Intervention de Bernard Delcros

Réunion du 1er décembre 2020 à 21h15
Loi de finances pour 2021 — Cohésion des territoires

Photo de Bernard DelcrosBernard Delcros :

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, les programmes 112 et 162 couvrent le volet à dominante rurale de cette mission « Cohésion des territoires ». Leur évolution ne peut s’apprécier qu’au regard des crédits qui ont aussi été inscrits dans le plan de relance.

Mon analyse du budget pour 2021 se résume à cinq points de satisfaction, un regret et une proposition.

Le premier point de satisfaction, et non des moindres, concerne le report de deux ans, jusqu’au 31 décembre 2022, de plusieurs zonages et des aides directes aux collectivités et aux entreprises qui y sont associées.

L’an dernier, dans un rapport d’information, Frédérique Espagnac et Rémy Pointereau et moi-même avions proposé un dispositif qui succéderait aux zones de revitalisation rurale (ZRR) pour mettre en œuvre des aides plus ciblées et plus efficientes. En attendant qu’il soit mis en place, les ZRR devront être prorogées pour l’ensemble des communes, y compris celles qui ne remplissent plus les critères d’éligibilité au regard de la réforme de 2015. Ce budget répond parfaitement à notre demande. C’est un enjeu important pour le secteur rural.

Autre exemple positif, les aides à finalité régionale sont prorogées de deux ans. Elles prévoient un soutien aux entreprises par des exonérations fiscales et par des aides directes, dans des communes qui ne sont parfois pas éligibles aux ZRR.

Par cohérence avec ce report, nous présenterons un amendement qui vise à rétablir la prime à l’aménagement du territoire (PAT), adossée à ce zonage.

Le deuxième point de satisfaction tient à ce que la politique contractuelle entre l’État et les territoires soit renforcée. Les contrats de plan État-régions (CPER) passent de 108 millions à 222 millions d’euros, si l’on prend en compte ceux qui sont intégrés dans le plan de relance.

Par ailleurs, les contrats de ruralité seront reconduits. Mon rapport de 2019 dressait un bilan de la première génération de ces contrats tout en proposant de passer à des contrats de deuxième génération.

La mise en place des contrats de relance et de transition écologique répond à cette demande, même si leur dénomination est discutable, j’y reviendrai.

Troisième point de satisfaction, l’engagement du programme « Petites villes de demain » permettra de répondre à la problématique des centres-bourgs et des petites villes qui n’ont pas été éligibles au plan « Action cœur de ville ».

Nous tenions à ce que le nombre d’habitants ne figure pas dans les critères du dispositif, car, en milieu rural, certains petits bourgs de 700 ou 800 habitants jouent souvent un rôle de pôle de services pour tout un bassin de vie. Il est donc essentiel qu’ils puissent être éligibles à ce programme.

Vous avez par ailleurs ouvert la possibilité de candidatures groupées à l’échelle des intercommunalités, ce qui permettra de ne laisser aucune commune en dehors du dispositif.

Le quatrième point de satisfaction vient de ce que les crédits alloués à l’ingénierie territoriale au sein de l’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) augmentent de 10 millions à 20 millions d’euros, auxquels s’ajoutent 20 millions d’euros au titre du plan de relance. Ils passent donc de 10 à 40 millions d’euros, ce qui constitue une évolution positive pour la ruralité.

Enfin, les crédits affectés aux maisons France Services sont en augmentation de 50 %, favorisant ainsi le maillage des territoires en services de proximité.

Il restera à examiner l’adéquation entre les 30 000 euros attribués à chacune de ces maisons par le biais du fonds national d’aménagement et de développement du territoire (FNADT) ou du fonds inter-opérateurs, et la montée en gamme des services qu’elles développent en prenant parfois en charge ceux qui relevaient de l’État, comme on a pu le voir dans certains départements avec la réforme des trésoreries.

Mon regret concerne l’abandon du nom « ruralité » dans les nouveaux contrats avec les territoires. Les contrats de ruralité deviennent des contrats à la relance !

Certes, nous sommes dans une période de relance qu’il nous faut réussir, et tout cela n’est affaire que de mots. Cependant, les mots ont leur importance, les symboles aussi, mais également les messages envoyés à la ruralité, comme vous le savez bien. Je note d’ailleurs que les contrats de ville demeurent sous cette dénomination dans le programme 147.

Monsieur le secrétaire d’État, les enjeux de la ruralité doivent être bien identifiés. Ils ne peuvent pas être dilués dans d’autres enjeux nationaux, particulièrement au moment où le secteur rural retrouve de l’intérêt et de l’attractivité pour un grand nombre de Français.

Nous souhaitons vivement que, au-delà de cette période de relance, les contrats de territoires soient marqués du sceau de la ruralité avec des crédits bien identifiés en faveur des territoires ruraux.

J’aimerais enfin vous faire une proposition. L’ensemble des crédits consacrés à la politique d’aménagement du territoire, et notamment aux politiques contractuelles, sont dispersés dans plusieurs missions, ce qui est dommageable.

Pour davantage de visibilité, de cohérence et d’efficacité, ne serait-il pas opportun de rassembler toutes les politiques contractuelles au sein d’une même mission, et d’affecter des crédits spécifiques à chacune d’entre elles, comme c’était le cas en 2017, quand les contrats de ruralité ont été mis en place ?

Je ne veux pas conclure sans vous dire combien nous sommes satisfaits de votre nomination auprès de Jacqueline Gourault, ministre de la cohésion des territoires et des collectivités locales. C’est la première fois qu’un secrétaire d’État en charge de la ruralité figure dans un gouvernement.

Je sais que de nombreux sénateurs ont en partage le vécu de la ruralité et une connaissance fine de ses enjeux, notamment des territoires de montagne. Nous comptons sur vous pour permettre aux territoires ruraux de jouer pleinement leur rôle.

Le pays a besoin de sa ruralité pour répondre aux enjeux environnementaux, économiques et de cohésion sociale auxquels il doit faire face.

Dans l’attente, nous proposons d’adopter les crédits de la mission pour le programme 112 et le programme 162, enrichi d’une nouvelle action cette année.

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