Je voudrais à présent aborder différents points qui me tiennent à coeur.
Concernant tout d'abord la réduction de nos émissions de gaz à effet de serre, alors que l'Europe semble entrer progressivement dans une logique vertueuse et que le protocole de Kyoto est désormais opérationnel, il me paraît assez paradoxal que l'Assemblée nationale ait adopté en première lecture un amendement qui a pour objectif affiché de supprimer les moyens mis à disposition de l'Observatoire national sur les effets du réchauffement climatique.
Peut-être faut-il rationaliser davantage les liens entre les différents organismes qui ne se coordonneraient pas suffisamment, mais le moment n'est pas venu d'en supprimer : il faut au contraire investir davantage en études certes, mais surtout en communication.
A ce sujet j'ai apprécié, madame la ministre, votre réponse à l'Assemblée nationale telle que le rapporte le compte rendu de séance du Journal Officiel. Quel est l'état de vos réflexions aujourd'hui et quand rendrez-vous publiques vos décisions ?
Nous soutiendrons donc l'amendement de la commission des affaires économiques, qui vise à rétablir les crédits de cet organisme essentiel pour la lutte et la protection des populations contre le changement climatique.
Je comprends d'autant moins cette prise de position que la lutte contre le réchauffement climatique a fait l'objet d'engagements importants par votre gouvernement ; à cet égard, j'ai été sensible à l'engagement personnel du Premier ministre lorsqu'il nous a réunis la semaine dernière à Matignon.
Je citerai à l'appui de cette affirmation deux exemples d'actions courageuses.
Le Gouvernement avait décidé, dès 2004, de débloquer 38, 5 millions d'euros sur cinq ans, dont une grande partie pour la recherche en faveur des « véhicules propres » et l'achat de véhicules neufs moins polluants : GPL - gaz de pétrole liquéfié -, GNV - gaz naturel véhicule -, véhicules électriques ou hybrides.
De la même façon, le projet de loi de finances pour 2006 traduit cette préoccupation par la mise en place d'une nouvelle fiscalité contraignante pour les véhicules rejetant le plus de gaz carbonique dans l'atmosphère.
De même, lors de la table ronde du 21 novembre 2005, le Gouvernement a pris un grand nombre d'engagements en faveur de la filière biocarburants, grâce à une politique fiscale incitative qui commence à offrir aux investisseurs de nouvelles perspectives. Néanmoins, je reste convaincu que nous devrions aller encore plus loin, compte tenu des enjeux et de notre retard en la matière.
Il n'y a pas toujours de cohérence entre les déclarations très médiatisées des plus hautes autorités du pays - M. le Président de la République, à Reims ; M. Raffarin, alors Premier ministre, à Compiègne, en septembre 2004 ; M. de Villepin à Rennes, en septembre 2005 - et les engagements budgétaires réels dans ce projet de loi de finances que nous examinons aujourd'hui. Il y a même une réelle divergence entre ces déclarations et la lenteur des décisions réglementaires attendues.
La France possède pourtant tous les atouts pour conduire une grande politique des biocarburants ; il faut qu'elle s'en donne les moyens.
Dans le monde, si nous nous comparons au Brésil, aux États-Unis, qui se sont fortement mobilisés depuis trois ans sur ce sujet, notre retard s'accroît. Même en Europe, nous ne sommes plus les meilleurs, alors que nous l'étions il y a quinze ans.
La politique des biocarburants est une véritable politique de développement durable.
J'ajouterai que la question de l'emploi d'énergies propres, en particulier du fait de leur coût, doit relever non pas de la seule responsabilité de l'État, mais bel et bien de la responsabilité de tous !
A l'appui de cette réflexion, je souhaite évoquer rapidement le plan « climat » en vous disant le bien que j'en pense, mais il faut en accélérer la mise en oeuvre.
Sur les textes d'application de la loi d'orientation sur l'énergie du 13 juillet 2005, d'autres ministères que le vôtre, je le sais, sont concernés. Mais je compte sur vous, madame, sur votre énergie, afin qu'en matière d'habitat, d'urbanisme ou d'énergies renouvelables, les décisions attendues soient prises et que vous soyez le fer de lance de « l'interministériel » en la matière.
Enfin, pour terminer, je voudrais aborder le thème délicat du principe de précaution, constitutionnalisé maintenant, et dont une utilisation intelligente me semble nécessaire.
Thème délicat, certes, car les acteurs économiques du domaine de l'industrie ou de l'agriculture éprouvent parfois certaines difficultés et des réticences à le mettre en place. Nous pouvons le comprendre dans le contexte de mondialisation et de concurrence effrénée qui est le nôtre.
Thème délicat, peut-être, mais alors il relève de notre responsabilité collective d'accompagner ces acteurs, afin qu'ils aient les moyens d'intégrer ce principe de la façon la plus harmonieuse possible.
Cette démarche me paraît primordiale si l'on veut allier développement durable et compétitivité de nos entreprises. C'est à cette condition qu'une mise en oeuvre efficace du principe de précaution deviendra possible et que la France sera au niveau que nous souhaitons.
En conclusion, quel avenir envisagez-vous, madame, pour votre action ministérielle ?
Je reste persuadé qu'il n'est jamais trop tard pour bien faire et qu'il est encore temps de réagir. Le poste de ministre du développement durable, dont vous êtes titulaire, est essentiel pour notre avenir. Je compte sur vous et sur votre action pour en convaincre l'ensemble du Gouvernement.