Intervention de Franck Menonville

Réunion du 1er décembre 2020 à 14h30
Loi de finances pour 2021 — Compte d'affectation spéciale : développement agricole et rural

Photo de Franck MenonvilleFranck Menonville :

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, le secteur agricole traverse depuis de nombreuses années de profondes difficultés, qui se sont d’ailleurs accrues, pour certaines filières, avec la crise sanitaire : sécheresses et aléas climatiques répétés, conflits commerciaux, mais également nouvelles charges et contraintes imposées aux agriculteurs.

La profession agricole est aujourd’hui habitée par le doute et par l’incertitude, alimentés par les injonctions contradictoires de nos politiques publiques et des attentes sociétales.

Monsieur le ministre, depuis votre arrivée à la tête de ce ministère, vous portez une voix claire et déterminée de soutien à l’agriculture et à la forêt. Certes, nos agriculteurs ont besoin d’être soutenus par l’État, mais ils ont surtout besoin d’une politique et d’une stratégie clairement définies pour le long terme !

Cette stratégie doit s’incarner dans la réforme de la PAC, dans le plan de relance évidemment, mais aussi dans le budget que nous examinons aujourd’hui. Or cette incarnation nous semble encore insuffisante.

Le budget de la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales » est relativement stable : pour 2021, les crédits s’élèvent à près de 3 milliards d’euros.

Permettez-moi d’en commenter certains aspects.

Tout d’abord, le programme 149 connaît une diminution de près de 5 % de ses crédits par rapport à 2020. Si cette diminution est principalement liée à un recul des crédits prévisionnels destinés aux mesures agroenvironnementales et climatiques, on note des baisses regrettables en matière d’indemnité compensatoire de handicaps naturels (ICHN) et de plans climat-air-énergie territoriaux (PCAET).

Au chapitre des autres points d’insatisfaction, je mentionne la baisse des crédits relatifs à l’enseignement agricole, qui n’est pas à la hauteur des défis actuels, notamment des enjeux de renouvellement des générations – nous avons évoqué cette question samedi dernier à l’occasion de l’examen des crédits de la mission « Enseignement scolaire ».

Autre motif d’insatisfaction : le Gouvernement a clairement affiché sa volonté d’accorder d’importants moyens à la recherche, en particulier lors des récentes discussions sur l’utilisation de certains produits phytosanitaires. Alors qu’il y a véritablement urgence en matière d’accompagnement de la transition de notre agriculture, le budget du Casdar subit une baisse de 10 millions d’euros. Comment ne pas être surpris par cette contradiction ? Nous avons déposé des amendements visant à la lever.

Quant aux aides annoncées durant le premier confinement, elles peinent pour le moment à se concrétiser.

Venons-en aux points positifs. Ce budget comporte de réelles avancées qu’il convient de souligner.

Parmi les plus importantes, je veux tout d’abord saluer la reconduction du dispositif TO-DE, précieux pour les agriculteurs et véritable levier de compétitivité face à la concurrence internationale et européenne. Il est reconduit jusqu’en 2022, alors que sa suppression était prévue fin 2020. À quand sa pérennisation ?

Ce budget prévoit aussi le maintien des crédits des chambres d’agriculture et l’abandon du projet de baisse de 45 millions d’euros envisagé l’année dernière par le Gouvernement. C’est une excellente nouvelle, monsieur le ministre.

Certes, la revalorisation de la réserve pour aléas, de 175 millions à 190 millions d’euros, est un signe positif, mais ce montant nous semble encore très sous-dimensionné au regard de ce qu’il s’est passé ces dernières années et de la situation climatique et sanitaire.

J’évoque enfin la hausse de près de 8 millions d’euros des crédits de l’action n° 26, Gestion durable de la forêt et développement de la filière bois. Le budget de la politique forestière enregistre donc un coup de pouce de 3, 9 %. En outre, dans le cadre du plan de relance, une enveloppe de 200 millions d’euros est dédiée à la forêt, dont 150 millions pour le reboisement.

Comme je l’ai indiqué lors du débat intitulé « La forêt française face aux défis climatiques, économiques et sociétaux », tout cela doit être une première étape, qu’il est nécessaire d’inscrire dans une politique de plus long terme. Aussi la situation très préoccupante de l’Office national des forêts (ONF), principal opérateur de la politique et de la gestion forestières, devra-t-elle faire au plus vite l’objet d’un véritable débat parlementaire. Il nous faut garantir l’avenir de l’ONF !

En conclusion, monsieur le ministre, de nombreux signes positifs figurent dans ce budget. Celui-ci est néanmoins perfectible, comme nous tâcherons de le montrer dans la suite de la discussion. J’ajoute qu’il est essentiel que l’examen du budget de cette année n’occulte ni la question de la place de l’agriculture dans le plan de relance ni celle des négociations en cours sur la PAC.

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