Intervention de Philippe Mouiller

Réunion du 4 décembre 2020 à 11h00
Loi de finances pour 2021 — Travail et emploi

Photo de Philippe MouillerPhilippe Mouiller :

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, le fort recul de l’activité économique mondiale en raison de la crise sanitaire se traduit par la fermeture de nombreuses entreprises et par une forte augmentation du chômage.

Ainsi, selon la Dares, dans les entreprises de plus de cinquante salariés, plus de 650 plans de sauvegarde de l’emploi ont été lancés en France. Dans les entreprises plus petites, de moins de dix salariés, on compte plus de 4 000 licenciements collectifs cumulés depuis mars.

Les conséquences des plans sociaux annoncés ne sont pas encore visibles sur la courbe du chômage. Les entrées en formation et les dispositifs d’aides publiques permettent d’amortir l’impact de la crise sanitaire.

Malgré cela, le nombre de chômeurs demeure à un niveau élevé, si l’on considère la catégorie A, et il explose, lorsque l’on comptabilise les catégories B et C qui correspondent à ceux qui ont exercé une activité réduite.

Les différents instituts de prévision retiennent, avec les précautions nécessaires dans un contexte inédit, l’hypothèse d’un taux de chômage compris entre 9, 8 % et 11 % dans les prochains mois.

Certes, la crise est conjoncturelle, mais elle est aggravée par l’absence de réformes structurelles. Les décisions prises actuellement sont des solutions d’urgence et de court terme.

Dans ce contexte, l’augmentation de 400 millions d’euros des crédits de la mission « Travail et emploi », soit une hausse de 3 %, peut sembler insuffisante. La politique de l’emploi est surtout soutenue par la mission « Plan de relance », avec près de 10 milliards d’euros qui viendront en grande partie abonder des dispositifs déjà prévus par la mission.

L’éclatement du financement de la politique de l’emploi sur ces deux missions pose un réel problème de lisibilité budgétaire. Des questions surgissent également sur la pérennité des ressources pour les budgets à venir.

En ce qui concerne l’apprentissage, nous ne pouvons que nous réjouir de l’augmentation du nombre de contrats d’apprentissage, qui jusqu’à la crise sanitaire a connu une forte dynamique, puisque la progression a été de 16 % par rapport à l’année précédente.

Dans le cadre du plan de relance, une aide exceptionnelle est prévue au titre des embauches d’apprentis effectuées entre juillet 2020 et la fin du mois de février 2021, ce dont je me félicite.

Toutefois, nous nourrissons des inquiétudes quant au financement de l’apprentissage, dont le système a été réformé par la loi du 5 septembre 2018 sur la liberté de choisir son avenir professionnel. Depuis lors, ce financement est assuré par les opérateurs de compétences (OPCO), dont les fonds sont fournis par France compétences.

À la suite d’une mission conjointe de l’inspection générale des affaires sociales (IGAS) et de l’inspection générale des finances (IGF), il est apparu que le système mis en place en 2018 était structurellement déséquilibré.

Aussi, l’article 56 du projet de loi de finances ne peut être qu’inquiétant, car il fait du financement de l’apprentissage une variable d’ajustement de l’équilibre budgétaire de France compétences.

Par ailleurs, les centres de formation d’apprentis (CFA) qui dépendent de secteurs fortement atteints par la crise sanitaire pourraient rencontrer de sérieuses difficultés financières. Dans ce contexte, la stabilité des crédits reversés aux régions pour le financement de l’investissement et du fonctionnement des CFA questionne.

Nous sommes également étonnés de la position du Gouvernement concernant les maisons de l’emploi. Alors qu’aucun crédit n’était initialement prévu, des amendements visant à dégager une enveloppe de 5 millions d’euros ont été adoptés à l’Assemblée nationale avec l’accord du Gouvernement, ce que nous saluons. Cependant, vous n’avez donné aucune précision quant aux programmes sur lesquels ces crédits seront prélevés.

Madame la ministre, le groupe Les Républicains se réjouit de la traduction budgétaire de la poursuite de l’expérimentation « territoires zéro chômeur de longue durée », à la suite de l’adoption définitive de la proposition de loi. Le dispositif pourra ainsi se maintenir dans les dix territoires initiaux et être étendu à au moins cinquante autres territoires.

Enfin, j’en viens à l’emploi des personnes handicapées, secteur dont le budget est globalement satisfaisant, puisqu’on constate une augmentation des crédits, hors expérimentations.

Toutefois, les entreprises adaptées ont été durement touchées par les conséquences de la crise sanitaire, avec une baisse de chiffre d’affaires estimée à 25 %. Il convient donc de les soutenir dans cette période difficile.

Malgré nos inquiétudes, nous approuvons la mission « Travail et emploi » et les actions engagées par le Gouvernement dans le cadre du plan de relance.

Néanmoins, nous restons inquiets du manque de réformes structurelles dans le domaine de l’emploi et, surtout, de l’application de la réforme de l’apprentissage et de la formation professionnelle.

Quoi qu’il en soit, compte tenu du contexte, nous voterons les crédits de cette mission.

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