenne.

Pour ces raisons, le groupe Les Indépendants votera les crédits de ces trois missions.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Richard

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’ensemble des crédits que nous examinons cet après-midi me permet d’intervenir sur plusieurs questions qui concernent le cœur de l’État, le système de commandement et de pilotage de nos fonctions publiques. L’inconvénient évident est une certaine dispersion, qui nous oblige à ne parler que de quelques thèmes parmi l’ensemble de ceux que l’on pourrait aborder.

La mission du secrétariat général du Gouvernement est, entre autres, de préparer les textes normatifs, tant ceux qui s’appliquent directement sous forme réglementaire que ceux à caractère législatif qui sont, par la suite, débattus par les deux assemblées.

L’obligation de l’étude d’impact des projets de loi, introduite par la révision constitutionnelle de 2008, est un progrès dont tout le monde convient. En même temps, des critiques permanentes, mais toujours de bonne foi, s’élèvent quant à la manière dont est effectué ce portrait d’ensemble d’un projet de loi.

Se pose, de manière principielle, la question de savoir si c’est au département ministériel qui porte le projet de faire l’étude d’impact, ce qui est sa mission, ou s’il faut faire appel à des compétences extérieures.

Il me semble que le moment est venu de poser méthodiquement cette question, dans le cadre d’un dialogue entre le Gouvernement et le Parlement. Chaque ministère n’a pas la force de travail ni les équipes permanentes aptes à produire une étude d’impact globale, et forcément pluraliste, sur chaque sujet abordé. Je crois que, à cet égard, l’ouverture à des collaborations extérieures, évidemment objectives et indépendantes, est un sujet sur lequel nous devrions travailler.

Les autorités administratives indépendantes, du point de vue de leur gestion, méritent un témoignage de satisfaction. Les regroupements qui pouvaient être faits l’ont été. Reste le sujet de la gestion des ressources humaines, puisque chaque autorité administrative indépendante est un employeur public distinct. Or la plupart d’entre elles, sauf la CNIL, constituent des employeurs de petite taille.

Il me semble que la synergie entre la direction de la fonction publique, au niveau central, et les autorités administratives indépendantes pourrait être améliorée dans le sens d’une continuité de carrière. On observe effectivement que les autorités administratives indépendantes présentent, du fait de leur taille et de leur spécialisation, un problème d’attractivité qu’elles ont tendance à traiter par une certaine inflation des rémunérations.

En ce qui concerne l’ensemble des organismes qui concourent à la sécurité nationale, je veux souligner que l’Anssi a rendu de très grands services et produit un niveau de cybersécurité tout à fait adapté à nos besoins. Elle n’est toutefois pas exempte de ce même défi de ressources humaines : elle doit attirer des agents publics de très haut niveau en matière de maîtrise des systèmes numériques, secteur faisant l’objet d’une intense compétition sur le marché du travail.

Tout en observant la réserve qui s’impose à moi concernant les juridictions administratives, j’approuve complètement le rapport qui vient d’être présenté par Guy Benarroche. L’inflation du nombre des dossiers dont sont saisies les juridictions est en grande partie liée au contentieux des étrangers, lequel a fait l’objet d’adjonctions et de modifications de procédure, souvent un peu improvisées au cours des dernières années. Un rapport du Conseil d’État préconise un certain nombre de clarifications et de réductions des superpositions de contentieux. Il me semble utile de lui donner suite rapidement, par exemple par voie d’ordonnance.

Nous approuvons donc l’ensemble de ces crédits.

Debut de section - PermalienPhoto de Fabien Gay

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les priorités budgétaires du Gouvernement, au travers de ces missions et de leurs différents programmes, sont révélatrices des orientations de sa politique.

Je formulerai trois remarques.

Premièrement, le tout sécuritaire est affiché tel quel dans les priorités où la sécurité figure en pole position. C’est sans doute justifiable pour ce qui est du renforcement des moyens du GIC ou de l’Anssi et de la création à venir d’une antenne à Rennes. Mais c’est sous cette injonction du tout sécuritaire que la Miviludes a été transférée au ministère de l’intérieur. Nous continuons à penser que cette décision est regrettable.

Il va de soi que cette mission interministérielle relève, par essence, de bien d’autres problématiques que celles de la prévention de la délinquance et de la radicalisation. Nous pensons notamment aux domaines de l’éducation ou de la santé.

Le nombre de décès liés à l’alcool ou au tabac, ainsi que celui des consommateurs de substances psychoactives et de nouveaux produits tels que la kétamine ou le protoxyde d’azote, continue d’être très important. En outre, les confinements et la crise que nous vivons ont tendance à augmenter ces conduites addictives.

Enfin, la création du fonds de lutte contre les addictions géré par l’assurance maladie ne nous rassure pas quant à l’avenir de la Mildeca et au défaussement du Gouvernement en la matière. Cet organisme subit une nouvelle baisse de ses crédits pour la treizième année consécutive, qui réduit à peau de chagrin ses moyens.

Deuxièmement, s’agissant de la mission « Conseil et contrôle de l’État », nous déplorons le traitement réservé par le Gouvernement à la Cour nationale du droit d’asile. Depuis trois ans, nous rappelons qu’il ne peut y avoir de République sans politique humaniste du droit d’asile, qui passe par un accueil digne et sécurisé des réfugiés dans notre pays.

Or, dans la série des ordonnances prises dans le cadre de la crise sanitaire, celle du 13 mai dernier prévoit que, pendant la période d’état d’urgence sanitaire, la Cour peut statuer sur tous les dossiers en audience à juge unique et avec un recours accru à la vidéo-audience. Cela nous inquiète fortement.

Même si le Gouvernement a été désavoué par le Conseil d’État, nous savons qu’il entend poursuivre sa politique comptable en la matière. Cette volonté ne sera pas sans conséquence sur le nombre de reports de procédures et sur l’explosion à venir des dossiers à traiter par la CNDA.

Troisièmement, en matière de conseil et contrôle de l’État également, je ne peux m’empêcher de revenir sur la convention citoyenne.

Après la crise des « gilets jaunes », le Président de la République a demandé à des citoyens tirés au sort, de travailler pour formuler des propositions ambitieuses sur le climat, avant de les recevoir à l’Élysée pour annoncer qu’il s’engageait à faire passer en conseil de défense écologique ou à soumettre au Parlement toutes leurs propositions. Cela ne l’a pas empêché d’en élaguer quelques-unes, notamment la taxe de 4 % sur les dividendes…

Les mois qui ont suivi ont prouvé l’inverse, laissant place à l’immobilisme, voire à certains reculs sur les propositions. Après avoir étouffé la soif d’égalité républicaine des quartiers populaires par l’enterrement en première classe du plan Borloo, le cri de la justice sociale et fiscale des « gilets jaunes » avec le grand débat national, qui n’aura débouché sur rien, …

Debut de section - PermalienPhoto de Fabien Gay

… vous vous apprêtez, monsieur le ministre, à faire de même en dénaturant les propositions de justice climatique de la Convention citoyenne. C’est vrai qu’il est compliqué pour un gouvernement de reconnaître le crime d’écocide alors que, en même temps, il réintroduit les néonicotinoïdes !

Ce déni de démocratie

Mme Sophie Primas s ’ exclame.

Debut de section - PermalienPhoto de Fabien Gay

Toutes ces questions, mais surtout les orientations choisies par le Gouvernement dans la gestion de ses politiques publiques, nous conduisent à voter contre les budgets de ces trois missions.

Applaudissements sur les travées du groupe GEST. – M. Mickaël Vallet applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

M. le président. La parole est à Mme Isabelle Briquet.

Applaudissements sur les travées du groupe SER.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Briquet

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je vais m’attacher à faire quelques remarques sur les missions « Direction de l’action du Gouvernement » et « Conseil et contrôle de l’État ».

Tout d’abord, la mission « Direction de l’action du Gouvernement » connaît une nouvelle fois une modification de son périmètre d’action, avec la création d’un nouveau programme dont l’objet est de financer la présidence française du Conseil de l’Union européenne en 2022, avec un engagement financier important dès 2021.

Dans la continuité des budgets précédents, on note un renforcement des moyens dévolus à la lutte contre le terrorisme, aux moyens des services de renseignement et à la coordination des services de sécurité et de défense nationale. Ainsi, nous tenons à saluer la hausse des moyens alloués à l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information.

Il convient par ailleurs de saluer les efforts consentis en matière de recrutement dans les différentes organisations publiques, notamment la CNIL, la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique ainsi que le Défenseur des droits. Ces instances jouant un rôle majeur de protection des libertés dans notre système démocratique, l’augmentation de leurs moyens est la bienvenue.

Cela étant, nous pouvons nous interroger sur la sincérité budgétaire des crédits attribués au service d’information du Gouvernement. En effet, les crédits prévus pour 2020 sont reconduits à l’identique pour 2021, alors même qu’ils ont été largement dépassés cette année.

Par ailleurs, alors que l’on parle toujours de simplification, force est de constater que l’on s’y perd un peu entre les actions qui passent d’un ministère à l’autre.

À ce propos, je souhaite répéter les regrets que nous inspire le transfert de la Miviludes au ministère de l’intérieur. Cet organisme, dont les moyens ont été réduits, risque de perdre sa spécificité au profit des moyens dévolus à la lutte contre la radicalisation.

En ce qui concerne la mission « Conseil et contrôle de l’État », il me paraît important de souligner la nécessité de recourir à des moyens humains adaptés afin d’assurer la qualité du travail des juridictions administratives.

Si l’on peut se satisfaire de la hausse des crédits de paiement, malgré une baisse importante des autorisations d’engagement, ces crédits permettront essentiellement de mettre en œuvre les projets immobiliers des juridictions administratives et, dans une moindre mesure, de renforcer leurs effectifs pour faire face à l’augmentation du contentieux dans les tribunaux administratifs.

Même s’ils tendent à diminuer depuis 2002, les délais de jugement restent la préoccupation majeure des juridictions administratives. En 2021, du fait de l’état d’urgence sanitaire, les délais de jugement vont se dégrader. Cette situation a des conséquences particulièrement dramatiques, notamment pour les justiciables de la Cour nationale du droit d’asile.

En effet, celle-ci n’a pas pu effectuer les recrutements nécessaires à son activité. À cet égard, une augmentation plus importante des autorisations d’engagement et des crédits de paiement aurait été appréciable. Au vu du contexte international que nous connaissons, qui a un impact sur le nombre de demandeurs d’asile, la réduction des délais de recours et l’accélération des procédures devant la CNDA entraînent une surcharge de travail et ne permettent pas un accompagnement correct des personnes. Nous devons être particulièrement vigilants, afin que l’État de droit ne puisse être remis en cause.

L’année 2021 devrait être marquée par la mise en place de la réforme du Conseil économique, social et environnemental, adoptée au mois d’octobre 2020 et dont les décrets d’application devront être publiés avant le 1er juin 2021.

Rappelons que le CESE est la troisième assemblée de la République. Il est à l’origine de nombreux projets. Il a notamment été chargé d’organiser la Convention citoyenne pour le climat.

La réforme envisagée vise à faire du CESE une instance consultative de premier ordre. Elle prévoit notamment la possibilité d’organiser des consultations publiques et de rendre des avis sur la mise en œuvre de lois traitant de sujets économiques, sociaux et environnementaux, sur demande du Gouvernement ou du Parlement, ainsi que la faculté d’associer à ses travaux des conseils consultatifs de collectivités locales, des composantes de la société civile et des personnes tirées au sort.

Bien que cette réforme prévoie la réduction du nombre de membres du CESE, il est surprenant que le budget alloué soit stable par rapport à 2020.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Briquet

En effet, le renforcement de ses missions implique un accroissement significatif de la charge de travail et nécessiterait donc des moyens plus importants.

Il nous faut enfin relever, sur ces deux missions du PLF pour 2021 – comme sur d’autres, d’ailleurs –, un manque de clarté budgétaire : bien des actions qui relèvent de ces budgets se retrouvent, en fait, dans le plan de relance. Cela nuit grandement à la lisibilité des programmes, et donc à l’action publique.

Cependant, compte tenu des avancées constatées sur les crédits alloués à la mission « Direction de l’action du Gouvernement », nous les approuverons.

Comme la présentation de notre collègue rapporteur pour avis Jean-Pierre Sueur vous aura permis de le comprendre, mes chers collègues, nous voterons également les crédits alloués à la mission « Pouvoirs publics ».

En revanche, concernant la mission « Conseil et contrôle de l’État », nous considérons que la prise en compte des missions de la CNDA est insuffisante. Nous nous abstiendrons donc sur les crédits de cette dernière mission.

Applaudissements sur les travées du groupe SER.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

M. le président. La parole est à M. Jérôme Bascher.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Bascher

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, avec ces trois missions, nous touchons au cœur du fonctionnement de la République.

Les sujets sont tellement divers qu’il est difficile de tenir un discours à la fois complet et structuré. Pour ma part, je ferai cinq remarques.

Premièrement, je veux saluer le travail réalisé par le rapporteur spécial Jean-Michel Arnaud, qui a décidé de s’attaquer au sujet de l’audiovisuel, notamment du Sénat et de l’Assemblée nationale. Je sais que cela vous fera plaisir, monsieur le président, puisque vous vous souciez de la réforme générale de l’audiovisuel public. §Les chambres auront nécessairement elles aussi à se prononcer à un moment ou un autre.

Je veux féliciter le Gouvernement et l’Élysée de leurs efforts de transparence sur l’immobilier. Toutefois, transparence ne signifie pas consolidation. J’avais appelé, dans le rapport de la mission de contrôle, à une consolidation des crédits du ministère de la culture consacrés au palais présidentiel, comme l’Élysée a su le faire pour les forces de sécurité. J’aimerais que cette recommandation du Sénat, qui était aussi une recommandation de la Cour des comptes, soit suivie d’effets.

Deuxièmement, je veux dire que la sécurité informatique est essentielle aujourd’hui. Nous avons tous, dans cette assemblée, reçu des courriels avant le vote sur le Haut-Karabagh. Nous recevons tous aujourd’hui des courriels de l’Azerbaïdjan. Je rappelle que la dernière grande attaque informatique du Sénat a eu lieu au moment de la reconnaissance du génocide arménien. Ce sont des sujets majeurs.

Le Sénat avait recommandé d’augmenter les crédits de l’Anssi. Je vous félicite, monsieur le ministre, d’avoir suivi cette recommandation. L’Anssi réalise un travail remarquable. Il faut continuer à soutenir cette agence.

Troisièmement, je veux évoquer un sujet qui m’a été soufflé par Christine Lavarde et qu’Alain Richard a lui-même évoqué : l’engorgement des juridictions administratives lié au contentieux du droit d’asile, comparable à l’engorgement de nos juridictions judiciaires, aujourd’hui, par les délits routiers – ils représentent 50 % des affaires.

Le problème réside non pas dans ces budgets, mais bien dans nos politiques migratoires, les décisions rendues faisant par ailleurs l’objet d’appels systématiques. Certes, la crise liée à la covid-19 n’a pas arrangé la situation, mais il y a bien un problème de crédits dans la mission dont Sébastien Meurant est le rapporteur spécial et des sujets tenant à la politique d’immigration.

Quatrièmement, je veux évoquer le sujet du Conseil constitutionnel. Des crédits avaient été ajoutés pour feu le référendum d’initiative populaire sur la privatisation d’Aéroports de Paris. Il me semble que cette privatisation n’est plus totalement à l’ordre du jour ! Je ne comprends pas le maintien des crédits, puisqu’aucun référendum d’initiative populaire n’est prêt. C’est pour moi un mystère… Au reste, nous ne disposons pas de la possibilité d’amender sur ce point.

J’en viens, cinquièmement, au CESE.

Monsieur le ministre, vous avez consolidé les 4, 6 millions d’euros de la Convention citoyenne pour le climat. C’est fantastique ! Je rappelle que le Sénat comme l’Assemblée nationale n’ont pas vu leurs crédits augmenter depuis plus de dix ans. Dans le même temps, le CESE voit ses crédits augmenter pour une Convention citoyenne de gens choisis au hasard et qui n’existe plus… Admettez que cette hausse est un peu étrange !

J’entendais tout à l’heure ma collègue demander des crédits renforcés pour le cas où l’on mettrait sur pied davantage de conventions citoyennes. Quelle bizarrerie que de payer 4, 6 millions d’euros pour 149 propositions ! §Mes chers collègues, imaginez le budget qui serait le nôtre si nos propositions étaient rémunérées de la même manière… Monsieur le ministre, cette démocratie de la roulette et des experts n’est pas sérieuse.

J’en viens à la commission Burguburu, nouveau comité Théodule qui pourra dorénavant donner son nom à tout comité dont on ne sait pas bien à quoi il sert, comme Jean-Pierre Sueur l’a justement rappelé. Il écrit la loi sans en avoir reçu la mission. Il faut bien qu’il trouve des choses à dire : on ne peut pas dire qu’on l’a créé pour rien…

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Bascher

J’en arrive à ma conclusion.

Puisque nous débattons de la « direction de l’action du Gouvernement », je ferai remarquer que l’action de Jean Castex est parfaitement illustrée par les mots de Napoléon, qui a créé un certain nombre des institutions dont nous parlons cet après-midi : « En politique, une absurdité n’est pas un obstacle. » Monsieur le ministre, préférez la sagesse du Sénat !

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Benarroche

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je ne reviendrai pas sur les juridictions administratives et financières et ne m’attarderai pas non plus sur les programmes de la mission « Pouvoirs publics ». Je mettrai plutôt en exergue quelques points qui me paraissent révélateurs des priorités données par le Gouvernement dans sa conduite de l’État.

Les crédits alloués à la Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives se révèlent très insuffisants : l’action correspondante est la seule à ne pas bénéficier d’une augmentation de ses crédits sur l’année 2021.

Les budgets alloués au Défenseur des droits ainsi qu’au Contrôleur général des lieux de privation de liberté sont eux aussi insuffisants : ces deux institutions fondamentales pour le contrôle et la protection des libertés individuelles devraient bénéficier de conditions matérielles améliorées. Le Défenseur des droits a connu une augmentation de 40 % de ses saisines entre 2014 et 2020 et devrait être soutenu dans la nécessaire déconcentration de son activité et dans le renforcement de son réseau de délégués territoriaux. Notre groupe présentera deux amendements tendant à augmenter les moyens humains et matériels de ces deux institutions.

Et que dire de la façon de traiter l’urgence climatique ? Le jeune Haut Conseil pour le climat devrait être une instance utile dans ce cadre. Il a dénoncé, pas plus tard que mardi, le retard considérable de la France dans la rénovation énergétique des bâtiments.

Son budget, son fonctionnement, son indépendance doivent être reconsidérés. Son budget, pour l’instant, est famélique : il s’élève à 500 000 euros. Je vous invite, mes chers collègues, à le comparer, par exemple, à celui de l’Ordre national de la Légion d’honneur, qui se voit allouer 28 millions d’euros. Dans ces conditions, nous soutiendrons l’amendement de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable visant à augmenter le budget du Haut Conseil pour le climat.

Notons qu’un panorama de la mission « Direction de l’action du Gouvernement » permet de relever un recours excessif à de très nombreux contractuels, lesquels peuvent représenter, selon les missions, jusqu’à trois quarts des effectifs.

Si je m’attarde sur cette mission, c’est aussi pour souligner les difficultés que rencontre le Parlement dans le contrôle de l’exécutif, et parfois, j’ose le dire, dans celui de la sincérité du budget.

Je reste persuadé que l’attention doit être portée non seulement sur les fluctuations des montants alloués par le PLF, mais aussi sur les indicateurs permettant d’évaluer leur bon usage.

Par exemple, le taux d’application des lois promulguées depuis plus de six mois, qui est l’un des indicateurs présentés dans le programme 129, est relativement bon, mais il pourrait être un trompe-l’œil. Selon ce dernier, les mauvais élèves seraient les ministères chargés de la transition écologique, de l’éducation nationale et de la cohésion des territoires, soit trois ministères porteurs d’enjeux essentiels. Surtout, quelle est la valeur d’un tel indicateur si de nouvelles lois reviennent sur les avancées des précédentes, à l’instar de celle qui a réintroduit les néonicotinoïdes ? Et que dire de certains programmes, comme celle de la présidence française de l’Union européenne, qui ne sont pas pourvus d’indicateurs de contrôle des performances ?

Concernant le CESE, je partage ce qu’ont dit certains de mes collègues. Je prends acte que les crédits « permettront d’organiser une nouvelle Convention citoyenne ou d’associer la parole citoyenne », notamment par la mise en place de pétitions dématérialisées. Nous sommes favorables à l’allocation de crédits pour stimuler ces nouvelles formes d’expression, que nous estimons revitalisantes pour notre démocratie.

Toutefois, un doute m’envahit, non sur la pertinence de tels travaux, mais sur le manque de prise en compte et de mise en œuvre de leurs conclusions par votre gouvernement. Initialement, le Président de la République avait prévu de reprendre 146 des 149 propositions de la Convention citoyenne pour le climat. Nous en sommes très loin ! L’ambition écologiste et citoyenne que portent ces conventions est ainsi pervertie. Cette perversion pourrait délégitimer les budgets utilisés à cet effet, ainsi que quelques-uns de mes collègues l’ont déclaré.

Mon dernier point portera sur la Cour nationale du droit d’asile.

Nous avons salué qu’elle puisse, a minima, conserver les postes non pourvus de l’an dernier, mais mon groupe défendra un amendement pour aller plus loin. Notre demande se justifie également par les évolutions du droit d’asile et les conséquences des différentes crises climatiques à venir, entraînant, qu’on le veuille ou non, un afflux plus important de demandeurs dans les prochaines années.

Accueil des migrants, contrôle et protection des libertés individuelles, urgence climatique, prise en compte de la participation citoyenne… : tel est le panorama des chantiers jugés non prioritaires par le Gouvernement, au vu de ces budgets, malgré les menaces que l’urgence climatique et l’urgence sociale font peser sur notre pays.

Monsieur le ministre, le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires estime que vous n’affectez pas les crédits sur les priorités que constituent la protection des plus démunis et la sauvegarde de notre planète et de nos habitants. Pour toutes ces raisons, il ne votera pas les crédits de ces missions.

Applaudissements sur les travées du groupe GEST.

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Artano

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le contexte sanitaire et sécuritaire actuel nous appelle à porter une attention particulière aux crédits des missions budgétaires que nous nous apprêtons à examiner.

En effet, ayant pour vocation de financer une grande partie de notre structure institutionnelle, ces missions combinent à la fois des objectifs de bon fonctionnement de la justice, de contrôle de notre administration et de confiance en l’action publique.

Alors que l’obscurantisme nous met au défi, nous avons le devoir de défendre avec vigueur notre modèle de société, à la fois démocratique, ouverte, mais aussi inflexible avec l’intolérance. Par ailleurs, face à une crise sanitaire dont nous sommes loin d’être sortis, il faut toujours rappeler que la première cause de l’État est de protéger ses citoyens, notamment en garantissant le respect de l’ordre public dans sa dimension sanitaire.

Loin des fantasmes délirants des complotistes ou de l’absence de sens civique des plus irresponsables, nous devons, en tant que législateurs, donner aux pouvoirs publics comme aux organes chargés de leur contrôle tous les moyens nécessaires à leur bon fonctionnement.

La crise sanitaire a notamment conduit de nombreux fonctionnaires à travailler différemment, souvent à distance, en s’adaptant à ces nouvelles contraintes. Je tiens évidemment à saluer leur engagement et leurs efforts dans ce contexte difficile.

Au-delà de ces considérations liminaires, je souhaite profiter du temps qui m’est imparti pour insister sur certaines questions plus spécifiques.

Tout d’abord, il faut noter l’augmentation de 1, 95 % des crédits de la mission « Conseil et contrôle de l’État », permettant notamment la poursuite des efforts entrepris pour la modernisation des hautes instances administratives et financières.

Entre autres, le CESE va bénéficier d’une réforme importante, dont l’objectif est de mieux prendre en compte la parole citoyenne dans le débat public. Partisan, à titre personnel, de la démocratie participative, je ne peux qu’encourager cette réforme, dont nous parachèverons l’examen le 14 décembre prochain. Toutefois, la sous-représentativité des outre-mer, dont le nombre de représentants passerait de 11 à 8, m’inspire de l’inquiétude. Comment imaginer que le représentant de Saint-Pierre-et-Miquelon puisse s’exprimer au nom de la Guadeloupe ? Avec cet exemple, mes chers collègues, je veux vous faire prendre conscience que l’insularité doit évidemment être prise en compte. J’espère que le Sénat reviendra sur ce sujet.

La crise sanitaire a eu et continue d’avoir des conséquences importantes sur l’activité des juridictions administratives et financières. Les stocks et les délais de jugement se sont évidemment dégradés, alors que la juridiction administrative avait entrepris et réussi, depuis plusieurs années, une politique ambitieuse de modernisation de son organisation et de ses méthodes de travail. Malgré tout, je me félicite de la formidable capacité d’adaptation à une situation inédite dont la juridiction administrative a su faire preuve et note une évolution positive des crédits de paiement, qui augmentent de 2, 74 %.

Concernant la mission « Direction de l’action du Gouvernement », il faut se réjouir du renforcement des moyens alloués à l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information, dont une partie des crédits seront consacrés au financement de l’installation d’un site à Rennes, afin de constituer un pôle de compétences en matière de cyberdéfense. C’est une bonne nouvelle pour notre stratégie en matière de cyberdéfense, outil indispensable de la lutte que mène notre pays contre le terrorisme. Cela reflète également la prise de conscience que la criminalité s’est emparée de l’outil numérique pour rançonner ses victimes.

Nos concitoyens exigent à bon droit que leurs élus soient irréprochables, alors que toute crise sociale entraîne son lot d’antiparlementarisme et de populisme. Prenons donc garde non seulement à maintenir les exigences de probité, mais encore à faire savoir que nous le faisons. La crise du covid-19 a aussi eu un impact sur l’organisation des travaux parlementaires : nous avons dû nous adapter à de nouvelles méthodes de travail.

Je terminerai par une remarque sur la Miviludes. J’avais interpellé ici même le Gouvernement – c’est Laurent Nunez qui le représentait à l’époque – pour lui faire part de notre inquiétude face au risque d’un démantèlement de la Miviludes. C’est malheureusement ce qui s’est passé, avec un retour dans leur administration d’origine des plus grands spécialistes français de la lutte contre les dérives sectaires. Je crains par conséquent que nous n’ayons à constater, malgré la volonté du Gouvernement, un affaiblissement de l’action de l’État sur ce sujet.

Le groupe du RDSE votera néanmoins les crédits de cette mission.

Mme Évelyne Perrot applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Canevet

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le groupe Union Centriste apprécie tout particulièrement que l’exemplarité vienne du plus haut niveau, c’est-à-dire que les crédits de la mission « Pouvoirs publics » diminuent. En effet, nous sommes attachés à une bonne gestion des deniers publics et estimons qu’il est important que l’on montre l’exemple au sommet de l’État.

Je veux tout particulièrement souligner l’effort réalisé par le Parlement : l’Assemblée nationale et le Sénat voient leurs crédits stagner pour la dixième année consécutive. Le groupe Union Centriste tient vraiment à saluer l’important effort de gestion consenti par ces deux institutions. Je veux y insister.

Néanmoins, l’ensemble des institutions dont les crédits sont retracés dans cette mission sont affectataires d’un patrimoine historique extrêmement important. Le groupe Union Centriste est attaché à ce que celui-ci soit maintenu en très bon état. Les efforts d’investissements et de maintien en état du patrimoine doivent donc être poursuivis. Il importe qu’ils soient accompagnés d’une recherche d’efficacité thermique, qui est aujourd’hui un objectif de politique publique.

Pour ce qui concerne la mission « Conseil et contrôle de l’État », Jérôme Bascher a évoqué l’augmentation significative des recours des décisions rendues par la CNDA. Le groupe Union Centriste pense que ce n’est pas le seul motif de l’accroissement important de l’activité des juridictions administratives : je rappelle que le recours à ces dernières a augmenté de 20 % ces cinq dernières années hors contentieux lié à la CNDA. À notre sens, cette sollicitation tous azimuts des juridictions administratives justifie la prise de mesures pour réduire les possibilités de recours et l’engorgement de ces juridictions, parce qu’il est important que la justice puisse être rendue, dans notre pays, dans les délais les plus raisonnables possible.

On s’aperçoit aujourd’hui que les juridictions administratives ont entre trois et quatre fois plus de dossiers en stock que ce qu’elles sont capables de traiter dans le courant de l’année. C’est dire le retard pris et l’effort qui reste à réaliser pour que la justice soit rendue dans des délais plus raisonnables !

Peut-être faudra-t-il d’ailleurs envisager la réintroduction du droit de 100 euros qui existait auparavant pour accéder au tribunal administratif, de manière à éviter les recours abusifs qui engorgent nos juridictions, souvent pour des questions de forme et non de fond.

M. Jérôme Bascher applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Canevet

Ces recours empêchent que la justice puisse être rendue de façon sereine sur un certain nombre de sujets importants et mobilisateurs.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Canevet

S’agissant de la mission « Direction de l’action du Gouvernement », je tiens tout d’abord à saluer, monsieur le ministre, les efforts de rationalisation et d’optimisation qui sont réalisés depuis des années par la direction des services administratifs et financiers (DSAF) des services du Premier ministre et que j’ai pu constater par moi-même. Je pense que ces efforts permettent une efficience accrue. Il importe également qu’ils servent d’exemple pour l’ensemble des départements ministériels ; il convient que nous y soyons attentifs.

Certains orateurs ont parlé de l’importance de l’Anssi. Oui, dans un contexte d’accentuation de la cybercriminalité et des cyberattaques, il est nécessaire d’être encore plus vigilants sur le sujet. Pour l’heure, on observe que l’ensemble des départements ministériels ne sont pas encore « au top », monsieur le ministre. Les efforts doivent être maintenus pour que ceux qui ont du retard puissent le rattraper, car il n’y a rien de pire que ces cyberattaques. On sait bien aujourd’hui l’importance de l’outil informatique et de la digitalisation dans toutes nos pratiques institutionnelles. Une vigilance accrue est nécessaire sur le sujet, au risque de connaître des difficultés et même de remettre en cause le bon fonctionnement de nos institutions, ce qui serait particulièrement regrettable.

Cette mission regroupe aussi les crédits des autorités administratives indépendantes.

Le groupe Union Centriste apprécie l’effort budgétaire qui est réalisé en direction de la CNIL pour la doter de moyens supplémentaires, car on voit bien que le renforcement de la réglementation, notamment par lerèglement général sur la protection des données (RGPD), conduit à des saisines de plus en plus nombreuses. Comme pour les juridictions administratives, l’examen des dossiers dans des délais raisonnables nécessite des moyens. Nous apprécions tout à fait que ces derniers aient été prévus.

Pour conclure, je me félicite, monsieur le ministre, que, à l’instar de la DSAF, la direction de l’information légale et administrative (DILA) semble aussi réaliser des efforts de gestion depuis des années. Cela va dans le bon sens.

Applaudissements sur les travées du groupe UC.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laménie

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, quatre minutes, c’est très court pour aborder ces trois missions !

La mission « Pouvoirs publics », dotée de 993, 9 millions d’euros, la mission « Conseil et contrôle de l’État », avec 718 millions d’euros, et la mission « Direction de l’action du Gouvernement », avec 860 millions d’euros, se caractérisent par une relative stabilité.

Je salue les trois rapporteurs spéciaux de notre commission des finances et les six rapporteurs pour avis. Quatre commissions sont concernées : la commission des finances, la commission des lois, la commission des affaires étrangères et la commission des affaires sociales. Qu’il me soit permis de saluer ce travail collectif.

Au sein de la mission « Pouvoirs publics », la dotation accordée à la présidence de la République s’élève à 105, 3 millions d’euros, ce qui marque une stabilité.

S’agissant des assemblées parlementaires – vous savez, monsieur le ministre, que nous sommes très attachés au bicamérisme –, l’Assemblée nationale et ses 577 députés se voient allouer 517 millions d’euros, quand le Sénat et ses 348 sénateurs et sénatrices sont dotés de 323 millions d’euros.

Les crédits des chaînes parlementaires s’établissent à 34, 2 millions d’euros.

La dotation du Conseil constitutionnel se monte à 12 millions d’euros. Avec 77 personnes environ, le Conseil constitutionnel est, parmi les instances comparables au niveau européen, l’une des plus petites en effectifs. Je rappelle qu’il est chargé d’assurer le respect de la Constitution du 4 octobre 1958, dont un exemplaire original figure dans la salle des conférences du Sénat, via notamment les questions prioritaires de constitutionnalité (QPC).

Enfin, la Cour de justice de la République se voit doter de 871 500 euros.

Depuis près de dix ans, sous l’autorité du président Gérard Larcher, la dotation du Sénat est stable, comme celle de l’Assemblée nationale, à hauteur de 323, 5 millions d’euros.

Par ailleurs, le Sénat dispose d’un patrimoine important, notamment les vingt-deux hectares du jardin du Luxembourg et le musée du même nom. Il est nécessaire de faire connaître notre institution. Malheureusement, depuis le mois de mars dernier, en raison de la crise sanitaire, nous n’accueillons plus de groupes de visiteurs. Sénateur depuis 2007, j’ai pu mesurer combien il était important que nos concitoyens connaissent le fonctionnement de nos institutions.

Ce matin, nous discutions du budget de l’enseignement scolaire. Il me semble essentiel de continuer d’accueillir des visiteurs, toutes générations confondues : jeunes – collégiens, lycéens, membres des conseils municipaux des enfants… –, élus et non-élus, associations… L’histoire de notre institution est très riche, nous devons la faire connaître.

Eu égard à leur stabilité, le groupe Les Républicains, sous réserve de l’adoption de quelques amendements, votera l’ensemble des crédits de ces missions.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - Permalien
Marc Fesneau

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je voudrais tout d’abord vous remercier de vos différentes interventions et de la qualité du travail effectué par les rapporteurs spéciaux de la commission des finances, ainsi que par les rapporteurs pour avis, qui ont, comme chaque année, produit une analyse exigeante et précise des crédits sur lesquels le Sénat doit se prononcer aujourd’hui.

À titre liminaire, je rappellerai, comme certains l’ont déjà souligné, que la crise sanitaire a obligé l’ensemble des personnels relevant des missions que nous examinons à travailler différemment, souvent sous des contraintes difficiles, à distance, en s’adaptant dans l’urgence à des méthodes nouvelles. Je voudrais ici saluer leur engagement et les efforts qu’ils ont fournis pour assurer la continuité des missions importantes qui leur sont confiées.

Permettez-moi à présent d’entrer un peu plus dans le détail des crédits qui vous sont présentés et de répondre, dans la mesure du possible, à certaines de vos interrogations.

J’aborderai d’abord les crédits de la mission « Pouvoirs publics » qui demeurent stables, en légère baisse, comme cela a déjà été souligné, par rapport à l’exercice 2020.

Les crédits accordés à la présidence de la République font l’objet d’une analyse détaillée sur la base des questionnaires parlementaires de l’ensemble des rapporteurs et des entretiens avec les rapporteurs spéciaux, conformément à l’article 57 de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF).

Monsieur Sueur, on ne gagne jamais à la caricature, à la démagogie ou aux raccourcis en parlant de nos institutions…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Tout à fait, monsieur le ministre ! Je partage ce jugement et je n’ai fait que dire la vérité.

Debut de section - Permalien
Marc Fesneau

Je connais la rigueur intellectuelle de M. Sueur. Il sait très bien que la présidence de la République doit disposer de certains moyens et que l’augmentation des crédits est liée en partie à l’internalisation – c’est une question de sincérité budgétaire – d’un certain nombre de postes de personnels de sécurité pour un coût d’environ 2 millions d’euros.

Comme il l’a lui-même souligné, ces besoins découlent du nouveau dispositif de sécurité mis en place en raison du risque terroriste.

Debut de section - Permalien
Marc Fesneau

Par ailleurs, certains de ces investissements, qu’il convenait de mener à leur terme, avaient été programmés avant ce quinquennat. Il n’y a donc pas de dérapage des dépenses. Il s’agit seulement de contingences liées à des éléments que M. Sueur a lui-même décrits. Je tenais à le rappeler, car on gagne toujours à la transparence.

La dotation de la présidence de la République est stable en 2021 par rapport à 2020 et le prélèvement sur disponibilités, qui fait souvent l’objet de vos attentions, est en baisse pour atteindre 2, 5 millions d’euros.

Ces moyens illustrent les effets positifs de la réorganisation des services de la présidence, amorcée en 2019, qui commence à porter ses fruits, comme l’a rappelé votre rapporteur spécial Jean-Michel Arnaud.

Conformément aux recommandations de la Cour des comptes et avec le soutien financier de l’opérateur du patrimoine et des projets immobiliers de la culture (Oppic), la présidence de la République poursuit son programme d’investissement dans l’entretien et la valorisation de son parc immobilier. Il s’agit d’un impératif, comme l’a très justement souligné M. Canevet.

J’entends les critiques quant à la lisibilité du schéma de financement de ces opérations, mais c’est le même depuis 2009 et jamais la Cour des comptes n’a formulé d’observations particulières.

Enfin, l’Élysée entreprend des travaux de renforcement de sa sécurité, notamment de ses systèmes d’information, ce qui apparaît pour le moins nécessaire dans le contexte de menace terroriste et de tensions géopolitiques que nous connaissons.

Monsieur Bascher, la baisse des crédits du Conseil constitutionnel est liée à la baisse de son activité prévisible, les opérations de contrôle liées à la procédure du référendum d’initiative partagé (RIP) sur la privatisation d’Aéroports de Paris étant désormais closes.

L’année 2021 verra tout de même la mise en place, comme M. Sueur l’a souligné, d’un dispositif national de suivi de la question prioritaire de constitutionnalité (QPC) qui permettra de mieux connaître son usage, dix ans après son instauration.

Monsieur Laménie, je me permettrai de m’abstenir de tout commentaire concernant le budget de votre assemblée. Il n’appartient pas au Gouvernement, au nom de la séparation des pouvoirs, d’apprécier le niveau de la dotation des assemblées parlementaires.

La crise sanitaire a donné lieu à un certain nombre de plaintes devant la Cour de justice de la République, ce qui a pu conduire à s’interroger sur le niveau de sa dotation. Comme l’ont indiqué vos rapporteurs, cette hausse de l’activité sera financée par le report du solde de la dotation non consommée en 2020, avec l’accord du ministère de l’économie, des finances et de la relance.

La mission « Conseil et contrôle de l’État » retient, comme chaque année, l’attention de l’ensemble des sénateurs. Ces crédits, en hausse de 2 %, traduisent un effort constant d’accroissement de la masse salariale et d’investissement depuis le début du quinquennat.

Le PLF pour 2021 s’inscrit dans la trajectoire d’accroissement des moyens humains des juridictions administratives avec la création de 28 postes, notamment au bénéfice de la nouvelle cour administrative d’appel de Toulouse qui verra le jour en 2022. Cette augmentation des moyens, saluée par MM. Richard et Menonville, s’avère indispensable pour faire face à la hausse importante des contentieux, comme l’a souligné votre rapporteur spécial, M. Bilhac.

La Cour nationale du droit d’asile (CNDA), qui a bénéficié de 80 % des créations d’emplois dans les juridictions administratives depuis cinq ans, soit 375 ETP, a particulièrement souffert de la période de confinement et de la crise sanitaire en général, comme l’ont rappelé MM. Benarroche et Gay.

Je salue, dans la lignée des propos tenus avant moi, le report sur l’année 2021 des créations de postes qui n’ont pu intervenir en 2020 pour les raisons que vous connaissez, afin de poursuivre nos efforts visant à garantir l’effectivité du droit d’asile. Si la situation sanitaire le permet, la CNDA devrait pouvoir se rapprocher de sa capacité de jugement maximale au cours de l’année 2021 et tendre vers les objectifs prévus par la loi.

Le fonctionnement de la Cour des comptes et des juridictions financières appelle moins de commentaires. Elles bénéficient cette année d’un schéma d’emploi positif qui conduira à dix recrutements supplémentaires en 2021.

La hausse des crédits de personnel du Haut Conseil des finances publiques suscite des interrogations dont nous reparlerons. L’Assemblée nationale a ainsi adopté un amendement afin de limiter cette hausse à deux emplois. Le Haut Conseil pourra toutefois effectuer des recrutements supplémentaires afin d’exercer au mieux sa mission d’expertise indépendante tant auprès du Gouvernement que du Parlement.

En dépit de ces recrutements, le Haut Conseil demeurera sur la scène européenne une institution budgétaire indépendante de taille très réduite.

Enfin, le Conseil économique, social et environnemental conserve un budget stable. La réforme, en cours d’examen devant le Parlement, permettra de rénover le fonctionnement du CESE tout en garantissant la juste représentation des territoires – comme vous, monsieur Artano, nous sommes sensibles à cette question.

La réduction du nombre des membres du CESE permettra de dégager les économies nécessaires pour mettre en œuvre les nouvelles prérogatives du Conseil, notamment en matière de participation citoyenne.

J’ai bien entendu que certains, à l’instar de M. Bascher, ont souhaité interpeller le Gouvernement sur la Convention citoyenne – il me semble que nous débattrons d’un amendement sur cette question. Les crédits de 2021 permettront l’organisation de nouveaux exercices de participation citoyenne, malgré les difficultés inhérentes à cet exercice pendant la période de crise sanitaire.

Vous ne serez pas surpris d’apprendre que je soutiens très fortement un principe qui répond à une aspiration de nos concitoyens. J’en profite pour dire à M. Gay et à M. Benarroche qu’ils ne devraient pas s’inquiéter, bien au contraire : les citoyens ont formulé des propositions, le Gouvernement va déposer un projet de loi et, en définitive, conformément à la façon dont fonctionne notre démocratie, le Parlement va statuer.

M. Fabien Gay s ’ esclaffe. – Exclamations ironiques sur l ’ ensemble des travées.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Mes chers collègues, seul M. le ministre délégué a la parole.

Debut de section - Permalien
Marc Fesneau

Nous ne demandons pas au Parlement de voter strictement les préconisations de la Convention citoyenne, comme s’il s’agissait d’une injonction. Ce serait une attitude assez iconoclaste, puisque nous connaissons le principe selon lequel « tout mandat impératif est nul » !

J’en viens à la mission « Direction de l’action du Gouvernement » à laquelle est adjoint, pour 2021 et 2022, un nouveau programme consacré à la présidence française du Conseil de l’Union européenne. Si l’on isole les crédits de ce programme éphémère, les crédits de la mission progressent de 2, 7 % en 2021.

La hausse des crédits du programme « Coordination du travail gouvernemental » vient renforcer la coordination interministérielle en matière de sécurité et de défense.

Le secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale (SGDSN) bénéficiera d’un schéma d’emploi dynamique, comme l’ont souligné votre rapporteur spécial Paul Toussaint Parigi ainsi que l’ensemble des rapporteurs.

L’Anssi fait l’objet d’une attention particulière de MM. Cadic, Vallet et Richard qui soulignent sa grande compétence, comme en atteste sa forte attractivité. La création d’un pôle cyber à Rennes devrait y contribuer positivement.

Certains d’entre vous ont évoqué l’inscription de crédits alloués à l’Anssi et à la direction interministérielle du numérique (Dinum) dans la mission « Plan de relance ». Cette présentation permet de suivre l’exécution de l’effort de relance de 100 milliards d’euros qui s’ajoute aux crédits consacrés au numérique dans la mission que nous examinons.

Madame Briquet, vous m’interpellez sur la reconduction à l’identique des crédits de fonctionnement du service d’information du Gouvernement (SIG) pour un montant de 14, 2 millions d’euros en 2021, comme en 2020. Durant la crise sanitaire, ce service a notamment été chargé d’une plateforme téléphonique d’information des citoyens qui a engendré un coût important, de l’ordre de 8, 5 millions d’euros, auquel se sont ajoutées des dépenses supplémentaires de communication. Nous pouvons espérer que le SIG sera en mesure, l’année prochaine, d’exercer normalement ses attributions, ce qui explique cette stabilité.

La Mildeca remplit une mission d’impulsion et d’animation essentielle, comme Mme Deroche et plusieurs d’entre vous l’ont rappelé. Cette structure bénéficiera, en plus de sa dotation, de 10 % du produit des avoirs criminels confisqués dans les affaires de stupéfiants que lui versera l’Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis dont les recettes ont dépassé 25 millions d’euros en 2019.

Comme l’an dernier, un certain nombre de créations d’emplois et de missions concernent le programme « Protection des droits et libertés » et visent à permettre aux autorités administratives indépendantes d’exercer au mieux leurs prérogatives.

Je rejoins ceux qui, comme MM. Leconte et Canevet, saluent le schéma d’emploi dynamique qui bénéficiera en particulier à la CNIL, avec la création de vingt postes pour accompagner la mise en œuvre du RGPD, même si j’ai bien noté les points de vigilance à retenir.

Le nouveau programme de la mission, qui permettra l’organisation de la présidence française du Conseil de l’Union européenne, représente un budget total de 150 millions d’euros sur deux ans, ce qui correspond à peu près aux dépenses constatées lors du dernier exercice, en 2008, dont 47, 4 millions d’euros de crédits de paiement en 2021 pour les réservations et opérations de communication en amont de la présidence.

Comme en 2008, aucune dépense de personnel ne sera supportée par le programme, ce qui explique l’installation temporaire, au sein du secrétariat général des affaires européennes (SGAE), de l’équipe éditoriale du site de la présidence française, composée de dix ETP.

Enfin, je crois que les crédits accordés à la direction de l’information légale et administrative n’appellent pas d’observations particulières.

Je conclus mon propos en vous remerciant du travail réalisé et en vous demandant d’adopter les crédits de ces trois missions, ainsi que le budget annexe.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Pouvoirs publics », figurant à l’état B.

En euros

Mission / Programme

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Pouvoirs publics

Présidence de la République

Assemblée nationale

Sénat

La Chaîne parlementaire

Indemnités des représentants français au Parlement européen

Conseil constitutionnel

Haute Cour

Cour de justice de la République

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Je n’ai été saisi d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.

Je mets aux voix ces crédits.

Les crédits sont adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Nous allons procéder à l’examen des crédits de la mission « Conseil et contrôle de l’État », figurant à l’état B.

En euros

Mission / Programme

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Conseil et contrôle de l’État

Conseil d’État et autres juridictions administratives

Dont titre 2

367 311 709

367 311 709

Conseil économique, social et environnemental

Dont titre 2

36 233 319

36 233 319

Cour des comptes et autres juridictions financières

Dont titre 2

196 228 836

196 228 836

Haut Conseil des finances publiques

Dont titre 2

1 052 939

1 052 939

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

L’amendement n° II-115 rectifié, présenté par M. Bascher, Mmes Lavarde et Puissat, M. Courtial, Mme Procaccia, M. Karoutchi, Mme Belrhiti, MM. Sautarel, Panunzi et Lefèvre, Mme Gruny, MM. Bazin, Dallier et Savary, Mme Noël, MM. E. Blanc, Meurant, Vogel, Chatillon, Longuet, Bouchet et Charon, Mmes Ventalon, Bonfanti-Dossat et Delmont-Koropoulis et MM. Sido, Klinger, Duplomb, Bonhomme et C. Vial, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

En euros

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Programmes

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Conseil d’État et autres juridictions administratives

dont titre 2

Conseil économique, social et environnemental

dont titre 2

1 300 000

1 300 000

Cour des comptes et autres juridictions financières

dont titre 2

Haut Conseil des finances publiques

dont titre 2

TOTAL

SOLDE

La parole est à M. Jérôme Bascher.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Bascher

Comme je l’ai annoncé lors de la discussion générale, il s’agit de supprimer les crédits destinés à l’organisation d’une nouvelle convention citoyenne.

C’est ici et par nous que se fait la loi. Nous y sommes fondés par la Constitution. Vouloir mettre en œuvre cette forme de démocratie participative me semble quelque peu bizarre : c’est bien beau de faire des propositions, et je comprends que les citoyens le souhaitent, mais il faut ensuite en être responsable. Or seuls le Gouvernement et le Parlement le sont. Il est toujours très embêtant d’écrire une lettre au père Noël et de ne pas en assumer ensuite l’ensemble des considérants.

C’est la raison pour laquelle je propose de supprimer ces 4, 2 millions d’euros de crédits et de réaliser ainsi des économies budgétaires dont le Gouvernement a bien besoin.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Bilhac

Monsieur le sénateur, cette augmentation des crédits date de l’an dernier. Cette année, ils sont stables. Ces 4, 2 millions d’euros étaient destinés à l’organisation de la Convention citoyenne pour le climat.

Par ailleurs, une loi en cours d’examen prévoit le renforcement des moyens du Conseil économique, social et environnemental.

La question se pose de la nécessité de reconduire cette hausse en 2021. Pour ma part, j’en appelle à la sagesse de notre assemblée.

Debut de section - Permalien
Marc Fesneau

M. Marc Fesneau, ministre délégué. Monsieur Bascher, le Gouvernement salue le geste d’économie, mais émet un avis défavorable – je sens votre désappointement.

Sourires.

Debut de section - Permalien
Marc Fesneau

L’organisation d’un nouvel exercice de participation citoyenne répond à une attente des Français qui souhaitent s’exprimer sur les sujets essentiels qui animent notre société.

Les crédits que vous souhaitez supprimer sont ainsi indispensables à la mise en œuvre des futures prérogatives du CESE – le projet de loi est en cours de navette – qui ne s’opposent en rien à celles du Parlement, auxquelles je suis profondément attaché. Je partage au mot près – et je crois que vous le savez – ce que vous avez dit de la chaîne de responsabilité.

Je vous sais trop subtil observateur de la vie politique pour ne pas savoir distinguer le rôle des commissions, qui émettent des avis, et des processus de participation citoyenne – déjà présents dans nombre de collectivités locales, quelle que soit leur orientation politique – de celui des élus, qui ont la responsabilité de prendre des décisions et de rendre des comptes.

Connaissant votre tempérament, je n’ai pas senti chez vous d’inquiétude particulière, mais je tiens à réaffirmer qu’il n’y a rien à redouter dès lors que l’on dit les choses comme je suis en train de les dire.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

La parole est à M. Guy Benarroche, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Benarroche

Je partage en partie l’analyse de M. le ministre, même si le Gouvernement fait les choses de telle façon qu’il déconsidère lui-même le CESE et la participation citoyenne.

Il n’est pas question ici de remettre en cause la manière dont est bâtie notre démocratie. Il s’agit seulement de se demander si elle fonctionne parfaitement aujourd’hui. En sommes-nous satisfaits ? Mes chers collègues, il me semble que nous nous posons tous des questions.

La possibilité de pétitionner ou de faire participer les citoyens par tirage au sort met-elle en danger notre démocratie ou va-t-elle la renforcer ? Nous sommes d’avis qu’elle va la renforcer.

Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Benarroche

Mais si, une fois les citoyens consultés, on ne va pas jusqu’au bout de la chaîne de décision en faisant intervenir parlementaires et Gouvernement, on délégitime la dépense consentie pour faire participer les citoyens. Soyons prudents, monsieur le ministre, et allons jusqu’au bout.

Pour ces raisons, je pense qu’il ne faut pas réduire le budget du CESE ni celui d’aucune instance de démocratie participative, au contraire.

M. Daniel Salmon applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

La parole est à M. Jean-Yves Leconte, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Leconte

L’amendement de notre collègue Jérôme Bascher est totalement cohérent avec la position de la majorité sénatoriale sur la réforme du Conseil économique, social et environnemental.

Vous êtes opposés à l’article 4 du projet de loi organique qui prévoit la participation citoyenne et vous en tirez les conséquences budgétaires logiques. Je souligne donc votre cohérence.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Leconte

Toutefois, le groupe Socialiste, Écologique et Républicain a soutenu la possibilité pour le CESE d’organiser, dans des conditions spécifiques, des consultations citoyennes. Il est donc assez logique, eu égard à la réforme en cours que nous examinerons de nouveau le 14 décembre prochain, de lui en donner les moyens.

Nous savons que cet amendement risque d’être adopté. Mais si l’on veut que le CESE puisse profiter des dispositions de l’article 4, il faut bien maintenir ces crédits.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascal Savoldelli

M. Pascal Savoldelli. Je m’interroge davantage sur la sincérité des auteurs de l’amendement…

Exclamations amusées sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascal Savoldelli

Je veux parler de sincérité financière, et donc en partie politique. Avancer comme argument la volonté d’économiser 4 millions d’euros quand on a réduit de 10 milliards d’euros les impôts de production perçus par les collectivités territoriales, c’est un peu risible !

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Fabien Gay

Nous avons un vrai problème sur la question de la participation citoyenne. Notre démocratie est-elle à bout de souffle depuis le début de ce quinquennat, oui ou non ? Voilà la véritable question.

Dès le début du quinquennat, vous avez fait travailler des élus et des acteurs associatifs sur les quartiers populaires. Le Président de la République a lui-même missionné Jean-Louis Borloo, assisté de nombreux élus et acteurs, pour travailler sur cette question. Il a rendu un rapport… enterré en grande pompe !

Vient ensuite la crise inédite des « gilets jaunes » qui demandent justice sociale et justice fiscale. Pour résoudre les problèmes, on demande de faire remonter les « cahiers de la colère », les cahiers de doléances. Les membres du groupe CRCE en ont remis eux-mêmes aux ministres. Nous n’avons jamais eu le moindre retour !

(Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.) Et un an plus tard, on ne sait toujours pas ce qu’il va en advenir. On se dirige toutefois vers un enterrement de grande classe.

Oui ! sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Fabien Gay

Vient enfin le grand débat national, qui a coûté des millions et des millions d’euros, pour en arriver à quoi ? À l’organisation d’une Convention citoyenne. On tire au sort 150 citoyens qui font un certain nombre de propositions dont nous approuvons – de ce côté-ci de l’hémicycle – un très grand nombre. §

La taxe sur les dividendes ? Ce n’est pas possible. Le crime d’écocide ? Transformons-le en délit – c’est que le glyphosate et les néonicotinoïdes sont passés par là… Au final, que restera-t-il de ces propositions ?

Vous n’arrivez pas à insuffler une nouvelle démocratie, une nouvelle façon de faire. Nous en avons pourtant besoin.

Debut de section - PermalienPhoto de Fabien Gay

De plus en plus de nos concitoyens s’abstiennent aux élections. Il va bien falloir trouver un nouveau moyen de fonctionner.

Nous défendons l’idée d’une VIe République, comme d’autres, mais pas forcément avec le même contenu : partage des pouvoirs, des savoirs, des richesses. Cet amendement, quant à lui, porte une tout autre interrogation.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

L’amendement n° II-687 rectifié, présenté par M. Benarroche, Mme Benbassa, M. Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme Taillé-Polian, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

En euros

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Programmes

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Conseil d’État et autres juridictions administratives

dont titre 2

Conseil économique, social et environnemental

dont titre 2

Cour des comptes et autres juridictions financières

dont titre 2

Haut Conseil des finances publiques

dont titre 2

TOTAL

SOLDE

La parole est à M. Guy Benarroche.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Benarroche

Je retire cet amendement, monsieur le président.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

L’amendement n° II-687 rectifié est retiré.

L’amendement n° II-620, présenté par Mme N. Goulet, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

En euros

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Programmes

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Conseil d’État et autres juridictions administratives

dont titre 2

Conseil économique, social et environnemental

dont titre 2

Cour des comptes et autres juridictions financières

dont titre 2

Haut Conseil des finances publiques

dont titre 2

TOTAL

SOLDE

La parole est à Mme Nathalie Goulet.

Debut de section - PermalienPhoto de Nathalie Goulet

Voilà quelques semaines, la Cour des comptes a rendu un rapport sur la fraude sociale qu’elle s’est estimée incapable de chiffrer.

Avec 1 783 salariés et 169 millions d’euros de budget, elle sait pourtant alpaguer des maires pour quelques euros payés en trop pour un bout d’enrobé dans une cour d’école.

Normalement, la Cour des comptes sait compter, mais il semblerait qu’elle n’y arrive plus pour la fraude sociale. C’est la raison pour laquelle j’ai déposé cet amendement qui vise à accorder 5 millions d’euros de crédits supplémentaires à la Cour afin de l’aider à apprendre à chiffrer la fraude sociale.

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Bilhac

Le Premier président de la Cour des comptes ne réclame pas une augmentation de son budget et la situation ne le justifie pas.

La commission demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, je me verrai contraint d’émettre un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Marc Fesneau

Dans son rapport sur la fraude sociale, lequel fait suite au rapport que vous avez vous-même déposé, madame la sénatrice, la Cour des comptes indique qu’elle ne présente pas d’estimation globale du montant de la fraude aux prestations, les données disponibles ne permettant pas de parvenir à un chiffrage suffisamment fiable.

Dans sa première recommandation, elle demande ainsi aux ministères chargés de la sécurité sociale et du travail et de l’emploi, à la CNAM, à la CNAV et à Pôle emploi de procéder régulièrement à une estimation chiffrée.

La difficulté rencontrée par la Cour pour chiffrer de manière fiable et précise le montant de la fraude aux prestations sociales ne tient pas à l’insuffisance de ses moyens humains et techniques, mais à la mise en place, par les administrations compétentes, d’un suivi exhaustif de ce phénomène.

Au demeurant, la Cour, qui se situe à équidistance du Parlement et du Gouvernement, arrête librement et en toute indépendance sa programmation, comme le Conseil constitutionnel a eu l’occasion de le rappeler.

Au fond, une augmentation de ses moyens n’aurait pas pour conséquence immédiate ou directe l’atteinte des objectifs que vous mentionnez.

Pour ces raisons, le Gouvernement est défavorable à cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Nathalie Goulet

Je vais retirer cet amendement, qui est un amendement de mauvaise humeur, comme tout le monde l’aura compris.

Toutefois, monsieur le ministre, je voudrais que l’on réfléchisse à doter la Cour des comptes de moyens de contrainte. D’année en année, les réserves et les préconisations se renouvellent, tant sur la fraude fiscale que sur la fraude sociale, notamment sur la fraude aux cotisations, sans jamais trouver à s’appliquer.

Je retire donc cet amendement, en espérant que les administrations sociales pourront enfin compter.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

L’amendement n° II-620 est retiré.

L’amendement n° II-684 rectifié, présenté par M. Benarroche, Mme Benbassa, M. Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme Taillé-Polian, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

En euros

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Programmes

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Conseil d’État et autres juridictions administratives

dont titre 2

Conseil économique, social et environnemental

dont titre 2

Cour des comptes et autres juridictions financières

dont titre 2

Haut Conseil des finances publiques

dont titre 2

TOTAL

SOLDE

La parole est à M. Guy Benarroche.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Benarroche

Cet amendement vise à renforcer les moyens alloués à la Cour nationale du droit d’asile.

Le nombre d’affaires augmente constamment et la Cour ne parvient pas à tenir les délais impartis – raccourcis, à juste titre, par la loi de 2018. Si la CNDA n’y arrive pas, ce n’est pas seulement en raison de la crise du covid. J’ai eu l’occasion de m’entretenir avec plusieurs membres de la CNDA, y compris sa présidente : c’est un problème global dû à l’accroissement incessant du nombre d’affaires à traiter.

La présidente de la CNDA a obtenu l’ouverture de huit salles d’audience complémentaires dès le début de 2021. De plus, les emplois non pourvus en 2020 seront reportés en 2021. Mais cela n’est pas suffisant pour traiter l’ensemble des dossiers dans les délais fixés par la loi.

Nous souhaitons donc accroître les moyens alloués à la Cour nationale du droit d’asile pour lui permettre de réaliser les embauches nécessaires et répondre ainsi à ses obligations.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Bilhac

La CNDA a bénéficié de 90 % des créations d’emplois de la justice administrative depuis 2015.

Si nous devons être attentifs au maintien des capacités de la Cour, il ne faut pas phagocyter une part trop importante des crédits accordés à la juridiction administrative dans son ensemble.

Enfin, le gage conduirait à une baisse trop importante des moyens du Haut Conseil de finances publiques, représentant plus de la moitié des crédits qui lui sont accordés.

Pour ces raisons, la commission demande le retrait de cet amendement.

Debut de section - Permalien
Marc Fesneau

Comme vous l’avez souligné, monsieur Benarroche, les dotations affectées à la CNDA dans le PLF pour 2021 intègrent notamment le financement du report des créations d’emplois qui n’ont pu être réalisées, conformément au souhait du Conseil d’État.

D’après les projections, le niveau de crédit atteint est suffisant pour permettre à la CNDA de juger dans les délais compatibles avec les objectifs qui lui sont fixés.

L’année 2020 a été marquée par d’importantes difficultés liées à la crise sanitaire et à la grève des avocats au premier trimestre. Toutefois, la Cour devrait se rapprocher de sa capacité annuelle de jugement maximale en 2021, en fonction de l’évolution de la situation.

Pour ces raisons, le Gouvernement n’est pas favorable à cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

La parole est à M. Jean-Yves Leconte, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Leconte

Cet amendement est effectivement très utile.

D’une part, si l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra) a bénéficié de moyens très importants pour essayer de faire face au mieux à l’évolution du nombre de demandeurs d’asile, la CNDA ne s’est pas vu octroyer les outils nécessaires pour faire de même. Or, vous le savez, 85 % des décisions négatives de l’Ofpra sont contestées devant la Cour nationale du droit d’asile. Il est donc important de donner à la CNDA les moyens de suivre la croissance du nombre de demandeurs d’asile telle qu’elle se manifeste depuis quelques années.

D’autre part, consacrer des moyens à la réduction des délais de traitement des dossiers par la Cour nationale du droit d’asile, ce n’est pas une dépense supplémentaire : répondre rapidement aux requérants est non seulement une mesure de dignité, mais aussi une mesure d’économie. Je rappelle en effet que des prestations d’accompagnement sont versées aux demandeurs d’asile, qui, ne pouvant pas travailler, doivent se voir accorder néanmoins les moyens de vivre. Autrement dit, si l’on réduit les délais de jugement, on fait des économies.

Par conséquent, comme je l’ai dit, la disposition que nous proposons n’est pas une dépense en plus, mais de l’argent bien utilisé : le traitement rapide des recours permet à l’État, au total, de faire des économies sur son budget, ce qui me paraît sensé.

Applaudissements sur les travées des groupes SER et GEST.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Conseil et contrôle de l’État », figurant à l’état B.

Je n’ai été saisi d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.

Je mets aux voix ces crédits.

Les crédits sont adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

J’appelle en discussion l’article 54 quater, qui est rattaché pour son examen aux crédits de la mission « Conseil et contrôle de l’État ».

Conseil et contrôle de l ’ État

Au début du paragraphe 2 de la sous-section 2 de la section 12 du chapitre III du titre III du livre III de la deuxième partie du code général des collectivités territoriales, il est rétabli un article L. 2333-87-5 ainsi rédigé :

« Art. L. 2333 -87 -5. – I. – La recevabilité du recours contentieux contre la décision rendue à l’issue du recours administratif préalable obligatoire et contre le titre exécutoire émis est subordonnée au paiement préalable, dans la limite d’un plafond de 33 €, du montant de l’avis de paiement du forfait de post-stationnement et de la majoration prévue au IV de l’article L. 2333-87 si un titre exécutoire a été émis.

« Dans le cas où la commission du contentieux du stationnement payant décide qu’il n’y a pas lieu d’annuler la décision individuelle relative au forfait de post-stationnement, le montant acquitté par le requérant préalablement à l’introduction du recours contentieux est déduit du montant du forfait de post-stationnement et de la majoration restant à régler.

« Par dérogation au premier alinéa du présent I, le paiement préalable ne peut être exigé pour les recours contentieux formés par :

« 1° Les personnes susceptibles de prouver le vol ou la destruction de leur véhicule, ou d’avoir été victimes du délit d’usurpation de plaque prévu à l’article L. 317-4-1 du code de la route, dans les conditions prévues à l’article 529-10 du code de procédure pénale ;

« 2° Les personnes justifiant avoir cédé leur véhicule, notamment par la production de la déclaration de cession et de l’accusé d’enregistrement dans le système d’immatriculation des véhicules mentionné au même article 529-10 ;

« 3° Les titulaires de la carte “mobilité inclusion” portant la mention “stationnement pour personnes handicapées” prévue au 3° de l’article L. 241-3 du code de l’action sociale et des familles.

« II. – En cas de dépôt d’un recours contentieux et sous réserve du paiement préalable du montant prévu au I du présent article, la durée d’examen du recours ne rentre pas dans le calcul de la période de trois mois mentionnée au IV de l’article L. 2333-87.

« La durée d’examen du recours court de la réception du dossier de recours par la commission du contentieux du stationnement payant jusqu’à la notification au requérant de la décision de la commission.

« Si un titre exécutoire a été émis, sa force exécutoire est suspendue durant toute la durée d’examen du recours et jusqu’à notification au requérant de la décision de la commission du contentieux du stationnement payant. »

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

L’amendement n° II-11, présenté par M. Bilhac, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. le rapporteur spécial.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Bilhac

Cet article introduit par l’Assemblée nationale plafonne à 33 euros le montant du paiement exigé préalablement à un recours devant la Commission du contentieux du stationnement payant (CCSP) et supprime l’exigence d’un paiement préalable à la saisine de ladite commission pour les personnes victimes du vol de leur véhicule et pour les personnes handicapées exonérées de la redevance de stationnement.

J’approuve totalement, sur le fond, les objectifs qui président à l’introduction de cet article. Un article similaire avait d’ailleurs été adopté par le Sénat dans le projet de loi de finances pour 2020, mais le Conseil constitutionnel l’avait censuré comme étant un cavalier budgétaire.

Les mêmes causes produisant en général les mêmes effets, et au vu de la menace d’inconstitutionnalité qui pèse sur l’article 54 quater, je pense qu’il devrait être supprimé. Il serait certes bon que les dispositions qu’il contient soient introduites dans un autre texte de loi ; reste qu’elles ne relèvent pas du domaine de la loi de finances.

Debut de section - Permalien
Marc Fesneau

Monsieur le rapporteur, votre amendement vise en effet à supprimer l’article 54 quater, introduit à l’Assemblée nationale, qui tend à rétablir, dans certaines conditions, l’obligation de paiement partiel du forfait de post-stationnement. Cette disposition avait d’ailleurs été, sous une forme un peu différente, votée par le Sénat l’an dernier, puis frappée d’inconstitutionnalité. Il est donc vrai que le Conseil constitutionnel a déjà censuré, dans une décision relative à la loi de finances pour 2020, une disposition de même nature.

L’article 54 quater prévoit un dispositif légèrement différent de celui qui prévalait dans les précédentes rédactions ; il conserve le principe du paiement du forfait à la collectivité et de sa majoration à l’État.

Je partage toutefois votre constat, en tout cas une partie de votre constat, s’agissant du caractère perfectible de cette rédaction. Et je suis, comme vous tous – je le sais –, attaché à ce que le fonctionnement de la CCSP ne soit pas entravé ; or c’est bien là la situation dans laquelle nous nous trouvons, compte tenu de ce qu’a décidé le Conseil constitutionnel.

Aussi le Gouvernement s’en remet-il à la sagesse du Sénat sur cet amendement. La navette sera l’occasion de poursuivre la réflexion sur ce dispositif, et c’est bien volontiers que nous le perfectionnerons.

L ’ amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Nous allons procéder à l’examen des crédits de la mission « Direction de l’action du Gouvernement », figurant à l’état B.

En euros

Mission / Programme

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Direction de l’action du Gouvernement

Coordination du travail gouvernemental

Dont titre 2

236 548 927

236 548 927

Protection des droits et libertés

Dont titre 2

50 779 259

50 779 259

Présidence française du Conseil de l’Union européenne en 2022

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

L’amendement n° II-442 n’est pas soutenu.

L’amendement n° II-554, présenté par M. Calvet, au nom de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

En euros

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Programmes

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Coordination du travail gouvernemental

dont titre 2

Protection des droits et libertés

dont titre 2

Présidence française du Conseil de l’Union européenne en 2022

TOTAL

SOLDE

La parole est à M. Rémy Pointereau.

Debut de section - PermalienPhoto de Rémy Pointereau

Cet amendement vise à augmenter les crédits du Haut Conseil pour le climat (HCC).

Il s’avère en effet qu’il manque de moyens humains, ce qui limite sa capacité à répondre aux demandes formulées par le Parlement, comme celle du président du Sénat, Gérard Larcher, qui a demandé récemment une évaluation de l’impact environnemental de la 5G. Mme Le Quéré, présidente du HCC, lui a répondu que les ressources humaines du Haut Conseil ne lui permettaient pas de répondre à sa demande et de mener à bien ces travaux.

Je rappelle que l’homologue britannique du Haut Conseil pour le climat est doté de 24 équivalents temps plein, contre 6 pour l’autorité française. Il serait bon, donc, d’augmenter ces crédits !

Debut de section - PermalienPhoto de Paul Toussaint Parigi

Si le Haut Conseil pour le climat fait l’objet d’un nombre croissant de saisines, ses moyens sont restés constants depuis sa création en 2019 par le Président de la République. Le Haut Conseil dispose, à l’heure actuelle, d’un budget de fonctionnement de 500 000 euros et de 6 équivalents temps plein, contre 24 pour son homologue britannique, comme cela a été dit.

Or, aujourd’hui, ces moyens limités ne lui permettent pas de répondre de manière satisfaisante aux demandes d’évaluation des politiques publiques relatives au climat formulées par le Gouvernement et par le Parlement.

Compte tenu de l’importance croissante de ces sujets dans le débat public, la question du renforcement des moyens financiers et humains du Haut Conseil pour le climat doit donc être posée.

La commission s’en remet à la sagesse du Sénat sur cet amendement ; quant à moi, à titre personnel, j’y suis favorable.

Debut de section - Permalien
Marc Fesneau

Comme cela a été rappelé par M. le sénateur Pointereau, le Haut Conseil pour le climat comprend une présidente et 12 membres choisis en raison de leur expertise. Il s’appuie sur une équipe de 6 personnes hébergées par France Stratégie, qui met par ailleurs à disposition du Haut Conseil ses moyens administratifs et financiers – il faut quand même le souligner –, lesquels sont mutualisés avec l’ensemble des organismes qu’il coordonne.

Debut de section - Permalien
Marc Fesneau

Le HCC peut en outre mobiliser l’ensemble des experts et des organismes publics intervenant dans le domaine du climat, dont une part importante de ses membres sont issus – le Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA), le Centre national de la recherche scientifique (CNRS), Météo-France, l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (Inrae), pour ne citer que ces organismes.

Grâce à l’ensemble de ces moyens, le HCC – vous l’avez dit – est désormais une autorité installée dont les travaux sont reconnus. Il remplit donc la mission voulue par le Président de la République, qui était de créer un organisme chargé d’apporter un éclairage indépendant et neutre sur la politique du Gouvernement pour la lutte contre le changement climatique et sur les impacts sociaux, économiques et environnementaux dudit changement.

En outre, vous gagez votre amendement par la réduction des crédits de la présidence française de l’Union européenne, alors même que celle-ci sera l’occasion de porter au niveau européen l’ambition de la France en matière de lutte contre le réchauffement climatique.

Avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

La parole est à M. Stéphane Piednoir, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Piednoir

Il ne s’agit bien évidemment pas de remettre en cause les missions du Haut Conseil pour le climat. Je m’interroge simplement sur l’ampleur de la demande qui est ici formulée : multiplier par quatre le budget du HCC, et donc multiplier par quatre ses effectifs, de 6 à 24 ETP, du jour au lendemain, ne me semble pas raisonnable.

J’entends bien la comparaison qui a été exposée par notre collègue Pointereau : le Royaume-Uni dispose du même type de structure, mais dotée de 24 ETP. Mais peut-être le Royaume-Uni ne dispose-t-il pas d’un office parlementaire chargé de l’évaluation des choix scientifiques et technologiques analogue à celui qui existe en France, avec 18 députés, 18 sénateurs, des personnels administratifs.

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Piednoir

Cet office est parfois saisi par l’Assemblée nationale, par le Sénat, voire directement par le Gouvernement, pour évaluer ce genre de politiques publiques. Il ne me semble donc pas raisonnable d’aller dans le sens de cet amendement, quoiqu’il ait été brillamment défendu par Rémy Pointereau.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

La parole est à M. Jean-Yves Leconte, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Leconte

J’irai dans le même sens que notre collègue Piednoir : nous avons besoin d’un peu de cohérence. Nous avons un Conseil économique, social et environnemental dont nous déplorons qu’il ne soit pas utilisé comme il faut. Or il a aussi cette compétence environnementale.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Leconte

Je rappelle que le Haut Conseil pour le climat ne représente pas grand-chose comparé au Conseil économique, social et environnemental, qui est inscrit dans la Constitution, et auquel il faut donner tout le rôle qui lui est dévolu au niveau constitutionnel.

Il n’est par conséquent pas très raisonnable d’accorder une telle dotation au HCC, qui vient d’être créé et n’a pas de véritable utilité, sauf à vouloir abaisser le rôle du Conseil économique, social et environnemental ; ce dernier peut tout à fait remplir la mission que nous avons en vue s’agissant des questions relevant du climat et de l’environnement.

Pour des raisons de cohérence et de simplification, il est donc préférable de s’appuyer sur le CESE plutôt que de renforcer cette petite structure dont l’existence même va totalement à l’encontre de la volonté de simplification et de rationalisation des petits organismes dont les crédits relèvent de la mission « Direction de l’action du Gouvernement ».

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

La parole est à M. Rémy Pointereau, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Rémy Pointereau

C’est un amendement d’appel que nous avons présenté, les ETP affectés au Haut Conseil pour le climat étant insuffisants pour répondre aux demandes. Compte tenu des arguments de M. le ministre, et après avoir discuté avec mon collègue de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable Bruno Belin, nous prenons acte de l’impossibilité dans laquelle nous sommes d’obtenir satisfaction ; nous allons donc retirer cet amendement. (Très bien ! sur des travées des groupes Les Républicains et UC.)

Il faut être raisonnable, même si le HCC manque de moyens, même si les ETP qui lui sont affectés sont insuffisants pour répondre aux demandes. Cette discussion nous a au moins donné l’occasion de faire la démonstration de la fibre écologique du groupe Les Républicains.

Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

L’amendement n° II-554 est retiré.

L’amendement n° II-686 rectifié ter, présenté par M. Benarroche, Mme Benbassa, M. Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme Taillé-Polian, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

En euros

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Programmes

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Coordination du travail gouvernemental

dont titre 2

Protection des droits et libertés

dont titre 2

Présidence française du Conseil de l’Union européenne en 2022

TOTAL

SOLDE

La parole est à M. Guy Benarroche.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Benarroche

M. Guy Benarroche. Cet amendement a pour objet d’augmenter les moyens du Défenseur des droits.

Oh ! sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Benarroche

Et pourquoi pas ? Quoi de plus légitime s’agissant de défendre tous les droits !

L’institution connaît, au titre du PLF pour 2021, une augmentation de ses effectifs de 5 ETP. Je vous rappelle néanmoins que la hausse d’activité du Défenseur des droits ces dernières années est considérable : le nombre des saisines dont il fait l’objet a augmenté de 40 % entre 2014 et 2019.

Il doit donc assurer un meilleur maillage territorial en renforçant son réseau de délégués territoriaux – tel est l’objet de cette augmentation de moyens.

En outre, depuis peu, le Défenseur des droits s’est attelé à un nouveau sujet : je vous rappelle, si vous ne l’avez pas encore noté, qu’il est chargé de la protection et de l’accompagnement des lanceurs d’alerte. Il a ainsi été saisi de 84 dossiers en la matière en 2019. Pour poursuivre ses travaux dans ce domaine, le Défenseur des droits se doit de recruter une équipe spécialisée. Les besoins ont été évalués à 10 ETP supplémentaires ; à 50 000 euros chacun, cela fait 500 000 euros.

Cette institution, de surcroît – vous le savez si vous êtes attentifs à ses budgets –, s’est toujours attachée à rationaliser ses coûts de fonctionnement, dans un souci de maîtrise des dépenses publiques que nous partageons.

Nous devons donc répondre aux besoins d’une institution dont nous savons qu’elle est soucieuse de la maîtrise de ses dépenses, et qui, en même temps, est chargée d’une nouvelle mission – s’occuper des lanceurs d’alerte – que nous lui avons confiée, mes chers collègues : compte tenu de ses nouvelles prérogatives, elle a besoin de davantage de moyens.

C’est la raison pour laquelle le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires demande le renforcement du budget qui lui est alloué ; l’augmentation que nous proposons est non pas de 2 millions d’euros, montant que nous avions estimé nécessaire, mais, après discussion avec un certain nombre de membres des commissions compétentes, de 500 000 euros, ce qui correspond à 10 ETP, moyens humains indispensables semble-t-il.

Debut de section - PermalienPhoto de Paul Toussaint Parigi

Comme cela a été dit, la version initiale de cet amendement avait pour objet une hausse de 2 millions d’euros, soit 9 % du budget total du Défenseur des droits. Ce montant apparaissait disproportionné à la commission des finances au regard du souci de maîtrise globale de la dépense publique.

La commission a donc demandé le retrait de cet amendement. Celui-ci a néanmoins été rectifié dans un sens plus raisonnable, la hausse proposée étant désormais de 500 000 euros. La commission n’ayant pu se prononcer formellement sur cette version rectifiée, j’émets à titre personnel un avis favorable sur cet amendement.

Debut de section - Permalien
Marc Fesneau

L’augmentation des moyens du Défenseur des droits s’est traduite par le déploiement de 12 chefs de pôle régionaux, dont le rôle est d’animer le réseau des délégués territoriaux bénévoles qui traitent près de 80 % des demandes – telle est la réalité du travail effectué.

Le PLF pour 2021 prévoit d’ailleurs une augmentation des moyens alloués à ce réseau en permettant d’accroître de 20 le nombre de délégués territoriaux, passé – je le rappelle – de 398 en 2014 à 520 en 2020 grâce à une hausse des crédits affectés à leur indemnité représentative de frais.

En conséquence, le Gouvernement estime qu’il n’y a pas lieu de revenir sur la dotation et les moyens budgétaires attribués au Défenseur des droits, qui sont de 23 millions d’euros et ont été alloués pour lui permettre l’accomplissement de ses missions.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Nathalie Goulet

Je soutiendrai cet amendement.

Des représentants du Défenseur des droits sont présents dans nos territoires ; ils sont certes bénévoles, mais ils n’ont, surtout, absolument aucun moyen – ils doivent utiliser leur voiture personnelle, n’ont pas d’ordinateur, doivent parcourir des distances impossibles…

Debut de section - PermalienPhoto de Nathalie Goulet

Vu l’ampleur de la casse sociale et économique et vu les difficultés d’accès au droit que l’on déplore en ce moment – le non-recours est un énorme problème : beaucoup de gens ne vont pas chercher les prestations auxquels ils ont droit –, le rôle du Défenseur des droits est essentiel. Il est là notamment pour écouter et pour faire le lien entre les administrations et les gens un peu perdus qui, en ce moment, sont nombreux sur nos territoires.

Je voterai cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Je mets aux voix l’amendement n° II-686 rectifié ter.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

L’amendement n° II-680, présenté par Mmes Meunier, Lubin et Briquet, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Poumirol, Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

En euros

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Programmes

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Coordination du travail gouvernemental

dont titre 2

Protection des droits et libertés

dont titre 2

Présidence française du Conseil de l’Union européenne en 2022

TOTAL

SOLDE

La parole est à Mme Michelle Meunier.

Debut de section - PermalienPhoto de Michelle Meunier

Il s’agit de l’action n° 15 du programme 129, qui concerne la Mildeca, la mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives.

Il y a deux ans, le Gouvernement a élaboré un plan national de lutte contre les addictions sur cinq ans. Ce plan compte 6 axes, 19 priorités et 200 mesures mises en œuvre par différents ministères et par différents opérateurs, associations et organismes.

Dans ce plan, il faut distinguer l’esprit et la lettre. Le Gouvernement confie à la Mildeca des objectifs d’envergure, afin de répondre à des enjeux sociaux, sociétaux et surtout de santé publique considérables – cela a été dit en discussion générale –, tout en diminuant les moyens qui lui sont alloués.

L’année 2021 ne fera pas exception à cette dynamique. Les montants prévus, en autorisations d’engagement et en crédits de paiement, sont quasiment réduits de moitié par rapport aux crédits votés en 2009.

On nous dit que les moyens sont redéployés : ici un fonds de lutte contre les addictions aux substances psychoactives porté par l’assurance maladie, là des moyens transférés au ministère de l’intérieur pour l’Office anti-stupéfiants.

Il y a malgré tout matière à s’interroger : la dispersion du pilotage signifie-t-elle un saupoudrage ou une multiplication de la force de frappe ?

Pourtant, s’agissant de la lutte contre les addictions, la tâche demeure immense. Les campagnes de sensibilisation et d’information ont porté leurs fruits sur la consommation d’alcool et de tabac, mais les bouleversements profonds du quotidien, provoqués notamment par le premier confinement, démontrent que les avancées sont fragiles. De récentes études ont montré que la consommation de tabac, d’alcool et de drogues, ainsi que le recours à des substances psychoactives sur ordonnance, sont en recrudescence.

Soyons attentifs aussi aux addictions sans substance, celles qui ont trait aux écrans et aux jeux en ligne, qui touchent notamment les adolescents et les enfants. On sait que les conséquences de ces pratiques sur la santé seront redoutables.

Pour toutes ces raisons, la Mildeca doit demeurer l’entité de pilotage de cette politique et, à ce titre, être confortée dans ses moyens. Nous proposons donc de lui attribuer un crédit supplémentaire de 400 000 euros.

Debut de section - PermalienPhoto de Paul Toussaint Parigi

Cet amendement vise à augmenter de 400 000 euros les moyens alloués à la Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives.

La baisse de 357 000 euros par rapport à 2020, à laquelle font référence les auteurs de l’amendement, correspond en réalité à une simple mesure de transfert, les missions du Centre interministériel de formation anti-drogues ayant été transférées au ministère de l’intérieur.

À périmètre constant, c’est-à-dire corrigé de cette mesure de transfert, les moyens de la Mildeca sont parfaitement stables par rapport à la loi de finances pour 2020.

Cet amendement me semble donc sans objet ; la commission demande à ses auteurs de bien vouloir le retirer.

Debut de section - Permalien
Marc Fesneau

Madame la sénatrice Meunier, nous partageons préoccupations que vous avez exposées ; il est nécessaire de veiller aux moyens de la Mildeca. Comme vient de le dire votre rapporteur, ces moyens, de fait, sont stables.

Par ailleurs, je voudrais rappeler, comme je l’ai dit dans mon propos liminaire, que la Mildeca bénéficie d’un autre financement, celui du fonds de concours « drogues », alimenté par l’Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués.

De surcroît, en plus des crédits sur lesquels vous êtes appelés à délibérer cet après-midi, elle aura bénéficié, en 2020, de crédits supplémentaires à hauteur de 2, 5 millions d’euros.

Une stabilité des dotations à laquelle s’ajoute la « dynamique » – pardon pour ce terme – des crédits afférents au fonds de concours « drogues » : cela permet à la Mildeca d’exercer ses missions dans les meilleures conditions. Vous avez raison, madame la sénatrice : elle a besoin de moyens pour pouvoir fonctionner, parce que les addictions se développent – et la période que nous vivons n’y est pas étrangère.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Fabien Gay

Je comprends que, de façon politique, vous refusiez d’augmenter le budget du Défenseur des droits, ainsi que, très probablement – c’est l’objet de l’amendement suivant –, celui du Contrôleur général des lieux de privation de liberté. Mais la Mildeca, c’est autre chose !

Debut de section - Permalien
Marc Fesneau

En réalité, les crédits augmentent !

Debut de section - PermalienPhoto de Fabien Gay

Et j’espère que notre collègue Mme Meunier et le groupe socialiste vont maintenir ce très bon amendement.

Le fonds « drogues » dont vous parlez a pour objet la lutte contre le trafic de drogue : ce n’est pas tout à fait la même chose…

Debut de section - Permalien
Marc Fesneau

Le fonds alimente le budget de la Mildeca !

Debut de section - PermalienPhoto de Fabien Gay

La Mildeca, elle, construit des parcours de santé, notamment, pour sortir les jeunes, et les moins jeunes, des addictions comme le tabagisme et les addictions aux drogues. Ici, au Sénat, on s’est soucié de cette affaire cette année ! Notre collègue Valérie Létard nous a alertés sur le fléau que représentent les usages dangereux du protoxyde d’azote, et nous avons voté à l’unanimité une proposition de loi sur ce sujet. Nous n’avons pas fait de politique politicienne : nous l’avons votée parce que ce phénomène est bien réel et parce qu’il faut lutter contre ces addictions.

Et on consacrerait 400 000 euros de moins à cette politique ? L’amendement de Mme Meunier vise seulement à rétablir le niveau des crédits ; cela fait treize ans, en effet – nous l’avons dit lors de la discussion générale, et c’est écrit dans l’objet de l’amendement –, que les budgets diminuent.

Voilà la question ! Elle mérite que nous y réfléchissions quelques instants. On ne demande pas grand-chose : 400 000 euros pour maintenir le niveau des crédits, alors que nous traversons une crise sociale dont nous savons que les ravages vont être très importants.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Je suis étonné des arguments qui sont opposés à cet amendement. Mme Meunier a bien expliqué quels étaient les impacts sur les personnes, dans nos quartiers, du fléau dont il est ici question. Nous en sommes tous témoins ; chacun pourrait en parler à propos de son département.

Que nous répond-on ? Monsieur le rapporteur, vous nous dites qu’il y a un transfert de crédits, que donc le budget est stable, et que l’amendement n’a pas d’objet. Mais ce que dit Mme Meunier, c’est qu’il ne faut pas que ce budget soit stable ; il faut qu’il augmente ! Nous voyons en effet quels ravages font les toxicomanies.

Il faut démanteler les trafics – à cet égard, nous connaissons le travail des services de la police, de la gendarmerie et des douanes –, mais aussi prendre en charge les personnes qui sont complètement cassées, abîmées, par ces fléaux.

Monsieur le ministre, vous avez évoqué les crédits venant des biens mal acquis, c’est-à-dire des avoirs que la justice prélève – nous en parlerons en examinant le budget de la justice, puisqu’un amendement sur ce sujet a été adopté à l’Assemblée nationale – lorsque sont saisis des biens issus du pillage de pays pauvres détenus en France par des personnes condamnées pour corruption internationale.

Ces ressources peuvent certes abonder la mission de lutte contre les drogues – vous avez tout à fait raison, monsieur le ministre. Mais je pense qu’il serait plus judicieux que ces fonds reviennent aux populations spoliées, ce qui rend d’autant plus nécessaire l’augmentation des fonds dédiés à la lutte contre les addictions et contre toutes les formes de toxicomanies.

C’est pourquoi notre groupe soutient avec conviction l’amendement de Mme Michelle Meunier.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Mes chers collègues, je vous signale que, si nous ne finissons pas avant ce soir l’examen des missions inscrites à l’ordre du jour de cet après-midi, elles seront reportées à demain, puisqu’il nous reste 39 amendements à examiner sur les crédits de la mission « Plan de relance ».

La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Taillé-Polian

Je serai très brève, monsieur le président. Je dis simplement, au nom du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires, combien nous soutenons cet amendement.

Au-delà des addictions « traditionnelles », drogues et alcool, je voudrais souligner tout particulièrement que des addictions nouvelles, aux écrans notamment, se développent considérablement elles aussi, en lien avec la situation sanitaire et avec les confinements.

La jeunesse est en situation de grande détresse psychologique ; il y a là des dangers profonds, importants, qui nécessitent non pas seulement que les crédits soient maintenus, mais qu’ils soient augmentés.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

Que pourront y changer 4 000 euros par département ?

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

L’amendement n° II-685 rectifié bis, présenté par M. Benarroche, Mme Benbassa, M. Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme Taillé-Polian, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

En euros

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Programmes

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Coordination du travail gouvernemental

dont titre 2

Protection des droits et libertés

dont titre 2

Présidence française du Conseil de l’Union européenne en 2022

TOTAL

SOLDE

La parole est à M. Guy Benarroche.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Benarroche

Cette demande est un peu moins budgétivore encore que les deux qui viennent d’être rejetées.

Cet amendement a pour objet d’augmenter le budget du Contrôleur général des lieux de privation de liberté (CGLPL) d’un montant de 100 000 euros, afin de le doter de 2 ETP supplémentaires.

Certes, le budget du CGLPL est en augmentation, mais, à étudier les chiffres d’un peu plus près, on voit que cette augmentation est essentiellement liée à la reconduction du bail locatif de ses locaux.

Le CGLPL est une autorité administrative indépendante qui a pour mission de veiller à ce que les personnes privées de liberté soient traitées avec humanité et dans le respect de leur dignité.

Cette institution est fondamentale, parce qu’elle opère un contrôle de tous les lieux de privation de liberté, des centres de rétention administrative aux hôpitaux psychiatriques en passant par les locaux de garde à vue et les établissements pénitentiaires. Ses recommandations sont essentielles dans ces lieux où les citoyens n’ont aucun droit de regard.

Compte tenu par ailleurs des récentes condamnations de la France par la Cour européenne des droits de l’homme, sanctionnant la densité carcérale des maisons d’arrêt françaises, et à défaut d’une politique pénitentiaire appropriée, nous avons besoin de renforcer le contrôle de ces établissements.

C’est la raison pour laquelle le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires demande l’augmentation de 100 000 euros des moyens du Contrôleur général des lieux de privation de liberté – ce montant a été fixé après audition des agents du CGLPL.

Debut de section - Permalien
Marc Fesneau

Monsieur le sénateur, vous avez raison de souligner le rôle absolument essentiel du Contrôleur général des lieux de privation de liberté.

Je voudrais rappeler que le montant de sa dotation a été arrêté, dans le PLF pour 2021, à un niveau supérieur à celui de 2020 : 1, 3 million d’euros en autorisations d’engagement, permettant le réengagement de son loyer – vous l’avez dit. La dotation est également légèrement supérieure au niveau de 2020 en crédits de paiement et en crédits de titre 2.

Je voudrais rappeler également que ces moyens ont été déterminés en concertation avec l’institution elle-même – il faut aussi écouter ce que disent les institutions dont nous examinons les crédits. Ils lui permettent de remplir pleinement les missions qui lui sont dévolues, son périmètre n’ayant pas connu d’évolution récente.

Avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

La parole est à M. Michel Canevet, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Canevet

Je suis plus que réservé sur cette augmentation de crédits. Je crois, au contraire, qu’il faudrait que l’on arrive à rationaliser le système et que l’on envisage de rattacher plutôt le Contrôleur général des lieux de privation de liberté au Défenseur des droits, qui a une vocation générale. Il importe d’introduire un peu de cohérence : à force de multiplier les institutions et les autorités administratives indépendantes, on s’y perd complètement. Il est temps de mettre un peu d’ordre. La logique voudrait que toutes ces institutions soient rassemblées.

Le message concernant les lieux de privation de liberté, dont on sait qu’ils sont surchargés, notamment les prisons, porterait beaucoup plus si le Défenseur des droits était chargé de cette mission. Il existe déjà des sections spécialisées au sein de l’institution du Défenseur des droits. Pourquoi ne pas en ouvrir une supplémentaire, spécialisée dans le contrôle des lieux de privation de liberté ?

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Je mets aux voix l’amendement n° II-685 rectifié bis.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Direction de l’action du Gouvernement », figurant à l’état B.

Je n’ai été saisi d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.

Je mets aux voix ces crédits.

Les crédits sont adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Nous allons procéder au vote des crédits du budget annexe « Publications officielles et information administrative », figurant à l’état C.

En euros

Mission / Programme

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Publications officielles et information administrative

Édition et diffusion

Pilotage et ressources humaines

Dont charges de personnel

62 731 055

62 731 055

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Je n’ai été saisi d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.

Je mets aux voix ces crédits.

Les crédits sont adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Nous avons achevé l’examen des crédits des missions « Pouvoirs publics », « Conseil et contrôle de l’État », « Direction de l’action du Gouvernement » et du budget annexe « Publications officielles et information administrative ».

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Le Sénat va examiner les crédits des missions « Remboursements et dégrèvements » et « Engagements financiers de l’État », des comptes d’affectation spéciale « Participation de la France au désendettement de la Grèce » et « Participations financières de l’État », des comptes de concours financiers « Accords monétaires internationaux » et « Avances à divers services de l’État ou organismes gérant des services publics », ainsi que de la mission « Investissements d’avenir » (et article 55).

La parole est à M. le rapporteur spécial.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascal Savoldelli

La mission « Remboursements et dégrèvements » est composée de deux programmes, le premier est consacré aux remboursements et dégrèvements d’impôts d’État, le second aux impôts locaux.

Les remboursements et dégrèvements d’impôts d’État sont évalués à 119, 2 milliards d’euros en 2021– une bagatelle ! Ce montant, déjà prodigieux, est de surcroît en augmentation de 1, 5 milliard d’euros par rapport à la prévision pour cette année. Ce nouveau bond s’inscrit dans le prolongement de la hausse quasi ininterrompue de ces crédits depuis 2010. Cela concerne donc au moins deux gouvernements.

D’où provient cette augmentation ? C’est simple, elle provient d’abord des remboursements de crédits de TVA, la part la plus importante des remboursements et dégrèvements d’impôts avec 56, 6 milliards d’euros. En sept ans, la sous-action relative aux restitutions de TVA a augmenté de 14, 2 milliards d’euros. Dès lors, madame la ministre, il est inutile de vous préciser que je considère comme absolument nécessaire de fournir aux parlementaires une information approfondie sur les causes de cette trajectoire de hausse !

Puisqu’il est question d’information approfondie, je rappelle que la Cour des comptes a estimé la fraude à la TVA à près de 15 milliards d’euros. Où et comment cette priorité est-elle gérée par le Gouvernement, madame la ministre ? Une action résolue permettrait de dégager de nouvelles ressources publiques, ce qui nous éviterait, par exemple, d’être suspendus à la décision de l’Union européenne de subventionner le plan de relance !

Lors des débats sur ce PLF pour 2021, j’ai aussi largement défendu la baisse des taux de TVA concernant les produits et les services essentiels aux personnes et à leur dignité. Je sais que la législation européenne nous contraint, mais la France doit être précurseur et leader, madame la ministre, comme dans d’autres domaines d’ailleurs, mais j’y reviendrai.

Un autre élément pèse sérieusement sur les remboursements et dégrèvements, à savoir le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE). Le coût de ce dispositif reste éminemment considérable pour les finances publiques, après avoir atteint quasiment 20 milliards d’euros en 2019. Inutile de mentionner le rapport éloquent de France Stratégie sur le sujet, largement cité dans l’hémicycle.

Par ailleurs, un autre élément abordé par cette mission concerne les coûts des grands contentieux fiscaux de droit de l’Union européenne, qui sont très élevés pour l’État. C’est un sujet qui ne souffre pas non plus d’un excès d’informations et de transparence.

Enfin, le dernier point que j’aborde ici est la question des « règlements d’ensemble ». Vous le savez, ils permettent à l’administration d’accorder au contribuable une minoration du montant des pénalités dues, mais également des droits demandés. Cette pratique est utilisée lors de redressements complexes, notamment en matière de fiscalité internationale.

Sur les 116 règlements d’ensemble opérés en 2019, portant sur une remise totale 1, 6 milliard d’euros, les droits ont été minorés de 1, 12 milliard d’euros. Si l’État renonce à percevoir autant d’argent au motif que les règles sont complexes, eh bien changeons les règles, cela rapportera plus d’argent à l’État ! Il y a là une problématique qui est posée, et pas n’importe laquelle : celle de l’égalité de traitement entre les contribuables.

Selon un rapport remis au Parlement, le règlement d’ensemble le plus important l’an dernier s’élève à 523 millions d’euros. Je n’entrerai pas dans le détail, mais il s’agit de Google, pour ne pas le citer.

Dans cette affaire, le tribunal administratif et la cour administrative d’appel de Paris avaient donné raison à l’entreprise au motif que « la société Google Ireland Limited ne dispose pas en France d’un établissement stable, au sens de la convention franco-irlandaise ». Mais pour solder l’affaire sur le plan pénal, Google avait décidé de transiger avec la justice et l’administration dans le cadre d’un règlement d’ensemble. Cette affaire m’inspire trois réflexions, madame la ministre.

Tout d’abord, nous devons inscrire dans le droit la notion d’établissement stable que, sur l’initiative des sénateurs communistes, le Sénat a adopté – j’en remercie d’ailleurs tous mes collègues.

Ensuite, l’administration fiscale espérait un redressement de 1, 1 milliard d’euros, mais elle n’obtient finalement que la moitié de cette somme. C’est pour le moins un accord a minima.

Enfin, ce règlement débouche sur une convention fiscale dérogatoire dont nous ne connaissons pas les termes.

En ce qui concerne à présent les dégrèvements et remboursements d’impôts locaux, en 2021, les crédits du programme s’effondrent, puisqu’ils passent de 23 milliards d’euros à 7 milliards d’euros.

Deux événements expliquent cette contraction. D’abord, la réforme de la taxe d’habitation et, ensuite, la réforme des impôts de production.

S’agissant de la réforme de la taxe d’habitation, il est utile de se rappeler que nous arrivons, en 2021, dans la deuxième phase de la réforme. Jusqu’ici, l’allégement introduit en loi de finances pour 2018 avait pris la forme d’un dégrèvement et, par voie de conséquence, son coût était retracé par la mission dont je rapporte les crédits.

La mise en œuvre progressive de ce dégrèvement s’était ainsi traduite par une hausse importante des crédits de la mission : 3 milliards d’euros supplémentaires en 2018, 6 milliards d’euros supplémentaires en 2019 et 14 milliards d’euros supplémentaires en 2020.

À compter de 2021, ce dégrèvement est transformé en exonération et le produit de la taxe d’habitation est perçu par l’État.

Au bilan, le Gouvernement s’attend à une diminution de l’ordre de 10 milliards d’euros de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), de la cotisation foncière des entreprises (CFE) et de la taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) acquittée par les entreprises.

Me voilà confronté à une contradiction, mais soyez rassurée, madame la ministre, cela n’effraie pas le dialecticien que je suis : la commission des finesses

Rires.

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascal Savoldelli

M. Pascal Savoldelli, rapporteur spécial. … a décidé de s’en remettre à la sagesse du Sénat, mais le rapporteur que je suis donne un avis défavorable !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Bascher

M. Jérôme Bascher, rapporteur spécial de la commission des finances. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je commencerai par citer Marx : « La politique, c’est l’art de chercher les problèmes, de les trouver, de les sous-évaluer et ensuite d’appliquer de manière inadéquate les mauvais remèdes. » Il s’agit, bien évidemment, de Groucho Marx et non de Karl Marx !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Bascher

Ces quelques mots résument parfaitement la politique financière menée par le Gouvernement, particulièrement la trajectoire des finances publiques depuis le début de ce quinquennat.

Je ne vais pas dire du mal de la gestion de la dette, madame la ministre, car les crédits sont en légère diminution en raison des effets de taux. Par ailleurs, l’Agence France Trésor gère particulièrement bien la dette de la France. Heureusement, car sans une agence aussi performante nous serions dans une panade financière bien pire !

J’en veux pour preuve la gestion des billets de trésorerie. Au moment où la France allait un petit peu mieux, elle a su diminuer son stock de billets de trésorerie pour, le moment venu, pouvoir émettre beaucoup de dette à court terme et à taux négatif, ce qui rapporte à notre pays.

Mais le sujet n’est pas la gestion, c’est la trajectoire des finances publiques – nous l’avons largement souligné lors de la discussion générale et de nos premières discussions sur le plan de relance. Au début de 2020, la France avait une trajectoire de dette inverse de celle de ses grands partenaires européens et des autres pays du monde : c’était un problème. Le temps était à la stabilisation, on était content, on était presque à 100 % du PIB, on était heureux, ça ne bougeait plus ! La dérive, je le dis en toute objectivité, a eu lieu en 2011.

En 2011, la France n’a pas infléchi sa trajectoire de dette. Depuis, elle n’a fait qu’augmenter toute seule, négligemment. Ce n’était pas important parce que les taux baissaient. Nous avons connu ce paradoxe incroyable qui a consisté à multiplier par deux notre dette par rapport au PIB tout en payant moins de charges d’intérêts. Voilà le vrai sujet, mes chers collègues, ne nous y trompons pas !

On nous dit que la dette au Japon atteint 240 % du PIB. Oui, mais le problème n’est pas la dette, ce sont les charges d’intérêts. Au Japon, les taux d’intérêt sont à zéro : ils paient donc zéro intérêt, contre 35 milliards pour la France. Voilà le problème !

Pour autant, le Japon est-il le modèle à suivre ? Eh bien non, car le Japon a une croissance également de zéro : si les taux d’intérêt y sont nuls, c’est que la croyance et l’espérance en l’avenir sont proches de zéro. Ce phénomène est lié à la transition démographique. Nous sommes dans le même cas de figure. Notre croissance potentielle est mauvaise. Je l’ai souligné dans la discussion générale, ce budget fait complètement l’impasse de la croissance potentielle : pas de politique familiale, pas de politique de recherche. Ce sont pourtant deux éléments fondamentaux.

J’ai entendu Bruno Le Maire, qui n’est toujours pas parmi nous

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Bascher

Selon un avis récent du Haut Conseil des finances publiques, la France sera moins riche en 2022 qu’en 2017, le PIB nominal aura baissé, voilà le bilan ! Et pendant ce temps, nous aurons augmenté notre dette et notre charge d’intérêts. C’est une vraie grande difficulté qui reste devant nous.

Quoi qu’il en soit, nous sommes sauvés : vous avez trouvé la martingale, à savoir un nouveau comité Théodule, comme pour l’article 24 de la proposition de loi relative à la sécurité globale, que j’évoquais dans ma précédente intervention, après Jean-Pierre Sueur. Vous proposez donc de créer un nouveau comité, composé de grands experts, qui sont tous très bons – je les connais personnellement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Bascher

Mais à quoi bon puisque, comme d’habitude, comme pour la loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022, vous ne tiendrez pas compte de leur avis ?

Vous votez une très belle trajectoire et vous l’abandonnez dès le lendemain de son vote ! Vous ferez ici la même chose !

Ils vous diront de baisser la dépense publique, ce que vous n’avez jamais fait, et de stimuler la croissance potentielle, ce que vous avez oublié de faire. Voilà, madame la ministre, et pour pas cher, les conclusions de votre comité Théodule, mais vous ne les verrez pas, car ce sera pour 2022, quand vous ne serez plus là !

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Murmures désapprobateurs sur les travées des groupes UC et RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Victorin Lurel

Monsieur le président, madame la ministre, chers collègues, le temps m’étant compté, je retiendrai trois points principaux de mon exposé.

Pour commencer, je citerai un élément de contexte. En 2020, la donne a sensiblement changé pour l’État actionnaire et sa doctrine. Telle la marée, l’ambition de 2017 a reflué.

En prenant les commandes, le Gouvernement a redéfini les contours de sa doctrine : les participations de l’État étaient conçues comme un placement « à la papa », lequel ne saurait échapper à la disruption en vogue à l’époque. Pour cela, un mouvement de « respiration » du portefeuille a été engagé, ce qui s’est concrétisé par la cession de la Française des jeux. La privatisation d’Aéroports de Paris devait suivre.

Trois ans plus tard, le « nouveau monde » accuse ses premières rides : à l’aune des événements exceptionnels que nous traversons, le Gouvernement a infléchi sa doctrine. Derrière cet élément de langage, c’est en réalité au retour de la conception qui prévalait jusqu’alors que nous assistons, avec la mobilisation de la prise de participation publique comme levier de politique économique.

Je ne peux qu’approuver ce retour à la raison : je suis convaincu que l’intervention en capital de l’État – je dis bien en capital – permet d’apporter une réponse, en soutien de nos entreprises, de nos savoir-faire et de nos emplois.

Toutefois, je m’étonne de constater la très faible consommation des 20 milliards d’euros de crédits exceptionnels ouverts dans le deuxième collectif budgétaire, puisque seulement 20 % d’entre eux ont été consommés. Malheureusement, la sincérité budgétaire semble faire partie des « victimes collatérales » de la crise sanitaire.

Lors de mes travaux, M. Martin Vial, commissaire aux participations de l’État, m’a indiqué qu’une recapitalisation de la SNCF devait intervenir avant la fin de l’année, pour pas moins de 4 milliards d’euros. Quelle ne fut pas ma surprise, quelques jours plus tard, de lire dans la presse que, pour le président de cette entreprise, cette opération « n’était pas à l’ordre du jour » !

Madame la ministre, comment expliquer cette situation ? Vous parlez d’une doctrine « infléchie », mais c’est plutôt le constat d’un État actionnaire « à genou » qui s’impose.

Deuxième point de mon exposé, ce constat ne peut qu’être renforcé par le dossier de la rentrée, qui continue de faire grand bruit et nous inquiète sur toutes les travées.

Je parle, bien évidemment, de l’acquisition de Suez par Veolia. S’il s’agit d’une affaire entre entreprises à capitaux privés, l’État actionnaire est indirectement concerné au titre de la participation qu’il détient dans Engie. Or, lors du conseil d’administration du 5 octobre dernier, l’État a été mis en minorité sur le vote de la résolution concernant l’offre d’acquisition par Veolia des 29, 9 % du capital de Suez détenus par Engie.

Dans cette affaire, au-delà des appréciations personnelles que nous pouvons avoir sur l’opportunité de la fusion, c’est bien la façon dont l’État actionnaire a appréhendé le dossier qui suscite mes interrogations. En effet, l’État a, sinon suggéré, du moins avalisé dès le premier semestre la décision d’Engie de recentrer ses activités et, partant, de mettre en vente sa participation au capital de Suez.

C’est pourquoi, madame la ministre, la surprise invoquée ne saurait justifier l’attentisme de l’État actionnaire face à l’offre de Veolia.

Mes chers collègues, sachez que le Gouvernement s’est montré, jusqu’à présent, peu coopératif. Non seulement Bruno Le Maire a perdu le chemin du Sénat, mais figurez-vous que son cabinet a décliné ma demande d’audition, jugeant que tel n’était pas « l’usage ». J’espère, madame la ministre, que vous jugerez que des interpellations en séance publique peuvent relever de « l’usage » !

Face au désengagement d’Engie, pourquoi l’État actionnaire n’a-t-il pas anticipé le besoin de recomposition de l’actionnariat de Suez ?

De deux choses l’une : si l’Agence des participations de l’État, prise de court par les turbulences de la crise sanitaire, n’a pas pu mener à bien cette recomposition, il faut le reconnaître.

Sinon, il vous faut assumer le sens de la stratégie consistant à « jouer la montre » qui, faute d’entente entre les parties, était vouée à l’échec. Quand deux des trois acteurs – Veolia et Engie – ont tout intérêt à aller vite, ce n’est pas, à mon sens, une position de neutralité.

Le troisième et dernier point de mon intervention concerne le débat sur les conditionnalités.

Le Gouvernement entend privilégier autant que possible une intervention directe en fonds propres et non en instruments de dette, assimilables à des fonds propres. L’objectif est clair : en contrepartie de son investissement, l’État veut être en mesure d’exercer une capacité d’influence sur la marche de l’entreprise.

Pourquoi, en ce cas, ne pas aller jusqu’au bout de la logique ? Dès lors que l’État entend exercer une capacité d’influence sur la marche de l’entreprise, les conditionnalités se justifient plus que pour tout autre type de soutien public.

Debut de section - PermalienPhoto de Victorin Lurel

Or le mécanisme en vigueur en la matière me semble bien trop timide : comment parler d’« engagements » alors que rien ne vient sanctionner leur non-respect ?

Laissez-moi vous faire part de ma conviction. Compte tenu de l’effort massif consenti par la puissance publique, je considère que ce soutien doit être assorti d’exigences.

Pour toutes ces raisons, la commission des finances n’a pas adopté les crédits du compte d’affectation spéciale « Participations financières de l’État ».

Applaudissements sur les travées du groupe SER.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

M. le président. La parole est à M. le rapporteur spécial.

Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Bizet

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le budget pour 2021 concernant les investissements d’avenir est caractérisé par deux éléments saillants : la poursuite du PIA 3 dans le contexte de la crise sanitaire, et le lancement d’un PIA 4 en soutien au plan de relance.

Je ne m’étendrai pas sur le PIA 3, si ce n’est pour saluer la souplesse dont cet outil a fait montre cette année. En effet, le secrétariat général pour l’investissement, le SGPI, a mobilisé plus de 1, 5 milliard d’euros pour soutenir financièrement les entreprises en difficulté ou encore renforcer les moyens dévolus à la recherche en santé.

Les programmes d’investissements d’avenir (PIA) ont permis d’apporter des réponses concrètes, ciblées et rapides aux défis posés par la crise sanitaire. La capacité de réaction du SGPI et des opérateurs mérite donc d’être saluée.

En 2021, certaines de ces initiatives devraient se poursuivre. Je pense, notamment, à la création d’une enveloppe d’investissement consacrée à la souveraineté technologique, intitulée « French Tech Souveraineté », et dotée de 100 millions d’euros dans le PLF pour 2021.

La crise a en effet souligné l’importance d’un renforcement de l’autonomie de notre pays dans le domaine des technologies d’avenir, ce qui m’amène à mon second point, à savoir le lancement d’un quatrième PIA.

Je tiens à rappeler, en préambule, qu’il avait été décidé de lancer ce programme avant l’émergence de la covid-19. Il va de soi, cependant, que la crise que nous traversons a fait émerger de nouvelles priorités.

Le PIA 4 est doté de 20 milliards d’euros et structuré en deux volets, qui répondent à des finalités distinctes.

Un premier volet, dit « dirigé », vise à financer des investissements exceptionnels, à hauteur de 12, 5 milliards d’euros.

Un second volet, dit « structurel », doit garantir, grâce à des dotations en capital, un financement pérenne aux écosystèmes d’enseignement supérieur, de recherche et d’innovation mis en place par le PIA, à hauteur de 7, 5 milliards d’euros.

Je ne m’étendrai pas sur les modalités de budgétisation et de gouvernance de ce PIA, qui sont sensiblement identiques à celles du PIA 3 et dérogent tout autant aux grands principes budgétaires.

Plusieurs aménagements sont néanmoins apportés à cette gouvernance, pour mettre en œuvre les recommandations du comité de surveillance des investissements d’avenir.

L’article 55, rattaché à la mission, détaille ces modifications : il s’agit, notamment, de la création d’un conseil interministériel de l’innovation pour décider des priorités de la politique d’innovation, du renforcement du rôle du comité de surveillance des investissements d’avenir et de la formalisation d’une doctrine d’investissement pour les investissements d’avenir.

Ces évolutions sont bienvenues ; elles contribueront à renforcer la cohérence et l’efficacité des investissements d’avenir.

Je voudrais enfin relever l’existence de plusieurs pierres d’achoppement dans ce quatrième programme.

Le lancement d’un nouveau programme semble augurer d’une pérennisation des investissements d’avenir. La prorogation de ces dispositifs dérogatoires aux règles budgétaires n’est pas problématique en tant que telle, tant que le Parlement demeure à même de suivre et de contrôler l’emploi des crédits qui sont votés.

Or il me semble que la maquette budgétaire qui nous est présentée risque d’aggraver le déficit de lisibilité dont souffrent les PIA, et ce pour deux raisons.

Tout d’abord, la liste des secteurs stratégiques qui bénéficieront d’un soutien dans le cadre du volet dirigé du PIA n’est pas encore arrêtée. Nous sommes donc appelés à voter des crédits sans savoir à quels secteurs ou filières ils seront destinés. Madame la ministre, si je comprends pleinement la logique qui sous-tend cette présentation, j’espère que vous nous exposerez dans les mois qui viennent les stratégies d’accélération qui seront retenues.

Je regrette, en parallèle, que deux programmes d’investissement d’avenir coexistent au sein de la mission.

Le suivi des montants inscrits dans le PIA 3 se révélait déjà particulièrement complexe, avec la double comptabilité induite par le circuit de la dépense, la dispersion des crédits, l’ampleur des redéploiements en cours de gestion… Avec ce nouveau PIA 4, qui financera les mêmes structures que le PIA, notre tâche risque de devenir encore plus ardue.

Pour terminer, je souhaiterais évoquer l’articulation entre les PIA et le plan de relance. En effet, le PIA 4 doit abonder le plan de relance à hauteur de 11 milliards d’euros sur les trois ans à venir.

À mes yeux, une clarification s’impose : les PIA constituent non pas un outil de relance, mais d’investissements à long terme afin de renforcer la croissance potentielle.

En pratique, le décaissement des crédits du PIA peut être particulièrement long : trois ans après le lancement du PIA 3, si 4, 7 milliards d’euros de crédits de paiement ont été consommés, seuls 750 millions d’euros ont été décaissés.

Par conséquent, madame la ministre, il me semble très ambitieux de considérer que les 11 milliards d’euros du PIA 4 pourront irriguer à très court terme le tissu économique français.

En dépit de ces quelques réserves, je vous propose d’adopter sans modification, mes chers collègues, les crédits de la mission.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

M. le président. C’était la dernière intervention de M. Bizet dans l’hémicycle, je tiens à lui exprimer toute notre estime.

Mmes et MM. les sénateurs, sur toutes les travées, se lèvent et applaudissent.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

La parole est à Mme Sophie Primas, au nom de la commission des affaires économiques.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l’an dernier, la commission des affaires économiques avait donné à ce budget un avis défavorable en raison, notamment, de ses doutes quant à la privatisation d’Aéroports de Paris et du manque d’information du Parlement.

Nous savons désormais que la privatisation n’aura pas lieu en 2021, mais de nouvelles interrogations émergent sur la stratégie de l’État actionnaire et sur la pertinence du fonds pour l’innovation et l’industrie (F2I). Par ailleurs, nous déplorons de nouveau le manque d’information du Parlement. Notre commission a donc donné, une nouvelle fois, un avis défavorable sur les crédits de ce compte.

L’information transmise au Parlement à propos de ce compte est bien trop lacunaire. Les montants sont « notionnels », c’est-à-dire qu’ils n’engagent en rien le Gouvernement et qu’ils ne permettent pas de connaître ses intentions en matière d’évolution du portefeuille. C’est ainsi par la presse, en dépit de nos questions, que nous avons appris, il y a dix jours, que des négociations sont en cours pour de nouveau renforcer les fonds propres d’Air France-KLM.

En outre, cet outil retrace de plus en plus des opérations qui n’ont pas de lien avec l’État actionnaire. La quasi-totalité des recettes de 2021 inscrites sur ce compte seront ainsi des versements budgétaires.

Il me semble pourtant que nous pourrions trouver des solutions plus appropriées pour la bonne information du Parlement. Aucun pan de l’action du Gouvernement ne saurait échapper à son contrôle : il s’agit là de l’une de ses missions constitutionnelles.

Ensuite, la stratégie même de l’État est source d’interrogations : il semble de plus en plus devenir actionnaire et de moins en moins stratège. Au fil de ses désengagements successifs, souvent pour des raisons budgétaires, l’État a perdu de son influence et de sa capacité à peser sur certaines décisions pourtant fondamentales pour notre souveraineté économique ou industrielle. Le fait qu’il n’ait pas pu, pas su ou pas voulu défendre ses intérêts dans l’épisode Véolia-Suez découle directement de la baisse continue de sa participation dans Engie.

De même, l’accord de cession des Chantiers de l’Atlantique à Fincantieri, toujours sur la table, illustre le privilège accordé au désengagement à court terme, alors même que cet accord est loin de présenter des garanties suffisantes, comme l’a montré un récent rapport du Sénat. Le risque est en effet important que l’acquéreur finisse par rapatrier une partie de sa production en Italie et qu’il procède à des transferts de technologie vers la Chine.

Ces constats sont particulièrement alarmants pour la reconquête de notre souveraineté économique et industrielle, qui nécessite au contraire un État doté d’une vision stratégique à long terme.

Enfin, la vraie nature du Fonds pour l’innovation et l’industrie apparaît de plus en plus clairement. C’est une usine à gaz budgétaire qui n’apporte rien de plus qu’une dotation budgétaire, mais qui possède deux inconvénients majeurs : d’une part, le Fonds soustrait au contrôle du Parlement le financement de l’innovation ; d’autre part, il ne garantit aucunement une stabilité à ce financement. Une clause de revoyure pour 2023 entraînera, en effet, une baisse de son rendement.

Voilà, mes chers collègues, les raisons qui conduisent la commission des affaires économiques à donner un avis très défavorable à l’approbation de ce compte.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque unité de discussion comprend le temps d’intervention générale et celui de l’explication de vote.

Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de dix minutes pour intervenir.

Dans la suite de la discussion, la parole est à Mme Nathalie Goulet.

Debut de section - PermalienPhoto de Nathalie Goulet

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la dette est une bombe à retardement pour les Français.

La France n’est pas classée parmi les pays frugaux, bien au contraire ! À cet égard, je me permets une observation : le montant de la dette atteindra 120 % de notre PIB, soit plus de 2 600 milliards d’euros, auxquels il faut ajouter le montant des engagements hors bilan qui représentent plus de 4 000 milliards d’euros, avec une dette non consolidée de 34 592 euros par habitant.

Le contrôle de la gestion de la dette échappe complètement au contrôle du Parlement. Nous sommes systématiquement mis devant le fait accompli. Cette situation valait déjà auparavant, mais la tendance s’est considérablement accélérée du fait de la crise sanitaire.

Les rapporteurs ont dit aujourd’hui à de multiples reprises qu’ils avaient été quelque peu empêchés dans leur mission de contrôle. D’autant que la LOLF, élaborée par l’excellent Alain Lambert, ne prévoit aucune barrière légale en matière de déficit, alors même que la « règle d’or » avait presque été adoptée lors de la réforme constitutionnelle de 2008. Cela s’était joué à une voix, et les calculs étaient différenciés. Le président Poncelet estimait que cette disposition avait été rejetée, tandis que du fond de mon siège, je ne faisais pas le même décompte…

Aucun dispositif n’est prévu pour limiter l’endettement ou assurer l’équilibre budgétaire. Il existe dans d’autres pays, notamment nordiques, des dispositifs légaux de frein à la dette ; nous devrions peut-être nous y intéresser.

On l’a vu avec la reprise de la dette de la SNCF, ou plus récemment avec celle de la dette de l’hôpital, qui nous a fâchés, madame la ministre, lors de la discussion de l’article 27 du projet de loi de financement de la sécurité sociale : c’était non pas à la sécurité sociale de prendre en charge la dette de l’hôpital, mais à l’État.

Le fait de jongler avec les dettes ne convient pas au contrôle parlementaire ! Vos choix manquent d’orthodoxie budgétaire ; ils sont même very unorthodox !

La dette nous rend de plus en plus dépendants à l’égard de la Banque centrale européenne (BCE). Il est donc nécessaire de reprendre une proposition que j’avais élaborée avec le rapporteur général de l’Assemblée nationale, Laurent Saint-Martin : organiser en début de session parlementaire un débat pédagogique et technique portant sur la dette.

En effet, de la dette vont dépendre nos capacités d’investissement et d’action. Elle obère aussi les capacités des générations futures. Un tel débat permettrait donc d’éclairer le Parlement.

Voyez à quelle allure nous menons les discussions budgétaires, tant sur les dégrèvements que sur la dette ou sur les autres missions : trois minutes de temps de parole accordées à des rapporteurs qui ont travaillé durant des semaines, cela équivaut à un témoignage, sûrement pas à une intervention !

Le deuxième point que je souhaite soulever concerne le comportement de l’État actionnaire.

Dans cet excellent ouvrage que je consulte régulièrement

Mme Nathalie Goulet brandit un « jaune » budgétaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Nathalie Goulet

Je considère que, de ce point de vue, l’État doit être absolument vertueux. Il ne saurait, par le biais de certaines de ses participations, se trouver mêlé à de telles opérations d’optimisation fiscale. C’est tout à fait inacceptable !

Le troisième point sur lequel je souhaiterais attirer votre attention concerne le franc CFA. Il s’agit d’une question d’actualité, puisque le président français Emmanuel Macron et le président ivoirien Alassane Ouattara ont décidé de mettre fin au franc CFA. J’ai commis un rapport sur ce sujet avec notre collègue Victorin Lurel.

Je souhaite vous entretenir de ce problème, madame la ministre, car je sais que doit arriver incessamment devant le Parlement le projet de loi qui va porter cette réforme, laquelle est purement cosmétique. On ne parviendra pas à empêcher les idées reçues ni remédier au désamour que connaît la France dans les pays africains avec une telle réforme !

Plutôt que lancer cette réforme, encore une fois cosmétique, mieux vaudrait mettre un terme complet au franc CFA, en arrêtant les réserves de change et en laissant les pays africains s’occuper en responsabilité de leurs convertibilités.

Le hiatus est trop grand entre la technique du franc CFA et la façon dont celle-ci est reçue dans les pays d’Afrique qui l’appliquent. C’est la raison pour laquelle je serais favorable à une réforme beaucoup moins cosmétique et beaucoup plus sérieuse.

J’en ai fini avec l’exposé de mes observations, sans pour autant avoir obéré le temps de parole de mes successeurs à cette tribune.

Applaudissements sur les travées du groupe UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Franck Menonville

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous examinons aujourd’hui les crédits de trois missions distinctes : « Remboursements et dégrèvements », « Engagements financiers de l’État » et « Investissements d’avenir ». Au vu de la diversité de ces missions et des programmes y afférents, je m’efforcerai d’être synthétique.

L’intérêt de cette discussion réside surtout dans le lien entre les engagements du passé et les investissements du futur. Notre dette publique montre en effet combien les décisions que nous avons prises par le passé pèsent sur notre futur. En l’occurrence, l’année 2020 s’est avérée particulièrement lourde de conséquences. En moins d’un an, notre taux d’endettement a bondi de 20 points de PIB.

En clair, les décisions que nous avons prises dans le feu de l’action de cette crise pèseront encore longtemps sur nos décisions en matière économique et surtout sur nos finances publiques, qui s’en trouveront durablement dégradées.

Un chiffre, parmi les 39 milliards d’euros de la mission « Engagements financiers de l’État », illustre bien cette réaction soudaine : les crédits ouverts sur le programme 114, « Appels en garantie de l’État », ont été multipliés par 26, à cause du déploiement massif des prêts garantis par l’État pour soutenir nos entreprises.

Cette dynamique d’endettement, aussi impressionnante qu’elle puisse paraître, comporte néanmoins un paradoxe, qui fait figure de moindre mal : alors que notre dette explose, la charge de la dette, elle, diminue. L’annulation de 2 milliards d’euros de crédits trahit, à cet égard, la politique européenne de taux bas qui caractérise le contexte macroéconomique actuel. Mais cela durera-t-il ?

Cette baisse en trompe-l’œil contraste nettement avec l’explosion des besoins de financement, qui sont passés de 220 milliards à 362 milliards d’euros. Cette situation a, en outre, obligé l’État français, pour la première fois de son histoire, à se financer par l’emprunt plus que par l’impôt.

Après ce tableau plutôt sombre et préoccupant de la situation financière, je souhaiterais conclure mon propos en évoquant le quatrième programme d’investissements d’avenir, lequel est source de satisfaction.

Après avoir consacré 57 milliards d’euros depuis 2010 aux trois premiers volets de cette stratégie, l’intégration du PIA 4 et de ses 11 milliards de crédits au plan de relance nous laisse espérer que notre pays se donnera les moyens de renouer au plus vite avec une croissance renouvelée et durable de long terme.

Les PIA permettent d’accompagner notre pays vers des stratégies d’avenir indispensables, comme l’a dit M. le rapporteur spécial Jean Bizet, même si nous attendons encore de connaître les périmètres stratégiques retenus.

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, malgré tous ces motifs d’incertitude, le groupe Les Indépendants votera, en responsabilité, les crédits de ces missions.

Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Taillé-Polian

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, il est en effet difficile, en quatre minutes, d’aborder des sujets, certes connexes, mais dont les enjeux sont si importants et divers.

La mission « Engagements financiers de l’État » est en hausse, par deux biais : l’augmentation de la dette publique, d’une part, et la multiplication des garanties de l’État face à la crise. Cela témoigne du soutien de l’État à l’économie, et nous nous en félicitons. Mais le choix gouvernemental d’en passer par l’emprunt sur les marchés financiers doit être interrogé.

Cet argent aurait pu être levé différemment, notamment sur l’épargne surnuméraire issue de la crise. Plutôt que de recommander à nos concitoyens qui ont pu épargner de consommer à tout prix – une course à la consommation antagoniste de la lutte contre la crise climatique –, on aurait pu susciter un élan républicain. On parle en effet beaucoup de République, mais aussi du séparatisme des plus aisés !

M. Sébastien Meurant s ’ exclame.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Taillé-Polian

Lever cette épargne accumulée via un emprunt aurait évité que l’on ne soit de plus en plus soumis aux marchés financiers, dont on sait que la bulle spéculative s’éloigne toujours davantage de l’économie réelle. Voilà une question qu’il convient de se poser.

Il est clair, et nous en sommes pleinement d’accord, qu’il est nécessaire d’investir. J’en viens donc à la mission « Investissements d’avenir » : nous considérons que le fait d’investir dans l’avenir est absolument essentiel et que la création de ce quatrième programme est une bonne nouvelle.

Cela dit, il n’a pas été pris acte que se posait, dans les programmes précédents, un problème de décalage entre les montants inscrits et la réalité des décaissements. La capacité à agir sur l’économie réelle semble donc être déconnectée des nécessaires réponses à apporter, face à la crise extrêmement violente qui affecte notre économie.

Nous regrettons également – je n’ai pas cessé de le dire et c’est un leitmotiv dans ces débats budgétaires – le manque de ciblage, et notamment d’écoconditionnalité. Je sais, car cela a été beaucoup dit au cours des différents débats, que ces investissements d’avenir sont liés à une doctrine gouvernementale. Cela ne justifie pas que l’on renonce à une conditionnalité suffisante sur les questions environnementales et sociales !

Par ailleurs, on peut s’interroger sur la cohérence entre la politique gouvernementale et l’action du Haut-Commissariat au plan, une instance qui semble avoir disparu après qu’elle a émis une note, le 28 octobre dernier. Cette note était d’ailleurs assez étonnante puisqu’elle en appelait à la décroissance…

S’agissant des participations financières de l’État, nous sommes nombreux à nous être interrogés au cours de cette discussion générale sur la réelle volonté de l’État d’intervenir dans l’économie en tant que stratège. Dans le dossier Veolia-Suez, de nombreux questionnements portent sur la capacité de l’État à exister véritablement dans les conseils d’administration et à se faire entendre.

Des voix se sont élevées à plusieurs reprises, au moment de la crise, pour que l’État prenne ses responsabilités face à la fermeture d’usines. Je pense à Luxfer, à Gerzat dans le Puy-de-Dôme, seule entreprise en Europe à fabriquer des bouteilles d’oxygène à usage médical. Peut-être aurait-il fallu, en l’occurrence, une intervention directe de l’État ?

Pour ce qui concerne la mission « Remboursements et dégrèvements », nous partageons nombre des propos qui ont été tenus par M. le rapporteur spécial Pascal Savoldelli. Nous nous interrogeons ainsi, avec d’autres, sur la question de la fraude à la TVA, et notamment sur l’explosion de l’enveloppe, alors même que les moyens dont dispose l’État pour contrôler sont en baisse.

Pour toutes ces raisons, nous nous prononcerons globalement contre les budgets de ces missions, qui nous laissent interrogatifs.

Applaudissements sur les travées du groupe GEST.

Debut de section - PermalienPhoto de Thani Mohamed Soilihi

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous abordons la discussion commune de trois missions budgétaires reflétant, il faut le dire, le dynamisme de l’action de l’État.

Tout d’abord, les crédits de la mission « Engagements financiers de l’État » sont d’un montant de 39, 2 milliards d’euros en 2021, en hausse de 1, 93 % par rapport à 2020. Cette mission représente ainsi la troisième mission du budget général de l’État en crédits de paiement.

Deux programmes sur cinq, le programme 117, « Charge de la dette et trésorerie de l’État », d’une part, et le programme 114, « Appels en garantie de l’État », d’autre part, représentent à eux seuls 99 % des crédits. Nous pouvons formuler deux remarques à ce propos.

D’une part, la charge de la dette reste maîtrisée, et ce malgré un contexte exceptionnel : la hausse de l’endettement public de près de 20 points de PIB et un besoin de financement important. Ce niveau contenu peut s’expliquer, d’abord, par la qualité de la gestion de la dette par l’Agence France Trésor, ensuite, par un contexte de taux très favorable, et enfin par les engagements de la BCE, qui a lancé un programme de rachat de titres pour 1 350 milliards d’euros.

D’autre part, les garanties octroyées par l’État constituent le principal facteur de hausse des crédits de la mission. Ce montant tout à fait exceptionnel, multiplié par 26 pour 2021, vise à faire face aux conséquences de la crise sanitaire.

Sur la mission « Investissements d’avenir », le budget pour 2021 est caractérisé par deux éléments notables : la poursuite du programme des investissements d’avenir dans le contexte de crise sanitaire, et le lancement d’un PIA 4, en soutien du plan de relance. Ce programme participera à hauteur de 11 milliards d’euros sur trois ans au plan de relance, dont 6, 5 milliards d’euros pour financer des investissements stratégiques et 4, 5 milliards d’euros pour les écosystèmes d’innovation.

Au travers du PIA, il sera question de cibler certains secteurs, marchés et technologies qui sont considérés comme prioritaires pour la résilience et la souveraineté de notre économie, ainsi que pour la transition écologique et énergétique.

Enfin, le budget pour 2021 relatif aux remboursements et dégrèvements constitue une rupture depuis 2010, puisqu’une baisse très nette de 15 milliards d’euros portera les crédits de la mission à 126 milliards d’euros.

Cette baisse s’explique par plusieurs facteurs, et tout d’abord, en partie, par l’évolution spontanée des recettes. Du fait de la crise économique, les entreprises ont pu obtenir le remboursement accéléré de leur crédit d’impôt de TVA et de certains crédits d’impôt sur les sociétés.

Ensuite, cette baisse peut s’expliquer par l’augmentation du coût des contentieux fiscaux pour près de 4 milliards d’euros.

Enfin, et pour la première fois depuis 2013, la dépense s’inscrit en nette diminution et recule de 26 milliards d’euros.

En matière d’impôts d’État, cette évolution s’explique par le contrecoup des fortes hausses enregistrées en 2020, lesquelles ne se renouvelleront pas en 2021. En matière d’impôts locaux, la suppression du dégrèvement de taxe d’habitation pour 80 % des ménages fera diminuer la dépense de 14, 2 milliards d’euros, tandis que la réforme des impôts de production conduira à une baisse de 2, 1 milliards d’euros.

Pour l’ensemble de ces raisons, le groupe RDPI votera les crédits de ces trois missions discutées simultanément.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Bilhac

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, comme chaque année, l’établissement de l’ordre du jour du PLF nous conduit à examiner en une seule et même discussion trois missions et quatre comptes financiers et spéciaux, qui touchent à des sujets pourtant assez différents, et dont les budgets additionnés s’élèvent à près de 200 milliards d’euros !

Le Gouvernement prévoit en 2021 : des restitutions d’impôts aux particuliers et aux entreprises toujours élevées, quoique en baisse dans la mission « Remboursements et dégrèvements » ; une charge de la dette maîtrisée dans la mission « Engagements financiers de l’État » ; la dernière phase du PIA 3 et le début d’un PIA 4 dans la mission « Investissements d’avenir ».

La mission « Remboursements et dégrèvements », au libellé certes peu engageant, reflète néanmoins la gestion du recouvrement des impôts par l’administration fiscale. À 126 milliards d’euros contre 141 milliards l’an dernier, elle concerne toujours principalement les impôts d’État, en particulier la TVA et l’impôt sur le revenu.

Je rappellerai à ce titre l’initiative, prise par le groupe du RDSE et notre ancien collègue Yvon Collin, d’un débat sur la fraude à la TVA transfrontalière, qui s’était tenu l’an dernier sur ce sujet majeur et pourtant mal connu.

Pour ce qui concerne la mission « Engagements financiers de l’État », la charge de la dette, portée par le programme 117, reste sous le seuil symbolique des 40 milliards d’euros, et continue même de décroître. C’est une bonne nouvelle à court terme, bien qu’il s’agisse toujours – ne l’oublions pas – du troisième poste budgétaire de l’État, après l’enseignement et la défense !

Le risque de taux sera remplacé petit à petit par un risque de volume de la dette, désormais colossale. Les atouts de la France en la matière restent les mêmes : liquidité et maturité raisonnable de sa dette publique. La diversité des détenteurs lui permet de ne pas dépendre d’un seul ou de quelques-uns qui feraient peser sur notre pays un risque pour sa souveraineté.

Rappelons néanmoins que la France est, avec le Royaume-Uni, le seul pays au monde à ne pas avoir fait défaut sur sa dette depuis plus de deux siècles.

Le désendettement de la Grèce reste un sujet d’actualité, alors que nous reversons à nos partenaires hellènes les intérêts perçus sur les emprunts qu’ils ont dû contracter. Il faut saluer les importants efforts effectués par ce pays depuis 2010 pour redresser ses finances publiques avec, il est vrai, un coût social élevé. Aussi, nous devons nous assurer que les intérêts perçus sont bien remboursés intégralement à l’État grec, car il serait incompréhensible de réaliser des profits sur ce compte.

J’en viens maintenant à la mission « Investissements d’avenir », qui a pour objet principal le soutien à la recherche, domaine crucial pour l’avenir de notre pays.

La diminution du PIA 3 est en trompe-l’œil puisque les investissements d’avenir vont continuer sous une quatrième forme, portée par l’article 55 rattaché. On serait tenté d’y voir une sorte de continuité, malgré la rupture importante que nous avons vécue cette année en matière de dépenses publiques.

Comment le Gouvernement compte-t-il articuler la montée en charge de ce nouveau PIA et les crédits du plan de relance dont nous allons terminer l’examen ce soir ?

Après ces quelques remarques nécessairement courtes, je précise que le groupe du RDSE devrait approuver les crédits de ces différentes missions.

Debut de section - PermalienPhoto de Fabien Gay

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, « c’est une chose redoutable que les propos du peuple animé par le ressentiment, et l’on paye toujours sa dette à la malédiction populaire », disait l’Agamemnon d’Eschyle.

Nos concitoyennes et nos concitoyens sont attentifs aux dépenses, aux politiques, mais également aux modalités de financement. La dette ? L’impôt ? Les taxes ? Pour qui ? Combien ?

Lors de l’examen de la première partie du projet de loi de finances, ce n’est pas faute d’avoir proposé de taxer ceux qui bénéficiaient de la crise et de ceux dont le revenu a augmenté, qu’il s’agisse des grandes entreprises, des géants du numérique ou des 1 % de nos concitoyens les plus aisés !

Ce n’est donc pas une fatalité, c’est un choix politique délibéré et assumé : vous n’augmenterez pas les impôts des plus riches. L’explosion de la dette publique à 120 % aujourd’hui n’était pas inéluctable ; vous l’assumerez.

La phrase devenue célèbre du Président Macron, selon laquelle « il n’y a pas d’argent magique », nous surprend. Notre pays émet des titres à moyen terme à un taux d’intérêt de 0, 2 %, et à court terme à des taux négatifs. On nous paye donc pour financer nos investissements et nos services publics. Je ne sais pas si l’argent est magique, mais la planche à billets n’a jamais produit autant de milliards !

Le poids des intérêts de la dette, il faut que les Français le sachent, diminue tous les ans. L’année dernière, cette dépense s’élevait à 8, 63 % des dépenses totales de l’État. Entre 2019 et 2021, la charge de la dette a diminué de 5 milliards d’euros et elle ne représente plus que 37 milliards d’euros chaque année. C’est bien peu au regard du volume de dette, qui devrait atteindre 2 500 milliards d’euros en 2021.

En outre, la BCE a pris en charge ce surplus d’émissions dû à la crise sanitaire. Pourquoi nous parler d’un cantonnement de la dette covid ? Elle a été rachetée en totalité par la BCE !

Nous sommes prévenus : après la crise, ce sera « réforme structurelle » et « réduction des dépenses publiques ». Traduction : réforme des retraites et politique austéritaire !

Encore une fois aveuglés par votre libéralisme dogmatique, aveugles au contexte, vous refusez l’investissement public. Pourtant, même le Fonds monétaire international (FMI) encourage tous les États à investir ! Je le cite : « Une augmentation de 1 % du PIB des investissements publics pourrait augmenter le PIB de 2, 7 %, l’investissement privé de 10 % et, surtout, créer entre 20 et 33 millions d’emplois, directement et indirectement. »

Investir par la dette ? Oui, mais dans quoi ? Mes chers collègues, il faut renforcer nos services publics !

Prenons l’exemple de l’énergie. C’est un bien commun, et un service public national au croisement des enjeux environnementaux, sociaux, d’égalité et de souveraineté industrielle.

Votre stratégie, madame la ministre, consiste aujourd’hui en un désengagement progressif de l’État dans deux entreprises, et surtout en la désintégration de deux entités, EDF avec le projet Hercule et Engie avec un projet de scission de l’entreprise en deux. En voici les conséquences : hausse des tarifs pour les usagers ; détérioration des conditions de travail et perte de statut pour les salariés ; perte de savoirs et de maîtrise industrielle.

En revanche, les dividendes augmentent toujours davantage. L’État, via l’Agence des participations de l’État (APE), détient actuellement 83, 6 % du capital d’EDF et uniquement 23, 6 % d’Engie, dont il prévoit depuis la loi pour la croissance et la transformation des entreprises, dite loi « Pacte », de se désengager totalement.

Il est impératif de changer le statut de ces deux entreprises. Il faut retrouver un véritable service aux usagers, grâce à la création d’un établissement public. Le marché nous a montré ce qu’il engendrait ; retrouvons un monopole d’État pour l’énergie afin de garantir un service de qualité pour tous, indépendamment des intérêts financiers. Se chauffer, se laver, se nourrir, cela ne saurait être mis à mal par la distribution de dividendes !

La relance doit être l’occasion de rappeler nos fondamentaux, et notamment l’investissement public. La dette n’est pas le problème, mais bien la solution. Cessez de vouloir nous apitoyer en évoquant son poids pour les générations futures ! C’est en agissant pour celles qui vivent aujourd’hui que les suivantes vivront dignement.

Nous ne voterons pas les crédits de cette mission.

Applaudissements sur les travées du groupe CRCE.

Applaudissements sur les travées du groupe SER.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Cozic

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, en 2020, les remboursements et dégrèvements devraient atteindre 152 milliards d’euros. C’est en 2016 qu’ils ont dépassé la barre symbolique des 100 milliards d’euros. Depuis le début des années 2000, l’augmentation est ainsi de 5 % par an en moyenne.

Avec la crise sanitaire, et donc incidemment la crise économique, ce budget pour 2021 constitue une rupture puisque la dépense devrait fortement diminuer et s’établir à 126 milliards d’euros, pour la première fois depuis 2013. Ce recul serait de 26 milliards d’euros.

En matière d’impôts locaux, la suppression du dégrèvement de la taxe d’habitation pour 80 % des ménages fera diminuer la dépense de 14, 2 milliards d’euros, tandis que la réforme des impôts de production conduira à une baisse de 2, 1 milliards d’euros.

Il est également à noter que les années 2020 et 2021 devraient aboutir à la clôture budgétaire de procédures contentieuses longues et très coûteuses pour l’État.

En 2020, les dépenses au titre des contentieux de série atteindront ainsi près de 4 milliards d’euros, auxquels s’ajoutent 2, 6 milliards d’euros au titre d’un contentieux exceptionnel portant sur l’impôt sur les sociétés.

Sur proposition de ma collègue députée Christine Pires Beaune, l’Assemblée nationale a adopté l’année dernière un amendement tendant à demander au Gouvernement de publier les informations relatives aux « règlements d’ensemble ». Je note que ce processus permet désormais à l’administration fiscale de négocier les droits et les pénalités dus par un contribuable faisant l’objet d’un contrôle fiscal.

Un fait, toutefois, suscite une interrogation : ce processus n’est pas encadré par les textes et, à l’inverse de la transaction, il n’empêche pas l’action contentieuse ultérieure. L’administration y a recours lorsque le quantum des rectifications est difficile à établir ou lorsqu’il existe un fort aléa juridique.

Néanmoins, grâce à ce processus, ce sont près de 1, 6 milliard d’euros de modérations qui ont été consenties, dont 1, 1 milliard d’euros portant sur les droits ; près du tiers concerne une seule opération.

Ce processus peut s’entendre, car il revêt un caractère relativement efficient en termes de retour de l’impôt. Toutefois, eu égard aux enjeux qui lui sont liés et en raison de ses implications du point de vue de l’égalité de traitement entre les contribuables, il paraît primordial de connaître précisément le mode opératoire de ce processus, ainsi que la manière dont il opère. Une traduction législative claire et précise en matière de règlements d’ensemble me paraît ainsi nécessaire. Elle permettrait aussi d’améliorer le recouvrement de l’impôt.

Nous voterons en l’état les crédits de la mission « Remboursements et dégrèvements ».

La mission « Investissements d’avenir » appelle, elle aussi, plusieurs remarques.

La gestion des autorisations d’engagement et celle des crédits de paiement varient sensiblement au sein de cette mission, pour des raisons logiques et évidentes.

Si les trois programmes préexistants ne bénéficient d’aucune ouverture de crédits en autorisations d’engagement, deux nouveaux programmes sont créés dans le cadre du plan de relance, abondés à hauteur de 16, 563 milliards d’euros. On note à cet égard une divergence, liée sans doute à la pluriannualité, par rapport aux annonces gouvernementales.

On peut raisonnablement penser que le PIA 4 s’engage sur des bases très fragiles, dans la mesure où les priorités d’investissement demeurent particulièrement floues. À l’aune des retours sur expérience dont nous disposons en la matière, cette situation se traduira sans conteste par une consommation réelle de crédits très inférieure aux objectifs annoncés. En tout cas, c’est très clairement ce qui s’est passé pour la fin de l’exécution du PIA 3, ainsi qu’en atteste de manière incontestable le « bleu » budgétaire présenté par le Gouvernement.

Pourtant, nous passer de ces crédits d’investissement me paraît une grave erreur, a fortiori dans le contexte de crise économique que nous traversons, qui rend nécessaire une relance économique forte. Avec la perte en cascade de nos industries, couplée à la tertiarisation de notre société, la France va devoir s’adapter et innover pour rayonner encore dans le monde.

En particulier, nous devons nous tourner vers les secteurs d’innovation non délocalisables, qui sont vecteurs d’un savoir-faire bien français.

La France est le douzième pays le plus innovant au monde en 2020, selon l’indice international GII. Mais nous nous plaçons derrière les deux autres pays européens de taille comparable, le Royaume-Uni et l’Allemagne, et nous ne sommes qu’au huitième rang en Europe. Nous ne pouvons nous en satisfaire ! Nous devons donc continuer d’avancer, avec plus d’audace.

Pour ces raisons, nous nous abstiendrons sur la mission « Investissements d’avenir », en l’état.

Quant à la mission « Engagements financiers de l’État », elle traduit la nécessité pour l’État de s’assurer de son financement en toutes circonstances. Nous en voterons les crédits, en hausse de 1, 93 %, de 38, 5 à 39, 2 milliards d’euros, pour les six programmes qui la constituent.

Madame la ministre, je souhaiterais que le Gouvernement établisse des tunnels de prévision sur le poids de la dette, en fonction des évolutions potentielles des taux d’intérêt. Ces données éclaireraient utilement la représentation nationale, alors que la dette représente désormais 120 % de notre PIB – ce qui, vous me le concéderez, n’est pas rien…

Applaudissements sur les travées du groupe SER.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laménie

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la mission « Remboursements et dégrèvements », qui appelle plusieurs thèmes de réflexion, déjà bien abordés par les rapporteurs spéciaux, que je félicite, et les autres orateurs, revêt une importance particulière.

Notre collègue Pascal Savoldelli l’a rappelé : cette mission représente 126 milliards d’euros. Ce montant important correspond notamment aux remboursements et dégrèvements d’impôts locaux, dans un contexte qui est source d’inquiétudes pour les collectivités territoriales, notamment du fait de la réforme de la taxe d’habitation. Les réformes envisagées en matière d’impôts de production, dont nous avons débattu en première partie, suscitent, elles aussi, des inquiétudes.

La mission « Engagements financiers de l’État », avec ses comptes spéciaux associés, est la troisième mission du budget, avec 39, 2 milliards d’euros répartis en six programmes, dont deux concentrent la quasi-totalité des crédits.

D’abord, le programme 117, « Charge de la dette et trésorerie de l’État », est essentiel, alors que l’augmentation de notre endettement suscite de légitimes inquiétudes de la part de tous. À 35 milliards d’euros, la charge de la dette, dont la gestion est assurée par l’Agence France Trésor, est certes maîtrisée – elle s’élevait à 44 milliards d’euros environ en 2013 –, mais c’est grâce à la baisse des taux d’intérêt.

Au-delà de ce contexte favorable, la détérioration du déficit dans le contexte de la crise sanitaire et de la conjoncture économique qui en résulte est source de vives préoccupations. Le soutien aux entreprises, en particulier, est nécessaire, mais il conduit à un creusement très marqué du déficit. De fait, le besoin de financement pour 2021 est estimé à 282 milliards d’euros.

Ensuite, le programme 114, « Appels en garantie de l’État », dont les crédits sont multipliés par 26 pour atteindre 2, 5 milliards d’euros. C’est la conséquence des dispositifs de soutien aux entreprises, auxquels le Gouvernement et nous-mêmes sommes particulièrement attachés, tant le monde économique a besoin d’être aidé.

Je n’oublie pas non plus l’importance de la mission « Investissements d’avenir ».

À propos du compte spécial « Participations financières de l’État », vous comprendrez que je mentionne la SNCF, chère à mon cœur. La reprise de la dette de cette entreprise est engagée, pour 35 milliards d’euros ; les inquiétudes entourant cette opération ont été abordées en commission des finances.

Dans un contexte qui n’est pas simple, nous nous conformerons aux avis de la commission des finances.

Nous tenons à remercier amicalement notre collègue Jean Bizet pour son engagement.

Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

M. le président. La parole est à Mme Christine Lavarde.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Christine Lavarde

Madame la ministre, je ne traiterai que de deux missions.

S’agissant de la mission « Remboursements et dégrèvements », monsieur le rapporteur spécial, je dois vous dire, malgré l’amitié que je vous porte, que le groupe Les Républicains ne saurait partager certains passages de votre rapport.

Ainsi, nous ne pensons pas que les montants des restitutions d’impôt aux entreprises témoignent du caractère vicié des fondements de l’Union européenne. Non, nous ne pensons pas non plus que l’Union européenne grève les finances de l’État de plusieurs dizaines de milliards d’euros pour favoriser la circulation des capitaux et l’égalité de traitement entre les entreprises européennes. Non, nous ne pensons pas davantage que l’Union européenne joue le rôle de cheval de Troie du néolibéralisme.

Debut de section - PermalienPhoto de Christine Lavarde

Nous considérons également que les critiques qu’il formule sur les remboursements aux entreprises au titre du crédit d’impôt recherche (CIR) sont quelque peu exagérées…

Debut de section - PermalienPhoto de Christine Lavarde

Si nous le rejoignons pour constater le coût de cette dépense fiscale, certes considérable, plusieurs études ont été entreprises pour essayer d’évaluer les effets économiques de celle-ci. Or il ressort des travaux les plus récents sur le sujet, menés en 2019 par la Commission nationale d’évaluation des politiques d’innovation, que le CIR a un effet multiplicateur supérieur à un. Ce n’est pas vraiment ce qui transparaît à la lecture du rapport ; en particulier, il y est soutenu que, lorsque le coût de la recherche diminue de 10 %, les dépenses de recherche n’augmentent, elles, que de 5 %.

Nous pensons plutôt que le CIR constitue une aide à l’innovation et doit être préservé pour soutenir l’effort de recherche de notre pays.

Je conclurai sur cette mission en posant une question au Gouvernement, au sujet du contentieux lié à la contribution au service public de l’électricité (CSPE).

Au titre de ce contentieux, 55 000 réclamations préalables avaient été déposées, et 14 000 requêtes ont été portées devant le tribunal administratif. Le risque budgétaire avait été évalué à 5 milliards d’euros, et la provision dans les comptes de l’État s’élevait, au 31 décembre 2017, à 1, 2 milliard d’euros.

Dans un arrêt du 3 décembre 2018, le Conseil d’État a fixé les règles du contentieux. Puis, en juillet 2018, la Cour de justice de l’Union européenne a confirmé que la CSPE pouvait être remboursée partiellement, à proportion de la part consacrée à des finalités autres que sa finalité environnementale. À la suite de cette décision, le coût du contentieux pour l’État a été réduit à 500 millions d’euros, sous réserve d’un remboursement rapide pour éviter le paiement d’intérêts moratoires.

En tant que rapporteur spécial de la mission « Écologie, développement et mobilités durables », je m’étonne de ne trouver absolument aucune mention de ce contentieux dans le projet annuel de performance de la mission « Remboursements et dégrèvements », alors même que, au sein de la mission « Écologie, développement et mobilités durables », le programme 174 supporte 5 millions d’euros de frais de gestion.

Où sont donc passés les 500 millions d’euros – un montant subordonné, je le rappelle, à un remboursement rapide ?

J’en viens à la mission « Engagements financiers de l’État », dans un contexte où, avec la crise, la question de la dette française se repose, de manière vraiment urgente.

Le niveau de la dette inquiétait dès avant la pandémie de covid : en juin 2019, le FMI a exprimé des inquiétudes quant au niveau trop élevé de notre dette – une analyse qui résonne encore plus aujourd’hui.

Au-delà de son seul niveau, c’est aussi la structure de la dette qui doit nous inquiéter, puisque, en 2019, elle était détenue à près de 70 % par des non-résidents, notamment par la BCE. Si, demain, la BCE doit revoir sa stratégie d’intervention, notamment pour satisfaire la cour constitutionnelle de Karlsruhe, la Banque de France sera limitée dans ses capacités d’intervention sur le marché secondaire, en sorte que la dette nationale sera beaucoup plus sensible aux exigences des marchés.

Comme cela a déjà été souligné, le coût de la dette est décorrélé du montant de celle-ci. En effet, malgré son niveau abyssal – les besoins d’emprunt, avant même le deuxième confinement, étaient évalués dans le « bleu » à 260 milliards d’euros –, la France continue d’emprunter à des taux négatifs : -0, 11 % en moyenne cette année.

Cette décorrélation entre le niveau et la charge de la dette envoie, nous le répétons, un mauvais signal : elle laisse croire que nous gagnons de l’argent en nous endettant. Or, comme le Trésor l’a montré, une faible remontée des taux aurait des conséquences significatives sur la charge d’intérêts. Nous avons donc tous une épée de Damoclès au-dessus de notre tête.

C’est la raison pour laquelle, en première partie comme en seconde, le groupe Les Républicains a déposé des amendements visant à soutenir le tissu économique en ayant recours à l’épargne privée plutôt qu’à l’argent magique.

Encore faut-il ajouter que le volume d’endettement a été artificiellement maîtrisé, par deux outils.

D’une part, l’État recourt à l’avance de l’Union européenne pour près de 40 milliards d’euros, dont 17 milliards d’euros pour la seule année 2021, dans le cadre du plan de relance Next Generation. Ces financements sous forme de subventions viennent amoindrir l’incidence du plan de relance sur le solde, donc notre besoin d’endettement. Il faudra pourtant bien rembourser, et on ne sait pas comment…

D’autre part, l’État a utilisé un dispositif assez intéressant à court terme : les primes d’émission sur des souches anciennes. Aujourd’hui, les investisseurs nous donnent de l’argent pour bénéficier de ces souches anciennes. Mais la conséquence directe est que nous allons devoir rembourser plus vite et à un coût plus élevé. La Cour des comptes a évalué à 1 305 milliards d’euros les montants à rembourser d’ici à 2030, dont 599 milliards d’euros dès 2023. Le mur se rapproche de nous !

Le remboursement de la dette, je le répète, est un pari qui nous engage tous.

Madame la ministre déléguée, lors de la présentation du projet de loi de finances pour 2020 par le Trésor et la direction générale du budget, un tableau a fait son apparition dans lequel on trouve une ligne : Ressources affectées à la caisse de la dette publique et consacrées au désendettement. À ce titre, ont été prévus : 0 euro pour 2019, 2 milliards d’euros dans la loi de finances pour 2020, 0 euro en 2020 et 2021. J’ai cherché dans tout le « bleu » : je n’ai pas trouvé cette ligne… Pouvez-vous nous en dire plus ? Doit-on en déduire un probable cantonnement de l’endettement public, avec la mise en place de recettes spécifiquement destinées à l’amortissement de la dette ?

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - Permalien
Agnès Pannier-Runacher

Monsieur le président, messieurs les rapporteurs spéciaux, madame la rapporteure pour avis, mesdames, messieurs les sénateurs, je remercie les rapporteurs et les orateurs des groupes pour leur analyse approfondie des crédits des missions examinées cet après-midi.

Dans le temps qui m’est imparti, je m’efforcerai de leur répondre sur les principaux sujets soulevés, en structurant mon propos autour des quatre blocs de politiques publiques examinés dans cette discussion.

En ce qui concerne les remboursements et dégrèvements, la lutte contre la fraude fiscale, en particulier à la TVA, est un des objectifs prioritaires du Gouvernement.

Monsieur Savoldelli, les recommandations de la Cour des comptes, formulées dans le prolongement du rapport d’information de l’Assemblée nationale de septembre 2018 sur l’évasion fiscale internationale des entreprises, ont permis de lancer les travaux méthodologiques d’évaluation de la fraude, articulés autour de trois axes : la poursuite des travaux engagés par l’Insee sur la TVA pour déboucher sur des estimations annuelles ; la définition d’une méthode d’évaluation en ce qui concerne les autres impôts, notamment l’impôt sur les sociétés et l’impôt sur le revenu ; et la mise en place de contrôles aléatoires pour enrichir les deux approches dans des secteurs tests – contrôles en cours de préparation et qui seront lancés en 2021. Ces données seront exploitées en 2022 afin d’affiner l’évaluation de la fraude à la TVA.

Au passage, je vous signale la forte augmentation des montants prélevés en contentieux fiscal intervenue ces trois dernières années, notamment dans des affaires de fraude à la TVA : elle témoigne d’une amélioration de la qualité des contrôles, liée en particulier au recours à des technologies permettant de croiser des fichiers, et plus seulement de faire l’analyse de risques des possibles évasions fiscales.

Monsieur Savoldelli, je tiens à répondre aussi aux préoccupations que vous avez exprimées sur le risque de non-compensation pour les collectivités territoriales dans le cadre de la mise en œuvre de la réforme des impôts de production. Les compensations prévues par le projet du Gouvernement sont intégrales et territorialisées ; pour les régions, elles permettent de substituer à une ressource volatile, la CVAE, une ressource plus stable et plus dynamique.

S’agissant des engagements financiers de l’État, le Gouvernement partage naturellement la préoccupation exprimée par MM. Jérôme Bascher et Franck Menonville et Mme Lavarde sur le financement de la dette en cas de remontée des taux d’intérêt. Le soutien de la Banque centrale et l’avancée des programmes de financement des États devraient limiter le risque de hausse à court terme. Je rappelle aussi que des positions très claires ont été prises en Allemagne au sujet de l’arrêt de la cour constitutionnelle de Karlsruhe.

Par ailleurs, la crise a entraîné un mouvement d’aversion pour le risque favorable au marché obligataire : les taux d’intérêt sur la dette française sont proches des plus bas niveaux historiques. Il est d’ailleurs assez probable que l’épargne forcée des Français soit déjà placée sur ces produits obligataires d’État : l’épargne privée n’est donc pas perdue.

Sur le plus long terme, une hausse des taux d’intérêt est déjà intégrée à la programmation budgétaire du Gouvernement, en cohérence avec un scénario pluriannuel de raffermissement des conditions macroéconomiques. Ainsi, le projet de loi de finances se fonde sur l’hypothèse que le taux à dix ans sera de 0, 70 % à la fin de 2021.

Sur les participations financières de l’État, je précise, à titre liminaire, que, de manière constante – c’est une explication qui revient chaque année –, tous les gouvernements retiennent des montants notionnels de prévision de recettes et de dépenses, afin de ne pas envoyer de signaux aux marchés.

En effet, le Gouvernement est soumis à une double obligation : celle d’information et de transparence à l’égard du Parlement et celle de gérer au mieux les deniers publics qui lui sont confiés, donc de défendre les intérêts du contribuable, ce qui suppose de ne pas révéler ses intentions aux marchés.

Le compte d’affectation spéciale « Participations financières de l’État » sera renforcé par 20 milliards d’euros de crédits exceptionnels ouverts par la deuxième loi de finances rectificative pour 2020 en faveur du programme 358 de la mission « Plan d’urgence face à la crise sanitaire ».

Monsieur Lurel, ces versements seront échelonnés : ils interviendront au fur et à mesure des besoins exprimés par l’Agence des participations de l’État et les entreprises concernées en vue de la réalisation d’opérations de crise visant à soutenir, au moyen de fonds propres, de quasi-fonds propres et de titres de créance, des entreprises stratégiques particulièrement fragilisées par les conséquences économiques de la crise sanitaire.

Si la crise a fragilisé le portefeuille de l’Agence des participations de l’État, elle ne remet pas en cause notre vision de l’État stratège.

La structure financière des sociétés du portefeuille de l’agence s’est sensiblement dégradée, entraînant des fragilités qui pourraient perdurer. L’État a su mettre en place et mobiliser des outils de soutien immédiat à la trésorerie des entreprises. Il va désormais intervenir pour renforcer les fonds propres ou les quasi-fonds propres des entreprises stratégiques durablement fragilisées par la crise.

C’est l’objet du travail conduit par l’Agence des participations de l’État dès la première vague de la crise sanitaire, en mars et avril derniers, en identifiant les entreprises françaises stratégiques les plus vulnérables et en quantifiant les besoins potentiels en renforts de fonds propres.

Nouvelle génération d’investissements d’avenir, le PIA 4 permettra d’accélérer l’innovation et la transformation de notre économie.

Engagé depuis dix ans, le programme des investissements d’avenir, qui a traversé les mandatures, a des mérites qu’il n’est pas nécessaire de rappeler. Il soutient tout le cycle de vie de l’innovation, entre secteurs public et privé, au côté de partenaires économiques, académiques, territoriaux et européens. Ses investissements reposent sur une doctrine exigeante, des procédures sélectives ouvertes et des principes de cofinancement ou de retour sur investissement pour l’État.

Dans un contexte où le soutien à l’innovation est plus que jamais nécessaire, nous lançons un quatrième programme d’investissements d’avenir. Massif, il vise trois grandes finalités, désormais inscrites dans sa doctrine : la croissance potentielle, la transition énergétique et écologique et la résilience de nos organisations et de notre économie, qui conditionne notre souveraineté. Ces trois finalités traduisent les priorités et l’ambition du Gouvernement pour la transformation de notre pays sur le long terme.

Doté de 20 milliards d’euros, le PIA 4 sera mis en œuvre, comme l’a expliqué M. Bizet, selon deux logiques.

D’une part, un volet dirigé de 12, 5 milliards d’euros correspond à des investissements stratégiques et prioritaires parfaitement ciblés, en particulier en matière de transition énergétique et écologique. Des travaux ont été menés par le Conseil de l’innovation, présidé par M. Potier, pour identifier plusieurs marchés clés.

D’autre part, un volet structurel de 7, 5 milliards d’euros garantira un financement pérenne et prévisible aux écosystèmes d’enseignement supérieur, de recherche et d’innovation, dont le financement est en grande partie assuré par des dotations en capital produisant, à terme, des revenus réguliers et récurrents.

Nous voulons le PIA 4 plus agile. L’objectif est de tirer les leçons des programmes précédents, que nous avons évalués, en mettant en œuvre des outils au service d’une stratégie et non des actions limitées dans leur champ par des outils trop rigides. Cette logique permettra, en outre, une plus grande cohérence dans le suivi de l’exécution des actions par le Parlement et les acteurs de l’innovation.

La gouvernance unifiée, sur laquelle plusieurs orateurs m’ont interrogée, assurera la mise en cohérence des interventions de l’État dans le financement de l’innovation ; elle traduit l’effort de rationalisation des instruments de financement que nous opérons dans cette loi de finances.

De plus, nous proposons d’étendre les missions du comité de surveillance des investissements d’avenir, où siègent huit parlementaires, pour mieux vous associer aux grandes orientations d’investissement. C’est une réponse à l’une de vos demandes.

Par ailleurs, ce quatrième PIA comportera une dimension territoriale amplifiée, permettant d’assurer le déploiement des innovations en les adaptant aux réalités des territoires.

Debut de section - Permalien
Agnès Pannier-Runacher

Les partenariats seront renforcés avec les grands acteurs des territoires, tandis que l’enveloppe de la tranche régionalisée sera doublée, passant de 250 à 500 millions d’euros ; le couple préfet-président de région se verra renforcé dans sa capacité de pilotage.

Enfin, le PIA 4 contribuera au plan de relance à hauteur de 11 milliards d’euros, sans perte de lisibilité.

J’insiste sur le fait que ces deux principes sont compatibles : alors que les budgets d’innovation et de recherche et développement pourraient être sacrifiés en période de crise, l’objectif du PIA est de mobiliser des moyens exceptionnels pour ne pas brider l’élan des chercheurs et des entrepreneurs français.

On l’a vu dans l’automobile, avec le comité d’orientation pour la recherche automobile et mobilité (Coram), et dans l’aéronautique, avec le conseil pour la recherche aéronautique civile (Corac) : cette stratégie nous permet de préserver des centaines, voire des milliers d’emplois de chercheurs et d’ingénieurs en recherche et développement dans ces secteurs.

Le PIA 3 a fait ses preuves à cet égard. Le PIA 4 sera rapidement engagé pour sécuriser les programmes de recherche développement et innovation.

J’ai été interrogée sur les décaissements. Comme vous le savez parfaitement, la force du PIA est la longue durée de l’engagement. On n’accompagne pas une start-up pour deux, trois ou même quatre ans, mais pour dix ans. Dans ce cadre, la logique n’est pas celle de l’annualité budgétaire : les engagements sont mis en place rapidement, tandis que les décaissements suivent le flux des projets. Aujourd’hui, une start-up sur deux en position de réussite en France a bénéficié du PIA !

Conformément à la recommandation du comité de surveillance, nous répondons à une demande légitime formulée de longue date par le Parlement en vous proposant d’inscrire dans la loi la doctrine d’investissement du PIA.

Cette doctrine, ainsi que la nouvelle gouvernance que nous mettons en place autour du Conseil de l’innovation, garantira la définition concertée et étayée de stratégies d’investissement sur des sujets clés, comme nous l’avons fait pour l’hydrogène et les technologies quantiques, en tenant compte des travaux parlementaires menés sur ces questions.

Cette doctrine a également pour objectif de renforcer le respect de ces principes dans les choix d’investissement et de mieux garantir l’additionnalité du PIA, au-delà des actions menées par les ministères dans le cadre budgétaire habituel.

Mesdames, messieurs les sénateurs, j’espère avoir répondu à l’essentiel de vos questions.

Applaudissements sur les travées du groupe RDPI et sur des travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Nous allons procéder à l’examen des crédits de la mission « Remboursements et dégrèvements », figurant à l’état B.

En euros

Mission / Programme

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Remboursements et dégrèvements

Remboursements et dégrèvements d’impôts d’État (crédits évaluatifs)

Remboursements et dégrèvements d’impôts locaux (crédits évaluatifs)

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

L’amendement n° II-718, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

En euros

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Programmes

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Remboursements et dégrèvements d’impôts d’État (crédits évaluatifs)

Remboursements et dégrèvements d’impôts locaux (crédits évaluatifs)

TOTAL

SOLDE

La parole est à Mme la ministre déléguée.

Debut de section - Permalien
Agnès Pannier-Runacher

Cet amendement technique vise à tirer les conséquences sur les crédits de la mission « Remboursements et dégrèvements » du vote des amendements n° I-1249, I-1042 et I-638 rectifié bis en première partie, ainsi que des révisions du scénario macroéconomique.

Nous vous proposons de relever les autorisations d’engagement et les crédits de paiement à hauteur de 3, 189 milliards d’euros, montant correspondant aux coûts de ces trois amendements, relatifs respectivement au crédit d’impôt en cas d’abandon de loyer par un bailleur social, au renforcement du crédit d’impôt sur le spectacle vivant et au relèvement temporaire du taux du crédit d’impôt sur le théâtre.

Debut de section - PermalienPhoto de Victorin Lurel

La commission s’en remet à la sagesse du Sénat.

L ’ amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Remboursements et dégrèvements », figurant à l’état B.

Je n’ai été saisi d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.

Je mets aux voix ces crédits, modifiés.

Les crédits sont adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Engagements financiers de l’État », figurant à l’état B.

En euros

Mission / Programme

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Engagements financiers de l’État

Charge de la dette et trésorerie de l’État (crédits évaluatifs)

Appels en garantie de l’État (crédits évaluatifs)

Épargne

Dotation du Mécanisme européen de stabilité

Augmentation de capital de la Banque européenne d’investissement

Fonds de soutien relatif aux prêts et contrats financiers structurés à risque

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Je n’ai été saisi d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.

Je mets aux voix ces crédits.

Les crédits sont adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Nous allons procéder au vote des crédits du compte d’affectation spéciale « Participation de la France au désendettement de la Grèce », figurant à l’état D.

En euros

Mission / Programme

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Participation de la France au désendettement de la Grèce

Versement de la France à la Grèce au titre de la restitution à cet État des revenus perçus sur les titres grecs

Rétrocessions de trop-perçus à la Banque de France

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Je n’ai été saisi d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.

Je mets aux voix ces crédits.

Les crédits sont adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Nous allons procéder à l’examen des crédits du compte d’affectation spéciale « Participations financières de l’État », figurant à l’état D.

En euros

Mission / Programme

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Participations financières de l’État

Opérations en capital intéressant les participations financières de l’État

Désendettement de l’État et d’établissements publics de l’État

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

L’amendement n° II-735, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

En euros

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Programmes

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Opérations en capital intéressant les participations financières de l’État

Désendettement de l’État et d’établissements publics de l’État

TOTAL

SOLDE

La parole est à Mme la ministre déléguée.

Debut de section - Permalien
Agnès Pannier-Runacher

Le présent amendement ouvre des crédits supplémentaires en autorisations d’engagement et crédits de paiement sur le compte d’affectation spéciale « Participations financières de l’État » à hauteur de 696 millions d’euros.

Ces crédits correspondent à une nouvelle prévision de reliquat de crédits non consommés devant être reportés de 2020 vers 2021 sur le programme 358, « Renforcement exceptionnel des participations financières de l’État dans le cadre de la crise sanitaire » et devant donc être budgétés à due concurrence sur le CAS, au titre des crédits d’urgence destinés à renforcer les ressources des entreprises stratégiques vulnérables en raison des conséquences économiques résultant de la crise sanitaire liée à la covid.

Dans une première prévision, ce reliquat de crédits non consommés était estimé à 9 milliards d’euros. La prévision ayant été affinée et portée à 8, 3 milliards d’euros, l’écart est reporté dans le CAS par mécanique budgétaire. Il s’agit d’un donc d’un amendement technique.

Debut de section - PermalienPhoto de Victorin Lurel

Il s’agit de reports de crédits. La commission s’en remet à la sagesse du Sénat.

L ’ amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

L’amendement n° II-10, présenté par M. Lurel, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

En euros

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Programmes

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Opérations en capital intéressant les participations financières de l’État

Désendettement de l’État et d’établissements publics de l’État

TOTAL

SOLDE

La parole est à M. le rapporteur spécial.

Debut de section - PermalienPhoto de Victorin Lurel

La commission des finances a tenu à déposer cet amendement afin – si j’ose dire – de marquer son désaccord fondamental sur le mécanisme de débudgétisation que l’État a toujours employé pour financer le fonds pour l’innovation et l’industrie.

On nous a fait voter en juillet l’ouverture de 20 milliards d’euros de crédits dont la totalité n’a pas encore été versée sur ce compte d’affectation spéciale – comme l’a indiqué Mme la ministre, les versements seront échelonnés. Or quelques semaines après nous avoir demandé cette autorisation, l’État a ponctionné ce compte de 1, 9 milliard d’euros pour financer le F2I.

Pourquoi ? Parce que ce mécanisme est une usine à gaz qui ne fonctionne pas et qui ne permet pas de verser de dividendes. Les prises de participation à hauteur de 10 milliards d’euros, à raison d’une dotation de 1, 6 milliard d’euros en numéraire et titres des sociétés EDF et Thales, ne rapporteront pas de rémunération.

Il faut trouver l’argent quelque part. On le prend donc dans ce compte d’affectation spéciale ! Nous demandons que l’autorisation qu’a donnée le Parlement soit respectée. C’est pourquoi le présent amendement vise à réduire les crédits du compte de 1, 9 milliard d’euros pour 2021.

Debut de section - Permalien
Agnès Pannier-Runacher

L’avis est défavorable. Comme vous le savez, la construction du F2I reposait sur des opérations de marché qui n’ont pas été réalisées. De plus, son financement repose sur le notionnel de l’obligation assimilable du Trésor (OAT) à cinquante ans.

Le Fonds pour l’innovation et l’industrie a vocation à financer l’innovation de rupture ; cela n’a rien à voir avec les 20 milliards d’euros de crédits qui permettront de soutenir les participations stratégiques.

Le F2I finance les start-up qui travaillent dans le domaine de la santé et de l’intelligence artificielle à l’élaboration de diagnostics, dans le secteur de la bioproduction ou encore sur stockage de l’énergie à haute densité ; autant de sujets absolument essentiels qui nécessitent des investissements si nous voulons créer des technologies de rupture.

Ce dispositif a vocation à donner de la visibilité aux entreprises à long terme. Il est donc fort heureux qu’il existe, et que l’État s’engage sur le long terme. C’est un enjeu de transition écologique et énergétique.

L ’ amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

L’amendement n° II-164, présenté par Mme N. Goulet, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

En euros

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Programmes

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Opérations en capital intéressant les participations financières de l’État

Désendettement de l’État et d’établissements publics de l’État

TOTAL

SOLDE

La parole est à Mme Nathalie Goulet.

Debut de section - PermalienPhoto de Nathalie Goulet

J’ai peur que l’adoption de l’amendement n° II-10 de M. Lurel ne réduise mes prétentions.

Comme je l’ai indiqué brièvement lors de la discussion générale, il ressort du « jaune » budgétaire sur les participations de l’État qu’un certain nombre de sociétés dont l’État est actionnaire ont une politique soit d’évasion, soit d’optimisation fiscale. Un certain nombre de situations me paraissent tout à fait anormales. Or l’État doit être vertueux et montrer l’exemple.

Le présent amendement vise donc à prélever 2 milliards d’euros sur les 2, 3 milliards d’euros de dividendes au profit du désendettement de notre pays.

Debut de section - PermalienPhoto de Victorin Lurel

La question mérite d’être posée. En effet, au-delà de son objet qui est de transférer 2 milliards d’euros vers la contribution au désendettement, par cet amendement, Mme Goulet pose la question des choix stratégiques de l’État actionnaire : comment peut-on accepter en connaissance de cause de financer avec l’argent du contribuable des entreprises qui sont installées dans des États non coopératifs, autrement dit, dans des paradis fiscaux ?

Selon un article récent, certaines entreprises qui sont financées par l’État, par des banques publiques ou via l’Agence des participations de l’État (APE) ont des participations dans des holdings installées au Luxembourg, à Guernesey, à Jersey ou ailleurs.

Cet amendement n’a pas été examiné par la commission, mais, avant d’émettre un avis à titre personnel, je souhaite entendre la réponse du Gouvernement.

Debut de section - Permalien
Agnès Pannier-Runacher

Je suis un peu surprise des propos que j’entends dans cet hémicycle. Nul n’est censé ignorer la loi, les entreprises dans lesquelles l’État investit, comme toutes les autres entreprises.

Le contentieux fiscal est la mission d’une direction qui effectue des contrôles extrêmement réguliers des grandes entreprises. On peut élaborer des théories ou entendre des choses, mais la réalité, c’est que les entreprises sont contrôlées, particulièrement quand l’État détient une participation à leur capital et siège au conseil d’administration.

Ces propos sont graves, d’autant qu’ils ne sont pas étayés par des faits. Car si les faits étaient étayés, ils seraient susceptibles de faire l’objet de poursuites. C’est au fond assez simple : soit vous respectez la loi, soit vous ne la respectez pas et dans ce cas, il faut la faire appliquer.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Ouzoulias

Alors, respectez la Constitution sur l’article 24 de la proposition de loi relative à la sécurité globale !

Debut de section - Permalien
Agnès Pannier-Runacher

Par ailleurs, lors des séances de questions d’actualité au Gouvernement, je constate que tout le monde s’inquiète du devenir d’un certain nombre de participations de l’État – Air France, Renault, et tous leurs salariés – et que l’on nous demande d’intervenir avec force pour soutenir et accompagner ces entreprises. Je suis surprise que, dans le même temps, vous envisagiez de supprimer 2 milliards d’euros dont nous pourrions avoir besoin assez rapidement.

Nous vivons une crise économique inédite qui frappe particulièrement certains secteurs d’activité. Pour des raisons indépendantes des choix stratégiques d’Air France, aujourd’hui 70 % de ses avions sont cloués au sol et 50 % de l’aviation commerciale ne peut fonctionner.

Il est certes toujours possible d’améliorer la manière dont une entreprise est gérée et de formuler des recommandations. Il reste que la situation d’Air France est tout de même assez étrangère à la gestion et aux choix de l’entreprise.

Il faut savoir raison garder : nous avons besoin de ces 2 milliards. Vous venez de voter – cela a d’ailleurs suscité quelque émotion – une diminution de 1, 9 milliard d’euros des crédits. On peut aussi arrêter d’investir et de soutenir les entreprises, mais le résultat serait – je le prédis – un surcroît de travail pour mon ministère en matière de restructurations et de suivi des plans sociaux.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Madame la ministre déléguée, mes chers collègues, je pressens que cet amendement va susciter des débats, c’est pourquoi je préfère être clair : nous examinons ensuite la mission « Économie », soit une heure vingt de discussion générale et vingt-deux amendements, puis les trente-neuf amendements de la mission « Plan de relance ». Si, à l’issue de l’examen de la présente mission, j’estime que nous ne pouvons pas entamer la discussion générale de la mission « Économie », celle-ci sera reportée après le dîner, ce qui signifie que nous siégerions entre cinq et six heures ce soir et cette nuit. Chacun prendra ses responsabilités.

Quel est donc l’avis de la commission ?

Debut de section - PermalienPhoto de Victorin Lurel

Avant de donner l’avis de la commission, je répondrai sur deux points.

Premièrement, ni la commission des finances ni le Sénat ne contestent les capacités d’intervention de l’État au sein des entreprises, en particulier quand il s’agit d’interventions directes en capital. Il en va différemment des quasi-fonds propres, car ce type de participation ne donne pas de droit de vote. C’est d’ailleurs pour cette raison que beaucoup de parlementaires préfèrent les interventions directes en capital qui permettent de peser sur la stratégie et les orientations de l’entreprise. Il ne s’agit pas de contester cela.

Deuxièmement, la baisse des crédits de 1, 9 milliard d’euros qui a été proposée par la commission des finances et votée par le Sénat ne visait pas à diminuer la capacité d’intervention de l’État, mais, au contraire, à garantir que l’État, au travers des 20 milliards d’euros de crédits que nous avons ouverts, dispose vraiment des moyens d’action, quelles que soient les modalités de déblocage.

Vous nous avez enjoint de rester vigilants dans nos propos, madame la ministre. Il me paraît que l’amendement de ma collègue Nathalie Goulet est un amendement d’appel visant seulement à poser le problème.

Pour ma part, je suggère au Sénat de s’emparer de ce sujet en constituant une mission d’information ou une commission d’enquête, car certains faits qui ont été portés à ma connaissance me font réagir.

Quoi qu’il en soit, je demande le retrait de cet amendement. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Taillé-Polian

Mme Sophie Taillé-Polian. Madame la ministre, je conviens que la fraude fiscale est une chose et que l’optimisation fiscale en est une autre. Pour autant, l’optimisation fiscale n’est ni très morale ni éthique…

Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Taillé-Polian

Monter des tas d’opérations et constituer des holdings est une attitude qui, à la longue, place les finances publiques des États à travers le monde dans une situation extrêmement difficile.

Nous avons fait de nombreuses propositions afin de réduire cette zone grise de l’optimisation fiscale, car c’est un véritable sujet que l’on ne peut évacuer au motif que ce n’est pas de la fraude. Sinon, les entreprises continueront de ne pas payer ce qu’elles devraient payer, dans notre pays comme dans d’autres à travers le monde, alors que cela permet de financer les politiques publiques, les services publics, les infrastructures, etc.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Fabien Gay

Madame la ministre, nous avons eu le même débat avec le ministre de l’économie, lors de l’examen de l’un des derniers PLF, ou peut-être de celui de la loi Pacte. Le ministre de l’économie avait indiqué qu’aucune entreprise ne toucherait d’aides publiques si elle a des filiales dans les paradis fiscaux.

Vous nous invitez à vous communiquer des faits. Je ne prétends pas que l’administration fiscale ne fait pas son travail, mais voici des faits relayés par la presse : parmi les entreprises qui ont touché des aides directes ou indirectes, Total possède 168 filiales dans les paradis fiscaux, Sanofi en possède 24, Schneider Electric 56, Renault, dont l’État est actionnaire, me semble-t-il, en possède 25, Thales 6, Danone 94. On pourrait les collectionner ! Engie, dont l’État est actionnaire, sort d’un gros scandale relatif aux paradis fiscaux, notamment au Luxembourg.

Par ailleurs, madame la ministre, lors des débats relatifs à la loi Pacte durant lesquels vous étiez très présente, on nous avait annoncé que l’État réduirait sa participation dans le capital d’Engie sous les 34 %, tout en restant actionnaire majoritaire – ce qu’il est –, mais on nous avait assuré que, en cas de vente stratégique, il détiendrait quoi qu’il arrive la golden share. Nous souhaiterions savoir pourquoi cette clause n’a pas été activée lors de la cession à Véolia des parts du capital de Suez détenues par Engie, parts dont nous estimons qu’elles constituent un actif stratégique.

Debut de section - PermalienPhoto de Nathalie Goulet

Monsieur le président, je retire l’amendement n° II-164.

Je propose que, dans le cadre de la mission de contrôle de la commission des finances, son rapporteur spécial pour les participations de l’État conduise une enquête de manière à ce que, l’année prochaine, nous puissions fournir les éléments nécessaires au ministre.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

L’amendement n° II-164 est retiré.

L’amendement n° II-716, présenté par MM. Salmon et Benarroche, Mme Benbassa, MM. Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco, M. Parigi et Mmes Poncet Monge et Taillé-Polian, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

En euros

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Programmes

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Opérations en capital intéressant les participations financières de l’État

Désendettement de l’État et d’établissements publics de l’État

TOTAL

SOLDE

La parole est à M. Daniel Salmon.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Salmon

La loi Pacte prévoit la privatisation du groupe Aéroports de Paris (ADP), détenu à 50, 63 % par l’État pour une valeur de 9, 73 milliards d’euros.

Les écologistes sont fortement opposés à cette privatisation qui équivaut à renoncer à exercer le pouvoir dans un domaine stratégique. C’est un non-sens économique, autant que la reproduction d’erreurs du passé telles que la privatisation des autoroutes.

Par cet amendement, nous souhaitons interroger le Gouvernement sur ses intentions quant à la privatisation d’Aéroports de Paris compte tenu de la situation actuelle qui a fortement affecté le secteur aérien.

Debut de section - PermalienPhoto de Victorin Lurel

La commission n’a pas pu examiner cet amendement.

Celui-ci a pour objet de supprimer toute contribution au désendettement de l’État en 2021, mais comme cela a été indiqué, il vise surtout à interroger le Gouvernement sur l’état du projet de privatisation d’Aéroports de Paris, projet qui a été reporté sine die en raison de la crise financière. La suspension du projet est-elle un simple ajournement ou un abandon définitif ?

Je me suis personnellement opposé à cette privatisation, et je n’étais pas le seul, puisqu’une procédure a été engagée, soutenue par d’autres collègues, et qu’un référendum d’initiative partagée (RIP) se préparait.

Je tiens toutefois à indiquer à mes collègues que, quoi qu’il en soit de leur approbation ou de leur désapprobation de ce projet, une mission ou un compte d’affectation spéciale ne peut pas être mono-programme – c’est une décision du Conseil constitutionnel. C’est pourquoi je ne suis pas certain qu’il soit conforme à la loi organique de porter la ligne « désendettement » à zéro.

Je demande donc le retrait de cet amendement.

Debut de section - Permalien
Agnès Pannier-Runacher

Je demande également le retrait de cet amendement, et à défaut, j’émettrai un avis défavorable.

Pour répondre à votre question, monsieur le sénateur, compte tenu des difficultés que rencontrent les secteurs aérien et aéroportuaire, les conditions ne sont pas aujourd’hui réunies pour travailler sur cette opération de privatisation ; mais je ne vous apprends rien.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Salmon

Je retire l’amendement, monsieur le président.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

L’amendement n° II-716 est retiré.

Nous allons procéder au vote des crédits du compte d’affectation spéciale « Participations financières de l’État », figurant à l’état D.

Je n’ai été saisi d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.

Je mets aux voix ces crédits, modifiés.

Les crédits ne sont pas adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Nous allons procéder au vote des crédits du compte de concours financiers « Accords monétaires internationaux », figurant à l’état D.

En euros

Mission / Programme

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Accords monétaires internationaux

Relations avec l’Union monétaire ouest-africaine

Relations avec l’Union monétaire d’Afrique centrale

Relations avec l’Union des Comores

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Je n’ai été saisi d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.

Je mets aux voix ces crédits.

Les crédits sont adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Nous allons procéder au vote des crédits du compte de concours financiers « Avances à divers services de l’État ou organismes gérant des services publics », figurant à l’état D.

En euros

Mission / Programme

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Avances à divers services de l’État ou organismes gérant des services publics

Avances à l’Agence de services et de paiement, au titre du préfinancement des aides communautaires de la politique agricole commune

Avances à des organismes distincts de l’État et gérant des services publics

Avances à des services de l’État

Avances à l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) au titre de l’indemnisation des victimes du Benfluorex

Avances aux exploitants d’aéroports touchés par la crise de covid-19 au titre des dépenses de sûreté-sécurité

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Je n’ai été saisi d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.

Je mets aux voix ces crédits.

Les crédits sont adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Investissements d’avenir », figurant à l’état B.

En euros

Mission / Programme

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Investissements d’avenir

Soutien des progrès de l’enseignement et de la recherche

Valorisation de la recherche

Accélération de la modernisation des entreprises

Financement des investissements stratégiques

Financement structurel des écosystèmes d’innovation

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Je n’ai été saisi d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.

Je mets aux voix ces crédits.

Les crédits sont adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

J’appelle en discussion l’article 55, qui est rattaché pour son examen aux crédits de la mission « Investissements d’avenir ».

Investissements d ’ avenir

I. – L’article 8 de la loi n° 2010-237 du 9 mars 2010 de finances rectificative pour 2010 est ainsi modifié :

1° Le I est ainsi modifié :

a) Au début du premier alinéa, est ajoutée la mention : « A. – » ;

b) Au même premier alinéa, après les mots : « pour 2017 », sont insérés les mots : « et par la loi n° … du … de finances pour 2021 » ;

c) Il est ajouté un B ainsi rédigé :

« B. – Les fonds du programme d’investissements d’avenir sont investis selon les principes suivants :

« 1° Les projets financés sont innovants et destinés à augmenter le potentiel de croissance de l’économie, accélérer la transition écologique et augmenter la résilience de l’organisation socio-économique du pays ;

« 2° Les procédures de sélection des projets sont ouvertes et objectives, favorisent la concurrence entre ceux-ci et font appel à des experts indépendants ou à des jurys comprenant, le cas échéant, des personnalités étrangères ;

« 3° Les décisions d’investissement sont prises en considération d’un retour sur investissement, financier ou extrafinancier ;

« 4° Les projets sont cofinancés ;

« 5° Les décisions d’investissement ainsi que les éléments ayant contribué à leur sélection sont rendues publiques, dans le respect des dispositions relatives au secret des affaires. » ;

2° Le II est ainsi modifié :

a) La seconde phrase du premier alinéa du A est remplacée par trois phrases ainsi rédigées : « Cette convention ne peut être conclue pour une durée supérieure à quinze ans. Cette durée peut toutefois exceptionnellement être prolongée de cinq années supplémentaires, sans que cela permette d’engager de nouvelles dépenses, hors frais de gestion et d’expertise, et uniquement pour assurer la fin progressive de l’action considérée et les retours financiers vers l’État. La convention est publiée au Journal officiel et précise notamment : » ;

b) Le 7° du même A est complété par les mots : « et par la loi n° … du … de finances pour 2021. » ;

c) Le premier alinéa du B est complété par une phrase ainsi rédigée : « Une liste récapitulative de ces conventions et avenants adoptés et publiés au Journal officiel est adressée annuellement au Parlement pour information. » ;

3° Après le premier alinéa du III, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Les fonds conservés par l’Agence nationale de la recherche en application du même 6 sont fongibles et rassemblés sur un même compte. Les intérêts produits sont utilisés pour le financement structurel de l’enseignement supérieur, de la recherche et de sa valorisation. » ;

4° Au premier alinéa du IV, après la seconde occurrence du mot : « investissements », sont insérés les mots : «, conseille le Gouvernement sur les priorités d’investissement du programme » ;

II. – Le 27° du I de l’article 179 de la loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020 est abrogé.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

L’amendement n° II-738 rectifié, présenté par Mme M. Filleul, MM. Lurel, Féraud, Kanner et Raynal, Mme Briquet, MM. Cozic et Éblé, Mmes Espagnac et Jasmin, MM. Jeansannetas et P. Joly, Mmes Lepage, Lubin, Meunier, Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 8

Après le mot :

ceux-ci,

insérer les mots :

ainsi que l’égalité des chances entre les femmes et les hommes,

La parole est à Mme Martine Filleul.

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Filleul

Cet amendement a pour objet d’inclure dans les procédures de sélection des programmes d’investissements d’avenir des critères relatifs au respect de l’égalité des chances entre les hommes et les femmes.

La crise économique que nous traversons ne justifie pas d’abandonner les grands objectifs qui sont les nôtres, mais également les vôtres, madame la ministre, ainsi que ceux de votre gouvernement en matière d’égalité professionnelle, bien au contraire.

Or, vous le savez, madame la ministre, deux tiers des travailleuses indépendantes et des femmes entrepreneurs n’ont maintenu, au mieux, que 20 % de leur activité pendant le confinement, et 54 % considèrent que leur entreprise est aujourd’hui en situation de risque élevé de dépôt de bilan.

Cette situation partagée par un nombre important d’entrepreneurs est rendue plus difficile encore pour les femmes en raison des charges qui pèsent sur elles, mais également des difficultés qu’elles rencontrent à se faire financer : 44 % d’entre elles estiment que les échecs de création d’entreprises s’expliquent par le manque de financement, le taux de rejet des crédits demandés par les créatrices d’entreprises étant supérieur à celui des crédits demandés par des hommes. Les start-up créées par des femmes sont menacées, d’autant qu’elles reçoivent 2, 5 fois moins de fonds que les start-up créées par les hommes.

Ces injustices doivent cesser. Or l’expérience montre que dans tous les domaines, les avancées sur cette question ne se font que lorsque la loi prévoit des mesures contraignantes.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Bizet

S’agissant de l’amendement n° II-738 rectifié – l’avis sera quasiment identique sur les trois amendements suivants –, je rappellerai l’esprit des programmes d’investissements d’avenir : ils doivent financer des projets d’excellence, sécuriser les porteurs de projet, leur gestion doit être simplifiée dans la durée – de fait, ils sont exonérés des règles budgétaires classiques – et ils doivent être réactifs.

Cet amendement relatif à l’égalité des chances entre les femmes et les hommes procède d’une intention sympathique, mais il n’a pas sa place à cet article. §C’est pourquoi je vous invite à le retirer, madame la sénatrice. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Agnès Pannier-Runacher

Je demande également le retrait de cet amendement et, à défaut, j’émettrai un avis défavorable.

La raison n’est pas que je n’adhère pas totalement à votre propos, madame la sénatrice. Celui-ci, parfaitement étayé par des chiffres, illustre la parole de Simone de Beauvoir selon laquelle chaque crise remet en cause la position des femmes, notamment dans l’économie. Cette affirmation est malheureusement avérée.

Toutefois, l’introduction de la parité dans les procédures de sélection pour les programmes d’investissements d’avenir (PIA) ne serait pas opérante. Quel critère appliquer pour départager des projets sur l’hydrogène, par exemple ? Le barème Pénicaud, quand bien même les entreprises ne comptent parfois que deux salariés ?

Nous faisons le choix de rehausser les exigences de l’index qui a été mis en place par la précédente ministre du travail – cet index constitue une vraie avancée – et de demander sa publication aux entreprises qui vont bénéficier du plan de relance afin d’analyser les éléments qui le composent.

Par ailleurs, nous offrons un accompagnement aux femmes entrepreneurs ; un programme spécifique de Bpifrance permet ainsi de proposer un mentorat aux femmes qui montent des dossiers et qui peuvent bénéficier du PIA.

En revanche, la disposition que vous proposez, non seulement ne serait pas opérante, mais pourrait avoir des effets absurdes non anticipés.

Quoi qu’il en soit, madame la sénatrice, soyez assurée que j’accueillerai très favorablement toute proposition opérationnelle sur le sujet.

Mme Sophie Primas applaudit.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° II-714, présenté par Mme Taillé-Polian, MM. Parigi et Benarroche, Mme Benbassa, M. Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme Poncet Monge et M. Salmon, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 11

Insérer les dix-sept alinéas ainsi rédigés :

« 6° Les projets bénéficiant du fonds du programme d’investissements d’avenir sont tenus de publier leurs engagements à l’aide d’indicateurs de performance en matière d’écologie et d’impact social constituant un index désigné “impact social et écologique”. Cet index, dont la constitution est précisée par décret, comprend les indicateurs de performance suivants :

« a) L’intégration d’une mission sociale ou écologique au cœur de l’activité de l’entreprise ;

« b) Le pourcentage du chiffre d’affaires consacré au mécénat, financier, de compétence ou en nature ;

« c) La part des postes occupés par des travailleurs fragilisés, en situation de handicap ou d’insertion ;

« d) Le pourcentage de salariés vivant dans des quartiers prioritaires de la politique de la ville au sein de l’entreprise ;

« e) Le score à l’index égalité femmes-hommes créé en application des articles 104 et 105 de la loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel ;

« f) L’empreinte écologique directe de l’entreprise ;

« g) L’empreinte écologique indirecte de l’entreprise ;

« h) La part des sièges de l’instance de gouvernance principale occupée par des salariés ;

« i) Le nombre de catégories de parties prenantes représentées dans les instances de gouvernance dont les salariés ;

« j) La part des salariés ayant bénéficié d’une formation hors compte personnel de formation durant les trois dernières années ;

« k) La part des bénéfices reversés en dividendes ;

« l) La publication des écarts de rémunération ;

« m) La limitation des écarts de rémunération entre le plus haut revenu de l’entreprise et le plus bas ;

« n) Le pourcentage des placements de l’entreprise réalisés dans des fonds labellisés du fait de leurs performances sociale ou environnementale ;

« o) La part des achats auprès de fournisseurs labellisés ;

« p) Le pourcentage des achats réalisés auprès de fournisseurs et prestataires de la région ou des départements limitrophes. » ;

La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Taillé-Polian

Pardonnez-moi, mais les propos de M. Bizet étaient à la limite…

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Taillé-Polian

Mme Sophie Taillé-Polian. Peut-être, mais tout comme M. Bizet l’a été à l’égard des femmes !

Mêmes mouvements.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Taillé-Polian

Cet amendement vise à imposer aux entreprises qui bénéficieraient du label « France relance » de publier des indicateurs permettant d’évaluer en transparence leurs résultats en matière d’impact social et écologique, comme le font les entreprises du collectif « Nous sommes demain » au travers de l’impact score.

Nous estimons en effet que ces investissements doivent être soumis à de fortes exigences, tant sociales qu’environnementales.

Vous me répondrez sans doute, madame la ministre, que la doctrine relative aux investissements d’avenir l’assure déjà. Mais nous jugeons que des indicateurs nous permettraient de suivre les progrès de ces entreprises dans le temps davantage qu’une doctrine.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

L’amendement n° II-487 rectifié bis, présenté par Mme Préville, MM. Lurel, Féraud, Kanner et Raynal, Mme Briquet, MM. Cozic et Éblé, Mme Espagnac, MM. Jeansannetas, P. Joly, J. Bigot, Devinaz, Gillé, Houllegatte et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 11

Insérer trois alinéas ainsi rédigés :

« 6° Pour les entreprises soumises à l’obligation de déclaration de performance extra-financière prévue à l’article L. 225-102-1 du code de commerce, le cahier des charges pour l’accès aux fonds du Programme d’Investissement d’Avenir inclut la publication d’un “rapport climat” dans les 6 mois suivant l’accès au fond. Ce rapport climat intègre les émissions de gaz à effet de serre de l’entreprise directes et indirectes, en amont et en aval, telles que définies par l’article R. 225-105 du même code. La stratégie de réduction des émissions ne doit pas prendre en compte les émissions évitées et compensées. Elle fixe une cible de réduction contraignante à partir de l’exercice 2021, ainsi que les plans d’investissements nécessaires et compatibles. Ce rapport s’appuie sur les informations fournies dans le cadre des obligations de l’article L. 225-102-1 dudit code et de l’article L. 229-25 du code de l’environnement.

« 7° Le Commissariat général au développement durable définit, en concertation avec le Haut Conseil pour le climat, la trajectoire minimale de réduction des émissions de gaz à effet de serre à mettre en œuvre par lesdites entreprises à horizon 2030, en fonction du secteur d’activité, pour atteindre les objectifs fixés par l’Accord de Paris, en vue de limiter le réchauffement climatique à moins de 1, 5° degrés Celsius. Un décret publié au plus tard le 1er mars 2021 vient préciser la méthodologie, les modalités de reporting standardisées, ainsi que le contrôle du respect du reporting et des objectifs fixés.

« 8° Le ministre chargé de l’environnement sanctionne les entreprises bénéficiaires, qui ne respectent pas les obligations de reporting dans les délais mentionnés au 6, d’une amende équivalente au montant du soutien financier reçu majoré de 2 % du chiffre d’affaires total de l’entreprise. En cas de non-respect des objectifs annuels de réduction des émissions de gaz à effet de serre publié dans le rapport climat mentionné au 6, l’entreprise doit régler une pénalité financière équivalente au montant du soutien financier reçu majoré de 1 % de son chiffre d’affaires. En cas de dépassement répété des objectifs annuels de réduction des émissions de gaz à effet de serre, la majoration est portée à un minimum de 4 % de son chiffre d’affaires. » ;

La parole est à M. Victorin Lurel.

Debut de section - PermalienPhoto de Victorin Lurel

Les PIA mettent l’accent sur la transition climatique. Cet amendement vise à aller plus loin en conditionnant les aides apportées aux entreprises. En contrepartie, celles-ci devront publier un bilan carbone, une stratégie climat et un plan d’investissement permettant de mettre en œuvre cette stratégie.

La conditionnalité et les contreparties posent – je le sais – un problème idéologique. Si elles figurent déjà dans certains textes, le présent amendement vise à les préciser davantage.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

L’amendement n° II-739 rectifié, présenté par Mme M. Filleul, MM. Lurel, Féraud, Kanner et Raynal, Mme Briquet, MM. Cozic et Éblé, Mmes Espagnac et Jasmin, MM. Jeansannetas et P. Joly, Mmes Lepage, Lubin, Meunier, Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 11

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« 6° Les personnes morales soumises aux obligations prévues par l’article L. 1142-8 du code du travail doivent avoir publié leur score à l’index égalité salariale entre les femmes et les hommes au sein de l’entreprise. » ;

La parole est à Mme Martine Filleul.

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Filleul

Depuis la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel, chaque année, avant le 1er mars, les entreprises d’au moins cinquante salariés doivent calculer et publier sur leur site internet leur index de l’égalité salariale femmes-hommes. Or la ministre du travail a indiqué que 17 000 entreprises n’avaient toujours pas publié leur index. Il est inacceptable, en 2020, que ces inégalités salariales subsistent et que les entreprises ne soient pas mises devant leurs obligations.

Le présent amendement vise donc à conditionner le financement des projets par les fonds de programmes d’investissements d’avenir au respect de l’obligation de publier l’index de l’égalité salariale femmes-hommes.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Quel est l’avis de la commission sur ces trois amendements ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Bizet

M. Jean Bizet, rapporteur spécial. Je m’efforcerai de mettre un peu plus d’onctuosité dans mes propos, car je ne tiens nullement à froisser Mme Taillé-Polian.

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Bizet

Je ne puis changer la philosophie des PIA, et sans vouloir paraître provocateur, j’estime que ces amendements, qu’ils soient relatifs au respect des engagements sociaux et environnementaux, à la transition énergétique et climatique ou à la réduction des inégalités salariales, n’ont pas tout à fait leur place dans ce débat.

Les PIA doivent par définition se focaliser sur l’excellence. Or des projets qui ne s’inscrivent pas dans une démarche de protection de l’environnement ne sont pas des projets d’excellence.

Ces amendements étant en quelque sorte déjà satisfaits, je demande leur retrait. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Agnès Pannier-Runacher

Je demande également le retrait de ces trois amendements, et à défaut, j’émettrai un avis défavorable.

Nous disposons d’une doctrine – celle-ci fera l’objet d’un vote – qui prend en compte la transition écologique et énergétique comme l’un des trois objectifs du PIA. Votre demande est donc satisfaite.

Par ailleurs, j’ai échangé avec le Mouvement des entrepreneurs sociaux (Mouves) au sujet de l’impact score. Je connais bien ce dispositif, mais son cahier des charges ne me paraît pas applicable, par exemple, à un laboratoire de recherche publique. À quelle unité faudrait-il appliquer les critères : à l’université, au labo, à la seule équipe de recherche ? Cela pose des difficultés opérationnelles. Le PIA est assorti d’une doctrine qui est très claire sur le sujet.

S’agissant de l’égalité hommes-femmes, je répète que nul n’est censé ignorer la loi. C’est certes plus difficile, mais il me paraît plus utile d’appliquer la loi que de multiplier les occasions de souligner que nul n’est censé l’ignorer.

Quoi qu’il en soit, soyez assurés que les cahiers des charges comportent des critères relatifs à la transition écologique et aux impacts sociaux. Ce sont des sujets clés.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Je mets aux voix l’amendement n° II-487 rectifié bis.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

L’amendement n° II-715, présenté par Mme Taillé-Polian, MM. Parigi et Benarroche, Mme Benbassa, M. Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme Poncet Monge et M. Salmon, est ainsi libellé :

Alinéa 20

Supprimer cet alinéa.

La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Taillé-Polian

Il a pour objet de rétablir le jaune budgétaire, qui fait état de l’avancement des crédits investis par les différents ministères pour mettre en œuvre les quatre engagements pris par le Président de la République, à savoir l’accélération de la transition écologique, l’édification d’une société de compétences, la compétitivité de l’économie et la construction de l’État à l’âge du numérique.

Mes chers collègues, nous avons été nombreux à déplorer la difficulté qu’il y a à tracer et à contrôler les crédits, notamment dans le cadre du plan de relance. La suppression du jaune budgétaire n’améliore pas la situation. Nous proposons donc de le rétablir.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Bizet

Sans vouloir vous froisser, ma chère collègue, …

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Bizet

… votre amendement est presque hors sujet. En effet, le label France Relance se substitue à celui du Grand plan d’investissement. L’annexe n’a donc plus lieu d’être.

Par conséquent, la commission demande le retrait de cet amendement, faute de quoi elle émettra un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Agnès Pannier-Runacher

Pour dissiper tout malentendu, je confirme que les quatre volets successifs des PIA continueront de faire l’objet d’un jaune budgétaire. L’avis est défavorable.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

L ’ article 55 est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Nous avons achevé l’examen des crédits des missions « Remboursements et dégrèvements » et « Engagements financiers de l’État », des comptes d’affectation spéciale « Participation de la France au désendettement de la Grèce » et « Participations financières de l’État », des comptes de concours financiers « Accords monétaires internationaux » et « Avances à divers services de l’État ou organismes gérant des services publics », ainsi que de la mission « Investissements d’avenir ».

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Économie » (et articles 54 octies et 54 nonies) et du compte de concours financiers « Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés ».

La parole est à Mme la rapporteure spéciale.

Debut de section - PermalienPhoto de Frédérique Espagnac

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la mission « Économie » porte un ensemble de dispositifs en faveur des entreprises, notamment les PME, dans les secteurs de l’artisanat, du commerce et de l’industrie. Elle porte aussi les crédits des administrations, autorités administratives indépendantes et opérateurs chargés de la mise en œuvre de ces politiques.

Cette année, la mission « Plan de relance » concentre l’ensemble des crédits nouveaux en faveur des entreprises, au sein du programme 363, « Compétitivité », mais également du programme 364, « Cohésion », avec des crédits dédiés à des garanties de prêts en faveur de la croissance des PME.

Si les moyens de la mission « Économie » affichent pour 2021 une hausse importante par rapport à la loi de finances initiale pour 2020, cette augmentation résulte principalement d’une très nette croissance, égale à 123 millions d’euros, des crédits consacrés au dispositif compensatoire de carbone des sites électro-intensifs. Elle est aussi la conséquence du déblocage progressif des crédits de paiement affectés au plan France Très haut débit.

En dehors de ces deux mesures, les crédits permanents de la mission sont globalement en baisse et leur réduction à périmètre constant se poursuit.

Des mouvements de crédits importants ont été opérés sur la mission au cours de cette année. Une nouvelle action dédiée aux mesures exceptionnelles dans le cadre de la crise sanitaire a été créée pour couvrir 860 millions d’euros de dépenses urgentes. Elle a porté les crédits de plusieurs mesures d’urgence, comme l’achat de masques à usage non sanitaire et les dispositifs d’aide exceptionnelle au secteur automobile, aux centres équestres, aux poneys clubs, aux cirques avec animaux, aux parcs zoologiques, aux aquariums ou encore aux refuges.

Cette action n’étant pas dotée de crédits pour 2021, nous nous interrogeons, madame la ministre, sur l’avenir de ces dispositifs de soutien, alors même que la deuxième vague de l’épidémie produit des effets délétères pour ces secteurs.

Au niveau de la mission, les moyens accordés aux différents dispositifs d’intervention seront en nette diminution pour 2021. Sur le programme 134, une fois exclue la compensation carbone, les crédits alloués aux autres interventions sont passés de 350, 2 millions d’euros en 2017 à 165, 3 millions en 2021, soit une diminution de 53 %.

Cette diminution est considérable. Elle correspond à un grand mouvement de rationalisation des multiples instruments de soutien de l’État aux TPE et PME : aides directes ou indirectes, prêts, garanties ou encore actions collectives de formation, de promotion ou de mutualisation des moyens à l’échelle d’une filière. Ces dispositifs portent sur des secteurs très divers, allant de la petite industrie aux métiers d’arts, en passant par les commerces de centre-ville, les services à la personne ou encore les jeunes PME innovantes.

Les coups de rabot successifs ne permettent pas de dégager d’orientation politique durable pour la mission « Économie ». Sur le long terme, il faut prévoir un réel désengagement de l’État qui laissera les territoires gérer seuls leur économie.

Les crédits de la mission « Plan de relance » prévus pour 2021 et 2022 ne sont que temporaires, de sorte qu’ils ne remettent pas en cause cette logique globale de désengagement. Une fois cette mission arrivée à son terme, l’ensemble des dispositifs d’intervention de l’État en faveur des entreprises risque de disparaître définitivement, puisque les crédits d’intervention du programme 134 continuent de fondre.

Le message est clair : l’État doit jouer un rôle contracyclique en période de crise, mais les régions devront assurer seules, dans la durée, un développement équilibré entre les territoires.

Alors que l’économie de nos territoires, l’artisanat et le commerce subissent de plein fouet les conséquences du confinement, je tiens à revenir sur le rôle du Fonds d’intervention pour les services, l’artisanat et le commerce (Fisac) : après avoir vu sa dotation passer de 78 millions d’euros en 2010 à seulement 16 millions en 2018, ce fonds a été placé en gestion extinctive à partir de 2019 – en clair, il est supprimé !

Pourtant, dans la crise actuelle, le Fisac pourrait constituer un instrument de reprise pour les activités les plus durement touchées. Il devrait servir à préserver les commerces des territoires les plus fragiles, et surtout les aider à se moderniser, en développant de nouveaux outils. Je pense en particulier aux artisans qui pourraient recourir davantage aux dispositifs numériques.

Nous présenterons donc un amendement qui vise à abonder le Fisac de 30 millions d’euros.

Concernant le plan France Très haut débit, c’est le programme 343 qui porte la participation de l’État, 3, 3 milliards d’euros au total. En 2021, le déblocage des crédits de paiement devrait s’accélérer avec une prévision de 622 millions d’euros.

Dans le contexte de crise sanitaire et de confinement, les chantiers de déploiement ont pris du retard, ce qui a engendré d’importants surcoûts sur l’ensemble du territoire. Même si nous saluons les efforts réalisés par le Gouvernement dans le cadre du plan de relance, nous considérons que le compte n’y est pas et qu’un effort supplémentaire devra être consenti pour atteindre l’objectif de couverture intégrale du territoire à l’horizon de 2025.

Nous présenterons donc un amendement qui tend à abonder le plan France Très haut débit de 30 millions d’euros.

Par ailleurs, la réforme des impôts de production fait peser un risque sur le financement de la péréquation postale. En tant que membre de la commission départementale de la présence postale territoriale des Pyrénées-Atlantiques, je connais l’importance des enjeux.

Debut de section - PermalienPhoto de Frédérique Espagnac

Je laisse donc la parole à mon collègue Thierry Cozic pour vous présenter la seconde partie de cette mission.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Cozic

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la mission « Économie » porte les crédits des principales administrations économiques du ministère de l’économie, des finances et de la relance.

Dans le contexte de la crise actuelle, nous ne pouvons que saluer la diminution des réductions d’effectifs que nous constatons pour 2021. La pression diminue en particulier sur les administrations du programme 134, la baisse des effectifs passant de 155 suppressions en 2020 à seulement 22 en 2021.

Tout d’abord, la réduction des effectifs de la direction générale des entreprises (DGE) devrait être moindre, avec une baisse de 19 équivalents temps plein (ETP) en 2021. Ces derniers mois, les services déconcentrés ont été particulièrement mobilisés, de sorte que la priorité est à la gestion de crise et que la finalisation du projet de services économiques de l’État en région a été retardée à 2022. L’activité des services doit pouvoir continuer à se focaliser sur l’accompagnement des entreprises en difficulté, ainsi que sur les filières stratégiques et l’innovation.

La réduction des effectifs de la direction générale du Trésor se poursuivra en 2021 à un rythme moins soutenu qu’auparavant, avec la suppression de 13 ETP. La rationalisation du réseau a été particulièrement forte au cours des dernières années, l’effectif des services économiques à l’étranger étant passé de 1 339 agents à 603 entre 2009 et 2020, soit une baisse de 55 %.

Pour la deuxième année consécutive, la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) verra ses effectifs préservés en 2021, avec une baisse de seulement 5 ETP. L’exécution de ses missions en matière de sécurité sanitaire et de lutte contre les fraudes doit ainsi être mieux garantie. Nous considérons que l’effort produit par le Gouvernement reste important.

Quant au fonds de péréquation postale, les conséquences de la réforme des impôts de production sur son financement n’ont pas été suffisamment anticipées par le Gouvernement. §Les ressources, issues de l’allégement de fiscalité locale dont le groupe La Poste bénéficie, reviennent aux commissions départementales de la présence postale territoriale et au financement des points de contact éligibles.

La Poste garantit l’accessibilité de services indispensables pour nombre de nos concitoyens. Je pense en particulier à l’accès au compte et à l’accessibilité numérique.

Pour cette raison, la commission propose un amendement qui crédite le fonds de péréquation postale de 66 millions d’euros pour compenser la perte de ressources liée à la réforme des impôts de production.

Enfin, les prêts garantis par l’État (PGE) ont constitué un outil indispensable, qui a permis aux entreprises de trouver rapidement des liquidités et de traverser ainsi la première vague de l’épidémie.

À ce jour, le bilan des PGE reste positif : les entreprises ont pu emprunter grâce à ces prêts un total de 124, 3 milliards d’euros. La sinistralité envisagée avant la mise en œuvre de nouvelles restrictions pour faire face à la deuxième vague épidémique impliquait un coût global du dispositif de l’ordre de 3 à 4 milliards d’euros, soit un niveau relativement limité au regard des apports du dispositif en termes de soutien aux entreprises. La deuxième vague de l’épidémie et les nouvelles restrictions pourraient cependant faire évoluer ce coût de façon très significative.

Le compte de concours financiers « Prêts et avances à des particuliers et à des organismes privés » comprend les crédits de deux dispositifs qui permettent également de pallier les difficultés de financement des entreprises.

Il s’agit, d’une part, du fonds de développement économique et social (FDES), d’autre part, des avances remboursables et prêts bonifiés gérés par la direction générale des entreprises.

La mobilisation du FDES dans le cadre de l’épidémie de covid-19 a donné lieu à un dédoublement de sa doctrine d’intervention. En parallèle du fonds classique, qui sert d’outil de soutien aux restructurations et qui suppose une contribution importante de financeurs privés, une doctrine d’intervention spécifique, dite « covid-19 », a été déployée. Ce FDES « covid-19 » n’a pas été conditionné à des cofinancements et à une procédure de restructuration.

Les deux dispositifs ont permis d’octroyer un nombre assez limité de prêts. En effet, à peine plus de 20 % du milliard d’euros prévu pour 2020 a été consommé, de sorte que l’intégralité des crédits sera reportée en 2021, avec une ouverture de crédits complémentaire de 75 millions d’euros.

Pour ce qui est des prêts bonifiés et des avances remboursables, la consommation des crédits a été encore plus limitée, puisque, au 31 août, seulement 19, 4 millions d’euros ont été consommés sur les 500 millions d’euros ouverts. D’après les informations transmises, une soixantaine de dossiers resterait en instance.

Pour conclure, je souhaite aborder la question du concours de l’État au financement des fonds de garantie de Bpifrance. En effet, depuis plusieurs années, Mme Espagnac et mon prédécesseur, Bernard Lalande, déplorent l’absence de budgétisation des crédits dédiés aux fonds de garantie, qui résultent de redéploiements de crédits ou de recyclages internes à Bpifrance.

Ces débudgétisations sont en contradiction avec le principe d’universalité budgétaire et nuisent à la sincérité des comptes publics. De plus, pour 2021, des crédits dédiés à ces garanties classiques ont été rangés au sein du plan de relance, alors qu’ils auraient dû être retracés dans le programme 134.

C’est la raison pour laquelle nous proposerons un amendement symbolique de 10 000 euros, visant à assurer le maintien du lien entre le programme 134 et les activités de garantie de Bpifrance.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Babary

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, mon propos sera essentiellement centré sur les crédits qui concernent le volet « Commerce et artisanat ».

Si le plan de relance dédié à ces secteurs regroupe environ 200 millions d’euros de crédits, la mission « Économie », quant à elle, n’en retrace quasiment plus aucun. C’est pourquoi la commission des affaires économiques a adopté quatre amendements.

Le premier concerne le Fisac, fonds qu’il ne nous semble pas raisonnable de supprimer, alors même que les autres dispositifs censés le remplacer ne sont pas encore suffisamment opérationnels. Je pense par exemple à l’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT), qui n’a qu’un an d’existence, ou au plan « Action cœur de ville », qui ne concerne que les villes moyennes. Je vous proposerai donc d’augmenter le Fisac de 30 millions d’euros.

Le deuxième amendement porte sur l’Institut national des métiers d’art (INMA). Le Gouvernement diminue progressivement le soutien public dont la structure bénéficie, et envisage son autofinancement en 2022. Or la crise actuelle a des conséquences lourdes sur les ressources propres de cette association reconnue d’utilité publique. Le mécénat et les prestations, comme les salons, sont en effet en baisse. Je vous présenterai donc un amendement qui vise à rétablir la dotation de l’INMA au niveau qu’elle atteignait l’an passé.

Le troisième amendement concerne l’initiative France Num, devenue la pierre angulaire de la politique publique de numérisation des PME. Bien qu’utile, l’initiative souffre d’une notoriété insuffisante et d’une absence totale de suivi de ses actions et de mesure de leur efficacité.

Il nous paraît essentiel, à un moment où la transition numérique semble enfin considérée comme primordiale, de financer une vaste campagne de communication qui ne soit pas ciblée sur les entrepreneurs déjà familiers du sujet, mais au contraire sur tous ceux qui en sont éloignés.

La commission a donc adopté un amendement qui tend à augmenter de 5 millions d’euros la dotation de France Num, dans l’objectif de financer également la mise en œuvre d’un dispositif de suivi des actions de numérisation mises en place grâce à son entremise.

Si nous saluons les mesures du plan de relance qui visent à accélérer la numérisation des PME, nous constatons qu’elles butent sur l’écueil que représente le financement concret du virage numérique.

C’est pourquoi, à l’occasion de l’examen des articles non rattachés aux crédits, nous vous présenterons un amendement, déjà adopté par le Sénat lors de l’examen du troisième projet de loi de finances rectificative, mais rejeté par l’Assemblée nationale, tendant à créer un crédit d’impôt à la numérisation et à l’équipement. Son taux serait de 50 % des dépenses engagées dans la limite de 10 000 euros par an.

Il est urgent d’agir fort et de penser la numérisation comme relevant de l’intérêt général. Sans cela, malgré toutes les bonnes intentions, les mesures mises en œuvre échoueront à trouver leur public.

En conclusion, la commission des affaires économiques a émis un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission « Économie », sous réserve de l’adoption des amendements qu’elle a déposés.

Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et INDEP.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

M. le président. La parole est à Mme la rapporteure pour avis.

Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Anne-Catherine Loisier

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la commission des affaires économiques saisie pour avis sur le volet « Numérique et postes » de la mission « Économie » a émis un avis favorable, essentiellement motivé par l’abondement des crédits du plan de relance, sous réserve toutefois de l’adoption d’un amendement sur La Poste.

Depuis plusieurs années, le Sénat plaide pour un cap clair et des financements conséquents pour développer les réseaux d’initiative publique sur tous les territoires. L’enjeu d’inclusion numérique est bien connu et son caractère essentiel a été ravivé par les confinements successifs.

Nous avions proposé une rallonge de 322 millions d’euros dans le projet de loi de finances pour 2020, mais n’avions obtenu que 30 millions dans le PLFR 3. Grâce au plan de relance, une enveloppe supplémentaire de 240 millions d’euros sera disponible en 2021. Le Gouvernement recycle des crédits qui ne sont pas nouveaux, mais ils permettent de mobiliser un total de 550 millions d’euros.

Il était temps, madame la ministre, car nous sommes malheureusement toujours les bons derniers de l’Union européenne en matière de très haut débit fixe !

Une étape a donc été franchie, en ce qui concerne le soutien aux territoires. Il conviendra à présent de nous assurer que le cahier des charges du plan France Très haut débit permette de financer tous les raccordements, y compris les plus longs et les plus complexes.

La gestion du dossier de La Poste est un autre sujet d’incompréhension, voire de mécontentement. En effet, malgré les alertes, le Gouvernement n’a pas anticipé les conséquences de la réforme des impôts de production sur la mission d’aménagement du territoire de La Poste. Pas plus d’ailleurs qu’il n’a prévu les difficultés du service universel postal. Ces missions sont pourtant essentielles, et la crise de ces derniers mois l’a encore prouvé.

Dans ce budget, madame la ministre, vous proposez comme seule réponse de diminuer la compensation du service de transport et de distribution de la presse, à moins de 90 millions d’euros. Quand on connaît l’équivalent dont dispose La Poste belge, à savoir 170 millions d’euros, on se demande comment La Poste française pourrait poursuivre une mission de qualité sur un territoire vingt fois plus grand et avec moitié moins d’argent !

Le Sénat a voté un amendement d’appel en première partie du projet de loi de finances. Nous vous proposons de revenir sur le sujet dans cette seconde partie et d’abonder de 66 millions d’euros l’enveloppe consacrée à l’aménagement du territoire.

Nous avions cru comprendre jusqu’alors que c’était une solution acceptable pour le Gouvernement, mais il semblerait que la question ne soit pas encore tranchée et qu’elle reste suspendue à l’arbitrage du Premier ministre.

Nous espérons donc, madame la ministre, que vous pourrez nous annoncer une bonne nouvelle, après plusieurs semaines de débat, et alors que nous sommes en plein examen du PLF. Les Français attendent du Gouvernement qu’il tienne les engagements qu’il a pris auprès des différentes commissions départementales de présence postale.

Notre amendement propose un minimum, sur lequel nous devrions pouvoir nous accorder, pour assurer la pérennité du service public de La Poste, auquel les Français tiennent tant.

La responsabilité nous reviendra ensuite de préparer l’avenir et de réfléchir à la forme que devra revêtir un service universel adapté aux réalités nouvelles, le contexte ayant particulièrement évolué ces derniers mois.

Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Franck Montaugé

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le choc économique que nous subissons depuis mars a eu pour conséquence d’exacerber les faiblesses structurelles de notre industrie à au moins quatre niveaux.

D’abord, l’endettement s’est accru de 13 % et, en septembre dernier, l’encours total de dette de l’industrie était proche de 150 milliards d’euros, ce qui est d’autant plus problématique que les entreprises industrielles françaises sont faibles en fonds propres.

Ensuite, l’investissement a chuté de 14 % par rapport à 2019, alors que notre outil industriel a dix-neuf ans d’âge moyen. Il est deux fois plus ancien qu’en Allemagne, et bien moins robotisé et numérisé.

En matière environnementale, 40 % de l’énergie consommée par l’industrie en France est le fait d’équipements vieux de plus de trente ans, et dont les performances énergétiques sont mauvaises.

La crise a aussi révélé l’importante dépendance de notre économie à certains grands secteurs exportateurs comme l’aéronautique et, dans une moindre mesure, l’automobile. Au-delà du seul déficit de notre commerce extérieur, le risque est que nous perdions durablement des parts de marchés à l’international.

Enfin, l’industrie a déjà perdu près de 53 000 emplois en 2020, alors que des plans sociaux restent à venir. En France, ce secteur représente 13 % des emplois contre 21 % en Allemagne et 20 % en Italie.

Comment le budget pour 2021 répond-il à ces enjeux ? Si les orientations de long terme sont intéressantes, elles présentent des carences à court terme.

Tout d’abord, un soutien plus conséquent à la demande sera nécessaire, car la crise qui se profile fera des dégâts dans l’ensemble de l’industrie.

Plusieurs leviers existent, dont le soutien à des secteurs oubliés du plan de relance, comme la construction neuve, qui encourage en particulier la production métallurgique. La commande publique en est un autre, mais encore faudrait-il que les collectivités qui représentent 60 % de l’investissement public disposent des ressources nécessaires. Enfin, la réouverture des commerces est un impératif pour l’industrie.

Pour relancer la demande, on ne pourra éviter la question de la mobilisation de la considérable épargne que les Français ont accumulée depuis mars dernier, soit environ 90 milliards d’euros. Aucune piste ne nous a été exposée à ce sujet.

Ensuite, le Gouvernement ne semble pas prendre correctement la mesure du mur de la dette, qui s’élève à près de 150 milliards d’euros dans l’industrie.

En conclusion, mes chers collègues, la relance offre une opportunité longtemps attendue de penser une politique industrielle souveraine, ambitieuse et réaliste, qui utilise tous les leviers de transformation de notre industrie.

Les orientations stratégiques de la réindustrialisation du pays devraient faire l’objet d’une implication directe du Parlement, en concertation avec les filières et les régions.

Si le plan de relance identifie bien les enjeux de long terme, il doit être renforcé à court terme pour pallier une crise de la demande et mieux anticiper le problème de l’endettement.

La commission des affaires économiques a émis un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission « Économie ».

Applaudissements sur des travées des groupes SER et Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque unité de discussion comprend le temps de l’intervention générale et celui de l’explication de vote.

Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de dix minutes pour intervenir.

Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Franck Menonville.

Debut de section - PermalienPhoto de Franck Menonville

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la question de la juste intervention publique dans la sphère économique nourrit d’intenses débats depuis plusieurs siècles. En cette année 2020, et dans les circonstances que nous connaissons, elle est plus que jamais d’actualité.

La mission « Économie » se compose de quatre programmes principalement orientés vers l’accompagnement des entreprises, notamment pour la transition numérique de l’artisanat et des petites entreprises. L’enjeu est essentiel dans le contexte actuel.

Alors que les petits commerces rouvrent leurs portes aujourd’hui – et nous nous en félicitons –, les difficultés rencontrées lors des dernières semaines, voire des dernières années, demeurent. Cela devrait suffire à nous convaincre qu’il faut accélérer la transition numérique des territoires, notamment la numérisation des PME et des commerces. Le groupe Les Indépendants est donc très favorable au crédit d’impôt à la numérisation qui sera proposé.

Je partage aussi les analyses de Mme la rapporteure spéciale sur le plan France Très haut débit : il gagnerait à être mis en œuvre plus rapidement. Madame la ministre, même si je connais votre détermination sur ce dossier, je crois qu’il est encore possible de gagner en efficacité, en simplifiant certaines procédures.

La commission des finances et celle des affaires économiques proposent d’abonder les crédits du Fisac à hauteur de 30 millions d’euros. Si l’amendement est adopté, cette enveloppe contribuera à redynamiser les centres-bourgs et les centres-villes, sans grever les finances publiques.

Le groupe Les Indépendants accueille donc très favorablement cette proposition. Il ne s’agit pas de donner au Fisac un blanc-seing sur le long terme, mais de reconnaître que sa mission est essentielle dans le contexte actuel et qu’aucun autre dispositif ne peut le remplacer à ce stade, comme l’a rappelé M. Serge Babary.

La pertinence du Fisac se justifie aussi par le fait qu’il s’agit d’un outil pérenne et structurel qui complétera utilement le fonds de solidarité, instrument qui à l’inverse est exceptionnel et conjoncturel. La bonne articulation des deux fonds renforcera notre politique de cohésion des territoires.

La contribution de La Poste à cette dynamique sera également déterminante, même si son rôle reste encore à définir. Il ne faut pas affaiblir sa présence sur les territoires, car nous devons pérenniser tout autant que renouveler ce service universel.

Nous étudierons prochainement l’opportunité de prolonger de deux ans le dispositif des zones de revitalisation rurale (ZRR). Dans le contexte de crise que nous traversons, le rôle des ZRR est comparable à celui du Fisac. Nous gagnerions à capitaliser sur de tels dispositifs, existants et éprouvés. C’est en cultivant la stabilité et en préservant la continuité des instruments dont nous disposons que nous éviterons les temps morts.

En conclusion, nous ne pourrons pas faire l’économie d’une réflexion plus globale sur la stratégie à mettre en œuvre pour redynamiser le tissu des entreprises de nos territoires. Il y va de la cohésion nationale.

Le groupe Les Indépendants votera les crédits de la mission « Économie », ainsi que les amendements présentés par les rapporteurs.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Salmon

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous le savons, l’examen de cette mission intervient, comme celui de l’ensemble du budget pour 2021, dans un contexte de crise sanitaire et économique inédit.

Si nous saluons les efforts financiers tout à fait nécessaires engagés depuis le début de la crise pour aider les entreprises, des réponses plus fortes doivent être apportées pour accompagner le tissu économique dans son ensemble.

Concernant les crédits de la mission, la hausse que nous constatons cette année résulte de la nette augmentation des crédits du dispositif de compensation carbone des sites électro-intensifs et du programme 343, « Plan France Très haut débit » – les crédits de paiement de ce programme progressent de 41 %. À ce sujet, il nous paraît nécessaire de donner la priorité à la couverture des zones blanches demeurant en France avant d’achever la couverture en très haut débit.

Nous regrettons par ailleurs le manque de lisibilité globale de cette mission du fait du plan de relance qui fait l’objet d’une mission spécifique, ce qui, si cela se justifie d’un point de vue opérationnel, complique la lecture des crédits que nous examinons.

Permettez-moi de revenir sur un certain nombre de points spécifiques que nous déplorons.

D’abord, la suppression définitive du Fisac – le sujet me paraît faire l’unanimité ce soir –, voulue par le Gouvernement, n’a pas de sens. La crise actuelle affecte en premier lieu l’artisanat et le commerce. Il est indispensable de disposer de crédits d’intervention, afin de maintenir ces activités dans nos territoires les plus fragiles, notamment ruraux. C’est pourquoi nous soutiendrons les amendements visant à rétablir les crédits du Fisac à hauteur de 30 millions d’euros.

Nous regrettons bien entendu l’absence de conditionnalité pour les aides versées aux entreprises dans le cadre de cette mission, comme d’ailleurs dans le cadre du plan de relance, qu’elles soient écologiques, sociales, de relocalisation ou encore d’assainissement fiscal.

Globalement, les aides de l’État profitent surtout aux grandes entreprises qui bénéficient davantage en valeur de la baisse des impôts de production. À côté, le soutien de l’État paraît bien insuffisant pour les TPE et les PME qui subissent la crise de plein fouet.

Plus largement, nous regrettons l’opposition de ce gouvernement à toutes nos propositions tendant à instaurer des solidarités économiques nouvelles, comme la contribution exceptionnelle sur les géants de la vente en ligne. Mettre fin à la distorsion de concurrence entre le commerce de proximité et le commerce en ligne est un enjeu d’équité et de justice sociale et fiscale – c’est une question qui est au cœur des préoccupations des acteurs du tissu économique local cher à nos concitoyens.

Une réflexion de fond doit aujourd’hui être menée en vue d’inventer une fiscalité du commerce répondant aux enjeux écologiques du XXIe siècle et permettant de lutter réellement contre les stratégies d’évitement de l’impôt mises en place par certains géants du numérique.

Vous parlez de souveraineté et de relocalisation, mais nous attendons toujours les actes nous assurant de reprendre la maîtrise de notre système productif. Garder le monopole sur nos fleurons nationaux est également essentiel : nous attendons le retour d’un État stratège. Utilisons si nécessaire la nationalisation provisoire pour conserver sur le sol français des capacités en matière de production stratégique. Je pense par exemple à Luxfer, dernière unité de production en Europe de bouteilles d’oxygène médical, une entreprise menacée de fermeture définitive.

Pour conclure, on ne retrouve pas les grands objectifs décrétés par le Gouvernement – la relance verte et la relocalisation stratégique – dans ce projet de loi de finances, particulièrement dans cette mission qui est pourtant le véhicule clé pour intégrer des dispositifs de régulation.

Si nous ne nous opposons pas à l’ensemble des mesures, nous ne pouvons pas approuver un budget conçu selon une doctrine néolibérale fondée sur la compétitivité des entreprises et la consommation à tout prix, objectifs qui ne répondent pas aux enjeux d’aujourd’hui et de demain.

C’est pourquoi le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires votera contre les crédits de cette mission.

Debut de section - PermalienPhoto de Nadège Havet

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, répondre à la crise sanitaire, c’est aussi soutenir plus que jamais notre économie, en particulier les secteurs les plus durement touchés et les plus stratégiques. C’était d’ailleurs l’objet de nos échanges sur le plan de relance, ici même jeudi dernier, échanges qui se poursuivront ce soir.

Les crédits de la mission « Économie » que nous examinons aujourd’hui ne peuvent être étudiés isolément, puisqu’ils seront complétés par les 6 milliards d’euros de crédits déjà votés, qui viennent en soutien de la compétitivité des entreprises et de la résilience économique de la France.

Pour la mission « Économie » en tant que telle, les crédits sont en augmentation de près de 14 %. Cette hausse est liée à l’évolution du montant de la compensation carbone accordée à certaines entreprises, d’une part, et au déploiement du plan France Très haut débit au titre du programme 343, d’autre part.

En début de mandature, le Président de la République a fixé l’objectif d’une couverture intégrale du territoire national en haut débit d’ici à 2020, et en très haut débit d’ici à 2022.

Afin d’y parvenir, le programme d’investissements d’avenir (PIA) piloté par le secrétariat général pour l’investissement représente la première source de financement. À cela viennent s’ajouter plusieurs ressources complémentaires prévues dans ce programme, en soutien aux réseaux d’initiative publique des collectivités. Les projets sont quasi finalisés : leur intervention doit garantir l’utilisation partagée du réseau et respecter le principe d’égalité et de libre concurrence sur les marchés.

Les crises sanitaire et économique que nous traversons impliquent en effet la sécurisation et la généralisation de la couverture en fibre optique sur l’ensemble du territoire, mais elles nécessitent aussi de prendre en compte la dégradation des conditions financières et le cofinancement des raccordements coûteux pour les sites les plus isolés.

En parallèle, saluons l’initiative de former 4 000 médiatrices et médiateurs, afin de lutter contre l’illettrisme et la fracture numériques ; cette politique est d’autant plus nécessaire que la période de confinement a accru l’usage des services numériques pour l’accès à des services essentiels de la vie quotidienne.

Les politiques publiques financées par le programme 134 visent, quant à elles, à redynamiser l’environnement économique, en ciblant trois objectifs stratégiques : développer les PME et les entreprises de taille intermédiaire, en renforçant l’offre classique de garantie des prêts de Bpifrance ; renforcer le soutien à l’international des entreprises à l’export, en particulier grâce au travail de Business France ; enfin, réguler et sécuriser les marchés pour s’assurer du respect des règles de concurrence, ainsi que de la qualité et de la sécurité des produits mis sur le marché.

Alors que l’ensemble de nos politiques de relance devra s’appuyer sur des données fiables, nous nous félicitons que l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee), qui collecte, produit, analyse et diffuse des informations socioéconomiques dans le débat public, bénéficie également d’un budget solide, légèrement en hausse.

Enfin, le programme 305 prévoit les moyens de fonctionnement de la direction générale du Trésor. Son action de conception et de mise en œuvre des politiques économiques et financières visera un objectif essentiel, celui de retrouver dès 2022 un niveau de richesse nationale équivalent à celui d’avant la crise, mais aussi l’objectif de soutenir la consommation des ménages.

Le groupe RDPI se prononcera donc en faveur des crédits de cette mission.

Debut de section - PermalienPhoto de Guylène PANTEL

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, les différents rapporteurs l’ont déjà mentionné, le projet de loi de finances pour 2021 est profondément marqué par la crise sanitaire, économique et sociale que nous vivons depuis le mois de mars.

C’est d’autant plus vrai pour cette mission « Économie », à laquelle a été ajoutée une nouvelle action Mesures exceptionnelles dans le cadre de la crise sanitaire – j’y reviendrai.

Concernant les programmes de cette mission, il y a plusieurs points, sur lesquels j’aimerais revenir.

D’abord, j’évoquerai le ralentissement des réductions d’effectifs à la DGCCRF, ainsi qu’à la direction générale des entreprises. Si l’objectif est de recentrer ces directions sur le cœur de leurs missions de contrôle, il aurait été plus efficace de prévoir une augmentation des effectifs, le but n’étant pas de contrôler pour le plaisir de sanctionner, mais bien de protéger nos petites et moyennes entreprises et de faire respecter la législation en matière de transition écologique.

Ensuite, j’aimerais attirer l’attention sur le plan France Très haut débit, lancé en 2013 en vue de couvrir 100 % du territoire en très haut débit à l’horizon 2022. Il a hélas pris du retard, et c’est regrettable, d’autant plus que le très haut débit est un enjeu considérable pour l’attractivité des territoires hyper-ruraux, comme mon département, la Lozère.

En abondant de 250 millions d’euros le guichet du réseau des initiatives publiques, après les 30 millions d’euros de crédits votés par le Sénat lors de l’examen du troisième projet de loi de finances rectificative, le Gouvernement montre qu’il a conscience de ces problématiques. Au total, c’est près d’un demi-milliard d’euros qui est sur la table pour atteindre l’objectif d’une France couverte à 100 % en très haut débit en 2025.

Je partage néanmoins les craintes de nos rapporteurs spéciaux quant à une sous-évaluation des besoins de la mission. C’est pourquoi le groupe du RDSE soutiendra leur amendement tendant à augmenter les crédits du programme.

Concernant les différentes aides aux entreprises, il convient de souligner leur nombre et le soutien déterminant qu’elles apportent à l’économie locale. Je pense notamment aux prêts garantis par l’État, gérés par Bpifrance. Au total, un encours de 300 milliards d’euros sera financé, avec une garantie de deux ans de décalage pour le remboursement.

Je pense également aux zones de revitalisation rurale (ZRR). L’annonce de leur maintien jusqu’en 2022 fut un vrai soulagement dans mon département, particulièrement pour les communautés de communes de Mende et de Marvejols. Plus que jamais, nous devons rappeler notre attachement à ce dispositif qui, s’il n’est pas parfait, permet de compenser de nombreux freins à l’installation dans nos territoires ruraux.

J’émettrai la même critique que nos collègues rapporteurs sur le manque de visibilité et l’absence de pilotage global des différents mécanismes de soutien à l’activité économique.

Sur le soutien aux commerces ruraux, je soutiendrai là encore l’amendement des rapporteurs spéciaux concernant le Fisac. Le souhait de l’enterrer, qui s’accompagne d’une baisse de 80 % des crédits qui lui sont dévolus, est une erreur, d’abord parce que la crise que nous connaissons vient de démontrer l’importance de nos commerces de proximité, ensuite parce que le remplacement du Fisac par le programme « Action cœur de ville » n’est que partiel et que les actions de ce dernier ne sont pas ciblées vers les territoires.

Pour conclure, à l’instar des rapporteurs, nous plaidons pour une plus grande lisibilité, une plus grande coordination des aides à destination des entreprises et pour que l’action publique, au niveau national comme sur nos territoires, soit encore simplifiée.

Vous l’aurez compris, mes chers collègues, la majorité du groupe du RDSE votera les crédits de la mission « Économie ».

Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Fabien Gay

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous déplorons que, dans ce projet de loi de finances pour 2021, les crédits consacrés à l’économie soient éparpillés entre la mission « Économie » et le plan de relance.

Malgré l’illisibilité qui en découle, les lacunes sont évidentes : le commerce de proximité et l’artisanat représentent 3 millions d’entreprises et 3, 5 millions de salariés. Une seule question compte : combien d’entre elles baisseront définitivement le rideau après les deux confinements que nous venons de vivre ? Et à cause de ces fermetures, combien de personnes auront tout perdu, leur commerce pour les petits patrons, leur travail pour les salariés, mais aussi leur maison et leurs économies pour beaucoup ?

Certes, on trouve des mesures éparses de soutien comme les programmes « Action cœur de ville » et « Petites villes de demain » ou le déploiement de cent foncières pour six mille fonds de commerce, mais elles s’inscrivent toutes dans le long terme.

Or il y a urgence, d’autant que le Gouvernement n’a pas renoncé à la réforme des réseaux consulaires, prévue par la loi relative à la croissance et la transformation des entreprises, dite loi Pacte, ni à la diminution des ressources affectées aux chambres de commerce et d’industrie (CCI) – 350 millions d’euros en moins depuis le début du quinquennat, 100 millions jusqu’en 2022 –, sans parler du Fisac.

Madame la ministre, les mesures en faveur des TPE et des PME sont insuffisantes. Vous me répondrez qu’il y a le chômage partiel, le fonds de solidarité et les prêts garantis par l’État, mais le problème, c’est que le Gouvernement est fort avec les faibles et faible avec les puissants.

Par exemple, plutôt que de travailler à une réouverture des librairies, vous avez fermé les rayons « culture » des hypermarchés. Pendant ce temps, Amazon et les autres géants du e-commerce ont tranquillement régné pendant un mois sur le marché du livre, entre autres secteurs.

Et alors qu’Amazon paie peu d’impôts et participe activement à la fraude fiscale à la TVA de ses revendeurs intracommunautaires, le ministre de l’économie s’est félicité d’avoir fait reculer le Black Friday d’une semaine – la belle affaire ! Amazon s’en est félicité pour en récupérer le mérite et se donner une image vertueuse après un mois de profits au détriment des commerces de proximité. Nous aurions préféré légiférer pour imposer à Amazon une taxe alimentant le fonds de solidarité.

Aujourd’hui, les commerces rouvrent : c’est bien, mais c’est insuffisant, car il va leur falloir compenser plusieurs mois de fermeture. Et ce sera pire pour les restaurants, les cafés et leurs personnels, dont les revenus dépendent en partie des pourboires – ils devront attendre le 20 janvier prochain.

S’ajoutent à cela les difficultés d’accès au fonds de solidarité malgré quelques avancées, obtenues notamment par le Sénat. Par exemple, pourquoi les gérants salariés en sont-ils encore exclus, alors qu’ils cotisent pour l’ensemble des risques et qu’un patron affilié au régime social des indépendants peut en bénéficier ?

Il est quand même incroyable que Bercy soit capable de créer une multitude de conditions pour exclure les petits commerçants du fonds de solidarité et qu’à l’inverse, quand on parle des aides publiques versées aux grands groupes qui dans le même temps licencient, versent des dividendes et ont des filiales dans les paradis fiscaux, le conditionnement devienne tout à coup impossible !

Surtout, fondamentalement, c’est la demande qu’il faudra soutenir pour relancer la machine économique, car, si les fêtes de fin d’année approchent, les Françaises et les Français paient le prix fort de cette crise, avec un chômage en hausse et 1, 1 million de salariés au chômage partiel avant même le reconfinement de novembre.

M. le ministre de l’économie l’a d’ailleurs reconnu sur France Inter cette semaine : « Les salariés font des efforts considérables et la vie est difficile pour eux. » Nous n’avons cessé, au groupe CRCE, de le dire. Dans cette même émission, le ministre « demandait » aux entreprises de faire elles aussi des efforts. Demander, madame la ministre, ne pouvons-nous rien faire de plus dans cette période de licenciements massifs ?

L’État, avec le Parlement, a la possibilité, par la loi, de transformer ces demandes en actes, par exemple en interdisant le versement des dividendes en 2021 ou en conditionnant les aides à des critères d’emploi et d’environnement.

Mais les difficultés ne touchent pas seulement les salariés au chômage partiel et ne datent pas de cette crise. Pour soutenir la demande, les salaires doivent être augmentés. Inutile de préciser que nous ne voterons pas les crédits de cette mission.

Applaudissements sur les travées du groupe CRCE.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Moga.

Applaudissements sur des travées du groupe UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Moga

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le sursaut économique aussi attendu que souhaité par tous les acteurs politiques et économiques dépendra avant tout de notre capacité à sortir de la crise sanitaire. Avec une chute d’activité de 12 % en novembre contre 31 % en avril, il est difficile de mesurer aujourd’hui la capacité de notre économie à reprendre vite et fort, mais le déconfinement de l’été nous permet d’être un peu plus optimistes.

Cependant, cette reprise ne sera réelle que si la casse économique est limitée et si les entreprises sont accompagnées au maximum. Les plans d’urgence et de relance proposés par le Gouvernement constituent des réponses indispensables à la marche de l’économie.

On peut se réjouir de leur existence et des mesures qu’ils prévoient. Sur la forme, on peut néanmoins regretter la difficulté à lire les crédits consacrés à la relance qui se trouvent à la fois dans la mission « Économie » et dans la mission « Plan de relance », examinée il y a deux jours. La mission « Économie » a d’ailleurs servi d’outil, dès cette année, notamment pour porter les prêts garantis par l’État et les prêts à taux bonifiés.

Pour que la reprise soit efficace, il faut qu’elle irrigue tous les territoires, qu’elle touche les populations les plus en difficulté et qu’elle anticipe l’avenir. C’est pourquoi j’aimerais, à ce stade, insister sur quelques points.

Tout d’abord, la vitalité des territoires ruraux et la survie de certains centres-bourgs dépendront du dynamisme du commerce de proximité et de l’artisanat. Comme la plupart des intervenants à cette tribune, je vous parlerai aussi du Fisac. §Vous le savez, la disparition désormais effective de ce fonds n’est pas du tout admise par notre assemblée.

Le confinement a été très rude pour ces activités économiques : des milliers d’entreprises disparaîtront sans doute demain. Le Fisac contribuait à les aider et confiait aux élus locaux et aux préfets la responsabilité des choix à opérer. Nous voterons donc l’amendement proposé par la commission des finances pour rétablir cet outil simple et primordial.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Moga

Ensuite, préparer l’avenir, c’est déployer le très haut débit sur tout notre territoire.

Je salue, comme ma collègue Anne-Catherine Loisier, la hausse des crédits alloués au plan France Très haut débit prévue par cette mission. Les objectifs sont bons, mais pourriez-vous, madame la ministre, faire un point sur les réalisations ?

Ne passons pas non plus à côté de la couverture de tout notre territoire en 4G : parler de la 5G, c’est bien, mais prenons garde de ne pas accentuer la fracture numérique. Aujourd’hui, la précarité se développe. Les plus jeunes habitants des zones rurales sont les plus en difficulté.

Enfin, la crise que nous traversons a mis en lumière les difficultés de notre économie mondialisée : problèmes liés aux délocalisations des activités industrielles, manques de compétences, problèmes d’approvisionnement et difficultés d’exportation. La santé et l’alimentation sont devenues des secteurs essentiels : l’État doit définir clairement sa stratégie en la matière pour protéger, relocaliser et développer.

La création et le développement d’entreprises de taille intermédiaire (ETI) performantes, innovantes et exportatrices constitueraient une stratégie nouvelle et efficace pour notre pays. Il y va aussi du développement du commerce extérieur et, donc, de la balance commerciale de la France. Madame la ministre, nous aurions aimé connaître les ambitions du Gouvernement dans ce domaine. Existe-t-il une stratégie nationale ou à tout le moins européenne ?

Les membres du groupe Union Centriste voteront en faveur des crédits de cette mission.

Applaudissements sur les travées des groupes UC, Les Républicains et INDEP.

Debut de section - PermalienPhoto de Florence Blatrix Contat

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, à la suite de l’intervention du Président de la République le mardi 24 novembre et de celle du Premier ministre le jeudi 26, nous connaissons aujourd’hui les premières mesures de déconfinement après la deuxième vague de la pandémie.

Si, dans nos territoires, et pour la première fois depuis plusieurs semaines, quelques-uns de nos commerces, de nos ateliers et autres lieux d’activité ont la possibilité d’ouvrir à nouveau, les difficultés qu’ils ont rencontrées au cours de l’année 2020 ne sont pas pour autant surmontées ni résolues.

C’est dans ce contexte singulier et particulier que les sénateurs et sénatrices socialistes, écologistes et républicains vous font part de leur analyse et de leurs remarques sur les crédits de la mission « Économie ».

Une simple lecture comptable fait apparaître une hausse globale substantielle de ces crédits pour 2021 par rapport à 2020, mais cette lecture peut être trompeuse. Aussi faut-il examiner plus précisément le fond du dossier et les chiffres.

Au cours de l’exercice en cours, la mission « Économie » a servi de support improvisé : au sein du programme 134, une nouvelle action n° 25 a en effet été créée pour prendre d’éventuelles mesures exceptionnelles dans le cadre de la crise sanitaire. Mais notons-le, comme elle n’est pas dotée de crédits spécifiques pour l’année 2021, se posera la question de savoir où seront ponctionnées les ressources budgétaires en cas de besoin.

Par ailleurs, la mise en œuvre d’un plan de relance de l’économie doté de 100 milliards d’euros sur deux ans a certes recueilli les faveurs de l’opinion publique, mais il ne faudrait pas que les effets d’annonce brouillent l’action, certes moins médiatique, mais plus pérenne du programme 134 et des autres programmes de la mission.

J’en reviens donc aux difficultés que rencontrent déjà – elles seront plus aiguës encore dans les prochains mois – les entreprises, commerces et artisans dans nos territoires et régions. Leurs besoins sont immédiats, mais doivent aussi trouver des réponses dans la durée.

Le projet de budget entérine la réorganisation de la direction générale des entreprises sur nos territoires, avec notamment la création des services économiques de l’État en région et la mise en place de pôles « entreprises, emploi, économie ». Nous n’en contestons pas le principe, mais ces décisions aboutissent néanmoins à une réduction du nombre des fonctionnaires sur le terrain au moment où leur mission de conseil et de soutien est particulièrement nécessaire.

Année après année, les coups de rabot sur le budget sont portés sans vision à moyen terme, au nom d’une rationalisation des services déconcentrés. Ils affaiblissent globalement l’action de l’État dans les territoires.

Comme l’ont souligné nos collègues rapporteurs, il faut faire beaucoup plus pour les PME et les ETI, l’artisanat et le commerce dans nos territoires. Ces activités sont le poumon économique de nos régions et sont le plus souvent très riches en emplois. Selon les calculs de nos collègues, l’effort financier de l’État en faveur des commerces et de l’artisanat a diminué de 89 % en dix ans. Il n’est plus véritablement lisible aujourd’hui, car il est intégré dans l’action n° 23.

Nous considérons que les activités productives, les commerces et les services de proximité doivent être prioritaires. Nous avons proposé la création d’une contribution exceptionnelle des acteurs économiques ayant perçu des bénéfices accrus en 2020, comme les assureurs et les acteurs du e-commerce. L’objectif était d’en redistribuer le produit aux acteurs économiques qui ont dû fermer ou dont l’activité s’est effondrée.

L’économie de proximité doit être identifiée comme une priorité dans le cadre de la relance économique. Des annonces ont été faites en ce sens en juin 2020 avec, comme mesure principale, un renforcement du soutien à la création de foncières de rénovation commerciale. Cela nous semble bienvenu, mais là encore, au-delà de l’effet d’annonce, nous souhaitons qu’une réponse soit véritablement apportée à la dévitalisation commerciale qui frappe nombre de nos communes, avec un ciblage resserré sur les territoires les plus fragiles.

Dans ce cadre, le soutien public à la numérisation des PME, des entreprises artisanales et des commerces est source de modernisation, de gains de productivité et de rebond économique. Comme l’a justement souligné le rapporteur spécial, il faut changer d’échelle dans ce domaine, pour répondre tant aux attentes et aux retards déjà constatés qu’aux besoins massifs en formation et en équipement de ces entreprises.

Par ailleurs, la hausse des crédits dédiés au soutien des entreprises – mes collègues rapporteurs l’ont indiqué – concerne essentiellement la compensation carbone ; elle cache en réalité une diminution de 53 % des crédits, hors compensation carbone. Il est indispensable, dans la situation actuelle, de rétablir de façon pérenne ces crédits et d’élaborer une véritable stratégie de pilotage du soutien aux entreprises.

Au-delà de ces réserves, les rapporteurs spéciaux proposent des avancées significatives pour soutenir efficacement l’activité de proximité, à savoir le maintien du Fisac et le renforcement de ses moyens, mais aussi une hausse des crédits alloués au plan France Très haut débit. Ils proposent également de garantir le maintien d’une présence postale sur l’ensemble des territoires.

Ce sont ces mesures que le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain soutient fortement, car elles auront des effets immédiats et visibles pour nos concitoyens, nos commerces et nos artisans. Si ces amendements sont adoptés, mon groupe votera les crédits de la mission.

Applaudissements sur les travées du groupe SER.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Annick Billon et M. Jean-Pierre Moga applaudissent également.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Chaize

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, mon intervention s’articulera autour de deux axes.

Le premier concerne le numérique et, plus particulièrement, le plan France Très haut débit. L’année dernière, nous avions dû batailler pour faire adopter un amendement tendant à abonder ce plan, amendement rejeté sans autre forme de procès par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture.

Cette année, nous n’aurons pas besoin de livrer une nouvelle bataille, car, entre la troisième loi de finances rectificative et le plan de relance, le plan France Très haut débit dispose désormais de 550 millions d’euros, ce qui prouve bien, madame la ministre, que nous avions raison il y a un an de vouloir augmenter les crédits du Fonds pour la société numérique. Notre position n’était en rien « détestable » – votre expression de l’époque !

Avec ces 550 millions d’euros, nous ne sommes plus très loin des 630 millions nécessaires au financement du 100 % raccordable au FTTH (Fiber To The Home), c’est-à-dire la fibre jusqu’au domicile, dans les zones les plus rurales de notre territoire. C’est d’autant plus vrai que l’État dispose encore de près de 50 millions d’euros de subventions aux opérateurs privés inutilisées dans le cadre du guichet de cohésion numérique des territoires, subventions qu’il convient de flécher à nouveau vers l’achèvement de la couverture FTTH du territoire.

Il faut comprendre l’absence de dépôt d’amendement par notre groupe sur ce sujet comme un gage de confiance donné à l’État, qui déclare désormais sans ambiguïté viser une couverture de 100 % en FTTH pour 2025.

Mais, pour que rien ne vienne entacher ce gage de confiance que nous accordons à la nouvelle dynamique engagée par l’État, je demande avec force et sans ambiguïté que les 550 millions d’euros qu’il a mobilisés soient intégralement affectés à la desserte FTTH des dernières zones d’initiative publique de notre territoire, qui sont les plus coûteuses à réaliser. Je parle bien de la « desserte », ce qui, techniquement et réglementairement, a tout son sens.

Je soutiens également la volonté de l’État d’expérimenter un dispositif de financement des raccordements non standards au FTTH en zone publique : il est en effet incompréhensible pour certains de nos concitoyens d’apprendre qu’ils devront attendre six mois de plus que leurs voisins pour être raccordés à la fibre ou qu’ils devront payer des frais élevés de raccordement. Sur ce point, je vous donne rendez-vous lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2022.

À présent, j’aborde le second axe de mon intervention, qui a trait à La Poste. Je veux intervenir, non pas au sujet des crédits de la mission « Économie », mais pour souligner ceux qui n’y figurent pas…

En tant que sénateur et président de l’Observatoire national de la présence postale, je me permets d’appeler votre attention sur la mission d’aménagement du territoire de La Poste, qui est bien souvent le dernier réseau présent dans les territoires. Le maillage d’au moins 17 000 points de contact, prévus par la loi et répartis sur tout le territoire, est garanti dans les zones urbaines et les zones rurales, dans les territoires périurbains, dans les zones de montagne et en outre-mer.

Cette mission impose à La Poste une norme d’accessibilité dont le respect est assuré, chaque année, par les commissions départementales de présence postale territoriale. C’est également dans le cadre de cette mission que La Poste peut adapter sa présence : agences postales communales, relais commerçants, guichets France services, équipements numériques, accompagnements des fragilités sociales ont ainsi pu voir le jour.

Ce n’est pas aux élus de terrain que j’apprendrai qu’à travers La Poste, c’est tout le dynamisme économique et social de la commune qui est en jeu. C’est l’accès aux espèces, aux colis – à l’heure du boom du e-commerce –, mais aussi, et de plus en plus, au numérique – l’inclusion numérique constitue désormais un besoin prégnant.

Grâce au fonds postal national de péréquation territoriale qui finance la mission d’aménagement du territoire, les élus ont pu apporter des réponses concrètes. Autant d’actions nécessaires pour combattre la fracture numérique qui risquent de ne plus pouvoir être menées, si l’État ne respecte pas les engagements de financement qu’il a pris dans le contrat de présence postale territoriale 2020-2022.

En effet, le cadre de gouvernance de la mission est aujourd’hui largement aux mains des élus. Le contrat encadrant la mission est signé par l’État, l’Association des maires de France et des présidents d’intercommunalité et La Poste. Les projets qui sont financés par le fonds postal de péréquation sont votés par les élus des commissions départementales de présence postale territoriale.

J’en viens donc à la problématique du financement de cette mission d’intérêt général, problématique liée à la réforme de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) inscrite en première partie du projet de loi de finances.

Afin de financer le coût que représente sa mission d’intérêt général, La Poste bénéficie d’un allégement de fiscalité locale, dont le montant abonde le fonds postal de péréquation. Le taux des abattements appliqués aux bases de contribution économique territoriale et de taxe foncière est arrêté, chaque année, par décret, la CVAE représentant pas loin de 80 % de la base d’abattement alimentant le fonds.

C’est pourquoi la réforme de la CVAE a un impact conséquent sur le fonds postal de péréquation. Selon les évaluations, cet impact représenterait 66 millions d’euros en moins, par an, sur un total de 174 millions.

Pour le dire plus concrètement, sans compensation de cette perte de 66 millions d’euros, la mission d’aménagement du territoire de La Poste sera réduite à peau de chagrin, c’est-à-dire au financement des annuités des partenaires – agences postales communales et relais commerçants. Les commissions départementales de présence postale territoriale, composées d’élus locaux, n’auront plus de moyens à leur disposition et se verront privées de leur rôle. Elles deviendront des chambres d’enregistrement et de répartition de dépenses obligatoires.

Certes, on pourrait envisager de laisser La Poste compenser les 66 millions d’euros sur ses propres deniers, mais ce serait un non-sens économique : on ne peut pas demander à une entreprise fonctionnant dans un environnement concurrentiel, fût-elle à capitaux publics, de financer la charge d’une mission d’intérêt général qui lui a été imposée par l’État et qui est déjà sous-compensée à hauteur de plus de 60 millions d’euros. En effet, l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (Arcep), qui est une autorité indépendante, estime le coût de la mission à 230 millions d’euros par an.

Ne laissons pas ce trou se creuser encore plus au détriment de La Poste, dont le modèle économique est déjà particulièrement ébranlé par la baisse vertigineuse du volume du courrier.

C’est aussi une question de principe, que nous devons défendre en tant que parlementaires : une mission de service public doit être assurée et, donc, compensée financièrement par l’État avec de l’argent public. Ainsi, dans le cas de La Poste, pourrons-nous légitimement contrôler qu’elle s’acquitte correctement des obligations fixées et serons-nous en mesure de lui demander des comptes.

Faisons preuve de cohérence, mes chers collègues ! En tant qu’élus, nous nous battons localement pour que La Poste reste dans nos quartiers et nos villages. Aujourd’hui, la question de sa présence et de son activité dans les territoires se pose à nous, en tant que législateurs, dans le cadre du projet de loi de finances pour 2021. C’est pourquoi je vous invite à voter en faveur des amendements que j’ai déposés avec certains de nos collègues, afin de garantir le financement de la mission de service public d’aménagement du territoire de La Poste.

Sous cette réserve, notre groupe votera les crédits de cette mission.

Debut de section - Permalien
Agnès Pannier-Runacher

Monsieur le président, madame, monsieur les rapporteurs spéciaux, madame, messieurs les rapporteurs pour avis, mesdames, messieurs les sénateurs, comme pour la discussion précédente, je salue la qualité de l’analyse menée par les rapporteurs et les groupes et vous remercie du niveau d’exigence, dont celle-ci témoigne. C’est une garantie de qualité pour notre débat.

Je vous répondrai en mettant en exergue trois objectifs fondamentaux de notre action.

Le premier objectif de notre action, c’est de renforcer le soutien au commerce, à l’artisanat et aux territoires.

La crise sanitaire est une épreuve pour nos commerçants, nos restaurateurs, nos artisans ou encore nos indépendants. Beaucoup d’efforts leur ont été demandés et nous en sommes pleinement conscients.

Je veux d’abord les remercier de tous ces efforts consentis. Je comprends combien il est difficile de ne pas être autorisé à travailler quand, en tant qu’indépendant, on a engagé toutes ses économies, mis toute son énergie et fait des sacrifices immenses pour développer son activité.

Face à ces difficultés, notre politique est très claire : tout mettre en œuvre pour leur permettre de passer ce cap.

Au fil des projets de loi de finances rectificative et, aujourd’hui, du projet de loi de finances, vous avez souhaité adopter des mesures de soutien massif : le fonds de solidarité – je rappelle qu’il bénéficie à 1, 7 million d’entreprises, ce qui laisse à penser que peu ont été oubliées –, le prêt garanti par l’État (PGE), les exonérations de charges sociales, les mesures en faveur de l’allégement des loyers ou la prise en charge de l’activité partielle qui a permis de maintenir le salaire et l’emploi de millions de salariés.

Cette volonté de soutien aux commerces et de revitalisation de nos centres-villes se traduit également dans la mission « Économie » et les programmes déjà mis en place par le Gouvernement.

Je pense, notamment, à la mise en œuvre du programme « Action cœur de ville », qui comprend un axe dédié au développement économique pour soutenir le commerce de proximité et l’artisanat.

Je pense aussi au programme « Petites villes de demain », piloté par l’Agence nationale de la cohésion des territoires, qui cible les communes de moins de 20 000 habitants appelant une revitalisation.

Je pense enfin à la structuration d’une centaine de foncières, avec l’appui de la Banque des territoires, que nous avons annoncée à la fin du mois de juin avec Bruno Le Maire. Pour ces structures de soutien aux commerçants et artisans, notre objectif est de traiter jusqu’à 6 000 commerces dans des centres-villes fragilisés.

Le plan de relance prévoit par ailleurs 60 millions d’euros pour la création d’un fonds de déficit d’opérations d’aménagement commercial.

Ainsi, et pour répondre aux questions soulevées par les rapporteurs spéciaux, nous mobilisons des moyens à la hauteur des enjeux.

Le soutien à l’artisanat est également au cœur de nos préoccupations – et je réponds là à M. le rapporteur pour avis Serge Babary.

La stratégie nationale en faveur de l’artisanat et du commerce de proximité, que j’ai présentée en octobre 2019, continue d’être mise en œuvre. Nous inscrivons ainsi au projet de loi de finances pour 2021 la suppression sur trois ans de la majoration de la base taxable de 25 % pour les indépendants non adhérents d’un organisme de gestion. C’était une demande des professionnels, réitérée depuis de longues années.

Le plan de soutien en faveur du commerce de proximité, de l’artisanat et des indépendants du 29 juin 2020, ainsi que le plan de relance amplifient cette stratégie.

Enfin, l’État soutient l’économie des territoires. Il n’y a pas de désengagement en la matière, mais nous modifions la répartition des rôles.

Nous avons mis en place un portage par les collectivités des aides aux entreprises, permettant de clarifier la répartition des rôles entre l’État et les régions en matière de développement économique. Cette évolution, en lien avec la loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République, dite NOTRe, répond à une demande des régions.

Concernant l’État, nous assumons avoir mis fin à certains dispositifs qui s’avéraient peu opérationnels pour privilégier des outils plus efficaces. Afin de rendre plus lisibles les crédits budgétaires et le pilotage du soutien aux entreprises, le programme 134 ne porte plus d’aides individuelles.

Le deuxième objectif de notre action, c’est de poursuivre et renforcer la modernisation de l’économie. La crise l’a démontré une nouvelle fois, elle nous oblige, comme l’ont souligné les rapporteurs pour avis, à amorcer ou accélérer la numérisation de nos entreprises.

La numérisation permettra la maîtrise de nouvelles compétences, l’ouverture de nouveaux marchés, l’optimisation des activités de nos entreprises. Nous voyons déjà les différences d’un confinement à l’autre : alors que l’activité économique était pratiquement à l’arrêt lors du premier confinement, elle s’est largement poursuivie lors du deuxième.

Les entreprises ont accéléré leur transformation et les performances enregistrées par certains commerces sont impressionnantes : on voit ainsi de très petites entreprises faire des bonds de chiffre d’affaires de 30 %, parce qu’elles ont saisi l’occasion. Bien sûr, ces situations sont encore isolées.

L’enjeu est donc d’accélérer cette transformation. Le Gouvernement a largement encouragé le click and collect, en l’autorisant durant le second confinement, mais aussi en déployant le plan « Clique mon commerce » qui offre un accompagnement méthodologique et financier à chaque commerçant ou artisan indépendant pour la création de son site de vente en ligne.

L’initiative France Num sera ainsi considérablement renforcée par le plan de relance, avec une enveloppe de 29 millions d’euros supplémentaires. Il n’est donc pas nécessaire de la renforcer encore dans le cadre de cette mission « Économie », d’autant que le Gouvernement a déjà fourni des efforts conséquents, avec 11 millions d’euros en LFR 3 et 60 millions en LFR 4 pour la seule digitalisation des commerçants et artisans.

Pour permettre à tous les territoires de bénéficier des avantages du haut débit, le plan France Très haut débit est poursuivi et renforcé.

À cet égard, je veux rappeler la position défendue, ici même, par le Gouvernement l’an dernier – je crois d’ailleurs que c’était moi qui avais assuré cette défense. Nous avions indiqué n’avoir pas besoin de crédits supplémentaires pour l’année 2020 – et effectivement, nous n’en avions pas besoin – et nous vous avions donné rendez-vous pour l’année 2021. Nous sommes fidèles à ce rendez-vous !

Je précise également que les principaux obstacles au déploiement du très haut débit sont actuellement des problèmes de procédure, d’installation et de compétences disponibles pour réaliser les travaux. C’est ce que l’on constate, malheureusement, au-delà de la volonté collective de déployer ce plan.

Néanmoins, 240 millions d’euros supplémentaires sont mis à disposition au travers du plan de relance, ce qui porte l’enveloppe à 550 millions d’euros.

Puisque je suis interrogée sur le sujet, j’indique que, sur la 4G, en termes de déploiement, nous avons fait autant en trois ans que sur les neuf années ayant précédé, soit une multiplication par trois du rythme de déploiement. S’agissant du très haut débit, nous enregistrons une multiplication par deux du nombre de prises effectivement déployées.

La montée en puissance se poursuit donc, même si, il est vrai, nous partions de loin. Certes, les classements européens ne nous classaient pas à la dernière place, mais ils nous accordaient la vingt-cinquième ou vingt-sixième position, ce qui n’est pas forcément attendu pour un pays comme la France.

Le troisième objectif de notre action, c’est de poursuivre les réformes, car elles ont fait leurs preuves.

Nos choix en matière de soutien à l’export et de diplomatie économique nous ont permis de devenir la première destination pour les investissements directs étrangers en Europe. Il faut continuer.

Concernant l’export et l’attractivité, nous avons inscrit des moyens destinés au développement international des entreprises, dans le cadre de démarches pluriannuelles engagées par l’État avec Business France et Bpifrance Assurance Export. Nous n’avons d’ailleurs pas réinventé la poudre : les dispositifs existants étant solides, nous estimons qu’il faut plutôt les abonder et les utiliser.

Une subvention de 60 millions d’euros à destination de Business France est inscrite en projet de loi de finances pour 2021, au titre du volet export du plan de relance.

Compte tenu des incertitudes pesant sur l’évolution de la situation sanitaire et de son impact potentiel, la répartition des enveloppes accordées à chaque mesure fera l’objet d’une gestion flexible, afin d’orienter les crédits vers les dispositifs les plus appropriés et les plus efficaces en fonction du moment.

Je vais maintenant compléter mon propos par des réponses aux questions qui m’ont été posées.

S’agissant de La Poste, je partage le diagnostic établi par la rapporteure pour avis Anne-Catherine Loisier et plusieurs autres intervenants et une solution sera trouvée en nouvelle lecture.

S’agissant du financement des garanties proposées par Bpifrance, le recyclage, je le rappelle, est avant tout une solution de bonne gestion qui n’a jamais freiné, à aucun moment, l’activité de la banque publique d’investissement. En tout état de cause, le jour où un abondement sera nécessaire, le sujet sera traité.

S’agissant de la conditionnalité, les mesures du plan de relance sont bien conditionnées – nous le verrons plus tard dans nos débats.

Le plan de relance bénéficie essentiellement aux petites et moyennes entreprises et aux entreprises de taille intermédiaire (ETI). Les chiffres sont têtus, mesdames, messieurs les sénateurs… La baisse des impôts de production profite à 75 % aux PME et aux ETI, et ce pour une raison simple : pour en bénéficier, il faut produire en France. Par construction, le dispositif ne s’adresse pas à des entreprises ayant eu des stratégies de délocalisation massive, ou alors c’est qu’elles continuent de produire en France.

Tous les autres dispositifs d’accompagnement, notamment les appels à projets, se concentrent essentiellement sur les PME et les ETI, que ce soit en valeur ou en nombre d’entreprises.

À la fin du mois de novembre, je le précise, puisque la question a été posée, 500 entreprises sont accompagnées dans le cadre de mesures industrielles. La moitié environ des projets correspond, notamment pour l’initiative « Territoires d’industrie », à une localisation, une relocalisation ou une extension de production en France. Les enveloppes votées en LFR 4 seront engagées, en intégralité ou presque, à la fin de ce mois.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures quarante-cinq.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à vingt heures quinze, est reprise à vingt-et-une heures quarante-cinq, sous la présidence de Mme Pascale Gruny.